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Sophie Auconie
Question N° 863 au Ministère du travail


Question soumise le 5 septembre 2017

Mme Sophie Auconie attire l'attention de Mme la ministre du travail sur la nécessité de lutter efficacement contre les détachements illégaux. En France, pour l'année 2015, le nombre de détachés illégaux est estimé entre 220 000 et 300 000. Le premier secteur impacté est celui du BTP. Afin de lutter contre cette utilisation illégale de main-d'œuvre à bas coût, pourrait être mise en place l'obligation de transmission par l'employeur des déclarations de détachement aux caisses de congés payés. Cette déclaration serait faite auprès de l'inspection du travail du lieu du chantier et instaurerait un nouvel outil de lutte efface contre le travail illégal. Avec cette mesure, conjuguée aux dispositions de « la loi Macron » imposant la carte professionnelle, la France se doterait d'un arsenal plus efficace et plus performant au dessein de réduire le nombre de travailleurs détachés illégaux. Elle lui demande quelle est la position du Gouvernement sur cette obligation de déclaration.

Réponse émise le 27 mars 2018

En instaurant par la loi du 6 août 2015 une carte d'identification professionnelle (CIP) pour les travailleurs effectuant des travaux de bâtiment ou des travaux publics, le législateur a souhaité renforcé la lutte contre le travail illégal et les fraudes au détachement de travailleurs dans un secteur d'activité particulièrement touché par ces pratiques illicites d'emploi. La carte est conçue comme un outil supplémentaire pour permettre aux acteurs du bâtiment et des travaux publics et aux agents de contrôle de prévenir et de lutter plus efficacement contre le travail illégal et la concurrence sociale déloyale dans le secteur du BTP. Les travailleurs détachés sont soumis à cette obligation. La déclaration de détachement de ces salariés génère automatiquement pour les entreprises relevant du bâtiment et des travaux publics une demande de carte CIP auprès de l'Union des Caisses de France qui fédère les caisses régionales de congés payés et intempéries du bâtiment et des travaux publics et qui est en charge de la gestion du dispositif. Au 1er mars 2018, 1 165 000 cartes ont été produites. Une obligation de transmission des déclarations de détachement aux caisses de congés payés en charge du service des congés dans le bâtiment et les travaux publics poserait des difficultés pratiques de mise en œuvre. En effet, si les travailleurs détachés doivent pouvoir bénéficier d'une adhésion à une caisse de congés payés pour la période de leur intervention en France, leurs employeurs peuvent être dispensés de s'affilier en France à une caisse des congés payés du bâtiment pour leurs salariés détachés en France s'ils justifient que ceux-ci bénéficient dans leur pays d'envoi, pour la période de leur détachement, des mêmes droits dans des conditions au moins équivalentes à celles prévues par le code du travail français. Ainsi le fait pour un travailleur détaché de ne pas être affilié à une caisse de congés payés ne constitue pas nécessairement une infraction aux dispositions du code du travail. De plus, le décret no 2016-175 du 22 février 2016 relatif à la carte d'identification professionnelle des salariés du bâtiment et des travaux publics a expressément prévu, conformément à l'avis de la CNIL, que les données nominatives recueillies par l'union des caisses de France dans le cadre de la gestion de la carte d'identification professionnelle des salariés du bâtiment et des travaux publics ne peuvent faire l'objet d'une utilisation à d'autres fins que celles de la délivrance, de la mise à jour et de la gestion de la carte d'identification professionnelle. Par ailleurs, la réunion de la commission nationale de lutte contre le travail illégal le 12 février 2018 a été l'occasion pour la ministre du travail de rappeler que la lutte contre le travail illégal et la fraude au détachement constitue l'un des axes majeurs de la politique publique tant ces phénomènes sont destructeurs des équilibres des comptes publics, portent atteinte aux droits des travailleurs et sont un facteur inacceptable de concurrence déloyale entre les acteurs économiques. Ainsi, la France s'est pleinement engagée dans la révision de la directive sur le détachement pour améliorer les droits des travailleurs et les conditions de la concurrence en Europe. Un compromis a été trouvé pour un meilleur encadrement du travail détaché (réduction à 12 mois de la durée maximale de détachement, principe « à travail égal, salaire égal, renforcement de la lutte contre la fraude et les abus). Au niveau national, la ministre du travail a annoncé le 12 février 16 mesures nouvelles visant à rendre les sanctions plus efficaces, à optimiser les outils des agents de contrôle et des préfets permettant d'agir, à préciser le cadre juridique et à faciliter les contrôles par des moyens nouveaux : la publication systématique des condamnations pénales (« name and shame »), le renforcement des sanctions financières, de 2 000 à 3 000€ par salarié détaché illégalement et de 4 000 à 6 000€ en cas de récidive, avec possibilité de suspension de l'activité si le prestataire ne s'acquitte pas de l'amende, l'extension des pouvoirs de sanction des préfets, notamment de la possibilité d'ordonner la fermeture ou la cessation d'activité d'un établissement, le renforcement des capacités d'enquête de l'inspection du travail. La ministre a annoncé d'autre part l'augmentation du nombre de contrôles, avec un objectif de 1 500 contrôles par mois et la hausse du nombre de contrôles conjoints avec d'autres services anti-fraude (police, gendarmerie, douanes, services fiscaux…) pour qu'ils représentent 50% des contrôles dans les secteurs prioritaires du bâtiment et des travaux publics (BTP) et des transports. Plusieurs de ces mesures seront intégrées au projet de loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, qui sera présenté en conseil des ministres à la fin du mois d'avril.

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