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Fabien Di Filippo
Question N° 9445 au Ministère de l'agriculture


Question soumise le 19 juin 2018

M. Fabien Di Filippo attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les conséquences de l'accord de libre-échange entre l'Union européenne et le MERCOSUR. Un accord de libre-échange est actuellement en cours de négociation entre l'Union européenne et les quatre pays du MERCOSUR (Brésil, Argentine, Paraguay et Uruguay) ce qui mène à une situation inquiétante aussi bien pour les agriculteurs que pour les consommateurs. Tout d'abord, il convient de souligner le risque sanitaire pour le consommateur. En Amérique du Sud, certains procédés comme les farines animales ou l'utilisation d'antibiotiques comme activateur de croissance y sont autorisés, alors qu'ils demeurent interdits en Europe. Afin de protéger les consommateurs français, il est important de se pencher sur la question de la traçabilité et les certifications sanitaires de ces produits, dans la mesure où 70 000 tonnes de viande bovine seraient importées chaque année. Ce dit risque peut être bien imagé par la découverte de fraude d'un exportateur de volailles brésiliennes qui aurait truqué ses analyses relatives à la présence de salmonelle dans celles-ci. De plus, ce type d'importations inquiète les agriculteurs français, qui craignent une concurrence déloyale qui se fera à leur détriment, spécialement quand il leur est impossible de produire dans les mêmes conditions que leurs concurrents. Soucieux de la protection des consommateurs français et du respect du travail des éleveurs qui apportent jour après jour des produits de qualité, il lui demande donc quelle méthode le Gouvernement compte employer afin de s'assurer que ces risques sanitaires et économiques soient écartés.

Réponse émise le 31 juillet 2018

L'Union européenne (UE) négocie actuellement un accord de libre-échange avec le Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay, Paraguay) avec un objectif affiché de conclusion en 2018. Les enjeux sont importants pour certaines filières agricoles françaises, notamment la filière bovine, compte tenu de la compétitivité des filières du Mercosur. Pleinement conscient de ces sensibilités, et en cohérence avec les objectifs des états généraux de l'alimentation, le Gouvernement est mobilisé pour assurer la défense des intérêts français et ainsi garantir la préservation du dynamisme économique des territoires. La France, soutenue par d'autres États membres, considère ainsi que la conclusion de l'accord UE/Mercosur est tributaire de l'équilibre entre l'ouverture du marché et la protection des filières sensibles agricoles dans la négociation, en particulier, le bœuf, l'éthanol, le sucre et les volailles. Concernant la viande bovine, l'UE a proposé à l'automne 2017 un contingent de 70 000 tonnes équivalent carcasse (tec). Face à la pression du Mercosur pour élever ce quota au-delà de 100 000 tec, la France demande que ce contingent soit le plus limité possible et ne s'écarte pas significativement de 70 000 tec. En cohérence avec les actions décidées dans le cadre du plan d'action sur la mise en œuvre de l'accord économique et commercial global (AEGC/CETA), le Gouvernement fait en outre valoir que les concessions tarifaires sur les produits sensibles doivent s'inscrire dans les limites d'une « enveloppe globale », permettant de définir ce qui est soutenable pour les filières au regard du marché, à l'échelle de l'ensemble des négociations en cours ou à venir (Australie, Nouvelle-Zélande, Chili…). Il se mobilise également pour que ces concessions tarifaires soient directement liées à des mesures permettant de rétablir des conditions de concurrence équitables entre les producteurs français et ceux des pays du Mercosur (mécanisme de sauvegarde et conditions liées aux modes de production). Concernant le volet sanitaire et phytosanitaire, des audits ont été réalisés au Brésil par les services de la Commission européenne en 2017 et 2018 pour évaluer la fiabilité de la certification des exportations vers l'UE. Le Gouvernement sera particulièrement vigilant pour que soit garantie la fiabilité du système sanitaire du Mercosur avant la conclusion de l'accord, en cohérence avec les conclusions de ces audits. En tout état de cause, l'ensemble des importations de viande en provenance du Mercosur devront se conformer aux normes sanitaires de l'UE. En outre, les viandes bovines issues d'animaux traités avec des hormones de croissance ou toute autre substance non autorisée dans l'UE comme facteur de croissance resteront strictement interdites. Il est certain qu'il reste du travail à mener d'ici la conclusion de cette négociation, le Mercosur devra démontrer qu'il peut proposer à l'UE un accord protecteur de ses sensibilités et synonyme d'avancées pour les secteurs agricoles offensifs. Le Gouvernement sera attentif jusqu'à la conclusion pour préserver les intérêts des filières agricoles françaises. Par ailleurs, d'une manière générale, le Gouvernement veille constamment à ce que les produits importés respectent des normes sanitaires et phytosanitaires au moins équivalentes aux règles européennes afin de protéger la vie et la santé des humains, des animaux et des végétaux, ainsi que les intérêts des consommateurs et des producteurs. À ce titre, il est inscrit dans la feuille de route des états généraux de l'alimentation (EGA), le principe d'une création d'un observatoire européen des produits importés. Ainsi, même si un pays tiers dispose de réglementations différentes dans le domaine sanitaire et phytosanitaire, ce pays doit se conformer aux normes sanitaires de l'UE, aux obligations internationales applicables dans le domaine de la sécurité sanitaire et aux règles générales d'importations suivantes : - le pays tiers doit figurer sur la liste des pays autorisés à exporter la catégorie de produits concernés vers l'UE ; - toute importation d'animaux et de produits d'origine animale est accompagnée d'un certificat sanitaire signé par un vétérinaire officiel de l'autorité compétente attestant la conformité aux normes européennes ; - chaque expédition fait l'objet de contrôles sanitaires au poste d'inspection frontalier du pays de l'UE d'arrivée. À noter également que dans le cadre de la négociation du nouveau règlement relatif aux médicaments vétérinaires, la France a porté l'ajout de mesures miroirs visant à interdire l'importation dans l'UE des animaux ou produits animaux en provenance de pays tiers ayant fait l'objet de certains usages antimicrobiens interdits par ailleurs sur le territoire européen : utilisation d'antibiotiques comme facteurs de croissance et utilisation d'antibiotiques critiques (réservés aux humains). Grâce à ces mesures de réciprocité à l'importation, les contraintes auxquelles sont exposées les opérateurs français et européens seraient donc les mêmes que celles rencontrées par les opérateurs des pays tiers. Ces mesures devraient être maintenues dans le texte final, car la commission de l'environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire du Parlement européen a adopté à l'unanimité le 20 juin 2018 le projet comportant ces dispositions. Enfin, soucieuse du respect des standards sanitaires européens, la France portera un projet de création d'un observatoire des risques sanitaires liés aux non-conformités pour les produits agroalimentaires importés dans l'UE. Ce projet fait partie de la feuille de route des EGA qui se sont tenus en France entre les mois d'août et de décembre 2017.

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