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Fabien Di Filippo
Question N° 9455 au Ministère de la justice


Question soumise le 19 juin 2018

M. Fabien Di Filippo attire l'attention de Mme la secrétaire d'État, auprès du Premier ministre, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, sur la nécessité d'inscrire dans la loi un âge limite de consentement sexuel. La gravité des conséquences psychodramatiques que subissent les mineurs victimes de relations sexuelles tant sur le plan mental et physique à court, moyen et très long terme n'est plus à prouver. Même sans violences, de lourds traumatismes peuvent résulter de relations sexuelles avant 15 ans. La médecine reconnaît d'ailleurs aujourd'hui qu'au cours d'une expérience traumatique intense, des mécanismes d'urgence, de dissociation et de sidération sont activés par le cerveau, ce qui cause de l'absence de réaction de certaines victimes. Dans le cas de mineurs de moins de 15 ans, l'absence d'opposition manifeste à l'acte qu'elles subissent ne peut et ne doit en aucun cas être considéré comme le signe d'un consentement. L'âge de la majorité sexuelle étant fixé à quinze ans, toute relation sexuelle avec une personne sous cet âge doit équivaloir à un viol. Il ne devrait pas y avoir débat sur le consentement d'un enfant de 5 ans à un rapport sexuel avec un adulte de 50 ans. Lors de l'examen du projet de loi sur les violences sexuelles et sexistes, le Gouvernement a refusé de fixer un âge limite de non consentement sexuel, arguant de l'anti-constitutionnalité d'une telle mesure. Pourtant, le Conseil constitutionnel n'avait pas déclaré l'anti-constitutionnalité, seulement qu'elle était « difficilement compatible avec la jurisprudence du Conseil constitutionnel qui, en dehors du champ contraventionnel, lorsque les faits peuvent raisonnablement induire la vraisemblance de l'imputabilité, n'admet qu'« à titre exceptionnel » l'existence d'une présomption de culpabilité en matière répressive.. » Il ne s'agit pas d'un refus catégorique. Afin que les enfants soient réellement protégés par la loi face aux abus sexuels, il est indispensable d'inscrire dans la loi que le mineur de 15 ans doit toujours être considéré comme non consentant. Il lui demande donc si elle compte respecter l'engagement qu'elle avait pris devant les Français d'établir un âge légal de consentement sexuel et porter cette mesure dans le projet de loi justice qui sera présenté en fin d'année 2018 au Parlement.

Réponse émise le 9 octobre 2018

La loi du 3 août 2018 renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes est venue renforcer la protection des mineurs victimes d'infractions sexuelles, plus particulièrement lorsqu'ils sont âgés de moins de quinze ans. Ainsi, le dernier alinéa de l'article 222-22-1 du code pénal dispose désormais qu'en cas d'atteinte sexuelle sur un mineur de quinze ans, la contrainte morale ou la surprise, qui définissent le viol ou les agressions sexuelles, sont caractérisées par l'abus de la vulnérabilité de la victime ne disposant pas du discernement nécessaire pour ces actes. Dès lors, ainsi que le précise la circulaire du 3 septembre 2018 adressée à l'ensemble des juridictions par la ministre de la justice, le principal critère devant être pris en compte par les juridictions pour apprécier l'existence d'une contrainte morale ou d'une surprise lorsque les faits ont été commis sur un mineur de quinze ans est celui du discernement de la victime et de sa capacité à consentir ou non à une atteinte sexuelle. Dès lors, le fait qu'un mineur de quinze ans puisse avoir l'apparence physique ou le comportement d'un mineur plus âgé ou d'un adulte, ou encore qu'il puisse avoir été exposé préalablement à des images pornographiques sur des sites internet ne saurait conduire les juridictions à considérer que ce mineur peut valablement consentir à un acte sexuel, s'il ne dispose pas d'un discernement suffisant à cette fin. En pratique, du fait de cette référence à la notion de discernement nécessaire, les qualifications de viol ou d'agression sexuelle devraient désormais normalement être retenues à chaque fois que seront victimes d'atteintes sexuelles les mineurs les plus jeunes. Cette modification a paru préférable à la création d'une présomption de non consentement qui soulevait des difficultés tant constitutionnelles que pratiques. Elle présente par ailleurs un caractère interprétatif, qui fait qu'elle est immédiatement applicable aux procédures en cours, y compris celles portant sur des faits commis avant l'entrée en vigueur de la loi.

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