Intervention de Agnès Firmin Le Bodo

Séance en hémicycle du lundi 16 janvier 2023 à 21h30
Évolution de la formation de sage-femme — Présentation

Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé :

Si, comme je l'espère, l'Assemblée en décide ainsi, l'adoption de cette proposition de loi concrétisera en effet ton engagement et ta persévérance en faveur d'une meilleure reconnaissance de la profession de sage-femme. Je salue également Raymonde Poncet Monge, rapporteure du texte au Sénat, et votre rapporteur Paul Christophe, désormais chargé de le défendre jusqu'au terme de son parcours. L'ayant moi-même cosigné en tant que députée, je suis heureuse de participer avec vous à la dernière étape de ce beau texte dont le sujet nous tient tant à cœur.

Il est d'autant plus important que par comparaison avec les autres pays européens, les sages-femmes françaises exercent des responsabilités particulièrement étendues : au-delà de l'accompagnement des premiers instants de la vie, leurs missions, progressivement élargies depuis 2009, incluent à présent, tant en ville qu'à l'hôpital, le suivi des femmes tout au long de leur vie, en matière de prévention et de contraception. Durant la même période, le suivi prodigué avant et après l'accouchement s'est ouvert sur une prise en charge en ville. En application de la loi du 24 juillet 2019 relative à l'organisation et à la transformation du système de santé, les sages-femmes ont la possibilité de vacciner les mineurs, garçons ou filles, contre le papillomavirus : c'est là un pas supplémentaire vers davantage de prévention, concernant une cause qui m'est chère et qu'avec d'autres collègues, j'avais promue sur ces bancs au cours de la précédente législature.

S'agissant toujours de prévention, le rôle clé des sages-femmes a été encore accru par la loi du 26 avril 2021 visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification, dite loi Rist, notamment en matière de renouvellement et de prolongation des arrêts de travail, ainsi que de dépistage des infections sexuellement transmissibles (IST). Enfin, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 leur a donné toute leur place dans le dispositif des rendez-vous de prévention aux âges clés de la vie et de nouveau étendu, aux côtés d'autres professionnels de santé, leurs compétences vaccinales.

Au-delà de cet élargissement légitime des missions des sages-femmes, cette proposition de loi s'inscrit dans la perspective plus large de la refonte des études en santé qu'entend mener le Gouvernement. Attractivité des métiers, qualité de vie, renouvellement et diversité des pratiques doivent être soutenus : il nous appartient d'inventer aujourd'hui les professions de ceux qui soigneront demain les Français, dans le cadre d'un système de soins où l'exercice coordonné et le partage de compétences au sein d'équipes organisées autour du médecin sont appelés à devenir la norme. Les métiers et les perspectives de carrière évoluent, grâce entre autres aux mesures concernant le partage de compétences et la pratique avancée que nous avons commencé à appliquer, tout en souhaitant continuer de progresser dans ces domaines ; nous aurons du reste l'occasion d'en reparler, dans les jours qui viennent, à l'occasion de l'examen de la proposition de loi portant amélioration de l'accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé. Le Gouvernement désire en outre, conformément aux engagements pris par le Président de la République, avancer en matière de pénibilité et de travail de nuit.

Tout doit néanmoins commencer par l'essentiel : la formation et les études. Cette proposition de loi répond pleinement à la volonté du Gouvernement d'universitariser les cursus en vue de multiplier les passerelles et de faciliter la reconnaissance internationale – ou du moins européenne, grâce au processus de Bologne – des diplômes. Une mission relative à cette universitarisation des formations en santé a ainsi été confiée au professeur Christine Ammirati, laquelle, en lien avec les ministères de la santé et de l'enseignement supérieur, et particulièrement avec les Inspections générales des affaires sociales (Igas) et de l'éducation, du sport et de la recherche (IGESR), a entrepris un important travail d'analyse et de concertation visant à créer les conditions d'une intégration efficace et adaptée de la formation des sages-femmes à l'université.

À cet égard, l'article 1er du texte constitue un jalon essentiel, car l'inclusion universitaire des formations paramédicales et relatives à la maïeutique permettra de développer la recherche, par exemple en sciences infirmières, en maïeutique, en réadaptation. L'objectif consiste à ce que tous les étudiants en santé apprennent à coopérer dès les bancs de l'université et bénéficient des mêmes droits et services que ceux de leurs pairs qui suivent un cursus LMD – licence, master, doctorat.

Même s'il reste encore du chemin à parcourir, nous avons progressé dans cette voie depuis la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital. La transformation de plusieurs facultés de médecine en facultés de santé a accéléré leur rapprochement avec les écoles de maïeutique ; la loi du 24 juillet 2019 a ouvert la voie à des expérimentations en la matière et relancé le processus d'intégration universitaire de ces écoles ; la création, toujours en 2019, d'une section spécifique du Conseil national des universités (CNU) a également contribué à accentuer le caractère universitaire de la formation des sages-femmes. Par ailleurs, l'article 1er bis de la proposition de loi prévoit que soit créé un statut de maître de stage universitaire en maïeutique, pourvoyant aux besoins d'encadrement des étudiants. Il est toutefois essentiel, à des fins d'harmonisation avec les autres professions, que ce statut fasse l'objet d'un travail plus vaste : un groupe de travail relatif à la maîtrise de stage universitaire et à l'instauration du tutorat pour les étudiants paramédicaux, associant les acteurs de la formation et les représentants des étudiants et employeurs, a par conséquent été lancé cet automne par la direction générale de l'offre de soins (DGOS).

L'article 2 prévoit, pour sa part, la création d'un troisième cycle d'études de maïeutique, car l'élargissement, depuis 2009, des missions des sages-femmes justifie une adaptation de leur formation initiale. Le Gouvernement soutiendra donc pleinement cette proposition de loi dans sa version issue des travaux du Sénat : comme M. le rapporteur, qui s'est exprimé sur ce point en commission, nous estimons légitimes les modifications proposées. Le dispositif initialement prévu aurait conduit à appliquer la réforme aux étudiants actuellement en deuxième et troisième années du premier cycle ; il était donc judicieux et nécessaire d'en décaler l'entrée en vigueur afin de gérer dans de bonnes conditions l'harmonisation des cycles, la préparation des terrains de stage supplémentaires et les conséquences du fait que 2028 constituera une année blanche.

À l'issue de son examen en première lecture, ce texte avait reçu l'approbation unanime des députés comme des sénateurs : je forme le vœu qu'il en soit de même ce soir.

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