Intervention de Jérémie Baruch

Réunion du jeudi 9 février 2023 à 14h30
Commission d'enquête relative aux révélations des uber files : l'ubérisation, son lobbying et ses conséquences

Jérémie Baruch, journaliste au Monde :

En ce qui concerne l'aspect fiscal, à l'époque des Uber Files, Uber France dit qu'il n'est pas une société de transport mais seulement une plateforme pour laquelle il fait du marketing. À ce titre, il estime ne pas avoir à gérer les chauffeurs, ne pas être concerné par tout ce qui a trait aux ressources humaines. Il renvoie toute la responsabilité des actions d'Uber à Uber BV, la société mère implantée aux Pays-Bas. C'est pour cela qu'il se permet de payer aussi peu d'impôts en France : son chiffre d'affaires est entièrement issu de la société mère, qui lui verse les montants afférents à la publicité, au marketing et aux salaires, à quoi s'ajoute une marge de 8,5 %. Ainsi, Uber France fait des bénéfices et paye des impôts sur ces bénéfices.

Les Uber Files nous montrent pourtant que les directeurs généraux de l'époque jouent un rôle exécutif ; ils ne se contentent pas d'obéir aux ordres venus des Pays-Bas. Cela pourrait impliquer pour la société Uber France un statut d'établissement permanent : il devrait alors payer des impôts sur les activités de la société en France, donc sur les revenus tirés de toute l'activité VTC. Dans tous les courriels échangés sur ces sujets, Uber insiste sur le fait que sa structure fiscale en Europe est son talon d'Achille : s'ils n'arrivent pas à la défendre, ils vont perdre encore plus d'argent et devront fermer boutique.

En façade, Uber France est donc censée se contenter de promouvoir l'application, de faire du marketing ; en réalité, il s'agit bien d'un centre décisionnel. C'est clair dans leurs échanges. Ils se battent pour qu'à aucun moment ce rôle opérationnel en France n'apparaisse, afin d'être imposés seulement aux Pays-Bas, où ils ont négocié un rescrit fiscal qui leur permet de payer des impôts très bas. Pour Uber, finir par gagner de l'argent est un enjeu capital, évidemment, et pour cela, ils ont besoin de payer aussi peu d'impôts que possible dans les autres pays européens.

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