Intervention de Michel Guiniot

Séance en hémicycle du mercredi 15 mars 2023 à 15h00
Premier amendement et protocole à la convention d'espoo — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Guiniot :

La convention d'Espoo, adoptée le 25 février 1991, ainsi que le protocole à cette convention, veillent à l'établissement d'une évaluation stratégique environnementale qui doit être obligatoirement communiquée aux parties concernées pour tout projet majeur pouvant avoir un impact transfrontalier significatif et préjudiciable à l'environnement.

Cette convention, approuvée par la France en juin 2001 et source de contraintes environnementales et diplomatiques, constitue une atteinte flagrante à notre souveraineté nationale. Elle ne vise qu'à la production d'études d'impact censées déterminer si des projets développés à proximité d'une frontière peuvent être nocifs pour l'environnement de l'État voisin, mais il ne s'agit en aucun cas d'un élément contraignant.

Le texte vise donc à autoriser l'approbation d'un amendement adopté en février 2001, soit avant que la France ait approuvé la convention. Nous avons mis dix ans pour ratifier l'accord et, depuis, vingt-deux longues années se sont encore écoulées avant que nous examinions cet amendement qui vise à inclure, « conformément à la législation […] nationale, les associations, organisations et groupes constitués par [celle-ci] » dans les procédures d'évaluation. Cela contrevient au principe même de contexte étatique transfrontalier. Des organisations qui ne sont pas des États et qui n'ont donc pas à se mêler de questions frontalières vont pouvoir s'impliquer dans les études d'impact : c'est un non-sens. Autant sortir de la convention d'Espoo et changer de dispositif.

S'il est louable, bien entendu, de prendre en considération le fait que les impacts environnementaux de certains projets ne s'arrêtent pas aux frontières nationales, le rapport de la commission est plutôt clair : « la convention ne [garantit] pas l'arrêt des projets ». L'amendement n'a pour seul objectif que de sensibiliser le public aux enjeux environnementaux.

Il est à préciser que lorsque nous avons approuvé, en juin 2001, la seule convention d'Espoo, les autres parties signataires avaient déjà pris acte de l'imperfection du texte et produit l'amendement qui nous intéresse aujourd'hui. Il faut aussi noter – cela a été dit – que l'Arménie, la Belgique, la Macédoine du Nord et le Royaume-Uni doivent encore cosigner l'amendement pour permettre sa mise en application.

Nous devons ensuite, dans un second temps, approuver le protocole du 21 mai 2003, dit de Kiev. Il vise à « assurer un degré élevé de protection de l'environnement, y compris de la santé », en prévoyant notamment que le public participe aux évaluations stratégiques environnementales. Il s'agit là d'un abus de langage, puisque l'article 8 du protocole limite cette participation à une consultation simple. L'article 4 prévoit que l'évaluation stratégique environnementale, à laquelle peuvent participer des organisations et des groupes, peut s'appliquer à l'élaboration de plans dans des secteurs divers allant de l'énergie à l'urbanisme en passant par le tourisme. Alors, nous faudra-t-il demander une évaluation stratégique environnementale pour faire visiter nos cathédrales et nos châteaux de Picardie ? De telles activités sont visées par le protocole, puisque l'alinéa 7 de l'article 2 mentionne « tout effet sur l'environnement, y compris sur […] les sites naturels, les biens matériels, le patrimoine culturel et l'interaction entre ces facteurs ».

Au-delà des aspects techniques, le Rassemblement national a dénoncé en commission l'instrumentalisation politique de ce texte, et je ferai de même dans l'hémicycle : le fait d'inclure les ONG écologistes dans le processus de décision ne remplacera pas les dispositions légales qui ont été supprimées par la loi relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables. Cette disposition « inclusive » n'empêchera pas l'installation de parcs éoliens dans les espaces protégés de notre beau pays, et le protocole n'est donc pas un voile posé sur le texte relatif aux énergies renouvelables.

Pour conclure, je reprendrai les termes du rapport : « l'enjeu du projet de loi […] soumis à l'examen du Parlement est surtout [et simplement] symbolique ». Le cœur des dispositions a déjà été intégré en droit français, au sein du code de l'environnement. Le Parlement étant sollicité pour prendre acte de décisions qui ont déjà été prises, le groupe Rassemblement national s'abstiendra sur cette farce démocratique.

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