Intervention de Arnaud Montebourg

Réunion du mercredi 1er mars 2023 à 16h00
Commission d'enquête visant à établir les raisons de la perte de souveraineté et d'indépendance énergétique de la france

Arnaud Montebourg, ancien ministre du redressement productif (2012-2014) :

Nous avons mené des conseils de filière sur le terrain ; je me souviens être allé à Montbard chez Vallourec qui fabriquait la tubulure des générateurs de vapeur pour les réacteurs. L'export, qui stimulait beaucoup les carnets de commandes des entreprises françaises, a servi de relais d'activité en attendant les arbitrages à venir au terme de la grosse bagarre due aux promesses faites en 2012. D'une certaine manière, j'ai donc été dans une période d'attente. Mais on se rend compte avec le recul que les arbitrages n'ont finalement eu lieu que l'année dernière, quand on s'est dit que l'on allait relancer le nucléaire. Il y a donc eu dix ans de flottement. Je n'ai pas été témoin de cette dernière période, mais j'ai lu dans les journaux, comme chacun, ce qui s'est passé, les discussions, le retour à Belfort et les annonces, dont je me réjouis, faites dernièrement sur l'accélération du nucléaire. Il n'empêche que l'on a perdu dix ans et que l'on a déstabilisé une filière.

L'export a servi de relais, mais nous avons connu des défaites avec l'Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et aussi toute l'Europe, qui s'est jetée dans les bras de Rosatom. Pourquoi cela ? Parce que nos têtes de série sont trop petites et que nous ne défendions pas notre appareil industriel car nous ne construisions pas les EPR, les réacteurs pressurisés européens : un jour le projet était abandonné, le lendemain il fallait le refaire, Penly était abandonné, Flamanville ne sortait pas… On pourrait aussi gloser sur les difficultés industrielles de la filière à sortir l'EPR. Il est vrai que l'obligation des nouvelles strates de sécurité imposées après l'accident de Fukushima a durci et renforcé la complexité de l'outil. J'ai lu ce qu'en pensent M. Fontana, M. Proglio, M. Machenaud et M. Levandowski. Tous ces industriels que je connais et que j'estime considèrent que l'EPR est un monstre de ferraille et de béton, trop gros par rapport à ce qu'il produit et que l'on aurait dû revenir à un réacteur de plus petite taille. J'ai l'impression que des leçons seront tirées à ce sujet pour la deuxième version de l'EPR. Les tiraillements entre Areva et EDF n'ont pas été pour rien dans ces difficultés, mais je trouve que la filière s'en est bien sortie au terme de toutes ces années d'instabilité politique sur la question nucléaire.

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