Intervention de Mark MacGann

Réunion du jeudi 23 mars 2023 à 9h15
Commission d'enquête relative aux révélations des uber files : l'ubérisation, son lobbying et ses conséquences

Mark MacGann, ancien dirigeant et lobbyiste d'Uber, lanceur d'alerte sur les pratiques de la société Uber pour entrer sur les marchés français et européen :

L'agence de Thaima Samman était l'une de celles, nombreuses, que nous utilisions pour le travail de public policy dont j'étais le responsable. Je n'étais pas le directeur juridique. Elle n'effectuait pas un travail d'avocate pour Uber mais elle pouvait faire un travail de juriste en interprétant les textes et en nous aidant à rédiger des amendements. Elle avait aussi un carnet d'adresses qui s'étendait aux agences de l'État et aux cabinets ministériels. Elle était impliquée en politique depuis longtemps et ses conseils et son expérience nous ont été très utiles. Elle a fait son travail et a été rémunérée pour cela mais il ne s'agissait pas d'un travail d'avocat, même si elle-même et sa collaboratrice le sont.

Il ne m'appartient pas de déterminer ce qui doit être protégé par le secret professionnel. Vous connaissez mon point de vue sur le fait que les avocats peuvent échapper à la réglementation et à la déontologie imposées aux lobbyistes.

Même si un élu est convaincu par vos arguments, il a aussi d'autres dossiers à traiter. Il faut donc aider les députés ainsi que leurs équipes – les députés disposent de peu de moyens humains pour les aider à faire leur travail. On leur fournit donc des propositions d'amendements, des données et des études. Ensuite, un député peut de manière honorable déposer cet amendement clé en main sans le modifier parce qu'il est convaincu qu'il est bien ficelé. Il peut aussi être pris par le temps. Je ne peux pas parler à la place des députés concernés.

Vous m'avez demandé une liste assez fournie de documents, madame la rapporteure. Je vais bien entendu vous les transmettre mais cela prendra peut-être un peu plus de quinze jours. Je vous transmettrai la liste des députés avec lesquels nous avons eu des relations à l'occasion des discussions sur les lois dites « Macron », « Thévenoud » et « Grandguillaume », ainsi que le détail du rôle de chacun.

J'en viens aux économistes. Pour contrer ce que disaient des sociétés comme G7 ou des responsables politiques conservateurs et hostiles à toute réforme, nous voulions démontrer la valeur ajoutée d'Uber pour l'économie et la société. Il fallait donner corps à nos déclarations avec des chiffres et des études. Nous avons donc engagé des économistes.

Ces derniers auraient-ils dû dire de manière beaucoup plus claire qu'ils avaient été payés ? Je pense qu'ils ont le droit de travailler et d'être payés. On sait qu'aux Rencontres économiques organisées chaque année à Aix-en-Provence par le Cercle des économistes, des économistes parlent en leur propre nom alors qu'ils sont payés depuis des décennies par telle ou telle entreprise. Il y a peut-être un peu de mélange des genres qu'il faudrait assainir avec davantage de transparence. Travailler pour Uber ou BNP Paribas n'est pas forcément illégal ou immoral mais il faut simplement le dire.

MM. Landier, Thesmar, Bouzou et autres ont effectué des travaux qui nous ont ensuite permis de montrer aux décideurs politiques français que leurs propres économistes confirmaient ce que nous disions. Comme nous sélectionnions attentivement les données d'Uber fournies aux économistes, le résultat de leurs études était conforme à la commande.

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