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Intervention de Julien Bayou

Séance en hémicycle du jeudi 6 avril 2023 à 21h30
Interdiction des vols en jets privés — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJulien Bayou, rapporteur de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire :

Ainsi, l'offre aérienne a été régulée pour la population générale alors que dans le même temps, le moindre débat sur la régulation des transports des plus riches est balayé d'un revers de la main. Avoir les moyens financiers vous permet donc de vous affranchir des lois de la République et de vous épargner le moindre effort écologique. Tel est le message envoyé par le Gouvernement. C'est une honte qui mine, qui sape, qui sabote le consentement de la population à la transition écologique.

Contrairement à ce que j'ai entendu lors de l'examen de la proposition de loi en commission, je ne souhaite pas punir les plus riches. Je souhaite juste les ramener sur terre, au même niveau que le commun des mortels, car je m'inquiète des effets de cette absence de régulation sur la cohésion sociale. Ce qu'il faut bien percevoir, c'est le risque que nous prenons si l'acceptabilité sociale de la transition n'est pas assurée. Lors de son audition, Yamina Saheb, autrice du Giec, l'a dit : « La transition doit être juste ou nous aurons la guerre. »

La proposition de loi relative à l'interdiction des vols en jets privés que je vous présente repose précisément sur les enseignements et préconisations du Giec et des scientifiques. L'enjeu est d'assurer la transition écologique urgente et nécessaire du secteur aérien tout en garantissant son acceptabilité sociale. Pour la première fois, la proposition de loi vise à faire reposer en premier lieu les efforts sur les plus riches, car ce sont eux qui contribuent le plus, et de loin, à la pollution et au dérèglement climatique.

Non, l'aérien n'est pas anecdotique : le secteur émet 24 millions de tonnes de CO2 selon une étude de l'Agence de la transition écologique (Ademe) – soit 5,3 % des émissions totales de la France en 2019 – et ses émissions sont en très forte croissance. Au sein de l'aviation générale, l'empreinte carbone des avions privés est, de façon indéniable, disproportionnée par rapport aux autres types de trajets réalisés : ils sont, par passager, dix fois plus polluants que les avions commerciaux. Sans parler du scandale des vols à vide, qui représentent jusqu'à 40 % des vols pour les trajets Lyon-Chambéry ou Lyon-Courchevel, par exemple.

Dans ce domaine, la France est le pays de tous les records, comme le montre un rapport de Greenpeace publié le 30 mars dernier. Entre 2021 et 2022, le nombre de vols en jet privé au départ de notre pays a augmenté de 55 % et les émissions produites de 93 %. La France est le pays de l'Union européenne qui compte le plus de vols en jet privé et quatre villes françaises se trouvent dans le top 10 des trajets le plus souvent effectués.

Lorsque l'urgence climatique est déclarée, tous les secteurs doivent engager une politique de sobriété et de décarbonation, y compris celui de l'aviation. Il faut d'abord réduire les émissions de gaz à effet de serre, et ensuite décarboner ce qui ne peut pas être réduit. C'est forcément dans cet ordre-là que l'on agit : réduire, puis décarboner. Or la réduction du trafic aérien commence par celle de l'aviation privée.

On nous dit que les jets privés sont utilisés à des fins purement professionnelles ; c'est faux. Les statistiques avancées par les représentants de l'aviation d'affaires que j'ai auditionnés ne reposent sur aucune donnée fiable. Quand l'avion du groupe Bolloré, par exemple, fait, dans la même journée, Paris-Toulon, Toulon-Corfou et Corfou-Paris, ces vols sont considérés par le secteur comme des vols d'affaires parce qu'ils sont facturés à l'entreprise Bolloré. Il s'agit, certes, d'un remarquable outil de défiscalisation, car ce ne sont pas des déplacements professionnels.

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