Intervention de Nicolas Tenzer

Réunion du mercredi 29 mars 2023 à 16h30
Commission d'enquête relative aux ingérences politiques, économiques et financières de puissances étrangères-États, organisations, entreprises, groupes d'intérêts, personnes privées-visant à influencer ou corrompre des relais d'opinion, des

Nicolas Tenzer, président du Centre d'étude et de réflexion pour l'action politique (CERAP) :

. Pour trois raisons.

D'abord, les pouvoirs publics, à la différence de certaines administrations, n'avaient pas toujours conscience du risque d'ingérences étrangères, lesquelles ont donc été très sous-estimées. Je suis de ceux qui alertent sur la nature du régime russe depuis au moins le début des années 2000. En 2005, plus encore en 2008, 2011, 2014, les gouvernants, ministres, élus, responsables politiques, responsables académiques ou de think tanks, les journalistes ont minimisé la situation. Des amis m'ont parfois reproché une certaine exagération mais, après le 24 février 2022, ils ont reconnu que ce n'était pas le cas. J'aurais préféré avoir tort.

Ensuite, les services de sécurité se concentraient sur la menace islamiste radicale. Leurs effectifs n'étant pas indéfiniment extensibles, la Russie est passée au deuxième plan.

Enfin, des personnes pouvaient s'inquiéter de ce genre d'investigation poussée. Certaines auraient pu se trouver dans le collimateur, sans d'ailleurs que cela conduise à une incrimination pénale. La présence profonde des intérêts russes, étatiques, économiques ou d'influence au sein de l'État français, globalement et au sein de certaines administrations, pouvait contrarier un tel processus. Trop de personnes, de partis, de tendances politiques diverses pouvaient se sentir concernés, aucun camp politique n'échappant à une telle présence. Nous avons donc fait preuve à l'égard de la Russie d'une attitude lénifiante, injustifiée et même coupable à travers diverses tentatives de rapprochement, ce qui a conduit à fermer les yeux sur certaines pratiques, y compris de la part de ceux qui en avaient été directement victimes. Cela explique aussi l'hésitation ou la pusillanimité pour lancer ce genre d'enquête. Avant le 24 février, quelqu'un me confiait que l'on voyait très bien les obstacles. Je ne suis pas sûr qu'ils aient complètement disparu.

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