Intervention de Stéphane Delautrette

Séance en hémicycle du mardi 27 juin 2023 à 15h00
Accompagnement des élus locaux dans la lutte contre l'artificialisation des sols — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaStéphane Delautrette :

Comme j'ai eu l'occasion de le dire lors de la discussion générale, notre groupe regrette l'absence d'une grande loi de programmation sur le foncier, adaptant nos objectifs de politique publique au nouveau cadre du zéro artificialisation nette (ZAN) et prévoyant en son sein, ou dans une loi de finances, un cadre financier et fiscal qui en soit l'outil opérationnel.

Bien sûr, une proposition de loi ordinaire ne se prête que peu à la définition d'un tel cadre. Cependant, un amendement, issu des rangs écologistes, demandant un rapport sur les aspects fiscaux a été adopté ; nous nous en réjouissons, tout comme du large soutien de principe qu'a reçu notre amendement proposant une loi de programmation foncière. Ainsi, dans la continuité de ces échanges, nous proposerons aux présidents des commissions concernées la création d'une mission d'information commune, afin de débuter un travail parlementaire transpartisan sur le sujet.

Notre groupe était très réservé quant au contenu de la proposition de loi sénatoriale. Certaines mesures, par exemple celles concernant les délais, avaient pour effet de priver d'effectivité les dispositions prévues pour la période 2021-2031, tandis que d'autres, notamment celles ayant trait à la comptabilisation et à la définition des projets nationaux, permettaient de fait un dépassement significatif de l'objectif consistant à réduire de 50 %, par rapport à la période décennale précédente, le rythme d'artificialisation des sols.

Le texte a cependant connu une évolution favorable tout au long des débats qui ont eu lieu dans notre assemblée. En premier lieu, les reports de délais prévus par le Sénat, qui étaient excessifs, ont été supprimés, à la seule exception de celui, limité à six mois, qui concerne les Sraddet – schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires ; il permettra de tenir compte des décrets d'application et des effets de la proposition de loi.

En deuxième lieu, le principe de comptabilisation des projets d'intérêt national et européen a été réintroduit, même s'il s'agit d'une comptabilisation à part, dans un forfait national de 15 000 hectares. Nous entendons la nécessité de conserver de la flexibilité, mais nous regrettons que nos amendements encadrant les éventuels dépassements du plafond n'aient pas été retenus. Certes, la définition de ces projets a été largement précisée, même si elle laisse encore des marges de manœuvre confortables à l'État. Un équilibre semble néanmoins trouvé dans la nouvelle rédaction, à condition qu'il soit conservé en commission mixte paritaire (CMP). Enfin, le mécanisme de poupées russes déclinant l'imbrication entre projets nationaux, régionaux et locaux a été précisé. Nous comptons fortement sur le dispositif de clause de revoyure pour bénéficier d'une évaluation et d'un suivi précis des consommations d'espace, notamment suite à l'adoption de nos amendements donnant une dimension qualitative à ces évaluations.

En troisième lieu, le mécanisme de la garantie rurale a été sanctuarisé, mais il est désormais conditionné à l'existence d'un document d'urbanisme prescrit, arrêté ou approuvé avant le 22 août 2026. Cette condition demeure cependant souple : nous avions certes proposé une autre définition, mais nous avons, là aussi, trouvé un équilibre grâce à l'adoption de notre amendement garde-fou, qui précise que la garantie rurale ne fait pas obstacle à l'application de règles de construction limitée prescrites par le RNU – règlement national d'urbanisme – dans les communes concernées.

Nous saluons également l'intégration d'une possibilité de mutualisation à l'échelle locale, après avis de la conférence des maires, même si nous aurions préféré qu'une logique intercommunale soit privilégiée en la matière.

Le texte résultant des débats en séance est donc sensiblement amélioré, et ses dispositions principales sont équilibrées ; elles permettent de concilier la préservation du ZAN avec une certaine flexibilité de mise en œuvre liée aux problématiques rurales, tout en introduisant une clause de revoyure en 2026. Pour ces raisons, le groupe Socialistes et apparentés votera pour le texte issu des travaux de notre assemblée.

Ce soutien ne doit cependant pas être compris comme un blanc-seing, monsieur le ministre de la transition écologique et de la cohésion de territoires. Vous nous avez demandé, en anticipant la CMP, de ne pas dépasser les lignes rouges des sénateurs, notamment celle qui concerne la logique de l'hectare dans le cadre de la garantie rurale. Nous comptons donc sur vous pour défendre de la même manière, auprès des sénateurs, les points d'équilibre importants adoptés dans notre assemblée et qui constituent le fondement de notre vote. Je pense en particulier à la comptabilisation et à la définition des projets nationaux, à l'encadrement des communes relevant du RNU et aux délais d'actualisation des documents d'urbanisme. À défaut, notre position de vote sur le texte qui sortira des travaux de la CMP sera susceptible d'évoluer.

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