Intervention de Fanny Gallois

Réunion du jeudi 29 juin 2023 à 8h35
Commission d'enquête sur la structuration, le financement, les moyens et les modalités d'action des groupuscules auteurs de violences à l'occasion des manifestations et rassemblements intervenus entre le 16 mars et le 3 mai 2023, ainsi que sur le déroulement de ces manifestations et rassemblements

Fanny Gallois, responsable de programme, Amnesty International :

Il existe un certain nombre de textes internationaux qui nous permettent de disposer d'une base sur l'évaluation de la proportionnalité. Nous avons également produit des lignes directrices, qui ne sont pas spécifiques à la France. De fait, l'analyse de la proportionnalité s'effectue au cas par cas, pour nous comme pour les forces de l'ordre supposées s'adapter à tout moment une situation qui évolue en temps réel.

S'agissant du recours à la force avec des armes à usage légitime comme les matraques et les gaz lacrymogènes, reprenons l'exemple de cet homme frappé à l'entrejambe et qui a perdu un testicule. Nous avons analysé les différents angles de vue des vidéos, qui donnaient le contexte général de la charge, et nous avons conclu que le coup porté à ce moment, dans ce contexte, ne semblait pas proportionné. Cette personne avait un appareil photo à la main et, selon certaines allégations, cet appareil aurait été pris pour un projectile.

S'agissant de l'utilisation de gaz lacrymogènes, nous procédons de la même manière : au cas par cas, à partir d'images. Nous les analysons pour vérifier que les tirs sont réglementaires, notamment que la grenade est lancée en l'air et non directement contre les manifestants auquel cas elle se transforme en projectile à impact cinétique. Je pense au cas malheureux de Zineb Redouane, décédée après avoir été blessée au visage par une grenade lacrymogène en marge d'une manifestation.

Nous demandons également l'interdiction d'un certain nombre d'armes. Pour nous, la proportionnalité est moins importante à partir du moment où des éléments permettent de conclure à l'utilisation d'une grenade de désencerclement ou d'une grenade GM2L à double effet assourdissant et lacrymogène – ce qui est contradictoire selon nous. En effet, l'effet lacrymogène est supposé entraîner la dispersion, mais l'effet assourdissant crée une confusion qui va l'empêcher en bon ordre.

S'agissant des bases et des documents sur lesquels nous nous fondons, nous fonctionnons généralement de la même manière quand nous effectuons nos recherches. Nous croisons les témoignages de toute personne qui peut être concernée, les documents officiels comme des jugements ou des arrêtés, les informations relayées par les médias et les vidéos publiées sur les réseaux sociaux. Ces dernières offrent une source intéressante. Mais elles sont nombreuses et elles ne suffisent pas. Nous disposons d'un laboratoire attaché à leur authentification et à leur analyse. Lorsque nous identifions des séquences pertinentes, nous essayons d'analyser différentes prises de vue, de même qu'en open data grâce à des méthodologies éprouvées.

Dans le cas de Zineb Redouane, décédée en marge d'une manifestation à Marseille, le ministre de l'intérieur d'alors Christophe Castaner avait parlé à la radio alors que l'enquête était en cours. Il avait déclaré qu'elle n'avait pas été tuée par la police.

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