Intervention de Christophe Bourseiller

Réunion du jeudi 29 juin 2023 à 8h35
Commission d'enquête sur la structuration, le financement, les moyens et les modalités d'action des groupuscules auteurs de violences à l'occasion des manifestations et rassemblements intervenus entre le 16 mars et le 3 mai 2023, ainsi que sur le déroulement de ces manifestations et rassemblements

Christophe Bourseiller, essayiste, auteur de Nouvelle histoire de l'ultra-gauche :

Je ne saurais me substituer à la police !

Je connais des autonomes de toutes générations. Ils ne se cachent d'ailleurs pas. Ils publient des textes, souvent intéressants, comme ceux du Comité invisible, dont L'Insurrection qui vient préconisant un déplacement depuis les villes vers les campagnes. La bibliographie est abondante ! Les autonomes sont connus depuis longtemps. En bordure des manifestations, je reconnais toujours un peu les mêmes. Je trouve de nombreux textes dans les librairies anarchistes ou alternatives. Il est possible de se rendre dans des ZAD, même si c'est un peu plus compliqué. Enfin, il y a la manne d'internet. Lorsque les chaînes d'information en continu me demandent qui ils sont, je décline en général leurs invitations tant cette question me paraît surprenante.

En outre, les autonomes des années 2000 s'inscrivent dans un héritage. Nulle rupture entre eux et leurs anciens ! L'Insurrection qui vient, par exemple, rappelle fortement une brochure situationniste de 1964 commentant les émeutes de Watts, aux États-Unis, Le Déclin et la chute de l'économie spectaculaire marchande. Le livre du Comité invisible que je viens de mentionner rappelle d'ailleurs un texte du situationniste Alexander Trocchi.

Cette génération, qui a entre 40 et 50 ans, est à la recherche de successeurs, qui se sont manifestés lors des rassemblements contre la réforme des retraites. Moins organisés, les anciens les ont regardés d'un œil paternel. Ils se retrouvent également dans les free parties – les rave parties interdites – ou au sein de collectifs lycéens. La génération des années 2000 semble avoir été touchée par la crise sanitaire liée au covid-19. Une sorte de coup d'arrêt s'est produit. Mais il est vrai que sont des stratèges – Guy Debord disait qu'il n'était pas un philosophe mais un stratège. Lors des premières manifestations contre la réforme des retraites, il ne s'est rien passé. Les forces de l'ordre ont donc baissé la garde. Or, les autonomes étaient bel et bien présents dans cette nébuleuse qu'est une tête de cortège. Ils attendaient le moment opportun. S'ils jugent les syndicats fermement opposés à leurs actions et leur service d'ordre vigilant, ils ne bougent pas. Mais si les syndicats relâchent la garde et si la police évalue mal le risque, ils s'engouffrent dans la brèche. « Agir en primate, penser en stratège », proclame un slogan autonome.

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