Intervention de Quentin Le Guillous

Réunion du jeudi 12 octobre 2023 à 9h10
Commission d'enquête sur les causes de l'incapacité de la france à atteindre les objectifs des plans successifs de maîtrise des impacts des produits phytosanitaires sur la santé humaine et environnementale et notamment sur les conditions de l'exercice des missions des autorités publiques en charge de la sécurité sanitaire

Quentin Le Guillous, secrétaire général adjoint des Jeunes agriculteurs (JA) :

Mon exploitation se situe à 60 kilomètres à l'ouest de Paris, couvre 185 hectares et est principalement consacrée aux grandes cultures, dont le colza, le blé, l'orge, les pois, la féverole et la luzerne. Mon exploitation est petite à l'échelle européenne, mais peut-être petite ou moyenne, voire grande, à l'échelle française. Je consomme environ 50 litres de carburant par hectare, opérations de moisson incluses. Sur mes 185 hectares, j'arrive à un total de 9 000 à 10 000 litres de carburant par an.

Je travaille en semis direct sous couvert avec des couverts vivants, c'est-à-dire que je récolte et je sème des couverts avant de les détruire avec du glyphosate la veille du semis direct. Ensuite, je sème mon blé dans un sol vivant. Lorsque je me suis installé en 2016, mon taux de matière organique s'élevait environ à 1 % ou 1,5 %. Après sept ans, mes analyses montrent que certaines parcelles sont passées à 3,2 % de matière organique. J'ai effectué des comptages de vers de terre, et j'ai constaté que j'en avais entre une tonne et demie à deux tonnes par hectare, tandis que mon voisin pratiquant l'agriculture biologique atteignait environ 500 kilos par hectare.

Je suis donc en faveur de la poursuite de l'usage du glyphosate, mais je soutiens également la recherche de solutions pour son remplacement. En particulier, il y a un défi à surmonter lorsque mes couverts intermédiaires, qui sont gélifs et disparaissent lors des gelées, ne poussent pas correctement l'été, laissant place à des mauvaises herbes telles que les ray-grass, les vulpins et le chardon. Dans de tels cas, je n'ai d'autre option que de recourir à la chimie. J'ai envisagé l'écopâturage avec un voisin possédant des moutons, mais cela n'a pas résolu complètement le problème.

Jeunes agriculteurs encourage l'accompagnement, notamment grâce à des fonds supplémentaires, des jeunes agriculteurs qui souhaitent s'engager dans l'agriculture de conservation ou adopter un modèle de réduction de 80 % de l'utilisation des produits phytosanitaires. Nous avons d'ailleurs inscrit ces recommandations dans notre rapport d'orientation.

J'ai réussi à réduire de 50 % l'utilisation des fongicides pour traiter les maladies et de 80 % l'utilisation des insecticides. Cependant, je dois admettre que je n'ai pas encore trouvé de solution satisfaisante pour éliminer complètement les herbicides. Si le glyphosate venait à être interdit, je serais contraint d'augmenter de plus de 200 % l'utilisation des herbicides. Les insecticides sont encore nécessaires, mais la présence accrue de vie dans le sol contribue à réguler leur utilisation. Malheureusement, je devrai probablement utiliser un insecticide contre les pucerons dans une quinzaine de jours, à moins que le temps n'évolue favorablement avec des gelées. L'interdiction des néonicotinoïdes est d'ailleurs une aberration, car je dois utiliser la pulvérisation chimique en aérien.

Je pense que l'Europe devrait travailler à l'élaboration d'une législation unifiée sur le glyphosate. Toute l'Europe devrait, par exemple, suivre la France sur sa norme de 1 080 grammes. Nous ne devrions plus tolérer une concurrence intraeuropéenne dans ce domaine.

Par ailleurs, il est possible de dire clairement que, dans deux ou trois ans, les consommateurs français ne mangeront plus de cerises françaises et, d'ailleurs, il faudrait même arrêter les importations de celles qui ne répondent pas aux normes françaises.

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