Intervention de Frédéric Falcon

Séance en hémicycle du mercredi 6 décembre 2023 à 21h30
Marché locatif en zone tendue — Article 1er

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrédéric Falcon :

Depuis le 1er janvier sont progressivement interdits à la location les logements qui ne répondent pas aux critères de la décence énergétique, c'est-à-dire classés G, F ou E à l'issue du DPE. Sans doute le Gouvernement a-t-il sous-estimé les conséquences économiques et sociales de l'application brutale de cette mesure, car elles se révèlent dramatiques : face aux difficultés techniques et financières des travaux requis, les propriétaires retirent massivement ces logements du marché locatif.

Madame et monsieur les rapporteurs, monsieur le ministre délégué, vous ignorez à quel point il est complexe de faire réaliser ces travaux d'isolation, contraints par une réglementation stricte au sein des copropriétés, ou dans les centres-villes anciens qui relèvent des architectes des bâtiments de France.

L'intégration de normes énergétiques aux critères de décence d'un logement est absurde : les appartements haussmanniens de Paris, dont le prix de vente dépasse 10 000 euros au mètre carré, sont-ils indécents parce que classés F ou G ? Quelle est la fiabilité de ce DPE dont, au sein d'une même copropriété, voire pour le même bien, le résultat varie d'un professionnel à l'autre – j'en ai personnellement fait les frais ?

Les premières études mettent fortement en doute à la fois le sérieux de ces diagnostics et la pérennité des isolations ; la Cour des comptes vient d'estimer que 60 % des logements ayant fait l'objet de tels travaux continuent d'être mal classés. L'université de Cambridge, que j'ai citée à plusieurs reprises en commission, a réalisé en 2022 une étude portant sur près de 50 000 logements au Royaume-Uni : il en ressort que le bénéfice des travaux disparaît au bout de deux ans pour une isolation par les combles, quatre ans pour une isolation par l'extérieur. Ces données se trouvent en ligne, accessibles à tous : je vous invite, chers collègues, à les consulter !

Plus préoccupant encore, comme je l'ai dit lors de la discussion générale, nous risquons un transfert de propriété – la mainmise des marchands de biens, des grandes foncières opportunistes, soutenues par la finance, sur les logements décotés que bradent des propriétaires dans l'incapacité économique ou technique de les rénover. Cela devrait vous intéresser, chers collègues de la NUPES ! Pour notre part, nous avons compris qu'Emmanuel Macron et sa majorité ne souhaitent plus que les Français soient propriétaires de leur logement.

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