Intervention de Sandrine Dogor-Such

Séance en hémicycle du jeudi 7 décembre 2023 à 21h30
Soins palliatifs — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSandrine Dogor-Such :

Depuis 1999, la loi garantit que « toute personne malade dont l'état le requiert a le droit d'accéder à des soins palliatifs et à un accompagnement ». Cela signifie soulager la douleur, calmer les symptômes, assurer le confort, prendre en compte l'angoisse ou la dépression, assister la famille sur le chemin d'une finitude inéluctable. Il n'est point besoin de légiférer plus avant sur ce sujet : le cadre légal actuel est amplement suffisant. Il suffirait que la volonté politique et les moyens soient au rendez-vous.

Le défaut de soulagement génère encore à ce jour des situations inacceptables, et de nombreux malades meurent en souffrant de douleurs non calmées. Cela vient en partie d'habitudes médicales d'obstination déraisonnable et de traitements à la fois inefficaces, pénibles, difficiles et intenses, ce qui montre que la loi Leonetti de 2005 est insuffisamment appliquée.

C'est la persistance d'une douleur insupportable qui explique les demandes que cela s'arrête, ce qui n'induit d'ailleurs pas nécessairement une demande d'administration de la mort. La réponse attendue est l'instauration d'un traitement antalgique et sédatif efficace, dont l'absence peut alors conduire à une demande d'euthanasie.

Les soignants savent entendre cette détresse, cette peine et parfois – et seulement parfois – cette envie de mourir. Leur mission est de comprendre, de soulager, de rassurer, ce qui est un élément fondamental du soin.

On constate que peu d'actes euthanasiques sont réalisés à l'étranger chez les patients faisant l'objet d'un parcours authentique de soins palliatifs. De nombreux patients passent par des phases de demande d'euthanasie, surtout au début de leur maladie, mais suivant leur accompagnement, celles-ci disparaissent pour 90 % d'entre eux.

Le Gouvernement envisage désormais de légaliser une aide active à mourir, dans un contexte d'extrême fragilité de notre système de santé, et alors que l'urgence n'est assurément pas là. Une telle légalisation fragiliserait des équipes soignantes confrontées au quotidien à des situations complexes et conduirait à un glissement éthique majeur.

En réalité, il s'agit d'éviter l'écroulement des soins palliatifs, car leur avenir est bien sombre. Une enquête réalisée en 2020 indique qu'il manque actuellement 100 médecins dans ces services et qu'il devrait en manquer 300 de plus en 2025. Or sans médecins, c'est tout un service qui ferme.

Un autre point ne peut être occulté : la dimension économique. Comme nous avons pu le constater en Belgique et au Canada, l'introduction de l'euthanasie fait entrer les soins palliatifs dans une spirale négative. S'inscrivant dans une situation déjà dégradée, avec des moyens financiers et humains insuffisants, le recours croissant à l'euthanasie contribue à désemplir les lits d'hôpitaux en général et ceux des services de soins palliatifs en particulier, n'incitant donc pas les pouvoirs publics à y investir.

Il est faux de dire que l'euthanasie compléterait les soins palliatifs. Elle stoppe l'accompagnement du patient ; elle l'élimine. La légalisation de l'aide active à mourir repose sur une éthique d'autonomie, tandis que les soins palliatifs reposent sur une éthique de la vulnérabilité et de la solidarité collective.

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