Je regrette votre réponse sur le statut de l'Anses. Julien Denormandie a expliqué hier que personne ne contestait l'avis scientifique rendu par l'Agence mais qu'il fallait parfois prendre des responsabilités quant au maintien d'une filière ou d'une production. Le directeur général de l'Anses a aussi exposé qu'il ne disposait pas d'une faculté d'adaptation des avis scientifiques. Il est problématique qu'un ministre de l'agriculture, dont la marge de manœuvre est déjà fortement diminuée par le transfert des compétences à l'Union européenne, soit bloqué par une administration sur laquelle il n'a pas la main. Quelle est réellement cette marge de manœuvre ?
Même si le rapporteur n'aime pas qu'on en parle, les critères de quantification posent un énorme problème. Vous-même ne semblez pas le voir non plus. Dans mon activité de viticulteur, en sortant des produits CMR, j'ai dégradé mon indice de fréquence de traitement (IFT) et, par nature, le Nodu et la QSA. On apprécie la baisse de l'utilisation des produits phytosanitaires de manière quantitative sans considérer l'aspect qualitatif. Or, quand, pour lutter contre le mildiou, on remplace 200 grammes par hectare d'un produit CMR par 6 ou 10 kilos de soufre par hectare, on augmente forcément la QSA, sans que l'amélioration qualitative soit valorisée : certaines dégradations du Nodu sont vertueuses. Il faut régler ce problème.
Les viticulteurs font face à de graves difficultés économiques : les vignes qui ne sont plus entretenues, donc plus traitées, se multiplient. On ne peut pas se réjouir de la baisse des produits phytosanitaires dans ces conditions.
Enfin, vous vous positionnez sur une ligne de crête, en refusant les interdictions sans solution, pour préserver la production. Mais, contrairement à ce que vous dites, il y a bien eu des interdictions sans solution, avec des menaces sur certaines productions. De plus, vous n'abordez pas la question de la dégradation de la compétitivité. Sur France Info, arguant d'une diminution de 30 % des quantités de glyphosate, vous vous êtes réjoui que la France ait été plus vertueuse que les autres pays. Or les solutions de remplacement sont plus coûteuses, ce qui entraîne une dégradation de la compétitivité de l'agriculture : la production agricole s'effondre en grande partie de ce fait. Les clauses miroirs fonctionnent très peu et ne concernent pas le marché commun, première concurrence de l'agriculture française. Qu'en pensez-vous ?