Intervention de Pierre-Henri Dumont

Séance en hémicycle du jeudi 25 janvier 2024 à 9h00
Convention france-moldavie pour l'élimination de la double imposition sur le revenu et la prévention de la fraude fiscale — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre-Henri Dumont :

Nous sommes de nouveau réunis un jeudi matin en séance publique pour examiner une convention internationale, après une nouvelle demande du groupe LFI de ne pas appliquer la procédure d'examen simplifiée, originellement prévue. Le texte, adopté à une large majorité en commission, sans débat ou presque, ne concerne pourtant qu'un nombre infime de personnes, n'a aucune conséquence sur les finances publiques et s'apparente à des dizaines d'autres accords en vigueur entre la France et des pays amis.

Avec les camarades Insoumis, le grand capital n'a qu'à bien se tenir ! Sus à nos soixante-cinq ressortissants sociaux-traîtres établis en Moldavie ! Ce sont tous des fraudeurs potentiels, certainement évadés fiscaux, en tout cas suspects, puisque seuls huit d'entre eux, inscrits sur les listes consulaires à Chiºinãu, ont accordé leur vote au Grand Timonier insoumis en 2022 – chiffre tombé à quatre pour son représentant aux élections législatives. Au goulag ! Un peu de sérieux, collègues Insoumis : la révolution n'est pas pour demain, et certainement pas avec cette convention franco-moldave pour l'élimination de la double imposition en matière d'impôts sur le revenu et pour la prévention de l'évasion et de la fraude fiscales.

Comme je l'ai indiqué la semaine dernière en commission, le groupe Les Républicains est favorable à ce texte, qui permettra de régler les quelques cas de double imposition touchant nos entreprises et nos ressortissants, mais qui va aussi dans le sens de la démarche d'intégration européenne de la Moldavie. Il ne s'agit en aucun cas, comme l'ont affirmé nos révolutionnaires de salon en commission, de « créer une nouvelle niche d'évasion fiscale et, par ricochet, d'alimenter l'extrême droite déjà florissante ». Il s'agit, en revanche, d'interroger la marche de ce pays vers l'Europe et sa potentielle intégration dans l'Union européenne, qui soulève, elle, de véritables questions.

En juin 2022, les vingt-sept États membres de l'Union européenne, avec le soutien de la France, ont accordé à la république de Moldavie le statut de pays candidat à l'Union européenne. Par ailleurs, dans le cadre du conflit en Ukraine, la France et la Moldavie ont signé, le 25 septembre 2023, une lettre d'intention sur la coopération bilatérale en matière de défense. La Moldavie est donc engagée dans un processus d'intégration à l'Union européenne, qui peut certes s'avérer long, mais qui est tout à fait réel.

En commission, la rapporteure m'a confirmé que la convention ne s'appliquerait pas à la Transnistrie. Le simple fait de se poser la question dit tout de la situation géopolitique dans laquelle se trouve la Moldavie, ce potentiel futur État membre de l'Union, amputé de près de 15 % de son territoire et de sa population, dont une proportion non négligeable dispose d'un passeport russe. Ce conflit gelé depuis 1992 – potentiellement le second au sein de l'Union européenne depuis l'intégration de Chypre – a pris une tout autre dimension avec le déclenchement de la guerre en Ukraine. Certains ont vu dans cette zone une possible base arrière pour une attaque sur le front ouest et une avancée vers le grand port d'Odessa. Cette zone représente donc un enjeu stratégique majeur pour l'Ukraine, ce qui explique en partie la volonté de l'Otan de se projeter en Roumanie, où la France est nation-cadre au sein de l'opération Aigle, destinée à sécuriser le flanc est de l'Otan – 500 de nos soldats y sont actuellement déployés.

Au regard de ces réalités, nous ne pouvons plus nous dispenser d'une réflexion de fond sur le processus d'élargissement tel qu'il est actuellement mené par l'Union. Les Républicains le répètent depuis maintenant plusieurs années : ce processus ne peut se dérouler correctement sans qu'une réforme profonde des institutions européennes soit d'abord lancée. Sinon, l'Union ne pourra pas fonctionner, elle perdra son pouvoir d'attractivité et suscitera toujours plus de rejet et d'incompréhension chez nos concitoyens.

Les élections européennes du 9 juin doivent nous permettre de trancher ce débat sur le devenir de nos institutions européennes, au moment où la majorité présidentielle est prête à diluer le pouvoir décisionnaire de notre pays en augmentant le nombre de commissaires européens et à sacrifier le veto de la France qui fut pourtant crucial pour le général de Gaulle dans la défense de la politique agricole commune (PAC), dont le dévoiement par l'alliance écolo-macrono-bobo a conduit à juste titre nos agriculteurs dans la rue.

En attendant ce moment de clarification politique, et puisqu'il faut nous prononcer, nous voterons en faveur de ce projet de loi, le destin de nos amis moldaves étant bien évidemment de se tourner vers l'Europe. Cette convention est une minuscule étape sur le chemin de l'intégration, mais elle permet d'aller dans le bon sens.

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