Intervention de Patrick Bloche

Réunion du jeudi 1er février 2024 à 14h00
Commission d'enquête sur l'attribution, le contenu et le contrôle des autorisations de services de télévision à caractère national sur la télévision numérique terrestre

Patrick Bloche, adjoint à la maire de Paris, ancien député de Paris, ancien président de la commission des affaires culturelles et de l'éducation :

Cet article visait à élargir le droit d'opposition dont jouissaient les journalistes de l'audiovisuel public à l'ensemble des journalistes, à une époque où la situation était – je reprends mon expression – moins dégradée. Je veux dire que les journalistes étaient capables de résister aux pressions dont ils pouvaient faire l'objet.

Je ne suis pas convaincu qu'il en soit encore ainsi et je n'en fais pas reproche aux journalistes : il faudrait ouvrir un vaste champ d'investigation sur l'exercice de leur métier, qui prendrait en compte sa précarisation, dans la presse écrite comme dans l'audiovisuel.

En 2016, nous étions en tout cas convaincus que le droit d'opposition pouvait être réellement exercé afin d'empêcher qu'un journaliste ne soit « contraint à accepter un acte contraire à sa conviction professionnelle formée dans le respect de la charte déontologique de son entreprise ou de sa société éditrice », pour reprendre les termes de ce même article 1er.

En 2016, le législateur avait prévu de généraliser les chartes déontologiques, désormais inscrites à l'article 2 bis de la loi fondatrice sur la liberté de la presse du 29 juillet 1881. Une date butoir avait été fixée au 1er juillet 2017 et la loi disposait qu'« À défaut de conclusion d'une charte avant le 1er juillet 2017 et jusqu'à l'adoption de celle-ci, les déclarations et les usages professionnels relatifs à la profession de journaliste peuvent être invoqués en cas de litige. » Tel a bien été le cas puisque ce délai n'a pas été suffisant pour que ces chartes soient négociées – car tel était bien l'objectif – entre les directions et les représentants des journalistes. Il était en effet impossible de soumettre les acteurs à une obligation de résultat ou de signature ?

On en a vu une illustration dans la presse écrite lorsque la société des journalistes du Journal du dimanche a tenté d'obtenir la rédaction conjointe d'une charte déontologique comportant des dispositions protectrices des journalistes et que la direction du journal a rejeté ces dispositions. La négociation n'a ainsi pas pu aboutir.

S'il est donc impossible d'imposer la conclusion d'une charte déontologique, l'existence, ou non, et le respect d'une telle charte donnent une indication de l'état d'esprit de l'opérateur concerné. Je considère que, tout comme l'existence d'un comité d'éthique efficace et indépendant, ce critère est révélateur de l'état d'esprit d'un opérateur et devra être pris en de compte lorsque viendra le moment pour l'Arcom de renouveler, ou non, son autorisation d'émettre. La responsabilité de l'autorité de régulation va en effet au-delà de la gestion des contentieux, de la réception des plaintes et des sanctions qu'elle prononce à l'encontre de chaînes, même si ces éléments forment un tout avec le renouvellement des autorisations.

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