Intervention de Antoine Villedieu

Séance en hémicycle du jeudi 14 mars 2024 à 9h00
Réduction de l'impact environnemental de l'industrie textile — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAntoine Villedieu :

Il nous est demandé d'examiner un texte qui vise à réduire les conséquences environnementales de l'industrie textile.

Pour rappel, la France a été, dans son histoire, une grande nation de l'industrie textile. Cela remonte à très longtemps, puisque cette industrie s'est par exemple développée dès le XIe siècle dans la ville de Maubeuge. Pourtant indispensable pour subvenir aux premières nécessités de l'homme, elle a été quasiment réduite à néant dans notre pays par les politiques menées par les gouvernements qui se succèdent depuis des décennies, dont le vôtre.

Comme dans bien d'autres secteurs d'activité, cet abandon industriel et cette complaisance à l'endroit des délocalisations ont provoqué de graves conséquences sociales et économiques. De nombreux Français en paient encore le prix. Désormais, c'est bien malheureux, le secteur du textile est très marginal dans notre pays : en 2023, il représentait moins de 3 % du PIB, alors qu'il s'agissait de notre première industrie motrice il y a deux siècles et qu'il était encore la source de 42 % de nos exportations il y a un siècle. En effet, par la volonté d'un fédéralisme européen débridé que vous soutenez et accompagnez, la France parachève la tertiarisation de son économie. Cette mutation se fait au détriment d'une industrie raisonnable.

Nous pourrions nous limiter à la discussion sur la mode express et les nouveaux modes de consommation, mais ce sujet technique est avant tout un révélateur du modèle social et économique dans lequel nous sommes entrés depuis plusieurs décennies. Notre société évolue vite, car elle perçoit bien que le tout-libéral et le consumérisme nous mènent droit dans le mur, sur plusieurs plans : social, économique, sanitaire et, bien entendu, environnemental.

Il nous revient dès maintenant de corriger les erreurs et les fautes commises par les générations précédentes en matière environnementale. Cela nous oblige, car la protection de l'environnement et de l'écosystème dans lequel nous vivons sera, à n'en pas douter, l'enjeu du siècle. Pour l'heure, il est de notre responsabilité de prendre conscience des conséquences de nos actes, de nos décisions et de nos politiques. Il nous revient de préparer une société durable.

Ce texte législatif est certes utile, mais il ne remédiera en rien au problème de fond. Par cette proposition de loi, vous posez la question de la durabilité des produits textiles. Pour ainsi dire, vous posez la question de l'ubérisation de la consommation de textiles sur fond de numérisation de notre société. Bien entendu, il nous faut responsabiliser les entreprises quant à ces nouveaux modes de consommation et sensibiliser les consommateurs, mais sans les culpabiliser, car la baisse drastique du pouvoir d'achat justifie en grande partie le recours des Français à la consommation de ce type de textiles. Or vous êtes coresponsables de cette baisse du pouvoir d'achat, qui empêche des millions de Français de consommer de manière raisonnée, voire de consommer français pour soutenir l'industrie nationale. Lorsque je dis « vous », je désigne le gouvernement d'Emmanuel Macron, car il s'abstient de remettre en cause le modèle économique qui prévaut.

Nous accueillons avec intérêt cette proposition de loi. Néanmoins, ce texte demeurera le symptôme de l'ubérisation de notre économie, qui est aussi la conséquence de votre doctrine économique, de l'aveuglement de la majorité présidentielle dans l'ultralibéralisme, de votre persévérance dans cette erreur politique majeure – ne l'oubliez pas ! « Dieu se rit des hommes qui se plaignent des effets dont ils chérissent les causes. »

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