Intervention de Yvan Ricordeau

Séance en hémicycle du vendredi 5 avril 2024 à 9h00
Plan pour l'emploi des seniors après la réforme des retraites et celle de l'assurance chômage

Yvan Ricordeau, secrétaire général adjoint de la CFDT :

mais le changement de calendrier complique un peu les choses.

Je partage les propos liminaires de Force ouvrière : l'emploi des seniors est un élément essentiel de toute réforme des retraites. Comment modifier les paramètres de la retraite sans aborder la répercussion sur les carrières, notamment sur la dernière partie de la carrière ?

Le décalage de l'âge de départ en retraite à 64 ans met en exergue la question de l'emploi des seniors. La France était l'un des pays européens qui avait le plus de difficultés à gérer ce sujet de façon qualitative lorsque l'âge de la retraite était fixé à 62 ans. Si nous n'agissons pas, alors que cet âge se décale rapidement de 62 à 64 ans, en prenant en considération la situation des salariés en question, les difficultés vont s'accroître.

Nous avons plaidé pour des mesures correctrices tout au long des négociations sociales sur les retraites, mais nous nous sommes heurtés à une opposition des organisations d'employeurs. La difficulté est similaire dans la négociation actuelle et, le moins que l'on puisse dire pas, c'est que nous n'avons pas beaucoup avancé, alors que nous y avons passé beaucoup de séances, et qu'il n'en reste qu'une.

En outre, pour la CFDT, il faut analyser l'emploi des seniors tant en termes de taux d'emploi – fondé sur le nombre de salariés qui restent en emploi jusqu'à leur départ à la retraite – que de qualité d'emploi. Souvent, on aborde le sujet uniquement par le premier biais, mais on ne peut progresser sur une seule jambe, et il faut également prendre en compte les difficultés des salariés en situation de travail.

Trois points nous semblent fondamentaux. D'abord, la France doit collectivement changer de culture en matière d'emploi des seniors car, depuis deux décennies, nous avons pris l'habitude de faire sortir rapidement ces salariés des entreprises.

J'y insiste, le changement est nécessairement collectif : il faut obliger les partenaires sociaux à discuter qualité et taux d'emploi des seniors dans toutes les branches, et dans l'ensemble des entreprises. Les acteurs doivent être les responsables de ce changement. C'est un passage obligé.

Il faut agir sur l'ensemble des préjugés relatifs à l'emploi des seniors. Quand le salarié atteint 50 ans et quelques, on a souvent tendance à lui montrer la porte de sortie. Pourtant, l'intelligence voudrait que l'on s'appuie et que l'on diffuse l'expérience des salariés seniors, notamment en direction des nouveaux embauchés. Il faut se saisir sérieusement de la question intergénérationnelle en entreprise.

Ensuite, pour progresser sur l'emploi des seniors, il faut s'en occuper bien avant que les salariés ne deviennent seniors. C'est pourquoi, dans le cadre de la négociation, la CFDT plaide pour des rendez-vous à 35, 45 et 55 ans, permettant de réaliser le bilan des compétences mais aussi d'évaluer la pénibilité, et l'usure professionnelle.

Enfin, il faut s'appuyer, si besoin, sur les dispositifs de reconversion évoqués par Mme Drevon car l'emploi des seniors est intimement lié à leurs conditions de travail, et donc à l'usure professionnelle. Certains métiers sont très exposés et doivent faire l'objet de mesures particulières. On ne peut demander à ces salariés de continuer comme si de rien n'était jusqu'à 64 ans !

L'emploi des seniors est avant tout lié au travail et à la qualité de l'emploi. Ce n'est pas un problème lié à l'assurance chômage, nous l'avons constaté lors de la phase du diagnostic, préalable à la négociation. Il s'agit donc de faire en sorte que les salariés restent en emploi dans les entreprises, et ne basculent pas en inaptitude, plutôt que de savoir comment recruter des demandeurs d'emploi seniors – question qui se pose infiniment moins que la précédente.

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