Intervention de Sophie Taillé-Polian

Séance en hémicycle du mercredi 10 avril 2024 à 14h00
Adaptation au droit de l'union européenne en matière d'économie de finances de transition écologique de droit pénal de droit social et en matière agricole — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSophie Taillé-Polian :

Ce texte de transposition de réglementations européennes dans le droit français intervient dans un contexte particulièrement mortifère. Le Parlement européen s'apprête, en ce moment même, à adopter le pacte sur la migration et l'asile. Malheureusement, l'objectif de ce pacte n'est pas de proposer un accueil digne et à la hauteur mais au contraire de limiter au maximum l'entrée des exilés malgré les situations dramatiques que ces personnes fuient à travers le monde : guerre, pauvreté, discriminations et oppressions.

L'Europe contrevient là à l'une de ses missions historiques : tirer les leçons de la seconde guerre mondiale pour construire un espace politique tourné vers l'humanisme. À l'opposé des principes ayant inspiré le pacte, nous réaffirmons le projet cher au cœur des écologistes : celui d'une Europe de la paix, protectrice des droits et des libertés. Ce sont ces principes que le droit de l'Union européenne doit conforter !

À chaque texte de transposition du droit européen, nous devons nous interroger : cela confortera-t-il ces principes, l'humanisme, l'État de droit ? Pour déterminer notre vote, nous devons à chaque fois nous poser la question suivante : le texte garantira-t-il aux personnes habitant notre continent plus de droits, plus de libertés, plus de protection ?

Il est difficile d'y répondre car ce type de texte rassemble des dispositions de toutes sortes, très techniques, abordant des sujets divers. Il est délicat d'en tirer une leçon unique.

Comme j'ai pu le dire lors du dernier examen avant la CMP, ce texte comporte des avancées certaines, d'importance : respect des droits de la défense lors de la garde à vue, reconnaissance du congé de paternité comme une période de travail effectif, réinsertion de l'article 5 relatif à la mixité et à la parité dans les instances dirigeantes des sociétés cotées, meilleure gestion des déchets de batteries.

Mais certaines de ses dispositions ne sont à la hauteur ni de l'urgence sociale et écologique, ni du projet initial de l'Europe, si souvent dévoyé, ni des aspirations de notre jeunesse.

Le Gouvernement contredit le droit de l'Union en créant une usine à gaz via un amendement, maintenu en CMP, qui discrimine les travailleurs en raison de leur état de santé. La belle idée ! Et pour faire simple, le Gouvernement refuse d'aligner les droits à congés des salariés en arrêt maladie sur ceux des autres salariés, ce qui conduirait à la situation inégalitaire suivante : les salariés non malades auraient cinq semaines de congés payés, les salariés malades n'en auraient que quatre. Comme si on se reposait lorsqu'on est malade !

La France cherche ici à contourner le droit de l'Union au détriment des salariés malades. La protection des plus faibles n'est évidemment pas dans l'ADN de ce gouvernement, qui poursuit sa politique de stigmatisation des personnes en difficulté.

Un deuxième point est extrêmement problématique : certaines dispositions ne répondent pas à nos ambitions écologistes, notamment celles qui allouent des quotas gratuits d'émissions de gaz à effet de serre. Ainsi, les plus grands pollueurs pourront-ils continuer pendant des années à réchauffer notre planète sans avoir à en payer le prix. C'est là la marque de cette Europe libérale qui ne répond pas aux enjeux écologiques que nous devrions pourtant affronter. Pour une Europe respectueuse de notre planète et des êtres humains et vivants qui essaient d'y vivre dignement, nous exigeons l'arrêt d'un marché du carbone avec des quotas gratuits.

Pour ces deux raisons principales, le groupe écologiste s'abstiendra sur ce texte. .

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