Intervention de Grégoire de Fournas

Séance en hémicycle du mercredi 2 novembre 2022 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2023 — Agriculture alimentation forêt et affaires rurales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGrégoire de Fournas :

L'agriculture française est un fleuron national que le monde entier nous envie. Elle aura toujours occupé une place particulière dans le cœur des Français. Gardienne de nos paysages et de la vie de nos villages, fière d'un savoir-faire reconnu, riche de la diversité de ses terroirs comme de son inépuisable capacité à se moderniser dans le respect de ses identités et de ses traditions, l'agriculture française est plus que jamais un secteur stratégique au service de notre souveraineté alimentaire ô combien indispensable dans le monde instable où nous vivons.

Pourtant dans nos campagnes, la colère continue de monter. Lassés par un agribashing injuste, par l'avalanche de normes et par la complexité administrative, écrasés par les charges, la concurrence déloyale et la guerre des prix, nos agriculteurs n'en peuvent plus. Votre politique, c'est celle qui, complice de l'Union européenne, a mis notre agriculture en concurrence avec la terre entière et surtout avec des pays qui ne respectent ni les normes sociales ni les normes environnementales imposées à nos agriculteurs.

Vous êtes les meilleurs gardiens de ces aberrations idéologiques mortifères. Et ce n'est que quand les crises surgissent que vous acceptez de vous remettre un peu en question. Ainsi, il aura fallu que notre pays soit frappé par la crise du covid pour que vous réalisiez qu'il ne savait plus fabriquer de masques, et c'est la guerre en Ukraine qui vous a fait prendre conscience de l'indispensable souveraineté alimentaire, un principe défendu depuis toujours par Marine Le Pen et le Rassemblement national. Le malheur, c'est qu'on ne résout pas les problèmes avec ceux qui en sont la cause ! Depuis votre arrivée au ministère de l'agriculture, la souveraineté alimentaire sera restée à l'état de slogans, monsieur le ministre, impuissant que vous êtes à engager des réformes structurelles pour changer les règles du libre-échange, impuissant à tenir tête à Bruxelles pour défendre nos agriculteurs, comme en témoigne l'enfumage avec la loi Égalim 2, restée partiellement inappliquée parce que contraire aux règles européennes, impuissant enfin à protéger nos agriculteurs des contraintes environnementales délirantes imposées par la stratégie européenne dite « de la ferme à la fourchette ».

Monsieur le ministre, la vérité c'est qu'il n'y a pas de souveraineté alimentaire sans souveraineté nationale. Dans un tweet du 26 septembre dernier, vous tentiez de vous rassurer soulignant que l'augmentation de 20 % du budget consacré à notre agriculture est « le signe de notre engagement et de notre détermination à agir au profit de nos agriculteurs et pour notre souveraineté alimentaire ». La marge de manœuvre famélique du ministre de l'agriculture d'une grande puissance jadis souveraine, la voici : amender un budget dont l'augmentation est déjà annulée par l'inflation et le coût des aléas climatiques.

Vous ne changerez donc rien au dogme du libre-échange qui consiste à importer des produits alimentaires de piètre qualité ne respectant pas les mêmes normes environnementales et sociales que les nôtres. Vous faites subir à nos agriculteurs une course inégale et injuste et vous leur demandez dans le même temps d'atteindre un objectif intenable tout en continuant de les entraver avec des normes toujours plus exigeantes.

Entendez les agriculteurs hollandais qui se sont révoltés contre ce que vous imposerez demain aux agriculteurs français par l'injonction européenne de la stratégie « De la ferme à la fourchette », stratégie qui continuera de saccager notre agriculture et pourrait augmenter de 20 % les importations depuis les pays non-membres de l'Union européenne. Dans ce budget, celle-ci trouve une traduction à travers la fin du recours au glyphosate en 2023 et la division quasiment par deux de l'utilisation des produits phytosanitaires d'ici à 2025 sans solutions alternatives viables. Cette stratégie folle est radicalement incompatible avec la souveraineté alimentaire et va entraîner un effondrement de nos productions agricoles.

Pour sauver notre agriculture et garantir notre souveraineté alimentaire, voici ce qu'il faut impérativement faire : mettre fin aux traités de libre-échange ; favoriser la production nationale par le localisme ; garantir à nos agriculteurs les outils d'une agriculture moderne et compétitive ; favoriser le modèle familial, garant d'une agriculture durable ; cesser de matraquer nos agriculteurs avec les normes intenables d'une bureaucratie étouffante ; mettre fin à l'artificialisation des terres agricoles, menacées par le développement anarchique des métropoles et des énergies renouvelables – je pense notamment à l'agrivoltaïsme, dernier délire coûteux et inefficace de votre politique énergétique erratique.

Monsieur le ministre, vous avez changé de stratégie de communication mais vous n'avez rien changé à votre politique. Pire que cela, vous l'avez aggravée. Ne comptez pas sur nous pour vous soutenir dans la destruction méthodique de l'agriculture française.

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