Intervention de Éric Girardin

Séance en hémicycle du mercredi 2 novembre 2022 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2023 — Agriculture alimentation forêt et affaires rurales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Girardin :

La tradition et l'innovation : ces deux mots constituent l'essence même de l'agriculture française. La France est le premier producteur agricole d'Europe. L'agriculture fait partie intégrante de notre histoire et de notre patrimoine. L'action des femmes et des hommes qui travaillent la terre de génération en génération façonne nos territoires, entretient le lien avec la nature et assure à nos concitoyens une alimentation saine, équilibrée et durable.

Chaque jour, les exploitants agricoles et leurs salariés travaillent pour nourrir les Français, les Européens et le monde entier. Ainsi, notre production agricole, qui s'adapte, se transforme et se modernise, contribue de manière positive à la balance commerciale française, même si sa part s'érode d'année en année. La crise sanitaire puis la guerre en Ukraine ont mis en avant le rôle essentiel des agriculteurs dans notre société et la nécessité impérieuse de maintenir la souveraineté de l'appareil productif alimentaire français.

Le budget qui nous est présenté aujourd'hui sert de moteur à la trajectoire agricole que nous prônons. Il sera conforté en 2023 par la nouvelle loi d'orientation agricole voulue par le Président de la République.

Dans ce contexte, alors que les aléas climatiques pèsent de plus en plus fréquemment sur l'activité agricole, je tiens à souligner au nom du groupe Renaissance les moyens budgétaires que nous employons à soutenir le revenu de nos agriculteurs. Je rappelle également l'augmentation considérable, de l'ordre de 30 %, des crédits de la mission "Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales" , due notamment à la mise en place de l'assurance récolte pour prévenir les risques climatiques, au passage de la TVA à 5,5 % pour les produits alimentaires destinés à l'élevage ou encore à la pérennisation du dispositif TODE visant à alléger le coût du travail agricole et à faciliter l'emploi des travailleurs saisonniers dans ce secteur.

Je tiens aussi à saluer le travail de fond mené par le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire pour proposer un budget qui consacre suffisamment de moyens à la préparation de l'avenir par l'innovation et la formation, grâce aux crédits alloués à l'enseignement agricole, visant tant les jeunes que les adultes.

Je souhaitais enfin remercier M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, dont le rapport fournit un éclairage précieux quant aux services de remplacement, lesquels constituent des outils particulièrement intéressants et pertinents, mais encore trop peu connus au sein même du monde agricole. Votre rapport ouvre la voie vers un important travail de développement et d'accompagnement de ce dispositif sur l'ensemble du territoire national. Il pourrait même permettre de faciliter la transmission des exploitations, nécessaire au maintien de notre souveraineté agricole, grâce à son rôle en matière d'anticipation.

Je tiens à appeler votre attention sur la question de la transmission des outils de production. En effet, la pyramide des âges du monde agricole nous enseigne que plus d'un agriculteur sur deux prendra sa retraite au cours des dix prochaines années. Or un tiers des exploitations ne sont déjà plus transmises, faute de repreneurs potentiels ; et, parmi celles qui le sont, 20 % vont à des repreneurs extérieurs à la famille, qui ne sont pas toujours issus du monde agricole.

Or, parallèlement, les agriculteurs doivent investir pour accomplir les transitions climatique, environnementale, technologique et numérique tout en faisant face à l'importante pression fiscale qui, en matière de transmission, pèse sur les exploitants et sur leurs repreneurs. Les valeurs vénales du foncier d'exploitation ne permettent plus de financer le coût des droits de succession, à moins que les entreprises agricoles ne s'endettent durablement au détriment de leur capacité d'investissement et de leur rentabilité. Ce phénomène contribue d'ailleurs au mal-être du monde rural, notamment des agriculteurs et des viticulteurs.

C'est pourquoi on constate une forte concentration du secteur, une disparition progressive des exploitations familiales et une multiplication des acquisitions d'exploitations agricoles et viticoles par des investisseurs étrangers ou institutionnels, qui ne sont pas assujettis à des droits de mutation aussi contraignants.

À l'heure où le Président de la République fait de la transmission des exploitations et de l'installation de jeunes agriculteurs un axe majeur de la future loi d'orientation agricole, il nous revient d'harmoniser les dispositifs juridiques et fiscaux existants pour maîtriser en amont les facteurs de production que sont les actifs immobilisés d'exploitation et le foncier. C'est la condition sine qua non pour parler de souveraineté et d'indépendance stratégique.

Prenant acte de ce constat ainsi que du rapport que j'ai remis au Gouvernement et dont l'une des mesures a été reprise, le projet de loi de finances pour 2023, grâce à un amendement déposé par nos collègues du MODEM, contient désormais le rehaussement de 300 000 euros à 500 000 euros du seuil d'abattement pour la transmission du foncier détenu dans le cadre d'un bail rural à long terme. Mais il ne s'agit que d'une étape : nous devons continuer d'accompagner le monde agricole, comme nous le faisons depuis cinq ans, par d'importantes réformes visant à valoriser la profession, le travail des agriculteurs, leur formation, leur installation et la transmission de leurs exploitations.

Se fondant sur l'ensemble de ces éléments, le groupe Renaissance soutiendra l'avis budgétaire tel qu'il a été présenté et continuera de soutenir l'agriculture française pour qu'elle soit libre, pérenne et souveraine.

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