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David Guiraud
Question N° 1193 au Ministère de l’intérieur


Question soumise le 13 septembre 2022

M. David Guiraud alerte Mme la ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur les conséquences graves qu'entraîneraient le rejet de la demande de visa humanitaire du journaliste syrien M. Hussam Hammoud sur sa vie, celle de sa famille ainsi que sur le renseignement français et la lutte contre les réseaux terroristes. Selon les informations révélées par le journal Médiapart, M. Hussam Hammoud s'est engagé au moment de la révolution contre Bachar Al-Assad en 2011 et a dénoncé au péril de sa vie les repressions opérées par le régime syrien, allant des détentions arbitraires aux exécutions sommaires des opposants politiques. Il a ainsi contribué à faire connaître aux différents médias internationaux la réalité des évènements vécus par la population syrienne, parmi lesquels Médiapart. Il a ainsi publié dans ce journal un certain nombre d'articles d'intérêt général. M. Hussam Hammoud a consacré une partie importante de sa vie à lutter contre l'État islamique. Il a fourni aux journalistes français et à l'État des informations capitales, notamment pour la sécurité collective des Français. En témoignent les propos de la journaliste, Mme Martelet, qui l'a rencontré en mai 2019 : - « Hussam s'est investi avec moi et d'autres journalistes à fond dans des enquêtes journalistiques pour documenter toujours et encore les crimes de Daech, leurs agissements depuis la chute de Baghouz et ce sans aucune protection ». - « C'est grâce à lui que je localise l'appartement de Jean-Michel Clain et surtout le bureau des étrangers où nous découvrons des documents de Daech. Notamment des cartes d'identités éditées par l'État islamique mais aussi un livre de compte comprenant des centaines de noms. Hussam me demande de les ramener en France (...) Les documents sont remis au PNAT [parquet national antiterroriste], lorsque je suis entendue pour expliquer comment ces preuves arrivent à Paris je mentionne Hussam à plusieurs reprises. Les agents qui m'entendent me disent : « Il doit être entendu aussi, son travail est très important » ». En octobre 2019, M. Hammoud, sa femme, Mme Fairouz Hammoud, et leurs deux enfants ont été contraint de fuir en urgence la ville de Raqqa en Syrie pour rejoindre la ville de Gaziantep en Turquie, en raison de menaces proférées par différents groupes armés lorsque la coalition internationale s'est retirée de la zone. Enquêtant actuellement sur les cellules de financement de l'État islamique présentes en Turquie, il reçoit depuis plusieurs semaines des menaces de mort qui ont motivé sa requête de visa humanitaire afin de demander l'asile en France avec sa famille. Les conditions pour accueillir M. Hussam et sa famille en France sont optimales : ils auraient un logement, une école pour les enfants et la famille aurait débuté l'apprentissage du français. En dépit de la connaissance de ces éléments et des risques encourus par cet homme qui a risqué sa vie et celle de ses proches pour renseigner les autorités françaises, ces mêmes autorités lui ont adressé ce lundi 5 septembre 2022 un refus incompréhensible. Aucune explication ne lui a été fournie, alors même qu'il a détaillé longuement aux fonctionnaires de l'ambassade de France d'Ankara l'ayant reçu en avril et juin 2022 tous les éléments mentionnés ci-dessus. Il s'agit d'une injustice profonde, doublée d'une ingratitude institutionnelle insupportable envers un homme qui a risqué sa vie pour la sécurité des Français et leur accès à une information de qualité. Et dans le futur, quel homme accepterait de livrer de si précieuses informations à la France si elle envoie le message qu'elle peut l'abandonner à tout moment ? Il lui demande donc les actions qu'elle compte mettre en œuvre afin de faire la lumière sur les motivations de cette décision ; il l'appelle à agir pour garantir l'asile à cet homme et sa famille.

Réponse émise le 22 novembre 2022

Le visa pour asile est un dispositif de protection unique en Europe. Il est délivré à titre exceptionnel par les postes consulaires français pour répondre à des besoins particulièrement urgents et manifestes de protection, la convention de Genève ne prévoyant pas de droit à demander l'asile depuis un pays tiers. Afin de prioriser la délivrance de tels visas pour répondre aux besoins de protection les plus urgents, ce dispositif dérogatoire répond à des exigences d'objectivation de la menace actuelle et personnelle à laquelle sont exposés les intéressés, non seulement dans leur pays d'origine mais également dans le pays depuis lequel ils sollicitent ce visa. Le ministère de l'intérieur et des outre-mer s'assure par ailleurs de la cohérence du récit et vérifie que la personne ne représente pas une menace pour l'ordre public en France. Il appartient au demandeur d'établir qu'il remplit ces conditions. Dans le cas de Monsieur Hussam Hammoud, les deux entretiens menés initialement par le poste consulaire en Turquie n'avaient pas permis d'apporter les informations pertinentes permettant de s'assurer que l'ensemble de ces conditions étaient réunies. Les nouvelles informations que l'intéressé a pu apporter ensuite aux autorités françaises, dans le cadre d'un nouvel entretien organisé le 6 octobre 2022, ont néanmoins permis de vérifier que tel était bien le cas. Par conséquent, un visa lui a été délivré le 14 octobre en vue de lui permettre d'accéder au territoire français et d'y déposer sa demande d'asile, qui sera ensuite examinée par l'OFPRA.

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