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Christelle Petex
Question N° 12658 au Ministère de la transition écologique


Question soumise le 7 novembre 2023

Mme Christelle Petex-Levet appelle l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur la mise en application de la responsabilité élargie des producteurs pour les produits et matériaux de construction du secteur du bâtiment (REP PMCB). En place depuis le 1er mai 2023, ce dispositif est à l'origine de graves problèmes dont les entreprises, principalement du secteur du bois, s'inquiètent de plus en plus. Depuis des années, le Gouvernement souhaite une planification écologique et promeut une progression de 50 % des volumes de bois pour le bâtiment à l'horizon 2035 et la valorisation des forêts françaises. Dans les faits, la mise en œuvre de la filière REP PMCB créée une importante distorsion de concurrence entre matériaux de construction, au détriment du bois et biosourcé et de surcroît avec les produits importés. Les conséquences néfastes de ce dispositif peuvent se résumer en quatre points. Le principe de collecte de l'écocontribution : de grands acteurs de la distribution ont semble-t-il d'ores et déjà adopté des pratiques inacceptables, voire illégales, puisque certains refusent désormais de payer cette écocontribution et demandent de la déduire des prix de vente. Par ailleurs, le montant de l'écocontribution est sur une trajectoire inflationniste intense qui effraie particulièrement les entreprises du secteur. Le flux d'importation exonérés : depuis la mise en place de ce dispositif, il semble que les importations, notamment de bois sciés en provenance de l'Europe, passent au travers de cette écocontribution ce qui crée de forte distorsion de concurrence. Il n'y a pas d'équité de traitement entre les différents matériaux : à titre d'exemple, l'écocontribution pour l'acier s'élève à 0,008 euro la tonne alors que celle du bois grimpe à 8 euros la tonne pour 2023. Plusieurs différences infondées entre les différents matériaux, tels que cet exemple, sont notables et envoient un signal incohérent avec les objectifs de décarbonatation du secteur du bâtiment et la trajectoire climatique recherchée. La gouvernance des éco-organismes : les premiers conseils d'administration des deux éco-organismes créés dans le cadre du dispositif ont eu lieu en septembre 2023 et révèlent une gouvernance qui semble plutôt opaque et qui ne met pas en confiance les entreprises du secteur concernées par la REP PMCB. Au vu de l'ensemble de ces éléments, Mme la députée se demande si le Gouvernement compte réexaminer la REP PMCB afin de lui apporter plus de cohérence avec les objectifs de décarbonation et également de restaurer des conditions loyales sur le marché ? Il en va de l'apaisement et la survie de l'ensemble de la filière qui se sent d'ores et déjà prise en étaux et s'essouffle après seulement quelques mois de mise en œuvre du dispositif. Elle souhaite connaître sa position sur le sujet.

Réponse émise le 5 décembre 2023

La loi anti-gaspillage de février 2020 a créé la filière à responsabilité élargie des producteurs de produits et matériaux de construction du bâtiment. En effet, compte tenu de l'absence d'exutoires pour les déchets de chantiers des professionnels du bâtiment, et de la multiplication des dépôts sauvages de déchets, qui avait conduit au tragique décès du maire de Signes dans le Var le 5 août 2019, le Parlement avait décidé de soumettre la collecte, le tri et la valorisation des déchets du bâtiment à la responsabilité élargie des producteurs. S'agissant d'une filière comportant de très nombreux acteurs, la définition du cahier des charges de la filière, et l'agrément des 4 éco-organismes qui à la fois collectent les éco-contributions des entreprises metteurs en marché des produits et matériaux de construction et organisent la collecte et soutiennent les collectivités locales participant à la collecte de ces déchets pour les particuliers ou les professionnels, a été pleinement effective au début de l'année 2023. Si dans un premier temps, les éco-organismes avaient défini en septembre 2022 le montant des éco-contributions qu'ils appellent, en tenant compte de la trajectoire de montée en puissance des soutiens à accorder aux nouvelles installations de collecte et de tri à mettre en œuvre, plusieurs d'entre eux ont finalement décidé de revoir à la baisse ce montant fin 2022, remettant en cause leurs engagements de déployer des points de collecte des déchets triés comme ils s'y étaient engagés. De fait, alors que les points de collecte et les actions à mener en 2024 nécessitent des moyens supplémentaires, ces éco-organismes n'ont d'autre choix que d'augmenter le montant de l'éco-contribution à appeler pour 2024. C'est effectivement une augmentation d'éco-contribution plus importante qui est demandée à l'ensemble des producteurs de produits et matériaux de construction, sachant que la collecte et le recyclage du bois est l'un des postes les plus coûteux aujourd'hui dans cette filière. Elle a conduit au moins un des éco-organismes à augmenter l'éco-contribution des acteurs de la filière bois, tout en prévoyant, comme la loi le lui permet, de répartir cette augmentation de contribution sur les producteurs d'autres matériaux, comme l'acier ou le plâtre. La décision de faire contribuer les producteurs de matériaux très en amont de la filière, qu'ils soient produits en France ou importés, au lieu de faire contribuer des producteurs de produits finis, par exemple les charpentiers qui livrent des éléments préfabriqués sur les chantiers, conduit en termes d'affichage à une augmentation potentielle du prix des produits plus importante. Ce choix a été motivé par la très forte opposition des professionnels du bâtiment d'eux-mêmes de contribuer au financement de la filière, ce qui est regrettable car ils en sont avant tout les principaux bénéficiaires en mettant à leur disposition toute une infrastructure qui manque cruellement aujourd'hui. Les éco-organismes ont le devoir vis-à-vis de leurs adhérents, de rechercher et de relancer les entreprises non-contributrices. Or, à ce stade, aucun effort n'a été entrepris pour identifier ces non contributeurs, contrairement au fonctionnement normal de ces éco-organismes. De fait, s'il y a des entreprises non-contributrices, il est difficile pour les services de contrôle de l'Etat de les poursuivre. Des discussions sont en cours avec les metteurs en marché et les éco-organismes, mais les solutions proposées à ce stade par ces derniers ne sont pas suffisantes pour permettre une juste sanction des non contributeurs. Il importe avant tout que la filière à responsabilité élargie des producteurs de la filière des produits et matériaux de construction monte en puissance selon le calendrier prévu, afin de pleinement lutter contre les dépôts sauvages, et que l'ensemble des acteurs concernés se mobilisent pour atteindre cet objectif.

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