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Marie Pochon
Question N° 12726 au Ministère du ministère de la culture


Question soumise le 7 novembre 2023

Mme Marie Pochon interroge Mme la ministre de la culture sur la prise en compte des multiples langues régionales qui font la richesse de la langue française dans le cadre de l'inauguration de la « Cité internationale de la langue française ». Ce lundi 30 octobre 2023, M. le Président de la République Emmanuel Macron a inauguré la nouvelle Cité Internationale de la langue française, située dans le château de Villers-Cotterêts, dans l'Aisne, dans les Hauts-de-France, qui ouvrira ses portes le 1er novembre 2023 au grand public. Le château de Villers-Cotterêts a été choisi car il est le lieu où le roi François Ier a signé en 1539 l'ordonnance qui a instauré le français comme la langue des actes judiciaires et administratifs à la place du latin. La rénovation du château aux fins de la création de cette Cité a été confiée au Centre des monuments nationaux (CMN) et a coûté 211 millions d'euros d'investissements publics, dont 100 millions d'euros issus du Plan de relance. Au delà du coût de ce projet, dédié, comme l'a annoncé le Président de la République ce jour, à une langue qu'il invite à ne pas adapter notamment aux enjeux d'égalité femmes-hommes, pour « ne pas céder aux airs du temps », la Cité internationale de la langue française ignore totalement la présence et la vivacité des langues régionales. Elles sont pourtant partie prenante du patrimoine culturel commun du pays et leur reconnaissance serait de nature à favoriser la cohésion territoriale et l'attachement aux territoires et à leur richesse. En 2013, le Conseil de l'Europe encourageait les autorités françaises à mettre en œuvre les dispositions prévues par la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires (CELRM) du 7 mai 1999, signée mais non ratifiée par la France, qui vise à protéger les langues régionales ou minoritaires historiques en Europe. Celle-ci établit des critères qui concernent sept langues régionales françaises que sont le basque, le breton, le catalan, le corse, le néerlandais (flamand occidental et néerlandais standard), l'allemand (dialectes de l'allemand et allemand standard, langue régionale d'Alsace-Moselle). Il est temps que la nation française s'enorgueillisse de la richesse de ses langues, de ses patois, de l'histoire de ses régions, qui nourrissent la langue commune. À ce titre, elle souhaite connaître la position du Gouvernement quant à la ratification de la Charte européenne des langues régionales et minoritaires et lui demande de préciser la manière dont pourra être prise en compte la diversité des langues régionales ou minoritaires de la France au travers de la Cité internationale de la langue française.

Réponse émise le 26 mars 2024

Le ministère de la culture est particulièrement attaché à la défense et à la promotion des langues régionales en France. Il conduit pour cela, à travers sa délégation générale à la langue française et aux langues de France, une action concrète et déterminée pour valoriser les langues de France et accompagner leur promotion dans un dialogue avec les collectivités locales et avec les élus. La Cité internationale de la langue française de Villers-Cotterêts, inaugurée par le Président de la République le 30 octobre dernier, accorde une place importante aux langues régionales : une salle entière du parcours permanent de visite leur est consacrée. La diversité linguistique française y est parfaitement illustrée à travers des cartels explicatifs, plusieurs cartes et un dispositif sonore qui permet de faire écouter des extraits de chaque langue régionale. Ces informations ne pourront qu'aiguiser la curiosité du visiteur soucieux de mieux connaître les langues régionales. La France n'a jamais été un pays monolingue et plusieurs langues régionales ont joué un rôle dans la formation du français, notamment par l'apport de vocabulaire aujourd'hui pleinement intégré à la langue française (par exemple le breton nous a donné « bijou », « baragouiner » ou « goéland »). Pour cette raison, la Cité ne pouvait pas faire l'impasse d'une présentation des langues régionales, y compris celles parlées dans les Outre-mer, dans son parcours permanent. Lors de l'inauguration de la Cité, le Président de la République a lui-même affirmé : « Chacun a le droit de connaître, parler, transmettre sa ou ses langues et c'est un droit non négociable. Toutes les langues sont égales du point de vue de la dignité. C'est pourquoi je veux que nos langues régionales soient encore mieux enseignées et préservées, qu'elles trouvent leur place dans l'espace public en un juste équilibre entre leur rôle d'ancrage de langue régionale et le rôle essentiel de cohésion de la langue nationale. Il y aura toujours de multiples langues dans la République et une langue de la République ». S'agissant de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires du Conseil de l'Europe, la France l'a signée en 1999, mais jamais ratifiée. En effet, le Conseil constitutionnel avait alors déclaré (décision du 15/06/1999), en s'appuyant sur l'article 2 de la Constitution française (« la langue de la République est le français »), que la Charte comportait des clauses contraires à la Constitution et qu'en adhérant à la Charte, la France méconnaîtrait les principes constitutionnels d'indivisibilité de la République, d'égalité devant la loi et d'unicité du peuple français. Cette position a été confirmée par le Conseil d'État en 2013, lequel a en outre émis un avis négatif au projet de loi constitutionnelle autorisant la ratification de la Charte (avis consultatif du 31/07/2015 relatif à la ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires). Ce projet de loi constitutionnelle a également été rejeté par le Sénat le 27 octobre 2015. Pour autant, en signant la Charte, la France a retenu 39 des 98 engagements proposés, au-delà du minimum de 35 que les États parties devaient souscrire. Ces 39 engagements concernent l'enseignement, la culture et les médias, la vie sociale, économique et les services publics, et sont conformes à la Constitution. Il faut le souligner : les politiques publiques en faveur des langues régionales connaissent une dynamique inédite, tant par les évolutions législatives récentes que par l'installation du Conseil national des langues et cultures régionales en mars 2022. Les États généraux du multilinguisme dans les Outre-mer, organisés en octobre 2021 à La Réunion, ont également rappelé les enjeux spécifiques propres aux Outre-mer. Le ministère de la culture entend poursuivre une politique volontariste en faveur de la diversité linguistique de la France.

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