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Julien Odoul
Question N° 14374 au Ministère du ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire


Question soumise le 23 janvier 2024

M. Julien Odoul appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur la situation des apiculteurs de France, qui subissent une baisse importante de leurs ventes en raison d'une importation massive de miel en provenance de pays hors Union européenne. En effet, depuis l'automne dernier, en plus de l'envolée des prix de l'énergie, les exploitations apicoles sont confrontées à d'importantes difficultés pour écouler leurs productions de miel. En 2022, la quantité de miel produite en France était de 31 387 tonnes, quand les importations de miel représentaient 35 500 tonnes. Selon une enquête menée par la FFAP (syndicat national regroupant des apiculteurs professionnels) en janvier 2023, 75 % des répondants déploraient une baisse de leurs ventes et dans plus d'un tiers des cas, la survie de l'exploitation était remise en question à court terme. Pour cause, de nombreux négociants, dont le principal est une entreprise qui regroupe 60 % du marché français, préfèrent acheter du miel d'importation en provenance de la Chine, de l'Argentine ou du Mexique. Selon le syndicat des apiculteurs, cette crise est donc avant tout une question de prix puisque le miel d'importation polyfloral coûte à peu près 2 à 3 euros le kilo hors taxe contre 7 à 9 euros le kilo pour le miel polyfloral produit en France et en moyenne 5 euros pour le miel monofloral. Outre l'aspect financier, de nombreux cas de « miels frauduleux » viennent mettre à mal la filière apicole. En 2021, la Commission européenne a mis en place une action coordonnée intitulée from the hives (« de la ruche » en français), pour déterminer la quantité des miels frelatés dans les importations. Ainsi, l'utilisation de sirops dans le miel pour baisser les prix de production (sirops de sucre à base de riz, de blé ou de betterave), l'utilisation d'additifs et de colorants pour imiter des miels spécifiques ou le fait de masquer la véritable origine géographique du miel en falsifiant les informations de traçabilité constituent les principales fraudes que les pays exportateurs de miel en France utilisent. Les conclusions du rapport effectué par la Commission européenne sont alarmantes, puisque sur les 123 exportateurs contrôlés, 70 ont été repérés comme ayant livré du miel suspect d'adultération avec des édulcorants. Sur les 96 importateurs contrôlés, les deux tiers avaient importé au moins un lot frauduleux. Au total 46 % des miels importés sont suspectés d'être frauduleux, contre seulement 14 % il y a six ans. Plus grave encore, la Chine, qui est le premier pays exportateur de miel en France, est aussi l'un des premiers pays producteurs de miels frauduleux (74 % des échantillons sont suspects) après la Turquie (93 % des échantillons). Aussi, l'origine florale du miel pose également problème, puisqu'un miel provenant de n'importe quelle fleur est aussi bien moins cher qu'un miel à base d'acacia, d'oranger ou de châtaignier. Un pot peut en effet mélanger jusqu'à cinq miels différents. On peut dès lors retrouver l'appellation « miel d'acacia » sur une étiquette alors que ce miel comporte une quantité moindre d'acacia. Enfin, l'aspect géographique du miel est aussi à prendre en compte, puisque seuls sept pays de l'Union européenne, dont la France, imposent sur leur étiquette d'indiquer la provenance du miel. On retrouve ainsi sur le marché français des produits conditionnés à l'étranger qui n'ont pas d'obligation en matière d'étiquetage. Afin de soutenir les apiculteurs français et d'assurer la production de miel français, il lui demande s'il compte rendre sa souveraineté à la France en matière apicole, mettre en œuvre des mesures pour limiter drastiquement les importations de miel hors Union européenne, baisser les coûts de production et de fabrication, et rendre obligatoire les pourcentages de chaque miel contenu dans un seul pot ainsi que son origine géographique.

Réponse émise le 12 mars 2024

La filière apicole française est confrontée à diverses difficultés, relatives à la commercialisation et à l'accumulation des stocks de miel. En outre, de nombreux apiculteurs subissent des pertes de production liées à la recrudescence des aléas climatiques. Dans ce contexte, le Gouvernement a annoncé, le 23 février 2024, la mise en place d'un soutien d'urgence exceptionnel doté d'une enveloppe de 5 millions d'euros (M€) prenant la forme d'avances de trésorerie, d'aides conjoncturelles, ainsi que de prises en charge des cotisations de mutualité sociale agricole. Ce dispositif, dont les conditions d'accès seront définies en concertation avec les acteurs de la filière apicole, a pour objectif de soutenir les apiculteurs professionnels connaissant des difficultés de trésorerie. Par ailleurs, l'État poursuivra son accompagnement de la filière au moyen d'un plan d'actions structuré autour de 4 axes. Tout d'abord, le Gouvernement souhaite améliorer la réglementation relative à l'étiquetage de l'origine des miels et renforcer les contrôles sur l'authenticité et la qualité des produits, afin de lutter contre les fraudes et améliorer la transparence de l'information fournie au consommateur. Cet axe d'action s'inscrit dans le cadre de l'accord entre le Conseil de l'Union européenne (UE) et le Parlement européen, activement défendu par la France, visant à rendre obligatoire une indication claire du pays producteur du miel par ordre pondéral décroissant, et non plus seulement s'il provient ou non de l'UE, comme c'est le cas pour les mélanges de miels. De plus, l'État mobilisera une enveloppe complémentaire de 500 000 euros (€), afin de soutenir des actions de communication et de promotion des produits de la ruche. Des travaux seront également menés pour améliorer la connaissance du marché du miel et encourager les partenariats entre producteurs et conditionneurs, en donnant à la filière les outils d'un pilotage renforcé. Enfin, le Gouvernement veillera à conforter la résilience de la filière apicole, par un renforcement du soutien apporté aux actions sanitaires à hauteur de 200 000 €, pour un montant total de 1,8 M€. Dans ce cadre, des travaux seront engagés pour traiter les conséquences de la prolifération du frelon asiatique. Ainsi, le ministre chargé de l'agriculture demeure pleinement engagé aux côtés de la filière apicole, dont il mesure l'excellence et l'engagement des acteurs au quotidien.

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