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Andrée Taurinya
Question N° 1900 au Ministère de l’europe


Question soumise le 4 octobre 2022

Mme Andrée Taurinya alerte Mme la ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur le sort des mères et leurs enfants français détenus dans les camps de prisonniers djihadistes au nord-est de la Syrie à la lumière du récent arrêt de grande chambre rendue par la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH, H.F. et autres c. France, requêtes n° 24384/19 et n° 44234/20). Dans sa formation la plus solennelle, la CEDH a rendu un arrêt condamnant la France pour violation de l'article 3 § 2 du Protocole n° 4, c'est-à-dire du droit d'entrer sur le territoire de l'État dont on est le ressortissant. Depuis de longues années déjà, ces femmes et ces enfants vivent dans des conditions déplorables, sous des tentes, souffrant de la chaleur en été et du froid en hiver. Sans protection, ils n'ont pas accès à l'éducation et ne peuvent bénéficier des soins qui leur sont pourtant nécessaires. Les autorités kurdes ont exprimé leur volonté de remettre ces personnes entre les mains des autorités françaises, ces dernières ayant jusqu'ici accepté d'engager des rapatriements au cas par cas. Le 5 juillet 2022, la France a rapatrié 35 enfants et 16 mères. Selon le « collectif des familles unies », il en reste encore plus de 150, alors même que la Belgique, la Finlande et le Danemark ont déjà décidé de rapatrier l'ensemble de leurs ressortissants : un comble pour le pays des droits de l'homme. Pour paraphraser Boris Cyrulnik et Serge Hefez : « Nous attendons ceux qui restent. Et sommes prêts depuis trop longtemps déjà ». La France se retrouve condamnée devant la justice européenne qui lui enjoint de reprendre l'examen des demandes des requérants en l'entourant de garanties appropriées contre l'arbitraire. De quelle manière les autorités françaises vont-elles se mettre en conformité avec le droit européen des droits de l'homme ? Les mères sous mandat d'arrêt international ont le droit être jugées et incarcérées sur le sol français, peu importe ce qu'elles ont fait. Leurs petits doivent pouvoir rencontrer leur famille d'origine afin de se reconstruire. Elle lui demande combien de temps encore la France va laisser ces enfants de la République vivre un tel supplice.

Réponse émise le 13 décembre 2022

Tous les services concernés de l'Etat sont mobilisés pour suivre les ressortissants français qui se trouvent actuellement détenus ou retenus dans le Nord-Est syrien. Les personnes adultes, hommes et femmes, ont pris la décision de rejoindre Daech et de se battre dans une zone de guerre. Il convient, dans ce contexte, d'assurer la lutte contre l'impunité des crimes commis par les combattants de Daech qui doivent être jugés au plus près des lieux où ils ont perpétré leurs crimes. C'est à la fois une question de sécurité et un devoir de justice à l'égard des victimes. Cette position est étroitement concertée avec ceux de nos partenaires européens qui sont également concernés. La France s'est toujours efforcée de prendre en compte l'intérêt supérieur des enfants qui, à la différence de leurs parents, n'ont pas choisi de rejoindre l'Irak et la Syrie. Ils n'ont pas choisi de rejoindre la cause d'une organisation terroriste. C'est la raison pour laquelle la priorité de ce gouvernement est de ramener ces enfants. Les opérations de rapatriement sont cependant extrêmement difficiles à mener, car il s'agit d'une zone de guerre, encore très dangereuse, sur laquelle l'Etat français n'exerce aucun contrôle effectif. Des opérations sont organisées dès que cela est possible. Depuis 2019, l'Etat a procédé à des opérations de rapatriement qui ont permis le retour, à ce jour, de 112 enfants français (et 2 néerlandais). La dernière opération a eu lieu le 20 octobre 2022. Lorsque le rapatriement des enfants impliquait le retour de leur mère et que les conditions sur le terrain le rendaient possible, celui-ci a été organisé, dès lors qu'elles en acceptaient, en toute connaissance de cause, les conséquences. Plusieurs mères refusent que leurs enfants puissent retourner en France avec elles. Toutes les mères rapatriées ont été, dès leur arrivée sur le sol français, remises aux autorités judiciaires, soit au titre d'un mandat d'arrêt - auquel cas elles ont été placées directement en détention - soit au titre d'un mandat de recherche, pour être placées en garde à vue puis en détention, dans l'attente de leur jugement. L'application rigoureuse de la loi pénale est de mise. Les enfants ont fait l'objet d'un suivi médical particulier et d'une prise en charge par les services sociaux. Malgré les difficultés de ces opérations, soyez assuré que la détermination et les efforts du gouvernement restent intacts pour les mener à bien.

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