Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ersilia Soudais
Question N° 1980 au Ministère du travail


Question soumise le 11 octobre 2022

Mme Ersilia Soudais attire l'attention de M. le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion sur la situation des services d'inspection du travail en France et plus particulièrement dans le département de la Seine-et-Marne. Depuis plus d'un an, les agents de contrôle de l'inspection du travail de Seine-et-Marne, comme leurs collègues de Seine-Saint-Denis et de certaines unités de contrôle de l'unité départementale de la DRIEETS de Paris et d'autres DDETS en France, ont enclenché un mouvement collectif visant à dénoncer leurs conditions de travail. L'inspection du travail est un corps d'environ 1 800 agents de contrôle, chargé de surveiller l'application du droit du travail pour près de 20 millions de salariés du privé. Les organisations syndicales représentatives alertent depuis de nombreuses années sur la baisse d'attractivité des postes au sein des services déconcentrés du ministère du travail, l'effondrement du nombre de postes ouverts aux concours d'entrée les années précédentes et l'absence de gestion prévisionnelle des emplois. Tout ceci a conduit, par la réduction inévitable du nombre d'agents sur le terrain, à une dégradation continue du service public de l'inspection du travail. Ces agents sont officiellement chargés des missions visant à faciliter le dialogue social dans l'entreprise et à assurer le respect les dispositions légales en matière de droit du travail. Comment ces deux missions essentielles, de dialogue et de contrôle, peuvent-elles être menées à bien quand le sous-effectif est aussi chronique ? Ainsi, en Seine-et-Marne, il existe 33 sections d'inspection du travail pour plus de 450 000 salariés. Le département est très dynamique économiquement, notamment le nord qui a connu une progression de 2,1 % à 16,3 % de l'emploi salarié entre 2012 et 2018. Au cours de l'année 2021 et début 2022, entre 10 et 13 postes d'inspecteurs du travail étaient vacants en permanence, soit un taux de vacance de poste qui est monté jusqu'à 40 %. Au 1er septembre 2022, certains postes ont été pourvus par des agents sortis d'école, mais le taux de vacance remonte déjà à 30  % au 1er octobre (10/33) et il faut s'attendre à des départs en retraite et des arrêts maladie longue durée causés par des conditions de travail de plus en plus difficiles, qui vont faire monter plus haut ce taux de vacance de postes. Ainsi, les travailleurs et travailleuses des communes de Charny, Claye-Souilly, Courtry, Le Pin et Villeparisis, dans la circonscription de Mme la députée, n'ont pas d'interlocuteur identifié au sein de l'inspection du travail. À cette liste non exhaustive, il convient d'ajouter également Chessy, La Ferté-Gaucher, Saint-Cyr-sur Morin, Coulommiers, Emerainville, Croissy-Beaubourg, Grandpuis-Bailly-Carrois, Avon, Fontainebleau, Nangis, Provins, Achères-la-Forêt, Saint-Fargeau-Ponthierry, Fleury-en-Bière, Fromont, Souppes-sur-Loing ainsi que l'ensemble des salariés agricoles du nord Seine-et-Marne et des entreprises de transport du sud du département. Mme la députée précise que, début septembre 2022, sur le nord du département, au moins deux accidents mortels au travail ont été constatés, dont l'un concerne un ouvrier agricole de sa circonscription. Elle précise que l'Organisation internationale du travail préconise de limiter à 10 000 le nombre de salariés dont a la charge chaque agent de contrôle. La moyenne de ce ratio s'élève en Seine-et-Marne à près de 13 600 salariés. Certaines sections ont en charge plus de 20 000 salariés. Ceci est un facteur évident de non-attractivité du poste, la charge de travail conduisant à des mutations et à un épuisement professionnel. La situation est tellement catastrophique que le journal L'Humanité titrait en juin 2022 que la Seine-et-Marne était devenu une « zone de non-droit du travail ». Les organisations syndicales représentatives au sein de la DDETS 77 ont alerté à plusieurs reprises leurs directions départementale et régionale. Selon leurs calculs, sur la base de données chiffrées qui font consensus, pour respecter ses propres engagements, sur la base d'un ratio déjà bien élevé (1 agent pour 10 000 salariés), l'administration devrait créer au moins 12 sections d'inspection du travail supplémentaires dans le département, c'est-à-dire de passer de 33 à 45 sections, qu'il faudrait ensuite pourvoir. La direction générale du travail a admis l'aspect préoccupant de cette situation. Le ministère communique certes sur les 200 postes ouverts au concours cette année mais, à supposer qu'ils soient tous pourvus, ceux-ci n'intégreront effectivement les services qu'après 18 mois de formation et ne combleront pas à eux seuls les départs en retraite prévisibles dans toute la France. À l'échelle locale, la direction régionale a pour l'instant refusé de s'engager à créer de nouvelles sections d'inspection et à pourvoir ces postes, malgré les alertes répétées des organisations syndicales depuis 2020. Les perspectives de recrutements ne sont pas plus réjouissantes : sur les 25 recrutements prévus par la voie du détachement en Île-de-France à partir du 1er octobre 2022, la Seine-et-Marne n'en accueillera aucun ! Elle lui demande donc ce qu'il compte mettre en œuvre dans les mois et années à venir pour répondre aux demandes légitimes des organisations syndicales et assurer ainsi à l'ensemble des travailleurs et travailleuses un accès équitable au service public de l'inspection du travail.

Réponse émise le 24 janvier 2023

Le ministre est soucieux de permettre l'exercice des missions de l'inspection du travail en veillant à garantir la couverture territoriale pour l'ensemble des missions du système d'inspection du travail tout en tenant compte des particularités locales. L'unité départementale de Seine-et-Marne compte 33 sections d'inspection du travail auxquelles s'ajoute l'appui des services régionaux tels que l'unité régionale de lutte contre le travail illégal qui prend en charge certains contrôles. Depuis trois ans, des efforts conséquents ont été réalisés pour recruter des inspecteurs du travail et limiter les vacances de postes d'agents de contrôle. Ainsi, le plan de recrutement permettra de voir l'arrivée dans les services de 441 agents d'ici 2024 au niveau national, via les concours externes, l'ouverture à la 3ème voie mais également via le détachement de fonctionnaires. C'est ainsi que 200 postes ont été ouverts par la voie du concours national en 2022 et pour la première fois, par la voie du détachement avec 81 postes pourvus en 2 ans (23 postes en 2021 et 58 postes en 2022). Par ailleurs, en 2021, un concours à affectation locale a été également organisé ouvrant ainsi 20 postes d'inspecteurs du travail pour lesquels les affectations seront exclusivement effectuées en région Ile-de-France dont en Seine-et-Marne. En ce qui concerne le département de la Seine-et-Marne, deux élèves inspecteurs du travail ont été affectés en 2019 et un inspecteur du travail a été affecté par voie de détachement en 2021. Pour 2022, cinq élèves inspecteurs du travail ont été affectés et un poste d'inspecteur du travail par voie de détachement a été ouvert, mais aucun candidat n'a postulé. Afin d'attirer davantage de candidats au métier d'inspecteur du travail, souvent méconnu, des actions de communication ont été engagées et des webinaires ont été organisés par l'administration du travail à destination des futurs candidats au concours ou au détachement pour leur présenter le métier et les modalités du concours et de la formation. Ont également été embauchés fin 2022 exceptionnellement des contractuels de catégorie A permettant d'alléger les tâches administratives contraintes des inspecteurs du travail et leur dégager du temps pour assurer les contrôles en entreprises. Il est signalé le fait que des salariés d'un certain nombre de communes du département de Seine-et-Marne, dont les salariés du secteur agricole et des transports n'auraient pas d'interlocuteur, et que des accidents mortels ont eu lieu dont l'un concerne un ouvrier agricole. A ce sujet, il convient de signaler que, par instruction du 4 septembre 2014, la direction générale du travail, autorité centrale du système d'inspection du travail, a précisé la règle de gestion des intérims de postes d'agents de contrôle permettant d'assurer par ce biais la couverture du territoire et de répondre au principe de continuité de service public notamment sur les enquêtes d'accidents du travail, missions de priorité nationale tout comme les enquêtes de licenciement de salariés protégés.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.

Inscription
ou
Connexion