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Emmanuel Blairy
Question N° 2423 au Ministère de la transition énergétique


Question soumise le 25 octobre 2022

M. Emmanuel Blairy alerte Mme la ministre de la transition énergétique sur la situation des agriculteurs endiviers. M. le député a rencontré dans sa circonscription du Pas-de-Calais un couple d'agriculteurs producteurs d'endives depuis 38 ans. Leur exploitation emploie jusqu’à 20 salariés. Ils lui ont fait part des difficultés qu'eux-mêmes et leurs pairs rencontrent actuellement. D'abord sur le plan énergétique : leur exploitation utilise une très grande quantité d'électricité pour la production d'endives - pour le fonctionnement des machines agricoles mais surtout pour la conservation froide des endives. Le constat est sans appel : leur facture d'électricité est passée de 60 000 euros à 200 000 euros par an. Ainsi, la vente de l'ensemble de leur production de 2022 ne suffit pas à assumer cette facture. Cet exemple criant est confirmé par de nombreux autres exploitants et élus locaux, dont tous doivent entendre la détresse jusque dans les ministères. Plusieurs possibilités existent : bouclier tarifaire, soutien dans la négociation des prix avec les distributeurs, allégement des critères d'accès à l'aide aux énergo-intensifs du Plan de résilience. Ensuite, il existe une possibilité dans le domaine du recrutement : comme de nombreux agriculteurs au moment des récoltes, ils font appel à l'intérim et au CDD. Mais un certain nombre de facteurs, notamment la hausse des prix du carburant, diminue l'attractivité de cette activité pour les intérimaires. Cette difficulté de recrutement pourrait mener à terme à une cessation d'activité, qui participerait ainsi de la désertification des zones rurales. C'est ainsi qu'il ne peut qu'encourager à adopter la mesure portée par son groupe à l'Assemblée nationale, soit la baisse de 20 % à 5,5 % de la TVA sur l'énergie - le carburant en l'occurrence - favorisant ainsi la mobilité, et donc le recrutement et l'emploi. Il lui demande en définitive quelles sont les mesures qu'elle compte mettre en œuvre pour sauver les agriculteurs endiviers.

Réponse émise le 16 mai 2023

Notre pays traverse sa pire crise énergétique depuis les chocs pétroliers des années 1970. La crise ukrainienne et la volonté de la Russie d'utiliser l'approvisionnement énergétique comme moyen de pression entraînent des tensions sans précédent sur les marchés du gaz et, par voie de conséquence, sur les marchés électriques. La communication réalisée par le Gouvernement depuis fin novembre 2022 a permis de faire le point et de sensibiliser le grand public et les différents secteurs d'activité sur les risques qui pèsent cet hiver sur notre système électrique national. Elle a également permis de rappeler que toutes les dispositions nécessaires pour aborder l'hiver dans les meilleures conditions possibles ont été prises. Le premier levier activé a été celui de la réduction de notre consommation d'électricité. Ainsi, un plan de sobriété a été annoncé, assorti de mesures visant à diminuer les consommations d'énergie en base et par ailleurs à lisser les pics de consommation électrique, et soutenu par une campagne de communication grand public. Le second levier a été celui de la maximisation des moyens de production. Cela passe tout d'abord par le suivi rapproché de la disponibilité nucléaire et par la sécurisation de nos approvisionnements en gaz, qui ont notamment permis à nos centrales à gaz de fonctionner à plein cet hiver. Cela passe ensuite par la facilitation de la finalisation des projets d'énergie renouvelable (EnR) en cours ou par l'autorisation d'usages à des seuils supérieurs au cadre usuel. Cette mobilisation a porté ses fruits : notre système électrique a pu surmonter la vague de froid de décembre, et dans sa dernière publication, RTE a indiqué que la réduction importante de la consommation (d'environ 9%), conjuguée notamment à la sécurisation de la remontée de la disponibilité nucléaire, conduisait à abaisser à « faible » le risque de coupures pour la fin de l'hiver. Pour autant, il reste nécessaire de se préparer à des scénarios extrêmes du type « grand froid » dans lesquels un plan national de délestage électrique pourrait être mis en œuvre et prendre la forme de coupures locales, ciblées et temporaires, limitées à environ 2 heures, pour certains usagers raccordés aux réseaux publics de distribution d'électricité, afin d'éviter des coupures de plus grande ampleur. Le Gouvernement et les préfets ont conduit un travail avec plusieurs filières afin d'examiner les situations particulières et de trouver des solutions adaptées à chaque cas, tout en tenant compte des limites techniques permettant de prévenir le délestage de certaines installations. Une rencontre avec l'union des endiviers et les services de la direction générale de la performance économique et environnementale des entreprises a eu lieu le 26 avril 2022, au cours de laquelle les questions de la hausse des coûts de l'énergie et des matières premières ont été abordées. Des accompagnements complémentaires sont prévus pour les filières les plus exposées aux fortes variations de prix des matières premières, parmi lesquelles celles énergo-intensives de l'agriculture et de l'agroalimentaire. Ainsi, l'État a mis en place depuis le 4 juillet 2022 une aide spécifique pour les entreprises dont les dépenses de gaz et d'électricité représentent une part élevée des charges, au moins 3% du chiffre d'affaires, et ont doublé en 2022. Cette aide bénéficie aux entreprises sans condition de taille ou de secteur et prend en charge entre 30 et 70% du surplus de dépenses énergétiques. Ce dispositif a été mis en oeuvre pour la période du 1er mars au 31 décembre 2022. Cette mesure exceptionnelle a bénéficié aux exploitations et entreprises des filières fruits et légumes particulièrement frappées par la hausse brutale du coût de l'énergie, la filière endivière ayant notamment été identifiée lors de la phase d'élaboration de ce dispositif. Par ailleurs le gouvernement a mis en place début 2023 un dispositif général d'aide aux consommateurs d'électricité, l'amortisseur électricité. Toutes les PME (entreprises de moins de 250 salariés et 50M€ de chiffre d'affaires) peuvent bénéficier d'une prise en charge de la moitié du prix de l'électricité pour la part supérieure à 180€/MWh, plafonnée à 500€/MWh. En parallèle, le Gouvernement a déployé de nouveaux soutiens en trésorerie (prêts BPI de long terme, nouveau prêt garanti par l'État « Ukraine ») pour éviter les faillites et les destructions d'emplois. Par ailleurs, le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire a réuni le 27 septembre 2022 les acteurs de la filière fruits et légumes pour lancer le processus d'élaboration du plan de souveraineté de moyen et long terme pour la filière annoncé dans le cadre du plan de résilience par le Gouvernement le 16 mars 2022. Ce plan vise à donner un cadre stratégique et des leviers d'actions opérationnels afin que la filière fruits et légumes puisse inverser la tendance en baisse des courbes de production à horizon 2030. La filière endivière est engagée dans la transition écologique dont un objectif prioritaire doit rester la diminution de l'utilisation des intrants de synthèse et de la dépendance aux énergies fossiles, mais également d'accompagner l'effort d'adaptation de la part des agriculteurs aux aléas climatiques, d'inciter à la diversification des cultures, d'augmenter la part de production en agriculture biologique et faisant l'objet de mesures agro-environnementales et climatiques. Ces orientations sont largement soutenues dans la politique agricole commune et sa déclinaison nationale au travers du plan stratégique national qui sera mis en oeuvre à partir de 2023. Les prix payés aux producteurs, ainsi que les relations entre la production agricole, les industriels et les distributeurs sont également une préoccupation constante du Gouvernement. La loi du 18 octobre 2021 visant à protéger la rémunération des agriculteurs, dite « EGALIM 2 », introduit ainsi de nouveaux dispositifs de régulation et de transparence, en favorisant la contractualisation entre producteurs et distributeurs, au profit d'une meilleure rémunération des agriculteurs français. Le plan d'investissement France 2030 soutiendra également les efforts de décarbonation de l'agriculture et la constitution de filières d'intrants durables, avec l'objectif de faire émerger des leaders de la production d'énergie renouvelable à partir des sous-produits agricoles. C'est aussi un défi environnemental pour la filière d'augmenter sa production dans un contexte de changement climatique et de réussir pleinement sa transition agro-environnementale pour répondre aux enjeux de souveraineté alimentaire de demain par des méthodes de production durable. Afin d'élaborer ce plan et ces leviers d'action, des discussions associent professionnels et services concernés au niveau transversal sur les grands axes stratégiques suivants : (1) protection des cultures, (2) compétitivité, investissements et innovation, (3) recherche, expérimentation, formation et renouvellement des générations, (4) dynamisation de la consommation de fruits et légumes dans le modèle alimentaire.

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