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Patricia Lemoine
Question N° 5230 au Ministère de l’agriculture


Question soumise le 7 février 2023

Mme Patricia Lemoine interroge M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur les conséquences sur la filière betteravière française de la récente décision de la Cour de justice de l'Union européenne déclarant illégales les dérogations accordées par la France pour l'usage de néonicotinoïdes. Alors que l'utilisation de néonicotinoïdes étaient interdites depuis 2018, la France avait accordé certaines dérogations, prévues par le droit européen, ces trois dernières années, pour la filière betteravière, afin qu'elle puisse faire face à la prolifération de pucerons responsables de la jaunisse. Toutefois, par un arrêt en date du 19 janvier 2023, la Cour de justice de l'Union européenne a jugé que les États membres ne pouvaient recourir à de telles dérogations et les a rendues, de fait, illégales. Tirant les conséquences de cette décision, M. le ministre a annoncé que les betteraviers ne bénéficieraient donc plus de dérogations permettant l'usage de tels produits, pourtant encore à l'étude quelques jours auparavant. Si l'interdiction de telles substances apparaît nécessaire au regard de leur sévère impact sur la biodiversité et en particulier sur les abeilles pollinisatrices, cette décision a pour conséquence de remettre en question la survie même de l'ensemble d'une filière et, avec elle, de nombreux emplois. Des plans, avec des financements, ont été mis en place afin d'identifier des alternatives efficaces, respectueuses de l'environnement. Toutefois, à ce jour, aucune d'entre elles ne semble véritablement aussi efficace et disponible immédiatement pour lutter contre une maladie qui a détruit près d'un tiers des récoltes en 2020. Si le groupe Cristal Union a d'ores et déjà annoncé son intention d'augmenter son prix d'achat du sucre betteravier de 12 % afin d'inciter les cultivateurs à en planter, un accompagnement fort des pouvoirs publics sera essentiel pour les aider à surmonter cette délicate transition. Elle lui demande donc quelles mesures, notamment financières et matérielles, sont actuellement envisagées pour éviter la destruction d'une partie importante de la filière betteravière.

Réponse émise le 2 mai 2023

Le Gouvernement a pris acte de la décision rendue le jeudi 19 janvier 2023 par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) excluant l'utilisation des néonicotinoïdes (NNI) pour les semences et le droit de déroger à l'interdiction européenne dans le cadre de l'article 53 du règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil, du 21 octobre 2009. Par conséquent, aucune nouvelle dérogation autorisant l'utilisation des NNI pour les semences de la campagne 2023 n'a été accordée. Dès 2020, le Gouvernement avait mis en place un plan national de recherche et d'innovation (PNRI) sans précédent de plus de 20 millions d'euros face à la menace de la jaunisse. Ce plan a permis de coordonner un important effort de recherche autour de la filière afin d'apporter des solutions alternatives techniquement et économiquement viables pour sortir des NNI en 2024. La décision de la CJUE est venue percuter ce programme de travail établi pour 3 ans et provoque des inquiétudes légitimes chez les planteurs, sucriers et semenciers sur la campagne des semis de mars 2023. Elle oblige la France à s'adapter pour la troisième et dernière année, l'État sera en soutien de la filière pour y parvenir. Dès le 23 janvier 2023, conscients des impacts qu'emporte l'arrêt de la CJUE pour la campagne betteravière, le ministre a reçu les professionnels de la filière afin d'échanger avec eux sur la situation. Le 9 février 2023, il a annoncé avec la filière le déploiement d'un plan d'actions afin de garantir une production suffisante de betteraves en 2023 et l'approvisionnement de l'ensemble de la filière sucre française. Dans ce cadre, afin que les producteurs ne pâtissent pas d'une distorsion de la concurrence, une action est menée à l'échelle européenne, afin de s'assurer que la décision de la CJUE soit uniformément appliquée par l'ensemble des pays de l'Union européenne. De plus, le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire a demandé, lors du Conseil européen « agriculture et pêche » du 30 janvier 2023, le déclenchement d'une clause de sauvegarde permettant d'interdire l'importation de produits traités avec des néonicotinoïdes. En outre, ce plan d'actions vise à déployer rapidement des mesures de protection des cultures. À cette fin, de nouveaux itinéraires techniques ont été élaborés en liaison avec les professionnels et selon les recommandations du PNRI. Ils seront mis à disposition des producteurs via l'institut technique de la betterave et pourront être utilisés en cas de jaunisse dès le printemps 2023. En parallèle, toutes les solutions immédiatement disponibles, issues du PNRI, concernant notamment l'utilisation des plantes compagnes sont mises en œuvre par la profession. À des fins préventives, des mesures ambitieuses de gestion des réservoirs viraux sont à l'étude et un plan d'actions et de surveillance sur la gestion de ces réservoirs sera présenté prochainement. Les modèles de prévision des vols de pucerons issus des travaux du PNRI seront déployés prochainement. Enfin, une aide sera accessible aux planteurs en cas de pertes liées à un épisode de la jaunisse au cours de l'année 2023. Le Gouvernement a demandé l'activation d'une mesure de crise européenne et engagé le travail de construction du dispositif, en lien avec la Commission européenne.

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