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Anaïs Sabatini
Question N° 5233 au Ministère de l’agriculture


Question soumise le 7 février 2023

Mme Anaïs Sabatini interroge M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur la PAC 2023/2027 et ses conséquences pour l'agriculture dans les Pyrénées-Orientales. Les points stratégiques de la PAC 2023/2027 pour l'élevage dans les Pyrénées-Orientales sont actuellement toujours en discussions, notamment en ce qui concerne l'éligibilité des surfaces pastorales et plus spécifiquement les surfaces ligneuses. Dans ce département, les surfaces pastorales couvrent 90 % des territoires exploités. M. le ministre a fait connaître sa position de principe dans un courrier en date du 3 janvier 2023 adressé aux représentants des exploitants agricoles. Elle consiste à limiter l'admissibilité des surfaces ligneuses aux seules exploitations dont le chargement est supérieur à 0,2 UGB/ha admissible. Concrètement, cela impliquerait une perte d'aides directes de l'ordre de 1,5 millions d'euros pour l'élevage des Pyrénées-Orientales. Cette décision aurait pour conséquence inévitable une fragilisation des exploitations qui se sont engagées depuis de nombreuses années en faveur de l'approvisionnement alimentaire de proximité et de la gestion agro-écologique des territoires. Ainsi, cet arbitrage ministériel mettrait en grande difficulté 250 éleveurs du territoire. Tout un système pastoral pourtant parfaitement respectueux du cadre règlementaire se verrait pénalisé par une décision ministérielle prise sans concertation avec les acteurs locaux et leurs représentants. Elle lui demande de bien vouloir réexaminer les éléments qui ont conduit à cet arbitrage et à revoir le calcul de chargement et l'aligner sur celui des chênaies et châtaigneraies ; elle souhaite connaître ses intentions à ce sujet.

Réponse émise le 13 juin 2023

Lors de l'élaboration du plan stratégique national (PSN), une attention particulière a été portée aux dispositions applicables aux surfaces pastorales, compte tenu de l'enjeu qu'elles revêtent. Dans ce cadre, les coefficients d'admissibilité de ces surfaces ont été maintenus à un niveau inchangé dans la version finale du PSN, adopté par la Commission européenne le 31 août 2022. Dans ce contexte, les surfaces pastorales bénéficient d'une meilleure prise en compte en tant que surfaces agricoles pour le paiement des aides découplées. Ces surfaces, composées majoritairement de ligneux, sont ainsi reconnues admissibles à proportion de leurs ressources fourragères. Malgré la contestation des modalités de cette reconnaissance par la Commission européenne, la méthode du prorata a été reconduite au sein de la politique agricole commune (PAC) 2023-2027 et permet de rendre ces surfaces admissibles selon un pourcentage de la part d'éléments non admissibles. Toutefois, le maintien de cette méthode a dû s'accompagner de nouveaux critères pour contrôler l'admissibilité, en remplacement des indices de pâturage utilisés antérieurement, et pour permettre la mise en œuvre de nouveaux dispositifs, à travers notamment le système de suivi des surfaces en temps réel. Un critère de chargement a été mis en place pour déterminer l'admissibilité de ces surfaces, dont l'entretien est principalement assuré par les animaux. Ce critère concernera uniquement les prairies composées de ligneux, d'arbres, d'arbustes ou de buissons au sein de 38 départements du Sud de la France, ainsi que les surfaces en chênaies et châtaigneraies dans la zone Causses-Cévennes et en Corse. Il s'appliquera aux exploitations déclarant ce type de surfaces, qu'il s'agisse d'exploitations individuelles, en société ou de gestionnaires d'estives. Les modalités de calcul de ce taux permettront de mieux reconnaître l'activité pastorale. En effet, à la différence des surfaces graphiques utilisées pour calculer le taux de chargement de l'indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN), les surfaces admissibles tiennent compte de la diversité des territoires. Dans le cas où le seuil de chargement ne serait pas atteint, et à défaut du respect d'un critère alternatif de fauche ou de broyage sur les surfaces concernées, celles-ci seront plafonnées de manière à atteindre le seuil minimal. Toutefois, ce plafonnement ne remettra pas en cause l'admissibilité des autres types de pâturages, vérifiée selon des critères différents. À ce titre, le taux de chargement minimal à respecter est fixé à 0,2 unité de gros bétail (UBG) par hectare (ha) de surface admissible, en cohérence avec les garanties qui doivent être présentées auprès de la Commission européenne. Un seuil inférieur serait de nature à présenter des risques réels au regard des audits menés régulièrement par la Commission européenne, et engendrerait un refus d'apurement des dépenses agricoles de la PAC en France. Ainsi, l'application de ce critère s'articule avec l'ensemble des dispositions en faveur du pastoralisme qui seront mises en œuvre durant la programmation de la PAC 2023-2027. S'agissant de l'aide de base au revenu, le montant unitaire des droits à paiement de base (DPB) évoluera de la plus faible valeur jusqu'à une valeur égale ou supérieure à 85 % de la moyenne. Cette hausse portera sur une grande partie des surfaces pastorales qui ont été dotées, à l'origine, de DPB inférieurs à la valeur moyenne (compte tenu de montants d'aide historiquement plus bas que la moyenne, dans les exploitations concernées). L'éco-régime, introduit à compter de 2023, devrait être accessible à la plupart des exploitations pastorales à partir d'un montant d'aide potentiellement plus élevé que ce que perçoivent aujourd'hui la somme des utilisateurs au titre du paiement vert. Le niveau supérieur devrait concerner la majorité des éleveurs en systèmes herbagers et est évalué au montant indicatif de 80 euros par hectare (€/ha). Contrairement au paiement vert actuel, toutes les surfaces admissibles seront prises en compte. Afin de valoriser les externalités positives pour l'environnement produites par l'élevage extensif, l'éco-régime pourra être versé relativement aux surfaces déclarées par les éleveurs pour leur propre exploitation, mais également à celles qu'ils utilisent au sein des pâturages en commun dans les estives, au prorata de leur utilisation. Par ailleurs, le soutien en faveur des éleveurs de bovins, ovins et caprins est maintenu dans le cadre des aides couplées, avec l'introduction d'un plafond en surface fourragère de nature à favoriser les élevages extensifs. En outre, une aide spécifique à la production de légumineuses fourragères en montagne est mise en place. Elle bénéficiera ainsi aux éleveurs des zones pastorales par le biais d'un budget annuel de 18 millions d'euros (M€), avec un montant prévisionnel à l'hectare évalué à 149 €/ha en 2023. Aussi, plusieurs aides du second pilier de la PAC complètent le soutien apporté au pastoralisme français. En premier lieu, l'ICHN permet de maintenir l'activité d'élevage et les surfaces pastorales qui doivent faire face à des contraintes naturelles ou d'autres handicaps spécifiques. Les critères d'octroi favorisent notamment les systèmes extensifs. Le budget de ce dispositif a été, à ce titre, maintenu à hauteur de 1,1 milliard d'euros par an. Cette aide représente un apport très significatif pour les zones pastorales et sa méthode de calcul demeurera selon les modalités actuelles, hormis le plancher relevé de 3 à 5 UGB par exploitation. Plusieurs mesures agro-environnementales et climatiques concernent les zones pastorales et rémunèrent des pratiques vertueuses pour l'environnement, mises en œuvres par les exploitations des zones pastorales : il s'agit des mesures « surfaces herbagères et pastorales », « amélioration de la gestion des surfaces herbagères et pastorales par le pâturage » et « systèmes herbagers et pastoraux », dont les montants varient entre 51 et 88 €/ha. De plus, les aides à l'investissement, au niveau régional, favorisent la mise en valeur des espaces pastoraux en proposant, par exemple, des financements pour les accès, les cabanes, la contention et la gestion de l'eau. Enfin, le dispositif de protection des troupeaux contre la prédation apporte par ailleurs un soutien financier aux éleveurs ; différentes options (gardiennage, clôtures, chiens de protection, analyse de vulnérabilité, accompagnement technique) peuvent éventuellement faire l'objet d'une aide en fonction du niveau de prédation observé dans la zone en question. Dans ce cadre, les montants consacrés à l'aide à la protection des troupeaux, issus du fonds européen agricole pour le développement rural, connaissent une hausse continue depuis ces dernières années : de 18 M€ en 2015 à 30,42 M€ en 2021 et a bénéficié, cette même année, à environ 3 000 éleveurs pour un montant moyen de 10 000 €. La nouvelle programmation de la PAC porte le rehaussement du montant annuel moyen, estimé à 35 M€ par an sur la période 2023-2027.

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