Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Hélène Laporte
Question N° 6416 au Ministère de l’agriculture


Question soumise le 21 mars 2023

Mme Hélène Laporte appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur la situation critique de l'industrie française du sucre et de l'alcool d'origine betteravière. Le 8 mars 2023, Tereos, premier sucrier français et quatrième mondial, a annoncé l'arrêt de l'activité sucrière sur son site industriel d'Escaudœuvres (59) et la fermeture de la distillerie de Morains (51). Cette restructuration, en partie imputable à l'élément conjoncturel de la crise énergétique qui a démultiplié les coûts de fonctionnement, est en premier lieu la conséquence d'une baisse durable de la production de ces sites, consécutif à l'effondrement de la production de betteraves sucrières sur les terres françaises. En effet, entre 2017 et 2023, celle-ci a chuté de 25 % et la surface plantée de 10 %. La première cause de cette trajectoire est la suppression des quotas sucriers le 1er octobre 2017 qui a entraîné une forte baisse du cours de la betterave sucrière, laquelle a détourné de nombreux agriculteurs de la filière. S'est ajoutée la prohibition de l'usage des néonicotinoïdes dans la législation française et la réglementation européenne, aggravée par la décision de la CJUE du 19 janvier 2023 empêchant sans exception l'usage de semences traitées avec ces substances. L'exposition des plants de betteraves aux pucerons, vecteurs d'une jaunisse dévastatrice pour les récoltes, a entraîné une baisse de la productivité des sols et un risque contribuant encore davantage à éloigner les agriculteurs de la cultivation de cette espèce. À l'heure de cette annonce de Tereos qui laisse présager une aggravation du déclin de la filière française du sucre et de l'alcool de betterave, elle souhaite savoir quels dispositifs il envisage pour soutenir cette industrie.

Réponse émise le 9 mai 2023

La décision rendue par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) le 19 janvier 2023 exclut l'utilisation des néonicotinoïdes (NNI) pour les semences. Par conséquent, aucune nouvelle dérogation autorisant l'utilisation des NNI pour les semences ne sera accordée. Le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire tient à rappeler que dès 2020, le Gouvernement avait mis en place un plan national de recherche et d'innovation (PNRI) sans précédent de plus 20 millions d'euros afin de faire face à la menace de la jaunisse, et d'apporter des solutions alternatives techniquement et économiquement viables pour sortir des NNI en 2024. La décision de la CJUE est venue percuter ce programme de travail établi pour trois ans et a provoqué des inquiétudes légitimes chez les planteurs, sucriers et semenciers sur la campagne des semis de mars 2023. Conscient des impacts qu'emporte l'arrêt de la Cour de Justice pour la campagne betteravière, le ministère a réuni dès le 23 janvier 2023 les professionnels de la filière afin d'objectiver la situation et de construire un plan d'actions adapté qui garantisse la pérennité de la filière française. Grâce à la mobilisation immédiate des services de l'État et de la filière, le plan a pu être présenté le 9 février 2023. Ce plan d'action vise notamment à déployer rapidement toutes les solutions immédiatement disponibles et à accélérer la recherche et le développement de nouvelles alternatives pour protéger les cultures en lien avec les professionnels et sur la base des avancées permises par le PNRI. Il assure par ailleurs le soutien à la filière en cas de jaunisse impactant la campagne 2023. Le Gouvernement a en effet décidé la mise en place d'une aide aux planteurs en cas de pertes de rendements liées à un épisode de jaunisse, et demandera pour ce faire l'activation d'une mesure de crise européenne. Ce filet de sécurité est en cours de définition s'agissant des paramètres techniques. Cet accompagnement a vocation à sécuriser les planteurs et industriels dans cette transition et permettre de conforter la souveraineté alimentaire. Le 8 mars 2023, Tereos a annoncé un projet de réorganisation de son activité industrielle en France avec l'arrêt de l'activité sucrière sur le site d'Escaudœuvres et de la distillerie de Morains. S'agissant d'une zone de production de betteraves moins touchée que beaucoup d'autres par la jaunisse en 2020, cette décision de restructuration industrielle à Escaudœuvres ne peut être attribuée au non renouvellement de la dérogation sur les NNI ou à d'autres contraintes réglementaires ou à l'objectif de décarbonation de l'industrie. La position exprimée par le ministre de l'agriculture, mais aussi par le ministre chargée de l'industrie ainsi que les acteurs localement, est que Tereos doit expliquer ses choix économiques en transparence, alors que des engagements ont été pris en 2020 et 2021 sur la pérennité des outils industriels. Tereos doit éclaircir les motivations économiques de cette décision et les assumer sans tenter d'en faire porter la responsabilité à d'autres ; en cela le ministère chargé de l'agriculture partage solidairement ses positions État et région. Il est important que Terreos explique bien et assume cette décision de nature économique industrielle. Le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire a immédiatement demandé au groupe que des garanties soient données aux planteurs pour pouvoir livrer sur d'autres sites et a appelé Tereos à ne laisser aucun salarié sans solution. Le ministère chargé de l'agriculture a également demandé aux préfets concernés de réunir les acteurs locaux pour examiner la situation car les motivations économiques de cette décision doivent être éclaircies et assumées par Tereos. Le Gouvernement se tient au côté des acteurs de la filière pour garantir la compétitivité et la viabilité de la filière betterave-sucre française.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.

Inscription
ou
Connexion