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Annick Cousin
Question N° 6928 au Ministère de la santé


Question soumise le 4 avril 2023

Mme Annick Cousin interroge M. le ministre de la santé et de la prévention sur la menace de fermeture de la maternité de l'hôpital de Villeneuve-sur-Lot, suite à la mise en application de la loi « Rist » durant le mois d'avril 2023. La situation est aujourd'hui alarmante dans son département du Lot-et-Garonne et plus particulièrement dans sa circonscription du Villeneuvois. Le département ne possède qu'une seule maternité de niveau 2, située à l'hôpital d'Agen. Cette maternité survivait grâce à l'utilisation de pédiatres et spécialistes intérimaires, avec des gardes surpayées. La mise en application de la loi « Rist », portée et votée par la majorité en 2021, menace aujourd'hui le très précaire équilibre médical du département. Il manque à ce jour « 6 jours de gardes » à combler pour la maternité de l'hôpital d'Agen pour le mois d'avril 2023 à venir et les intérimaires ne souhaitent plus se rendre en Lot-et-Garonne suite au plafonnement des tarifs de gardes. L'hôpital d'Agen risque fortement de manquer de praticiens et ce sont ceux de Villeneuve-sur-Lot qui seraient réquisitionnés pour tenir les gardes à Agen, privant ainsi les habitants de sa circonscription d'accès à leur maternité. Ses administrés ne supportent plus ce déclassement des territoires, tant au niveau de l'accès aux services publics qu'aux soins médicaux. Ce sont trop souvent les territoires les plus ruraux qui pâtissent les premiers des dysfonctionnements des services étatiques. Mme la députée tient à rappeler que la sécurité et la santé des mères et des enfants dépendent en grande partie de la proximité et de la facilité d'accès à ces spécialistes. Mme la députée souhaite connaître les solutions que M. le ministre envisage pour pallier au désintéressement des intérimaires pour les territoires ruraux. Elle lui demande s'il peut s'engager à ce que la maternité de Villeneuve-sur-Lot, plus grande ville de sa circonscription, ne se retrouve pas contrainte de fermer suite à la promulgation de la loi portée par la majorité.

Réponse émise le 11 juillet 2023

Outre son impact financier majeur sur les budgets des établissements de santé, un recours dérégulé à l'intérim médical, hors du cadre réglementaire, engendre une déstabilisation des services hospitaliers et des équipes médicales et soignantes susceptible de nuire à la qualité des soins. La fragilité de la démographie médicale dans certains territoires génère ainsi une tension sur le marché de l'emploi médical et une forte concurrence entre établissements pour l'accès aux ressources humaines médicales rares, favorisant ces pratiques dérégulées. Les dispositions de l'article 33 de la loi Rist du 26 avril 2021 visant à lutter contre les dérives de l'intérim sont entrées en vigueur depuis le 3 avril 2023. Elles permettent, d'une part, aux comptables publics de bloquer les rémunérations des contrats d'intérim médical dépassant le plafond réglementaire ou ne respectant pas les conditions fixées par la réglementation et, d'autre part, aux agences régionales de santé de déférer devant le tribunal administratif les contrats irréguliers dont les montants excèdent les plafonds réglementaires, conclus avec des entreprises de travail temporaire ou directement conclus entre praticiens et établissements publics de santé. La mise en œuvre de ces contrôles comptables a donc vocation à remettre de l'équité dans les équipes et les conditions de rémunération des praticiens, à stopper les dérives constatées, compte tenu de la concurrence pouvant exister localement entre établissement pour recruter dans certaines spécialités en tension. Il s'agit également de remettre de la transparence et de l'équilibre dans la gestion des ressources humaines médicales. Il convient, par ailleurs, enfin de noter que l'ensemble des fédérations d'établissements de santé, publics et privés, ont signé une charte d'engagement commune en faveur de l'application de ces contrôles (FHF, FEHAP, Unicancer, FHP, FNHAD). Des travaux préparatoires à la mise en œuvre de ces contrôles ont été conduits depuis l'automne 2021, au niveau national et régional, en vue d'établir des diagnostics territoriaux par spécialités en lien avec les différents acteurs des territoires. Ces diagnostics territoriaux, réalisés par les agences régionales de santé en lien avec les établissements de santé, sont régulièrement actualisés depuis le mois de mars 2023. Ils sont suivis de près par les services ministériels et ont permis d'anticiper la mise en œuvre des contrôles et de rechercher des solutions adaptées à chaque territoire pour assurer le maintien de la continuité des soins. Des difficultés ponctuelles et localisées existent néanmoins, mais elles préexistent la plupart du temps à la mise en œuvre des contrôles de l'intérim médical. L'application de la loi Rist a pu avoir pour effet d'aiguiser ces tensions et difficultés locales (suspension partielle ou totale de certaines activités / fermetures à certaines dates ou restrictions horaires). Un état des lieux pour anticiper l'organisation de l'offre pour l'été est prévu en lien avec les agences régionales de santé. Ces mesures de contrôle s'accompagnent également de mesures d'attractivité vis-à-vis des praticiens. Ainsi, en décembre 2021, une prime de solidarité territoriale (PST) visant à encourager les remplacements de praticiens entre établissements publics de santé au-delà de leurs obligations de service par la mutualisation des ressources humaines médicales à l'échelle d'un territoire a été créée. Elle permet par exemple de rémunérer environ 1 700 € brut un praticien qui réaliserait 24h de travail un dimanche dans un autre établissement. Ce dispositif a été revalorisé et assoupli pour faciliter son accès. Désormais, le directeur général de l'agence régionale de santé peut majorer ces montants dans la limite de 30%. En outre, le plafond de l'intérim médical pour les praticiens salariés d'une entreprise de travail temporaire et mis à disposition d'un établissement public de santé a été revalorisé à 1389,83 euros bruts pour 24h. Enfin, la majoration des indemnités de garde de 50% a été prolongée jusqu'au 31 août 2023. Toutes ces mesures visent donc à accompagner les établissements dans une période de tension sur l'offre de soins et à soutenir les professionnels des établissements publics de santé. L'application de la loi RIST doit permettre d'engager une réflexion sur les enjeux d'attractivité et de fidélisation des personnels médicaux. Conformément aux annonces du Président de la République lors de ses vœux aux soignants en janvier 2023, une concertation autour des enjeux de permanence de soins, de l'évolution des carrières hospitalières et d'amélioration des conditions de travail des praticiens se tiendra d'ici l'été. Cette concertation doit s'inscrire dans la continuité du rapport que l'inspection générale des affaires sociales a rendu sur cette question à la fin du mois de mai 2023.

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