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Charlotte Leduc
Question N° 7042 au Ministère auprès du ministre de la transition écologique


Question soumise le 4 avril 2023

Mme Charlotte Leduc alerte M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports, sur la situation catastrophique des usagers de la ligne de TER Nancy-Metz-Luxembourg. Des milliers de travailleurs et de travailleuses empruntent cette ligne quotidiennement et les conditions de voyage se dégradent de jour en jour. Trains bondés, retards et suppressions récurrents, vétusté des installations... ces problèmes existent depuis des années et se sont encore aggravés avec le retour massif des usagers dans les trains après les confinements des années 2020 et 2021. Ils s'amplifieront même davantage dans les années à venir puisque d'ici 2040 on pourrait passer de près de 120 000 à plus de 160 000 travailleurs frontaliers français. La fin de l'information-trafic en temps réel sur les réseaux sociaux accentue encore et de manière compréhensible, le mécontentement des usagers. Le service public de transport a pourtant montré depuis longtemps qu'il peut être à la hauteur des attentes légitimes des concitoyennes et concitoyens dès lors qu'on lui alloue les moyens nécessaires. Une solution d'urgence permettant d'améliorer rapidement la capacité de transport de la Moselle au Luxembourg serait d'autoriser les abonnés TER à emprunter les TGV Paris-Metz-Luxembourg sur le tronçon Metz-Luxembourg moyennant paiement de la réservation. Les syndicats de cheminots comme les associations d'usagers sont favorables à cette mesure, pourquoi n'est-elle pas étudiée par la SNCF ? À l'heure où la bifurcation écologique des modes de transports est un impératif vital pour faire face au dérèglement climatique, cette situation est intolérable car elle conduit de nombreux voyageurs à privilégier la voiture au train. C'est un non-sens climatique. De plus, en ces temps de crise inflationniste, il serait inacceptable que l'amélioration de la ligne pèse sur les finances des voyageurs. Mettre à niveau la qualité de service sans en faire payer le prix aux Françaises et aux Français qui utilisent quotidiennement le train ne serait que justice. La région Grand Est a bien entendu un rôle à jouer pour améliorer l'existant, mais l'État a également une forte responsabilité dans la conjoncture actuelle. Le démantèlement de la SNCF en différentes entités distinctes a fragilisé le dialogue entre les services qui gèrent la maintenance du réseau et ceux qui gèrent l'exploitation des trains, entraînant régulièrement la suppression de TER. De plus, la suppression du statut et les différentes réformes des retraites ont sapé l'attractivité de nombreux métiers de la SNCF comme agent d'escale, agent de maintenance matériel ou contrôleur pour lesquels le salaire de base sans les sujétions liées au déplacement ou à l'assiduité peut être inférieur au SMIC. Toutes ces décisions étatiques se traduisent concrètement sur le terrain par un service public sinistré pour les usagers. L'État a pourtant les moyens de réagir, au travers des contrats de plan État-Régions mais aussi des commissions franco-luxembourgeoises en raison du caractère transfrontalier de la ligne qui bénéficie grandement à l'économie luxembourgeoise. Les annonces gouvernementales d'un plan d'investissement de 100 milliards d'euros dans le ferroviaire d'ici 2040 vont théoriquement dans le bon sens. Cependant, pour que ce plan soit efficace, encore faut-il que les investissements soient déployés adéquatement. Il faut que l'argent aille en priorité à l'amélioration et au renforcement des lignes du quotidien, comme la ligne Nancy-Metz-Luxembourg, afin de renforcer leur attractivité face à la voiture. Les usagers attendent des actions fortes pour mettre fin à la saturation de la ligne et améliorer l'offre de transport. L'inquiétude est pourtant grande que le développement des « RER métropolitains » ou de nouvelles lignes à grande vitesse se fasse au détriment de ces investissements vitaux dans les lignes du quotidien. Les propos ministériels du 2 mars 2023 à la gare de triage de Woippy « et puis le grand projet de RER métropolitains, une ambition à dix ans : c'est typiquement sur le sillon lorrain que nous ferons ces investissements » se sont certes voulus rassurants sur ce sujet mais ne donnent pas de perspectives concrètes. Les usagers de la ligne Nancy-Metz-Luxembourg attendent des garanties au-delà des effets d'annonce, or les annexes du rapport du COI ne semblent rien envisager de neuf sur cette ligne. Elle lui demande quelles informations concrètes le Gouvernement peut leur communiquer quant à la réalisation effective des mesures déjà programmées mais sans cesse retardées et à l'affectation réelle d'un budget et des mesures concrètes de co-construction d'un réel RER franco-luxembourgeois de la part des 2 entreprises ferroviaires nationales, CFL et SNCF sous la tutelle de leurs états respectifs.

Réponse émise le 30 avril 2024

L'axe de déplacement Nancy-Metz-Luxembourg est essentiel pour plus de 120 000 travailleurs frontaliers qui vivent en France et travaillent au Luxembourg. La route, avec l'A31 en France et l'A3 au Luxembourg, comme le rail (sillon lorrain) sont en situation de saturation aux heures de pointe, et ces trafics devraient poursuivre leur hausse dans les prochaines années : on estime à 135 000 le nombre de frontaliers qui emprunteront cette liaison en 2030. Le Gouvernement est très soucieux de l'offre et de la qualité des services ferroviaires régionaux, y compris transfrontaliers, proposés aux usagers et encourage naturellement toutes les actions entreprises par la SNCF pour résoudre les dysfonctionnements qui pénalisent dans certains territoires l'usage des TER et leur capacité à répondre aux besoins de la mobilité quotidienne, en se positionnant comme une alternative réelle et efficace à la voiture individuelle. S'agissant en particulier des services ferroviaires entre Metz et Luxembourg exploités à présent par SNCF Voyageurs, il convient cependant de rappeler qu'il s'agit, d'une part, de services publics TER conventionnés par la région Grand Est, et d'autre part, de services commerciaux TGV librement organisés par l'entreprise. La définition des conditions d'accès à ces trains, relatives en particulier aux tarifs et aux réservations, relève, pour les premiers, de la seule compétence de la région Grand Est et, pour les seconds, de la politique commerciale de SNCF Voyageurs. Ainsi, il n'appartient qu'à ces deux acteurs d'évaluer l'opportunité de permettre aux abonnés TER l'accès aux TGV desservant Luxembourg et, le cas échéant, d'en contractualiser les conditions opérationnelles, tarifaires et financières. L'Etat n'intervient pas dans ces choix et négociations, d'une part, en application du principe de libre administration des collectivités territoriales et, d'autre part, dans le respect de l'autonomie de gestion dont dispose SNCF Voyageurs pour son activité grande vitesse. Pour ce qui concerne l'infrastructure, dans l'objectif de renforcer les modes de transports plus écologiques et de répondre à la saturation croissante du sillon lorrain, un protocole d'accord visant à améliorer les circulations transfrontalières a été signé le 19 mars 2018 entre la France et le Luxembourg. Les deux États contribuent à hauteur de 120 M€ chacun, soit en tout 220 M€ pour le fer et 20 M€ pour renforcer l'offre routière de transports en commun et le covoiturage. Cet engagement a été prolongé par un avenant au protocole, signé le 19 octobre 2021 et prévoyant une participation supplémentaire de 110 M€ pour chacun des deux pays, portant les fonds destinés au ferroviaire à 440 M€ au total pour l'axe Metz-Thionville-Luxembourg. Ce protocole prévoit d'augmenter la capacité de la ligne Metz-Luxembourg en deux paliers. Le premier palier porte la capacité des trains de 8 000 à 14 000 places assises par période de pointe et par sens grâce à l'utilisation de rames plus capacitaires et de trains composés de trois rames au lieu de deux actuellement. Les derniers travaux d'allongements de quais étant en cours, ce premier gain sera obtenu dès l'année 2024, dans le respect du protocole d'accord de 2018. Le deuxième palier augmente la fréquence des trains à l'horizon 2030 grâce à des interventions sur l'alimentation électrique et sur l'organisation des flux (reprise de plan de voies, interventions sur le nœud ferroviaire de Metz, etc.). La capacité permise par ces opérations sera de 22 000 places pendant la période de pointe, la fréquence étant renforcée à 8 TER par heure. Par ailleurs, l'avenant au protocole signé en 2021 permet la construction d'un centre de maintenance du matériel roulant et la réalisation de ses accès, ainsi que l'automatisation ou semi-automatisation de la conduite des trains, si les études, qui restent à mener, en confirment l'intérêt. Enfin, le projet de RER métropolitain (SERM) du sillon lorrain fait partie des principaux projets de service express régionaux métropolitains en cours d'études. Il a été identifié comme « A faire avancer rapidement » par le Conseil d'orientation des infrastructures dans son rapport publié en février 2023. La participation française au protocole franco-luxembourgeois provient donc pour partie des enveloppes des CPER dédiées aux SERM pour 2023-2027. Par ailleurs, des études de préfiguration du SERM Lorraine-Luxembourg vont être lancées en 2024, afin de définir un schéma d'ensemble du projet au-delà de l'armature que constitue la liaison ferroviaire entre Metz et Luxembourg, préparer un plan de financement et élaborer un schéma de gouvernance pour les phases ultérieures.

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