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Bruno Bilde
Question N° 7045 au Ministère de l’économie


Question soumise le 4 avril 2023

M. Bruno Bilde interroge M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur les conclusions du rapport étouffé de 2021 sur le modèle économique des sociétés d'autoroute. En février 2021, l'Inspection générale des finances et le Conseil général de l'environnement et du développement durable remettaient un rapport au Gouvernement sur le modèle économique des sociétés d'autoroute. Le document, étouffé par le Gouvernement, vient d'être rendu public par Marianne et Caradisiac, site internet spécialisé dans l'automobile. Ce rapport que M. le ministre de l'économie et de la souveraineté industrielle avait promis de publier, sans jamais le faire, confirme la surrentabilité des sociétés concessionnaires d'autoroute. Il « met en évidence une rentabilité très supérieure à l'attendu pour ASF-Escota et APRR-Area », soit les groupes Vinci et Eiffage. La rentabilité visée au moment de la privatisation de 2006 de l'ordre de 7,67 % est très largement dépassée. En février 2021, lors de l'écriture de ce rapport, le taux de rentabilité interne était de 11,7 % pour les concessions de Vinci et de 12,49 % pour celles d'Eiffage. Si ce taux de rentabilité avait été mieux anticipé, le prix d'acquisition de ces sociétés aurait pu être supérieur de 6 milliards d'euros. Dès lors, le « principe de rémunération raisonnable » dicté lors de la signature de l'accord n'est plus respecté. En d'autres termes, les sociétés d'autoroute font des bénéfices très importants sur le dos des automobilistes français. Dans un contexte ou l'inflation galopante et l'explosion des prix de l'énergie pèsent fortement sur le pouvoir d'achat des Français cette situation n'est pas acceptable et ne peut pas perdurer. M. le député demande à M. le ministre de mettre en place immédiatement les solutions qui s'imposent. Il lui demande de mettre en place immédiatement les mesures préconisées dans le rapport dès 2021 c'est-à-dire : une diminution conséquente des prix des péages, un raccourcissement de la durée de concession et un prélèvement sur l'excédent brut d'exploitation jusqu'à la fin des concessions.

Réponse émise le 27 juin 2023

Les sociétés concessionnaires d'autoroutes sont chargées de l'entretien et de l'exploitation du réseau autoroutier dit « concédé ». Cette gestion est opérée par voie contractuelle selon un mode concessif. Les hausses tarifaires sont inscrites dans les contrats et sont plafonnées, pour les sociétés concessionnaires historiques (SANEF, SAPN, APRR, AREA, ESCOTA, ASF, Cofiroute), à 70 % du niveau d'inflation de l'année précédente hors nouveaux travaux demandés par le concédant au concessionnaire. Ainsi, le niveau des péages évolue moins vite que l'inflation. Ces péages couvrent (i) les coûts d'exploitation et d'entretien du réseau, (ii) le remboursement des dettes contractées par le concessionnaire et les coûts de financement afférents et (iii) la rémunération du concessionnaire au titre du capital investi. Le rapport de l'IGF montre que le TRI projet est proche de celui anticipé par l'État lorsqu'il a cédé le capital qu'il détenait dans les sociétés concessionnaires d'autoroutes à des acteurs privés. En revanche, s'agissant du TRI actionnaire, qui avait été estimé à 7,7 % pour l'ensemble des sociétés d'autoroutes, l'écart par rapport aux anticipations s'est révélé à ce stade du déroulement de la concession plus significatif, avec une différence allant de 1 à 4 points de pourcentage. Ces chiffres doivent néanmoins être considérés avec beaucoup de précaution. D'une part, il n'était pas possible, au moment de la privatisation, d'anticiper la politique monétaire qui serait menée pendant les années 2010-2020 et qui a eu pour effet de permettre aux concessionnaires de bénéficier de conditions financières particulièrement favorables. D'autre part, le TRI actionnaire ne peut s'apprécier que sur l'ensemble de la durée d'une concession, c'est-à-dire, s'agissant des sociétés concessionnaires historiques, jusqu'à leur date d'échéance, comprise, selon les concessions, entre 2031 et 2036. L'écart actuellement constaté n'est donc pas définitif. L'État n'est pas resté inactif face à l'augmentation de la rentabilité des sociétés concessionnaires d'autoroutes : le rapport que vous mentionnez a été commandé ; la hausse du prix des péages a été contenue à 2 % en 2022 ; enfin, le choix d'indexer la taxe d'aménagement du territoire sur l'inflation a permis de rapporter plus d'un milliard d'euros à l'État. Par ailleurs, j'ai saisi le Conseil d'Etat afin qu'il étudie les voies juridiques permettant d'éviter l'apparition d'une situation de rente. Parmi les pistes étudiées figurent l'augmentation de la fiscalité pesant sur les sociétés concessionnaires détenues par le groupe et la réduction de la durée des contrats de concession autoroutière.

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