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David Guiraud
Question N° 838 au Ministère du ministère de l’économie (retirée)


Question soumise le 16 août 2022

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M. David Guiraud interpelle M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique au sujet de la décision du jugement du tribunal du commerce de Lille du 1er août 2022 conduisant au placement en redressement judiciaire de l'entreprise Camaïeu, dont le siège social se situe à Roubaix. La situation est particulièrement préoccupante pour l'activité de l'entreprise, ainsi que pour ses salariés. En difficulté depuis de nombreuses années, Camaïeu a été reprise le 17 août 2020 pour la somme de deux euros par le groupe Hermione People et Brands (HPB), HBP étant détenu par la Financière immobilière bordelaise (FIB), une structure d'investissement. Un certain nombre d'éléments ont perturbé l'activité de Camaïeu, notamment une cyberattaque ayant provoqué un blocage de l'entreprise de juin 2021 à octobre 2021 et conduit à la perte de 40 millions d'euros de chiffre d'affaire et, surtout, les conséquences économiques de la crise sanitaire liée à la pandémie du covid-19. Au regard de ces difficultés liées à la conjoncture, les dirigeants ont fait le choix de ne pas honorer les factures locatives de l'entreprise, créant de fait une dette locative qui atteindrait, selon le président de HPB, la somme de 69 millions d'euros. Des négociations avec les commerçants propriétaires ainsi que des recours en justice ont été entamés. Cependant, le 30 juin 2022, la Cour de cassation a tranché en faveur de l'obligation de paiement des loyers, qui n'est donc ni suspendue, ni neutralisée pendant le confinement. Le président de HPB a contesté cette décision, arguant que le fait que le trafic dans la distribution non alimentaire a chuté de 16,6 % alors que les loyers ont augmenté de 3,2 % sur la même période. Cette raison a été invoquée par les dirigeants pour déclarer le 25 juillet 2022 Camaïeu en cessation de paiement. La dette totale de l'entreprise atteindrait selon les calculs du tribunal du commerce de Lille 97 600 000 euros face à un actif disponible de 5 900 000 euros, justifiant ainsi une insuffisance d'actifs de 91 700 000 euros. Le jugement rendu le 1er août 2022 par le tribunal de commerce de Lille a fixé les décisions suivantes : cessation des paiements au 1er juillet 2022 ; période d'observation de 6 mois pendant laquelle seront établies par le chef d'entreprise des propositions tendant à la continuation ou à la cession de l'entreprise dans le cadre d'un redressement ; livraison d'un premier rapport précisant si l'entreprise dispose des capacités financières suffisantes à sa poursuite d'activité et comparution le 28 septembre 2022 à 14 h de l'entreprise et du représentant des salariés (si besoin) pour entendre la lecture dudit rapport et voir statuer sur la poursuite d'activité. M. le député souhaite attirer la plus haute vigilance de M. le ministre sur plusieurs points. Tout d'abord, sur la non-information des délégués syndicaux de la part de l'entreprise de ses résultats et de ses dettes en temps réel, en dépit de multiples sollicitations à ce sujet auprès du président du CSE, du président du CA et de la directrice générale opérationnelle de Camaïeu. Ensuite, le choix de ne pas honorer le paiement des loyers par les dirigeants pose question. Les délégués syndicaux de la CGT seraient intervenus dès le début de l'année 2021 pour alerter la direction et l'actionnaire propriétaire de la FIB, pour dénoncer les risques et les conséquences du non-paiement des loyers, et ce à plus forte raison sachant que cela entraînerait par ailleurs des indemnités de retards et des frais de justice. Ils ont ainsi fait part de leurs inquiétudes sur le fait que ce choix pourrait se traduire par des fermetures de magasins et des centaines de licenciements. Ce choix pose d'autant plus question au regard de l'existence d'une convention financière avec la société Multi Projet Investments (MIP) afin de permettre la centralisation des mouvements de trésorerie entre les sociétés du groupe HPB. MIP est ainsi intervenue afin de payer les salaires des employés de Camaïeu en décembre 2021 et janvier 2022. Une nouvelle fois, les délégués syndicaux, en dépit de leurs demandes répétées auprès de la direction, n'ont pas eu de réponse s'agissant du lien qui existait entre cette convention et le paiement des dettes de l'entreprise. Un courrier à ce sujet en date du 16 février 2022 a d'ailleurs été adressé par des délégués syndicaux au premier vice-procureur de la République. À cet égard, M. le député alerte M. le ministre sur le questionnement légitime du premier vice-procureur de la République, durant l'audition des dirigeants de Camaïeu le 1er août 2022 : « M. le premier vice-procureur de la République (...) pose la question : pourquoi les sommes dues correspondant aux loyers covid n'ont pas été provisionnées ? Il souligne qu'au vu de l'importance des sommes et du nombre de magasin, il y aurait dû y avoir des sommes provisionnées. Ne serait-ce pas de la cavalerie ? En réponse, il est déclaré que la cyberattaque a entraîné 40 millions d'euros de perte (...) que des tribunaux de cour d'appel sont allés dans le sens de Camaïeu et qu'il existe aussi une convention de trésorerie qui permet de solliciter l'actionnaire. M. le premier vice-procureur de la République, s'interroge également sur le fait que lors de l'acquisition de Camaïeu à la barre du tribunal et lors de la cession récente d'une autre société à laquelle la société HPB se portait candidate, l'actionnaire principal de Camaïeu avait rappelé qu'il possédait un actif de plus d'un milliard d'euros ; la question de l'absence de soutien de l'actionnaire interroge donc le ministère public. Le président de HPB précise : le montant est plutôt de 1,5 milliards d'euros dont 700 000 000 en actif net ; qu'il y a "une synergie HPB" mais qu'il y a une stratégie "par entreprise" ». M. le député souhaite avertir M. le ministre des conséquences désastreuses pour l'emploi et la vie des 2 714 salariés de l'entreprise. En 2020, la FIB avait décidé de reprendre 511 magasins et 2 619 salariés, dont 438 au siège à Roubaix, sur les 634 magasins et 3 146 salariés de l'entreprise en France. La directrice générale opérationnelle a exposé durant l'audition du 1er août 2022 le plan d'action pour relancer la marque. Il en résulte selon ses dires que la question des licenciement se pose pour environ « 80 magasins (ce qui représenterait 300 salariés) (...) mais qu'il y existe une possible mobilité vers les autres sociétés du groupe. Elle souligne le fait que le travail de négociation des loyers est à continuer ». Le président de HPB a précisé qu'il « y aura des solutions de reclassement des " vendeurs " » et qu' « il faut laisser une filiale choisir la voie de la procédure collective, l'objectif étant d'établir un plan pour lequel l'actionnaire devrait participer ». M. le député souhaite porter à la connaissance de M. le ministre les éléments suivants : le chiffre d'affaires de l'entreprise s'établissait à 228 millions d'euros en 2021 ; selon le président de HPB, la société a perçu de l'État 9,6 millions d'euros au titre de l'aide au paiement des loyers en raison des fermetures des enseignes durant les périodes de confinements ; l'AGS permettant la garantie des salaires serait intervenu en 2020 et interviendra pour le mois de juillet 2022 ; le propriétaire de la FIB et actionnaire du groupe a été classé comme étant la 104e plus grande fortune de France en 2022 ; le questionnement des délégués syndicaux sur la stratégie de cet actionnaire qui, à la suite de la reprise de Camaïeu et en dépit des difficultés de cette entreprise, a également repris d'autres sociétés en difficulté qu'il a fallu, là aussi, consolider, telles que La Grande Récré ou Go Sport, est encore à ce jour sans réponse ; M. le premier vice-procureur de la République a mentionné durant l'audition du 1er août 2022 qu'il « éprouve de la tristesse, de l'amertume et de la colère, qu'il pense aux salariés qui vont vivre une seconde procédure collective (...) qu'il va y avoir des licenciement et ceci même si un plan de continuation est arrêté » et qu'il est « plus qu'inquiet et très pessimiste quant à cette situation ». En conséquence de quoi, M. le député demande à M. le ministre les actions qu'il compte mettre en œuvre afin de faire la lumière sur cette situation, notamment sur, d'une part, le choix des dirigeants de ne pas honorer les loyers des locaux des enseignes alors même que l'entreprise a reçu une aide de l'État à cette fin et, d'autre part, sur celui de l'actionnaire de ne pas user de la convention financière afin de mettre en réserve les sommes requises au titre des loyers dus, des indemnités de retard et des frais de justice qui découlent de cette décision. Il lui demande également comment l'État compte préserver ces emplois et cette activité précieuse, à l'heure où les discours sur la relance économique et industrielle du pays fleurissent : il y a, sur le dossier Camaïeu, besoin d'actes forts.

Retirée le 11 juin 2024 (fin de mandat)

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