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Karine Lebon
Question N° 9686 au Ministère de la santé


Question soumise le 4 juillet 2023

Mme Karine Lebon alerte M. le ministre de la santé et de la prévention sur l'absence de mise en œuvre de la promesse gouvernementale relative à la revalorisation du coefficient géographique appliqué aux établissements de santé de La Réunion. Ces derniers regrettent que le coefficient géographique stagne une nouvelle fois en 2023, pour la dixième année consécutive, au taux de 31 % dans le département. Pourtant, lors de son séjour sur l'île le 10 mai 2022, M. le Premier ministre Jean Castex avait annoncé que ce coefficient serait revu en 2023, en réponse aux demandes répétées des élus et établissements de santé réunionnais. Le Président de la République avait d'ailleurs lui-même évoqué l'ouverture du dossier de revalorisation du coefficient géographique lors de sa rencontre avec les élus réunionnais le 27 janvier 2022. L'article L. 162-22-10 du code de la sécurité sociale dispose que les coefficients géographiques sont implantés « dans certaines zones afin de tenir compte d'éventuels facteurs spécifiques, qui modifient de manière manifeste, permanente et substantielle le prix de revient de certaines prestations dans la zone considérée ». Les régions éligibles au coefficient géographique présentent des surcoûts importants et ce s'agissant de l'ensemble des facteurs de production (charges de personnel, médicaments et dispositifs médicaux, fiscalité, surcoûts immobiliers), dans des proportions spécifiques à chaque région. Si le surcoût lié aux salaires des personnels à La Réunion est pour l'essentiel pris en compte par le coefficient de 31 %, il n'en est pas de même par exemple pour l'acheminement des médicaments et matériels médicaux, pour la fiscalité ou pour le coût des constructions immobilières etc. La structure des économies locales, avec de fréquentes situations d'oligopoles ou de monopoles (exemple des énergies, produits sanguins, gaz médicaux), pèse fortement sur les coûts des prestations auxquelles les établissements hospitaliers ont recours. Les écarts de charges générant un surcoût par rapport aux établissements de santé hexagonaux sont conséquents. Alors que ce coefficient est censé valoriser des facteurs spécifiques affectant de manière permanente et substantielle les coûts des prestations de santé sur un territoire donné, La Réunion n'a vu son coefficient revalorisé seulement d'un point depuis sa création en 2006. Cette inadéquation entre le coefficient géographique tel qu'il est appliqué à La Réunion et la réalité vécue par les établissements de santé du territoire doit être reconnue et une solution pérenne doit être trouvée. Le rapport d'information parlementaire n° 2248 du 19 septembre 2019 confirmait qu'un coefficient géographique à 31 % ne permet pas aux hôpitaux de La Réunion de faire face aux charges liées à l'éloignement, à l'insularité, à l'étroitesse du marché intérieur, aux risques naturels et aux facteurs sociaux locaux. S'appuyant sur une étude approfondie menée en 2018 par les cabinets Ernst and Young et Verso consulting pour le compte de la Fédération hospitalière de France (FHF) de l'océan indien, les rapporteurs confirmaient que pour compenser ces charges, il faudrait porter le niveau du coefficient géographique de 31 à 35 %. Dans leur recommandation n° 5, les rapporteurs précisaient ainsi : « Les coefficients géographiques des départements ultramarins étant sous-évalués, augmenter le taux du coefficient géographique en calculant le plus exactement possible les surcoûts de fonctionnement par grandes catégories de dépenses.« Si des amendements d'appel sont régulièrement déposés en projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), les paroles du Gouvernement ne sont pas encore suivies d'actes concrets alors même que toute absence d'évolution de ce coefficient expose les établissements réunionnais à une fragilisation néfaste à la fois pour les patients, les personnels et l'ensemble du tissu social. Malgré les efforts considérables des établissements des dernières années pour assurer le retour à l'équilibre financier, nous observons une distorsion, au fil du développement des activités hospitalières, entre les charges et les ressources des établissements, en dépit de l'engagement sans faille des personnels lors des crises sanitaires successives. Le centre hospitalier universitaire de La Réunion a d'ailleurs annoncé pour 2022 un déficit de 50 millions d'euros, en raison notamment de l'absence de revalorisation du coefficient géographique, situation qui doit trouver de la part de l'État des réponses pérennes de stabilisation financière et d'accompagnement. Face à cette situation urgente, elle lui demande donc des précisions quant à la date exacte à laquelle le coefficient géographique appliqué aux établissements de santé de La Réunion sera revalorisé à 35 %.

Réponse émise le 12 décembre 2023

Certains territoires bénéficient, dans notre système de santé, de modalités de financement spécifiques : c'est notamment le cas du coefficient géographique,  outil qui permet de majorer les tarifs perçus par les établissements de santé pour tenir compte du coût de la vie dans ces territoires. Cet outil est mobilisé dans les territoires ultramarins, en Corse, et en Ile-de-France. Le coefficient géographique a fait partie des éléments constitutifs de la mise en œuvre de la tarification à l'activité, qui prévoyait pour les activités de médecine, chirurgie et obstétrique de mettre en place des tarifs nationaux par prestations hospitalières (basés sur un référentiel de coûts moyens) et à partir d'une classification médico-économique des séjours. La nécessité est très tôt apparue de majorer, pour un nombre de zones géographiques limité et présentant des surcoûts liés à des contraintes spécifiques et pérennes, ces tarifs. Le dispositif a ainsi vocation à compenser des écarts de coûts structurels supportés par les établissements de santé liés à leur implantation géographique. Les coefficients géographiques s'appliquent également aux modélisations des Missions d'intérêt général (MIG), dès lors qu'elles impliquent notamment des postes de charges liés aux personnels. Ainsi, la quasi-totalité des MIG se voient appliquer le coefficient géographique. A la demande du Gouvernement, la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques, qui dépend notamment du ministère de la santé et de la prévention, a réalisé, au cours de l'année écoulée, une étude permettant d'évaluer le niveau du coefficient géographique. L'objectif était de mesurer si ce coefficient permettait effectivement de compenser les charges supplémentaires auxquelles les établissements ultra-marins doivent faire face. Cette étude a conduit le Gouvernement à affiner les données utilisées dans le calcul de ce coefficient pour être davantage en phase avec la réalité. Cela se traduira, sans modification du mode de calcul, par une revalorisation progressive pour les départements dont il est avéré qu'un retard est observé. Il convient de noter que les modalités de financement des établissements des autres champs d'activité ont également évolué ces dernières années et dans le cadre notamment de la mise en œuvre des dotations populationnelles sur les champs des urgences, de la psychiatrie ou des soins médicaux de réadaptation, les coefficients géographiques ont été pleinement intégrés pour définir le modèle de péréquation de ces dotations entre régions. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 comporte par ailleurs une réforme majeure du modèle de tarification à l'activité (T2A). La mission flash de la délégation Outre-Mer de l'Assemblée nationale en cours sur la révision du coefficient géographique et le déficit des établissements pourra permettre, dans les prochains mois, de nourrir les réflexions du Gouvernement. Enfin, au-delà du coefficient géographique, le Gouvernement agit de manière résolue pour répondre aux besoins de santé des territoires ultramarins, via notamment les enveloppes mobilisées pour l'investissement hospitalier dans le cadre du « Ségur de la santé » en Outre-mer. Cela a représenté par exemple 448 millions d'euros en Martinique ou 274 millions d'euros à la Réunion.

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