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Julien Odoul
Question N° 993 au Ministère de l’éducation nationale


Question soumise le 6 septembre 2022

M. Julien Odoul alerte M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sur le nombre inquiétant de fermetures de classes d'école. Lors de la Conférence des territoires en juillet 2017, Emmanuel Macron faisait la promesse qu'aucune classe ne serait contrainte à la fermeture en milieu rural. Cinq ans après, force est de constater que cette promesse n'a pas été tenue et que le bilan en la matière est désastreux. Dans le département de l'Yonne, 120 classes ont été fermées entre 2017 et 2021. En dix ans, ce sont 211 classes qui ont été supprimées pour seulement 101 ouvertures. Dans le même temps, près d'un millier de classes a été ouvert dans les métropoles et dans les zones jugées prioritaires de la région Bourgogne Franche-Comté. Face à ces chiffres alarmants, comment ne pas s'inquiéter de la politique inégalitaire du Gouvernement qui illustre une nouvelle fois son délaissement des territoires ruraux, déjà fortement fragilisés par le manque d'infrastructures et de services publics. En plus de la désertification médicale, économique et sécuritaire, ces territoires connaissent maintenant une importante désertification scolaire au profit des centres urbains, où les écoles y sont concentrées. Les parents d'élèves s'inquiètent aussi de la fermeture de certains points d'arrêts de bus scolaire et craignent que cela soit la cause de nouvelles suppressions de classes. En effet, pour la commune de Nailly dans l'Yonne, deux hameaux proches d'environ 300 mètres ne sont plus desservis et ce pour des raisons incompréhensibles. Si aucun de ces deux arrêts de bus n'est remis en service, les enfants concernés, âgés de 3 à 6 ans, devront être scolarisés à Sens, en ville. La suppression de plus en plus fréquente des services publics en milieu rural et notamment des missions fondamentales de l'État, porte gravement atteinte à l'attractivité des territoires et va à l'encontre de la réalité démographique. Chaque fermeture de classe est un coup sévère porté aux efforts consentis par l'ensemble des acteurs locaux afin de maintenir en vie des communes désertifiées parce que délaissées par l'État depuis des décennies. Le rééquilibrage territorial ne pourra s'opérer tant que les villages perdront un moyen d'enseignement au profit des villes. Face à cette rupture d'égalité, il demande au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse de reconsidérer ces décisions dans les plus brefs délais afin de respecter la promesse républicaine de l'égalité des chances.

Réponse émise le 24 janvier 2023

Lors de la Conférence nationale des territoires au Sénat le 18 juillet 2017, le Président de la République indiquait la nécessité de refonder en profondeur l'interaction entre l'État et les collectivités territoriales, afin notamment que les territoires les plus ruraux ne soient plus considérés comme la variable d'ajustement économique, notamment dans le domaine de l'éducation. Pour la rentrée 2020, le ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse avait ainsi décidé qu'aucune fermeture de classe dans le primaire en milieu rural n'aurait lieu sans l'accord du maire. Cette mesure s'ajoutait à celle, actée elle jusqu'à la fin du quinquennat précédant, de "non-fermeture d'école sans l'accord du maire". Par ces actes concrets, l'État démontrait son engagement auprès des territoires ruraux dans le domaine de l'éducation. Pour autant, la diversité des situations en milieu rural ne permet pas d'apporter une réponse unique, et la non-fermeture de classes ou d'écoles ne saurait être la seule solution efficace pour résoudre l'ensemble des problématiques auxquelles sont confrontés ces territoires. Les réponses apportées se doivent d'être multiples et adaptées. Si certaines communes rurales sont confrontées à des difficultés d'accessibilité, d'autres bénéficient de la réussite pédagogique des projets de regroupement qu'elles ont menés. Ces regroupements peuvent prendre plusieurs formes : les regroupements pédagogiques intercommunaux (RPI), avec des regroupements d'écoles sur un seul site (RPI concentré) ou sur plusieurs sites (RPI dispersé). On en dénombre 4 777 RPI à la rentrée 2021 à l'échelle nationale, dont 61 dans le département de l'Yonne (54 dispersés et 7 concentrés). 2 RPI ont notamment été ouverts depuis la rentrée scolaire précédente dans ce département. Ils constituent un outil efficace d'aménagement du territoire scolaire ; les réseaux d'écoles ont également pour vocation de regrouper des écoles ou des RPI de plusieurs communes autour d'un projet pédagogique commun, avec souvent une mise en commun d'équipements (sportifs, informatiques) par les communes concernées. L'État a également engagé ces dernières années plusieurs démarches expérimentales pour permettre aux territoires ruraux de bénéficier d'un soutien et d'une liberté d'action adaptée pour répondre aux enjeux auxquels ils sont confrontés : il a été proposé aux élus des départements ruraux ou de montagne d'engager une démarche contractuelle pluriannuelle d'améliorations qualitatives de l'offre éducative dans ces territoires. Cette démarche, précisée par l'instruction n° 2016-155 du 11 octobre 2016, s'est traduite par la signature à ce jour de cinquante « conventions ruralité ». L'État s'engage à maintenir les moyens nécessaires au fonctionnement des écoles dans les territoires ruraux, et en contrepartie, les acteurs locaux s'engagent à réfléchir aux nouvelles organisations des écoles (RPI) et aux aménagements nécessaires, notamment les transports, pour faciliter les déplacements vers ces écoles ; les Territoires éducatifs ruraux (TER) sont également étendus. Ce dispositif s'adresse aux zones rurales et de montagne, et plus généralement aux territoires éloignés, confrontés à des problématiques spécifiques (distance, relief, dispersion de l'habitat, éloignement des opportunités d'emploi et de poursuite d'études, déprise démographique). Ce programme vise ainsi à renforcer les prises en charge pédagogiques et éducatives des enfants et des jeunes, avant, pendant, autour et après le cadre scolaire. Au sein de l'académie de Dijon, cinq territoires éducatifs ruraux ont déjà été mis en place (Bourbon-Lancy, Charny, Corbigny, La Machine, Saulieu-Liernais). La signature du TER de Charny engage notamment les acteurs locaux du département de l'Yonne dans cette démarche. Six autres TER ont été déployés en Bourgogne-Franche-Comté, dans l'académie de Besançon (Delle et communes associées, Haut-Jura, Jussey, Pays de Maîche, Porte du Jura, Saint-Loup-sur-Semouse). A l'échelle nationale, 570 communes sont engagées dans la démarche, ainsi que 45 950 élèves du premier degré public, 351 du privé, 27 749 collégiens du public et 358 du privé ; le programme de revitalisation des internats en zone rurale a permis de labelliser des résidences thématiques dans des collèges et des lycées de zones rurales et de montagne dotés d'un projet éducatif renforcé, construit autour de thèmes porteurs d'avenir (artistique, numérique, sportif, ouverture internationale, etc.). Au total, 132 internats d'excellence sont situés en zone rural, dont 18 font l'objet d'une convention d'attribution de moyens dans le cadre du Plan de relance ; le « plan mercredi » propose également des solutions et des financements pour faciliter l'organisation des accueils de loisirs de qualité respectant les principes de la charte qualité « plan mercredi ». Un plan de relance du dispositif a été proposé en mai 2021 pour soutenir davantage les collectivités en difficulté économique, et notamment celles en zone de revitalisation rurale (ZRR), faiblement dotées en terme de moyens et d'ingénierie ; avec le « plan bibliothèques », en trois ans, l'État a également délégué six millions et demi d'euros aux académies, principalement rurales, pour l'achat de livres pour les bibliothèques d'école. La ventilation des crédits entre les académies est effectuée principalement selon des indicateurs de ruralité, en prenant en compte le critère du nombre d'élèves scolarisés dans les écoles des communes rurales ; le dispositif Cordées de la réussite a été étendu aux collèges ruraux. À ce jour, 339 collèges publics ruraux sont encordés soit 49,4 % des collèges publics ruraux en 2021-2022, ce qui représente 14 212 collégiens publics ruraux encordés, soit 15,7 % des collégiens scolarisés dans un collège rural. Au travers de ces démarches, l'État poursuit son engagement concret en faveur d'une meilleure prise en compte des territoires ruraux. Afin d'adapter les services publics aux enjeux locaux, cette politique repose sur le renforcement des partenariats et des coopérations locales, en tout premier lieu avec les collectivités territoriales. Les transports par exemple, doivent faire l'objet d'une réflexion entre acteurs locaux compétents, au regard des enjeux mentionnés précédemment. Avec la mise en œuvre de ces dispositifs, l'État garantit pour ce qui le concerne, à tous les élèves du pays, quelle que soit leur origine sociale ou territoriale, une parfaite égalité des chances en matière de réussite scolaire et d'orientation.

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