Intervention de François Loncle

Réunion du 3 novembre 2016 à 11h30
Mission d'information sur les relations politiques et économiques entre la france et l'azerbaïdjan au regard des objectifs français de développement de la paix et de la démocratie au sud caucase

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Loncle :

Avant d'en venir à me deux questions, je voudrais faire une remarque d'ordre général, tirée de mon expérience limitée des missions d'observation électorale. J'ai participé à deux missions de ce type : l'une en Azerbaïdjan – à laquelle participait aussi Michel Voisin – pour le Conseil de l'Europe ; l'autre lors d'élections législatives au Burkina Faso, dans le cadre de l'Assemblée parlementaire de la francophonie.

Je n'accepterai plus aucune mission de ce genre. Pourquoi ? Arrivés la veille des élections, les nombreux observateurs – qui n'étaient pas seulement des Français – ont assisté dans les deux cas au déroulement d'un scrutin absolument impeccable. En Azerbaïdjan, j'étais surpris de constater que l'organisation – bureaux de vote, déroulement du scrutin, dépouillement – était même plus rigoureuse que dans notre propre pays ! Le problème est que les observateurs ne participent en rien à tout ce qui constitue l'amont de l'élection : la campagne électorale, l'exercice de la liberté d'expression et de communication, la répartition des temps de parole, les réunions publiques, l'égalité entre les candidats, etc. Aucune mission d'observation électorale ne participe à ce processus qui précède l'élection proprement dite.

J'ai le souvenir d'un récit de notre cher collègue Loïc Bouvard qui participait à de nombreuses missions. Accompagné d'un membre du parti socialiste, il était venu devant la Commission des affaires étrangères rendre compte du déroulement d'une élection présidentielle en Géorgie. Tous les deux nous avaient raconté à quel point tout s'était magnifiquement bien déroulé ; ils ne trouvaient rien à redire concernant ces élections ; tout était impeccable. Le lendemain, une révolution éclatait en Géorgie, l'élu était renversé et de nouvelles élections étaient organisées quelques mois plus tard… Leurs observations ne correspondaient visiblement pas au ressenti des gens sur place. Il faut donc rappeler les limites de ce type d'exercice.

Le Conseil de l'Europe est une très belle institution, trop méconnue, insuffisamment pratiquée par les responsables politiques de tous bords, mais qu'il faut sauvegarder à tout prix. Comme François Rochebloine, j'y siège depuis longtemps, et je tiens à dire que le travail de Pierre-Yves Le Borgn'est absolument remarquable et d'une très grande rigueur. La première question que je veux lui poser est double. Sur les quarante-sept pays appartenant au Conseil de l'Europe, combien ne respectent pas les valeurs de l'Europe dans le domaine des droits de l'Homme et de la démocratie, à l'instar de l'Azerbaïdjan ? Pour ma part, je pense qu'ils sont une dizaine dans ce cas. Pour une telle institution, c'est un ratio élevé. À l'inverse, combien de pays du Conseil de l'Europe remplissent les critères que vous avez énumérés en négatif à propos de l'Azerbaïdjan ?

Malheureusement, la description de Pierre-Yves Le Borgn'est un réquisitoire contre la diplomatie française. En tout cas, je l'ai prise comme telle. Ce réquisitoire vise en particulier le Président de la République, le ministre des affaires étrangères et l'ambassadrice Aurélia Bouchez qui, pendant une heure, nous a fait ici une description de ce pays qui ne correspond absolument pas à ce que ressent Pierre-Yves Le Borgn'au Conseil de l'Europe. Nous sommes bien obligés de constater le jugement contradictoire que suscite ce pays membre du Conseil de l'Europe avec lequel la France entretient des relations d'un très haut niveau dans les domaines économique, politique, etc. Si ce que vous dites est exact, nous pouvons légitimement nous poser la question suivante : pourquoi la France, le Président de la République, le ministre des affaires étrangères et son ambassadrice ne nous le disent pas la même chose ?

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