Intervention de Marie-Françoise Bechtel

Réunion du 30 avril 2014 à 11h45
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Françoise Bechtel :

Votre exposé, monsieur le ministre, nous concerne d'autant plus que vous avez souligné, tout comme votre prédécesseur, la nécessité de compléter le dispositif législatif, notamment afin que les services de police soient autorisés à infiltrer les sites Internet. Nous en étions restés au point où des problèmes constitutionnels faisaient obstacle à une intervention législative rapide ; les services du ministère de l'Intérieur devaient travailler sur la question. Êtes-vous aujourd'hui en mesure de nous dire dans quel délai une disposition législative pourrait être prise ?

Permettez-moi, puisque j'étais la rapporteure du projet de loi relatif à la sécurité et à la lutte contre le terrorisme, de faire quelques commentaires sur les interventions des précédents orateurs.

Je dois dire, monsieur Larrivé, que la tribune du juge Trévidic en faveur d'une révision de l'infraction dite « d'association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un acte terroriste » m'a beaucoup étonnée ; en effet, lorsque nous l'avions auditionné dans le cadre de la préparation de mon rapport, il nous avait au contraire expliqué que la loi de 1996 qui définit cette infraction était remarquable par sa souplesse et son empirisme, qu'elle était souvent copiée à l'étranger et que nous n'avions aucune raison de la dénigrer. Je suis par conséquent surprise que l'on juge aujourd'hui nécessaire de définir l'acte isolé, alors qu'il soutenait à l'époque qu'une telle incrimination permettait d'en tenir compte. La réflexion aurait-elle évolué sur ce point ? Qu'en pense-t-on au ministère de l'Intérieur ?

La possibilité de bloquer l'accès aux sites Internet avait également été examinée par la Commission, des amendements ayant été déposés en ce sens ; mais nous avions considéré – à tort ou à raison – qu'une telle mesure serait contre-productive par rapport à l'objectif d'infiltrer ces sites. On ne peut pas faire les deux : il en est comme de boire ou conduire, il faut choisir !

Un délit de consultation des sites Internet faisant l'apologie du terrorisme serait malaisé à mettre en oeuvre. Certaines personnes pouvant être amenées à les consulter de façon légitime, il faudrait que la loi prévoie des exceptions : je pense non seulement aux forces de sécurité, mais aussi aux chercheurs. Or comment définir un chercheur ? Je crains qu'il ne soit bien difficile d'aboutir à une disposition claire et efficace.

À l'époque, certains membres de la Commission avaient estimé qu'il fallait agir prioritairement contre la propagande ouverte, notamment dans les cours de récréation. Or il s'avère que le recrutement des djihadistes s'effectue dans le secret, via Internet, sans que les familles en soient informées. Il s'agit de méthodes de professionnels, beaucoup plus efficaces et bien plus dangereuses qu'une propagande faite aux yeux de tous – même si celle-ci, particulièrement choquante, mérite des actions appropriées, notamment au titre de la protection de l'enfance. Cela rend d'autant plus nécessaire une infiltration des sites par les services de police.

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