Intervention de Éric Ciotti

Séance en hémicycle du 16 septembre 2014 à 21h30
Lutte contre le terrorisme — Après l'article 1er

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Ciotti :

Je vous remercie, madame la présidente.

Monsieur le ministre, je souhaite, avec cet amendement, aborder la question de la proportionnalité des réponses que notre société peut apporter afin de dissuader, prévenir, mais également sanctionner ceux qui vont combattre à l’étranger dans des groupes qui incarnent la barbarie contemporaine.

Je veux donc soulever, à ce stade de nos débats, la question de la déchéance de la nationalité. Nous l’avons abordée hier, au cours de la discussion générale. Le Premier ministre lui-même, dans un entretien accordé il y a quelques mois, au quotidien Libération je crois, indiquait qu’elle ne devait pas être taboue.

J’approuve et soutiens, naturellement, cette position. Mais force est de constater qu’elle est restée lettre morte, et n’a jamais été traduite en actes, contrairement à ce qui s’est passé dans d’autres États membres de l’Union européenne, en particulier la Grande-Bretagne, où, au cours des dix derniers mois, je crois, il a été procédé à la déchéance de la nationalité britannique d’une vingtaine de binationaux.

Monsieur le ministre, en répondant à mon intervention au nom de mon groupe lors de la discussion générale, vous avez affirmé qu’il existait des exemples similaires dans notre pays. J’aimerais donc que vous puissiez nous donner les chiffres, ainsi que la position du gouvernement.

Je crois en effet que, face à l’ampleur de la menace, face à un risque qui n’a jamais été aussi élevé, nous devons utiliser des armes suffisamment explicites et dissuasives contre ceux qui ont l’intention de partir combattre à l’étranger, au sein de forces ayant des visées terroristes. Il faut que nous puissions, à leur retour, leur infliger cette sanction.

Elle existe déjà dans notre droit : L’article 25 du code civil dresse la liste des crimes et délits en raison desquels la déchéance de nationalité peut être prononcée à l’égard d’un individu. Je l’utilise donc comme support juridique de mon amendement.

En créant, par un article L. 421-2-6 du code pénal, une nouvelle incrimination pour un acte terroriste commis à titre individuel, vous élargissez opportunément le cadre défini par la loi antiterroriste de 1986, qui reposait sur l’incrimination d’association de malfaiteurs.

Je souhaite donc compléter l’article 25 du code civil par un alinéa ajoutant cette nouvelle incrimination : telle est l’économie générale de cet amendement.

Vous allez sans doute me répondre qu’il est satisfait, puisque les actes de terrorisme figurent déjà dans la rédaction actuelle de l’article 25. Mais je crois qu’il serait préférable, utile, opportun et légitime de préciser très clairement que cette nouvelle incrimination doit faire partie des cas dans lesquels peut être prononcée la déchéance de la nationalité française.

Je crois, monsieur le ministre, que la question a valeur de symbole : une telle évolution est réclamée par beaucoup de nos concitoyens, qui ne peuvent comprendre que nous restions passifs et inertes quand des centaines – demain peut-être des milliers – de binationaux partent à l’étranger commettre des actes terroristes, et peuvent revenir en France tout en conservant leur nationalité.

J’ajoute, et cela a déjà été évoqué, que l’application de l’article premier pourrait se trouver entravée par l’existence de binationaux : grâce à leur autre nationalité, ils peuvent contourner l’interdiction provisoire de voyager.

Ce débat, je crois, doit être engagé. Nous attendons du gouvernement, surtout des actes. Le droit, par l’article 25 du code civil, permet la déchéance de la nationalité française, sauf bien sûr, et c’est légitime, si celle-ci a pour effet de rendre apatride l’individu à l’égard duquel elle est prononcée.

Il faut que notre pays ait enfin recours à ces procédures de déchéance ; l’opinion les attend, et de tels exemples seront très dissuasifs pour ceux qui ont l’intention de commettre des actes terroristes en France ou à l’étranger.

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