Intervention de Alain Tourret

Réunion du 13 janvier 2016 à 9h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain Tourret :

La qualité évidente des travaux de notre président et de M. Poisson démontre que le contrôle politique est inséparable de la protection des libertés. À bien y réfléchir, il constituait l'un des éléments de la révision de 2008, à l'occasion de laquelle a été introduit un contrôle de l'usage des dispositions de l'article 16 de la Constitution. Il devrait dès lors être l'une des priorités de la prochaine inscription de l'état d'urgence dans la Constitution.

De ce point de vue, je préfère parler d'état de nécessité plutôt que d'état d'urgence. Le premier n'est pas encadré dans le temps ; le second, si. Je vous renvoie à la thèse très convaincante de Geneviève Camus, L'État de nécessité en démocratie, qui permet de pérenniser telle ou telle mesure.

Qui est le garant de la liberté individuelle ? Aujourd'hui, la magistrature judiciaire est meurtrie. Ce qui se dit de réunion en réunion dans les assemblées générales des cours d'appel doit au moins être entendu, à défaut d'être pris en compte. S'il fallait distinguer entre prévention d'un côté et répression de l'autre, ne faudrait-il pas alors procéder à une réforme d'ensemble du statut de la magistrature et de celui du parquet ? Avant-hier encore, la procureure générale près la cour d'appel de Caen ne disait pas autre chose : dans ces conditions, il faut repenser de fond en comble les missions de la magistrature administrative et celle de la magistrature judiciaire. J'ai toujours été convaincu que la magistrature administrative est l'une des garantes des libertés, mais une scission sans doute trop simpliste est en train de s'opérer. En tout état de cause, s'il fallait confier l'ensemble des mesures de prévention à la magistrature administrative, il faudrait sans doute réviser la Constitution, et non pas seulement la loi. Il s'agit d'une rupture profonde avec nos traditions. Je n'y suis pas opposé, mais tout doit être mis sur la table. La magistrature judiciaire s'est toujours considérée comme la protectrice des libertés, ce que ne revendique pas la magistrature administrative.

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