Intervention de Lisa Belluco

Réunion du mercredi 18 octobre 2023 à 9h40
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLisa Belluco :

La crise écologique que nous traversons est coûteuse : elle nous oblige à investir pour réduire sa portée et nous y adapter. Je citerai une nouvelle fois le rapport Pisani-Ferry, qui évalue l'investissement nécessaire à 67 milliards d'euros par an ; or, dans ce PLF, le Gouvernement n'annonce que 7 milliards.

Malgré ce manque général de moyens, quelques organismes font figure de rescapés, tels que l'Ademe, qui voit ses autorisations d'engagement et crédits de paiement augmenter de 25 %. Au lieu d'être la règle, cette hausse reste une exception, notamment en matière de prévention des risques naturels et industriels. Les autres financements stagnent, en dépit de l'inflation, alors que les risques ne vont qu'en s'aggravant, sous l'effet du changement climatique et de la réindustrialisation.

Prenons le risque industriel, auquel une commune sur deux est exposée. Depuis vingt-cinq ans, on compte en moyenne quatre incidents par jour sur le territoire national : il s'agit là de dégradations de l'environnement et de menaces pour la santé de nos concitoyens. Puisque nous voulons tous mener une politique de réindustrialisation, ces risques vont s'accroître ; or si nos concitoyens ne font pas confiance à nos institutions, ils n'accepteront pas l'implantation de nouvelles industries polluantes et la réindustrialisation échouera. Il faut donc accorder à l'inspection des installations classées toutes les garanties pour qu'elle puisse effectuer correctement son travail et assurer la sécurité de nos concitoyens, auxquels nous devons éviter un nouvel AZF ou un nouveau Lubrizol.

Concrètement, cela signifie qu'il faut donner plus de moyens aux Dreal. En juillet dernier, alors que nous examinions le projet de loi relatif à l'industrie verte, le ministre délégué chargé de l'industrie avait pris un engagement devant l'Assemblée nationale : « Nos discussions avec le ministre de la transition écologique nous ont conduits à observer que les Dreal ne disposaient pas de moyens suffisants. Nous allons donc les accroître – cela se retrouvera dans le PLF – afin de nous assurer de l'effectivité du texte. » Pourtant, nous ne voyons dans le PLF qu'une augmentation de 13 ETP pour la prévention des risques, dont la moitié concernerait l'ASN. Où sont les moyens supplémentaires promis pour renforcer la sécurité industrielle de notre pays ?

En matière de transition énergétique, le constat est le même : les augmentations de moyens ne permettent pas de répondre aux défis qui sont les nôtres. Il y a quelques jours, nos collègues Mmes Julie Laernoes et Marjolaine Meynier-Millefert présentaient justement un rapport d'information sur la rénovation énergétique des bâtiments, qui pointe plusieurs insuffisances de notre politique dans ce domaine. Pour atteindre nos objectifs en matière de climat, il faudrait rénover 370 000 logements par an d'ici à 2030, mais MaPrimeRénov' reste un dispositif opaque : les rénovations sont trop partielles, le reste à charge colossal et le compte n'y est pas. Le reste à charge pour une rénovation globale peut atteindre 29 000 euros, soit près d'un an de salaire pour un ménage qui gagne 2 500 euros par mois. Comment voulez-vous économiser assez pour sortir de la précarité énergétique ? Nous avons besoin d'un soutien plus fort de l'État, qui devrait consacrer à cet objectif 1,5 milliard d'euros par an et non 1,2 milliard sur trois ans comme l'a annoncé le ministre.

Le problème est similaire concernant l'achat de véhicules peu polluants, qu'il s'agisse de vélos ou de voitures. Pour ces dernières, les aides doivent permettre de mieux cibler les petits véhicules légers qui remplissent la même fonction que les gros mais en consommant moins d'énergie, moins de matériaux et en émettant moins de polluants. Les gens ont besoin de se déplacer, pas de conduire un gros SUV.

Tout n'est pas à jeter dans ce projet de loi de finances, mais le texte ne prend pas encore la mesure de la crise écologique que nous traversons. C'est inquiétant.

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