La séance est ouverte.
La séance est ouverte à seize heures.
La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
La République française ne saurait tolérer qu'un seul de ses enfants soit plongé dans l'indignité de vivre dans un habitat précaire. Face à l'indignité, la seule réponse possible est l'indignation. Or, quand on est un responsable politique, l'indignation doit toujours mener à l'action – plutôt que parler, il faut agir. L'indignation, c'est le discours puissant du Président de la République à Marseille en juin 2023, discours dans lequel il s'est saisi du sujet à bras-le-corps. Quant à l'action, elle s'est traduite, depuis plusieurs mois, par le travail de la Première ministre, Élisabeth Borne, et des ministres chargés du logement qui ont œuvré à mes côtés et que je salue : Olivier Klein a posé les bases de ce projet de loi et Patrice Vergriete en a rédigé l'essentiel.
Ce texte important propose des solutions concrètes à un problème qui touche la France entière et qui crée des situations de détresse humaine intolérables. Il constitue une promesse sociale et humaine pour des milliers de Français et intervient dans un contexte de crise profonde et multifactorielle du secteur du logement, une crise à la fois conjoncturelle et structurelle à laquelle nous devons répondre.
Le projet de loi traduit plusieurs ambitions complémentaires au service de nos concitoyens : une ambition économique, une ambition écologique et une ambition sociale.
Une ambition économique, tout d'abord. Pour que chacun puisse acheter ou louer un logement correspondant à ses besoins, nous développons des mesures immédiates de soutien à la production de logements abordables. En 2024, la mobilisation renforcée du secteur HLM nous permettra de créer 110 000 logements sociaux. Par ailleurs, 6 millions de Français supplémentaires seront rendus éligibles au prêt à taux zéro (PTZ) grâce à de nouveaux critères et au recentrage du dispositif sur la production neuve en zone tendue.
Une ambition écologique, ensuite. Elle se traduit par l'accélération de l'adaptation du parc national de logements aux enjeux de la transition écologique. Le Gouvernement investit massivement – j'insiste sur ce terme – en faveur de la rénovation énergétique et de la décarbonation des bâtiments. Cette politique repose sur trois piliers : la lutte contre les passoires thermiques, la montée en puissance du dispositif MaPrimeRénov' et un effort de financement pour la rénovation du parc social.
Enfin, le projet de loi nourrit une ambition sociale, qui sera au cœur de nos débats et dont les dimensions sont multiples : l'hébergement d'urgence, dont nous maintenons en 2024 le niveau extrêmement haut – 203 000 places disponibles avant même le déblocage des 120 millions d'euros annoncés par le Gouvernement –, l'accélération de la construction de logements sociaux, et, plus urgentes encore, la lutte contre l'habitat indigne et la requalification des copropriétés dégradées.
De quoi parlons-nous exactement ? Certaines copropriétés sont dites dégradées parce qu'elles sont fragilisées par des problèmes financiers ou techniques et parce qu'elles rencontrent des difficultés pour maintenir leurs immeubles en bon état. Plus de 114 000 copropriétés, soit près de 1,5 million de logements, sont aujourd'hui fragiles et nécessiteront, à court ou moyen terme, une intervention de la puissance publique. Lorsque ces situations dégénèrent et que l'on n'intervient pas, peu ou mal, la santé et la sécurité des occupants peuvent être menacées et des drames se produire.
Actuellement, 400 000 logements, occupés par 1 million de personnes, dont 50 % de locataires, sont encore potentiellement indignes. Une part substantielle d'entre eux sont situés dans des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV). Je comprends le terrible sentiment d'impuissance des élus locaux et des voisins de bonne foi face à ces situations dramatiques – je le comprends d'autant mieux que pendant dix ans, avant d'avoir l'honneur de m'exprimer à cette tribune, j'ai été le maire d'une ville qui compte sept QPV, Angers.
Enfin, la longueur des processus administratifs est totalement inadaptée aux difficultés que rencontrent les copropriétés. Un chiffre est particulièrement frappant : la durée des programmes de redressement des copropriétés en difficulté varie entre cinq et dix ans ; elle peut même atteindre vingt ans pour la transformation des grands ensembles confrontés à des dysfonctionnements majeurs au sein d'un quartier ou pour la requalification de quartiers anciens dégradés. Cinq ans, dix ans, vingt ans, c'est toujours trop long quand il y a urgence !
Pour remédier à cette situation, le Gouvernement a instauré plusieurs dispositifs qui ont fait leurs preuves et qui nous incitent à accélérer. En 2018, nous avons lancé le plan Initiatives copropriétés (PIC), qui consacrait 2,7 milliards à des interventions publiques pendant dix ans pour accompagner les copropriétés les plus dégradées et traiter 88 000 logements. Nous avons également engagé une simplification de la police de l'habitat indigne à travers une ordonnance de 2020 permise par la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, dite loi Elan – déjà fermement soutenue, à l'époque, par le rapporteur Guillaume Vuilletet. Cette réforme porte déjà ses fruits puisque le nombre d'arrêtés d'insalubrité a progressé de 30 % entre 2018 et 2022, passant de 2 700 à 3 600.
Le présent projet de loi n'est donc pas un point de départ : il s'inscrit dans une continuité et a vocation à nous donner des outils supplémentaires pour répondre à la crise du logement. Ce texte prolonge également les travaux sur l'habitat indigne confiés à la maire de Mulhouse, Michèle Lutz, et au maire de Saint-Denis, Mathieu Hanotin, qui ont animé la mission relative aux outils d'habitat et d'urbanisme à créer ou améliorer pour renforcer la lutte contre l'habitat indigne.
Je peux résumer les objectifs du projet de loi à travers un triptyque simple : accélérer et simplifier, conformément à l'orientation donnée par le Président de la République mardi dernier lors de sa conférence de presse ; lutter contre les marchands de sommeil ; améliorer les conditions de vie des Françaises et des Français qui vivent en copropriété, soit 10 millions de logements.
Pour atteindre ces trois objectifs, le texte que je vous présente se structure autour de deux axes : d'une part, faciliter et hâter l'intervention foncière de la puissance publique sur l'habitat indigne pour éviter la dégradation définitive ; d'autre part, accélérer les procédures de recyclage et de transformation des quartiers.
Le premier axe est d'intervenir le plus tôt possible afin de mettre un terme précoce aux spirales de dégradation. À cette fin, nous proposons notamment la création du prêt collectif aux copropriétés, qui vise à faciliter dans toutes les copropriétés le financement bancaire des travaux. Cette mesure répond à une attente très forte des copropriétaires, démunis face à l'absence de financement ou à l'obligation d'attendre plus d'un an et demi pour en obtenir un. Parmi les autres mesures contenues dans le texte – je suis à votre disposition pour les détailler lorsque nous discuterons des articles –, je veux signaler l'extension du périmètre de la procédure d'opération de restauration immobilière (ORI), aujourd'hui conçue pour les centres anciens ; l'amélioration de l'information des copropriétaires, ainsi que des occupants, sur l'état de la copropriété, pour protéger les acheteurs ; l'introduction de l'insaisissabilité des comptes pour les copropriétés sous administration judiciaire ; et, enfin, l'enrichissement du registre national des copropriétés par l'introduction des diagnostics de performance énergétique (DPE).
Le second axe du projet de loi est de simplifier et d'accélérer les procédures judiciaires et administratives, par exemple en améliorant le traitement des situations dramatiques en matière de sécurité et de salubrité, et la réactivité de la puissance publique, par un ajustement de la procédure d'expropriation en cas d'effondrement imminent. Le texte contient également des mesures pour accélérer les opérations d'aménagement importantes, notamment en numérisant les procédures.
À l'heure où vos travaux débutent en séance publique, je veux saluer le travail que vous avez effectué en commission et le consensus politique qui s'est dégagé sur de nombreux points du texte.
Le travail constructif de presque tous les groupes a permis de retenir des amendements enrichissants et d'obtenir un vote favorable sur le texte à l'unanimité des membres de la commission présents.
Je salue l'immense travail effectué avec les élus locaux en amont de la présentation du projet de loi. Ce texte est aussi le leur : il reprend un grand nombre de propositions pragmatiques issues des travaux menés dans le cadre du plan Initiative copropriétés durant cinq années, et du rapport Hanotin-Lutz sur la lutte contre l'habitat indigne.
Mesdames et messieurs les députés, j'espère vous avoir montré à quel point ce texte est nécessaire et utile. Puissent nos débats être à la hauteur de la gravité des enjeux et de la cause que nous servons : le respect de la dignité des Françaises et des Français, et celui de la promesse humaniste et sociale de notre république.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et LIOT.
La parole est à M. Guillaume Vuilletet, rapporteur de la commission des affaires économiques.
Depuis 2017, la majorité n'a cessé d'agir pour s'attaquer à la dégradation de l'habitat dans certains quartiers de nos métropoles et de nos petites villes. Cet enjeu est essentiel à la fois pour améliorer les conditions de vie des habitants, pour dégager des viviers de logements à une époque où leur attrition pose des difficultés dans les zones fragiles, et pour veiller à une meilleure adaptation écologique et énergétique de l'habitat au défi climatique. Aujourd'hui, 400 000 logements et 1 million de personnes sont concernés. Les dégradations de logements ont un coût social, économique et environnemental qui n'est plus supportable.
Le projet de loi donne aux collectivités et aux copropriétaires des outils efficaces pour faciliter la restauration des bâtis quand il en est encore temps, accélérer l'application des dispositifs existants et protéger les habitants des marchands de sommeil. Il s'inscrit dans la lignée de la loi Elan, qui a permis de développer, sous l'égide de Julien Denormandie, alors ministre chargé du logement, le plan Action cœur de ville et le programme Petites Villes de demain : ces deux dispositifs visent à faciliter et à soutenir le travail des collectivités locales, à inciter les acteurs du logement et de l'urbanisme à réinvestir les centres-villes, à favoriser le maintien ou l'implantation d'activités et, plus généralement, à améliorer les conditions de vie des habitants.
En 2019, à la demande du Premier ministre et dans le cadre de la loi Elan, j'ai rédigé un rapport intitulé « Promouvoir l'habitabilité durable pour tous », qui a conduit à l'ordonnance du 16 septembre 2020 relative à l'harmonisation et à la simplification des polices des immeubles, locaux et installations. Cette ordonnance a permis une simplification notable puisque nous sommes passés de treize à deux polices administratives et de vingt et une à quatre procédures.
Je salue le travail accompli par l'ancienne ministre chargée du logement Emmanuelle Wargon, qui a choisi d'insister sur l'enjeu de la rénovation énergétique des logements, dans la continuité de Julien Denormandie, qui plaçait la construction de logements neufs au même niveau que la réhabilitation de logements anciens. Dans le même esprit, les ministres Olivier Klein et Patrice Vergriete ont voulu renforcer les moyens opérationnels à la disposition des collectivités, de l'État et des opérateurs pour mener des programmes de requalification de l'habitat indigne. Une mission a ainsi été confiée aux maires Mathieu Hanotin et Michèle Lutz, dont les recommandations ont largement nourri le projet de loi que nous examinons aujourd'hui.
Au cours des auditions que nous avons menées, mon corapporteur Lionel Royer-Perreaut et moi-même avons mesuré combien les dispositions du projet de loi sont attendues par les acteurs du secteur. Elles respectent les trois objectifs que nous avons fixés dans notre feuille de route : anticiper, accélérer et protéger. Complétant les mesures existantes, les nouveaux outils proposés par le texte permettront de lutter efficacement contre l'habitat indigne et les copropriétés dégradées. Je salue l'esprit transpartisan qui a présidé à leur examen en commission : ses membres ont approuvé et renforcé le texte dans l'intérêt des Français.
S'agissant de la partie du texte sur laquelle je suis rapporteur, je veux souligner les apports qui seront, selon moi, particulièrement efficaces pour faciliter la prise en charge des situations difficiles.
L'article 3 crée une nouvelle faculté pour les collectivités d'exproprier des immeubles qui sont dans un état de dégradation encore remédiable, ce qui permettra de s'attaquer aux problèmes plus tôt et d'éviter les dégradations irréversibles qui imposent la démolition. Il s'agit d'éviter ainsi aux habitants le traumatisme d'un départ forcé de leur domicile, mais aussi d'économiser l'argent public et de renforcer l'efficacité de l'action de la puissance publique.
Les articles 6 et 7 tendent à faciliter l'intervention des opérateurs spécialisés dans les actions de requalification en prévoyant le recours à la concession d'aménagement et au droit de préemption, qui rencontrent actuellement des obstacles juridiques.
Quant aux articles 11 et 12, ils visent à sécuriser les procédures d'expropriation existantes, ce qui est bienvenu.
Par ailleurs, nous avons enrichi le texte de plusieurs dispositions lors de son examen en commission – dispositions qui, j'en suis certain, contribueront à encore améliorer le traitement des situations. C'est le cas de celles prévues à l'article 8 bis, qui crée la faculté, pour une commune, de définir des secteurs à risque dans lesquels la réalisation d'un diagnostic de structure des immeubles bâtis sera obligatoire, afin de mieux connaître les bâtiments et de prévenir l'émergence de difficultés.
À l'article 7 bis, nous avons introduit la possibilité de dispenser de permis de construire les opérations temporaires d'hébergement à destination des personnes délogées à l'occasion d'une opération de requalification, ce qui doit permettre d'accélérer sensiblement l'avancée des projets.
Aux articles 12 et 12 ter, nous renforçons les effets des arrêtés de traitement de l'insalubrité et de mise en sécurité, notamment afin de prévenir les agissements frauduleux. Par exemple, l'organisation de la vacance de l'immeuble pour éviter d'avoir à prendre les mesures prescrites deviendra impossible.
Dans le même temps, nous avons veillé à renforcer les outils de prévention de la survenance des dégradations, notamment avec la création, à l'article 5 bis, d'un agrément de syndic d'intérêt collectif qui permettra à des opérateurs spécialisés, par exemple des bailleurs sociaux, de prêter leur soutien aux copropriétés.
C'est donc un texte comprenant de nombreux instruments utiles et pertinents destinés à mieux résorber l'habitat dégradé que nous nous apprêtons à discuter. J'espère que nous saurons encore en renforcer les dispositions au cours de nos débats en séance, en conservant un esprit aussi consensuel que possible.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
La parole est à M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur de la commission des affaires économiques.
Le texte dont nous commençons l'examen concerne les copropriétés dégradées. S'il peut apparaître trop juridique ou trop technique à certains, il n'en demeure pas moins éminemment politique. Il touche tout simplement au quotidien de nos administrés et à l'habitabilité d'environ 1,5 million de logements dont les occupants vivent dans des conditions indignes, indécentes ; des conditions qui ne font pas honneur à notre pays et qui nécessitent que les législateurs que nous sommes modifient la loi afin d'adapter, de moderniser et de simplifier les outils et les procédures dont nous disposons depuis maintenant trente ans.
Nous le devons avant tout aux personnes qui se trouvent dans ces situations. Nous le devons ensuite aux élus locaux qui luttent au quotidien contre l'habitat indigne, contre l'habitat indécent et contre celles et ceux qui se livrent à une marchandisation de la précarité. Nous le devons enfin à notre pays, afin d'offrir aux Françaises et aux Français des conditions d'habitat dignes.
Je le disais, des outils existent depuis près de trente ans. Des lois ont été votées et se sont, pour ainsi dire, sédimentées les unes aux autres depuis la loi d'orientation pour la ville de 1991, qui a introduit les fameuses opérations programmées d'amélioration de l'habitat (Opah). Année après année, nous avons densifié notre législation et adopté les plans de sauvegarde, les opérations de requalification des copropriétés dégradées d'intérêt national (Orcod-in), les plans de rénovation urbaine, le plan Initiative copropriétés dont Guillaume Vuilletet a parlé ; bref, de nombreuses mesures visant à lutter contre l'habitat indigne.
Ces outils sont néanmoins très complexes, s'enchevêtrent parfois et se révèlent insuffisants dans certains territoires. C'est le cas en Île-de-France, en Provence-Alpes-Côte d'Azur, mais aussi, reconnaissons-le, dans d'autres régions encore. Notre responsabilité est donc de renforcer ces outils et de simplifier les règles, afin d'aider plus efficacement les élus locaux et de pénaliser plus lourdement les marchands de sommeil.
Ainsi le texte comporte-t-il plusieurs articles de nature à faciliter, à aider et à balayer le spectre à 360 degrés, s'intéressant à la fois aux copropriétés qui fonctionnent plutôt bien, aux copropriétés qui commencent à émettre des signaux faibles et qui nécessitent déjà que la puissance publique se place à leurs côtés, et aux copropriétés dont la situation est dégradée, très dégradée, trop dégradée, et que nous devons bien sûr accompagner.
Cet accompagnement passera par le prêt collectif solidaire que M. le ministre a évoqué, par l'insaisissabilité des sommes versées à la Caisse des dépôts par les résidents de copropriétés en redressement, par l'extension des conditions d'ouverture d'un mandat ad hoc, par l'amélioration de la connaissance du parc de copropriétés en prévoyant que le registre d'immatriculation intègre le DPE, par l'information des copropriétés et des occupants sur les procédures de lutte contre l'habitat indigne, ainsi que par la scission de certaines copropriétés concernées par une Orcod-in, voire par un plan de sauvegarde. Ce sont tous ces outils qui, mis bout à bout, nous aideront à lutter contre l'habitat indigne.
À cet égard, je me réjouis de l'état d'esprit qui a animé nos débats en commission, car la question de l'habitat doit s'appréhender hors des contingences politiciennes. Notre responsabilité collective et individuelle est de faire fi des oppositions traditionnelles,…
…qui peuvent s'avérer bruyantes, afin de répondre aux exigences et aux attentes de nos administrés. Nous aurons tout loisir de débattre de l'ensemble des amendements déposés.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.
Je me réjouis que nous débutions l'examen de ce projet de loi, qui est le premier du nouveau gouvernement dirigé par Gabriel Attal. Le fait que ce premier texte inscrit à l'ordre du jour porte sur le logement constitue un signal important, et je remercie Christophe Béchu de le défendre avec force et conviction.
Notons ensuite que le groupe LFI – NUPES, si prompt à réclamer des lois en matière de logement, s'est surtout fait remarquer par son absence totale en commission lors de la discussion des articles, tous ses membres ayant quitté les lieux après l'intervention de l'oratrice du groupe dans la discussion générale.
Il s'agit pourtant d'un projet de loi utile, comprenant de nombreuses avancées concrètes pour les élus et les habitants, et s'inscrivant dans la continuité de notre action, depuis la loi Elan, en matière de lutte contre l'habitat dégradé et les marchands de sommeil. À cet égard, je tiens à saluer le travail des rapporteurs, Lionel Royer-Perreaut et Guillaume Vuilletet, ce dernier ayant d'ailleurs produit en 2019 un rapport qui a conduit, l'année suivante, à une profonde simplification des mesures contre l'habitat indigne.
Si le projet de loi peut apparaître technique, le rapporteur Royer-Perreaut l'a dit, il reprend en réalité un ensemble de propositions concrètes formulées par deux élus de terrain, en l'occurrence deux maires confrontés à cet enjeu : Michèle Lutz, maire de Mulhouse, et Mathieu Hanotin, maire de Saint-Denis. Le texte constitue ainsi une boîte à outils très attendue par les collectivités territoriales, en ce qu'il renforce la faculté des communes, des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et de leurs opérateurs à mener leurs projets.
Le texte prévoit aussi, à l'article 14, plusieurs accélérations procédurales – dont je me félicite – relatives aux opérations d'intérêt national (OIN), accélérations qui permettront de mener plus efficacement de grandes opérations d'aménagement, y compris la production de logements qui leur est associée. L'an dernier, lors de l'examen des projets de loi relatifs au nucléaire, à l'objectif zéro artificialisation nette (ZAN) et à l'industrie verte, la commission des affaires économiques avait déjà veillé à ce que la production de logements soit dynamisée dans le cadre de grands projets d'envergure nationale et d'intérêt général, lesquels sont indispensables à notre réindustrialisation. L'article 14 du présent texte va donc dans le même sens.
Notre commission a accompli un beau travail sur ce texte, acceptant de nombreux amendements déposés par la majorité comme par l'opposition. Vous avez d'ailleurs noté, monsieur le ministre, que le projet de loi avait été adopté en commission à l'unanimité des députés présents, ce dont je me réjouis. Ce travail transpartisan a porté le nombre d'articles de dix-sept à vingt-neuf. En définitive, nos débats ont permis de simplifier encore davantage les outils et les règles en vigueur.
L'article 7 bis, créé par l'adoption d'un amendement du rapporteur Vuilletet, accélérera les projets de requalification et d'aménagement en permettant le déploiement, pendant une durée maximale de cinq ans, de constructions d'hébergement temporaire. Cette avancée accélérera les opérations de résorption.
L'article 9 ter, créé notamment par l'adoption d'amendements déposés par mon collègue Lionel Causse, assouplit les règles de vote pour l'adoption d'un programme de travaux de rénovation énergétique dans une copropriété. Il s'agit d'une avancée importante, qui facilitera l'atteinte des objectifs exigeants que nous nous sommes fixés en matière de rénovation thermique des bâtiments. D'autres amendements seront discutés en séance, lesquels, je l'espère, permettront de rendre cette disposition encore plus opérationnelle, dans le plein respect des droits des copropriétaires.
Je me réjouis également de la création d'un article 3 bis, fruit d'un amendement de notre collègue Benjamin Saint-Huile du groupe LIOT, qui permettra de lutter encore plus efficacement contre l'artificialisation illicite des sols en ouvrant la possibilité, pour les autorités publiques, de prendre des mesures d'office afin de résorber les problèmes d'insécurité ou d'insalubrité suscités par des constructions illégales.
Je tiens aussi à évoquer les diverses mesures de simplification des relations entre syndics et copropriétés prévues à l'article 9 bis, en particulier la disposition, proposée par ma collègue Sandra Marsaud, élargissant les possibilités de dématérialisation des notifications et des mises en demeure. Le lien entre les dispositions de cet article, ainsi que de l'article 9 ter, avec le projet de loi initial peut être interrogé, mais compte tenu du nombre d'amendements ayant été déposés sur cette question, j'ai décidé d'adopter une approche large s'agissant de leur recevabilité – approche reprise par la présidence pour la séance, ce dont je me réjouis. Elle nous permettra d'avoir de riches débats tout au long de la semaine.
Il reste évidemment beaucoup de réponses à apporter à la crise profonde du logement. D'autres textes seront examinés prochainement. Je pense à la proposition de loi de Romain Daubié et du groupe Démocrate visant à faciliter la transformation des bureaux en logements, que nous étudierons mercredi matin en commission. Je pense également à la poursuite de l'examen de la proposition de loi d'Annaïg Le Meur et Inaki Echaniz visant à remédier aux déséquilibres du marché locatif en zone tendue.
La semaine dernière, le Président de la République a annoncé de « grosses simplifications » afin de réduire les délais, d'accélérer les procédures, d'éviter les recours multiples, et de remettre de l'audace et de l'énergie dans le secteur du logement. Nul doute que de beaux chantiers législatifs nous attendent dans les mois qui viennent. Monsieur le ministre, chers collègues, nous serons au rendez-vous de ce défi !
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
Si vous m'y autorisez, madame la présidente, avant de commencer mon propos sur le projet de loi, je voudrais, en tant que député de Saint-Denis, avoir une pensée pour les familles, les proches, les camarades, les enseignants des jeunes Sedan, 14 ans, et Farid, 18 ans, morts tous les deux la semaine dernière à Saint-Denis dans des rixes.
Notre pays traverse une crise du logement inédite depuis trente ans. Le nombre de ménages en attente d'un logement social n'a jamais été aussi élevé, tandis que la construction n'a jamais été aussi faible depuis vingt-cinq ans. Le nombre de personnes sans domicile a doublé en dix ans, 3 000 enfants dorment chaque nuit dans la rue, et 18 % de la population habite un logement pouvant être considéré comme insalubre. Enfin, l'accès à la propriété pour les classes moyennes n'a jamais été aussi faible et inégalitaire socialement.
Malgré cette situation alarmante, le Président de la République et le Premier ministre n'ont pas jugé bon de doter le logement d'un ministère de plein exercice, ce qui augure mal de la suite, c'est-à-dire de la capacité et de la volonté du nouveau gouvernement d'enfin apporter des réponses adaptées à la crise du logement que subit notre pays.
Compte tenu des enjeux, l'ambition du projet de loi soumis à notre examen est modeste. Ce texte est néanmoins utile – nous l'avons dit en commission – en ce qu'il propose quelques avancées qui s'appuient sur les retours d'expérience des opérateurs et des élus locaux. Cela fait des années que, comme d'autres, nous réclamons les moyens techniques et juridiques permettant d'accélérer les procédures et d'intervenir en amont sur les copropriétés fragiles ou dégradées, avant que leur situation ne devienne irrémédiable. Nous accueillons donc avec satisfaction certaines des mesures emblématiques du texte, comme la nouvelle procédure d'expropriation dérogatoire en cas d'inaction des propriétaires, ou encore les mesures visant à accélérer et à sécuriser les opérations de requalification.
Nous en demeurons cependant toujours au même constat : malgré les lois qui se sont succédé depuis plus de vingt ans, nous n'en avons toujours pas fini avec les « maisons qui tuent » et la dégradation du parc des copropriétés. La moitié de ce parc datant des années 1950 à 1980, des investissements lourds sont nécessaires pour le maintenir en état, voire le remettre à niveau, et en améliorer la performance énergétique.
Cependant, loin de tenir uniquement à la fin de ce que l'on nomme le « cycle technique » de ces immeubles, les causes de l'accroissement des difficultés des copropriétés sont aussi à rechercher dans la paupérisation accrue des propriétaires occupants – personnes âgées ou primo-accédants modestes – et le comportement de certains propriétaires bailleurs, qui considèrent leur bien uniquement comme un produit financier, source de rentabilité, et non comme un bien patrimonial. Certaines copropriétés atteignent ainsi un taux d'impayés supérieur ou égal à 25 %.
Devant l'ampleur des difficultés, nous ne pouvons en rester à l'accumulation de dispositifs juridiques, sans moyens humains et budgétaires renouvelés. Or, non content de faire l'impasse sur les questions financières et sociales, votre texte reste trop timide sur des questions essentielles à nos yeux, comme la lutte contre les marchands de sommeil, le problème posé par le pouvoir exorbitant des propriétaires bailleurs, qui paralysent parfois les travaux, ou encore la question de la politique d'investissement public et de construction de logement social, seule à même d'assécher le marché noir du logement sur lequel prospère l'habitat indigne.
Comme d'autres groupes, nous avions déposé en commission des amendements visant à élargir le débat et à nous attaquer aux causes profondes des difficultés que connaissent aujourd'hui les copropriétés dégradées et leurs occupants. Même si nous convenons que le débat a été constructif, nous regrettons qu'une grande partie de nos propositions aient été déclarées irrecevables au motif qu'elles étaient sans lien avec le texte.
Cela ne nous semblait pas le cas.
Il est pourtant urgent de mettre un coup d'arrêt à la comptabilité morbide des victimes des taudis insalubres, qui émaillent régulièrement l'actualité, comme ce fut le cas à Grigny il y a encore quelques semaines. En douze ans aux responsabilités à la mairie de Saint-Denis, de 2000 à 2012, j'ai été témoin de vingt-cinq décès liés à l'insalubrité, dont treize d'enfants, et, depuis, d'autres personnes sont décédées pour les mêmes raisons. Pour garantir à chacun la protection de sa santé, la sécurité et le repos dans un logement digne, comme le veut notre Constitution, il faut concevoir des dispositifs beaucoup plus coercitifs que ceux qui existent aujourd'hui.
Nous voterons en faveur de ce texte, tout en espérant que nos débats nous permettront de l'améliorer encore.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES et SOC ainsi que sur plusieurs bancs du groupe RE.
« Gouverner, c'est d'abord loger son peuple. » C'est avec ces mots puissants que, toute sa vie, l'abbé Pierre exhorta les pouvoirs publics à sortir de l'inaction, à créer les conditions du partage, à fonder une société où chacun a le droit à un habitat digne.
Les enjeux climatiques et économiques, et les dégâts sociaux auxquels nous devons faire face en 2024 nous obligent collectivement. L'état de dégradation du parc de logements étant un constat largement partagé, il fallait que ce texte puisse être examiné, travaillé, amélioré. Je tiens à saluer les propositions que Michèle Lutz et Mathieu Hanotin ont formulées auprès du Gouvernement : à travers eux, c'est l'implication des élus et des collectivités qui doit être soulignée. Je veux aussi saluer le travail des rapporteurs, fait de volonté et de sincérité, et la grande qualité des débats en commission.
Cependant, parce qu'il faut être juste, et donc avoir un minimum de mémoire, il est regrettable qu'il ait fallu attendre que des immeubles s'effondrent, à Marseille et ailleurs, pour qu'enfin une réponse soit apportée à ces drames de la misère sociale. Partout dans les territoires, que ce soit dans l'Hexagone ou en outre-mer, dans les quartiers populaires des grandes agglomérations comme dans les centres-bourgs du monde rural, des immeubles se détériorent. Les copropriétaires sont souvent exposés aux mêmes problèmes : difficultés de gestion, accumulation d'impayés de charges, report de travaux… Cette concentration de dysfonctionnements a des conséquences très concrètes : elle est souvent synonyme de logements vétustes, pour ne pas dire indignes, d'immeubles qui tombent en décrépitude, voire qui s'effondrent, de perte d'attractivité des quartiers. Ceux qui le peuvent quittent ces immeubles, et il ne reste bien souvent que les ménages les plus précaires, enfermés dans des logements devenus dangereux, pris dans une spirale de paupérisation.
Dans un pays comme le nôtre, ces situations sont inacceptables, et nous nous devons d'agir puissamment. Ce projet de loi, qui permettra aux collectivités et opérateurs d'intervenir le plus en amont possible pour éviter des drames humains et sociaux, prévoit des mesures de bon sens attendues depuis longtemps. Le groupe LIOT est ainsi favorable à la nouvelle procédure d'expropriation pour les immeubles dégradés dont l'état est remédiable, à la réhabilitation des copropriétés avant que la situation ne soit critique, au renforcement du droit de préemption urbain (DPU) demandé par les élus, et à la scission des grands ensembles en plusieurs syndicats pour faciliter la tâche des opérateurs.
Néanmoins, comme j'ai eu l'occasion de le dire en commission, plusieurs dispositions gagneraient à être retravaillées.
S'agissant de l'emprunt global collectif pour financer les travaux dans les copropriétés, nous redoutons que les établissements financiers ne prêtent pas aux copropriétés en difficulté. La mise en place d'une garantie publique s'impose donc. Le Gouvernement a d'ailleurs déposé un amendement en ce sens, auquel nous sommes favorables. Reste désormais à préciser le montant d'abondement du fonds pour répondre aux besoins des copropriétés et à encadrer les conditions pour y recourir : en effet, rien ne serait pire que de garantir la solvabilité des marchands de sommeil, ces profiteurs qui louent des logements indécents.
Par ailleurs, comme vous le savez, le réseau bancaire traditionnel n'est pas au rendez-vous en matière de financement des travaux de rénovation de tous les autres propriétaires modestes et très modestes : il faut renforcer l'accompagnement public. Voilà pourquoi je me ferai toujours le défenseur d'une banque de la rénovation.
Enfin, le projet de loi n'est pas sans carences. Les marchands de sommeil peuvent dormir sur leurs deux oreilles, les mesures coercitives ne sont pas légion. Le droit, qui ne saurait pourtant qu'être empreint d'humanité, doit s'appuyer sur des principes de justice et d'égalité – il y va de la promesse républicaine. En outre, je ne peux que déplorer le défaut de repérage et d'accompagnement des copropriétés en difficulté qui ne seraient pas encore dégradées, l'insuffisance des nouvelles informations inscrites au registre national d'immatriculation des copropriétés, ou encore l'absence d'éléments concernant l'accompagnement en matière d'ingénierie et de financement, alors que la prise en charge opérationnelle de la lutte contre l'habitat indigne pèse sur les budgets. Enfin, monsieur le ministre, nous ne pourrons pas faire l'économie d'une loi qui traite de l'habitat dégradé dans le monde rural : à l'heure où les élus de nos campagnes sont inquiets de voir la loi ZAN limiter leurs possibilités de développement, les biens sans maître, en déshérence ou en état d'abandon manifeste sont une réalité qu'il nous faudra traiter.
Applaudissements sur les bancs des groupes LIOT, SOC et GDR – NUPES.
Les copropriétés sont une préoccupation majeure des politiques de l'habitat. Dans tous types de quartiers de nos villes, des centres historiques à des quartiers plus contemporains, le parc ancien des logements se révèle souvent vétuste, parfois insalubre, et souvent doté d'équipements énergivores. Comme cela a été rappelé, pas moins de 1,5 million de logements présentent ainsi des signes de grande fragilité, et nous devons malheureusement déplorer l'effondrement de plusieurs immeubles, événements tragiques ayant fait des victimes.
Depuis les années 1990, les pouvoirs publics s'emploient à soutenir les propriétaires dans des démarches de rénovation et de requalification qui répondent à des questions en matière juridique, urbaine, d'ingénierie, mais également à des questions sociales. Reste que les blocages sont nombreux et les procédures, très longues : le texte présenté aujourd'hui essaie d'apporter de nouvelles solutions pour remédier à ces problèmes et ainsi renforcer la capacité d'action de la puissance publique – car c'est bien d'elle, aussi, qu'il s'agit dans ce projet de loi.
La loi Elan, adoptée en 2018 à l'initiative du ministre du logement d'alors, Julien Denormandie, que je salue, prévoyait des mesures pour améliorer le fonctionnement des copropriétés et le traitement des plus dégradées d'entre elles. Le gouvernement avait alors lancé un plan d'action sur dix ans visant à accélérer le processus de redressement des copropriétés en grande difficulté. Ce fameux plan Initiative copropriétés, coordonné par l'Agence nationale de l'habitat (Anah) et auquel participent nombre d'opérateurs, dont des urbanistes, s'appuie sur une action renforcée et coordonnée de l'ensemble des partenaires nationaux et locaux pour apporter des solutions adaptées aux territoires.
Le projet de loi que nous examinons, traduction juridique du retour d'expérience des opérateurs et acteurs impliqués dans la rénovation de l'habitat dégradé, s'inscrit dans le cadre des différents rapports déjà cités – celui de la mission menée par le directeur des prêts de la Banque des territoires de la Caisse des dépôts (CDC) sur le financement des travaux des copropriétés dégradées, mais aussi celui de Mme Lutz et M. Hanotin. Dans la perspective de la prolongation du PIC pour les années 2024 à 2028, il vise à moderniser les outils dont disposent les collectivités et opérateurs, pour leur permettre d'intervenir le plus en amont possible, tout en garantissant la bonne fin des opérations de requalification des copropriétés en difficulté, le cas échéant par voie d'expropriation.
Il tend également à faciliter l'intervention des collectivités et des pouvoirs publics lorsque cela se révèle nécessaire. Les articles 1er , 5, 6 et 7 visent ainsi respectivement à élargir le champ de travaux pouvant faire l'objet d'une opération de restauration immobilière ; à simplifier l'ouverture de la procédure du mandat ad hoc, qui permet de redresser les copropriétés en mauvaise gestion financière ; à créer un régime de concession spécifique aux copropriétés dégradées ; et, dans ce cadre, à faciliter le recours au droit de préemption urbain. En outre, l'article 10 permettra de scinder les très grandes copropriétés en plusieurs syndics, afin d'optimiser la gestion de leur redressement, et l'article 13 simplifiera la reconnaissance de l'état de carence.
En commission, nous avons adopté plusieurs dispositions pour enrichir le texte. À l'article 8 ter, nous avons renforcé notre arsenal juridique contre les marchands de sommeil en alourdissant la peine qu'ils encourent et en clarifiant la définition juridique de cette infraction. Nous avons également créé un délit de location irrégulière dissimulée : l'article 8 quater prévoit ainsi des sanctions en cas de paiement du loyer de la main à la main, sans délivrance d'une quittance. Par ailleurs, afin de responsabiliser les syndics, nous avons créé un agrément qu'ils devront obtenir, et introduit dans le texte l'obligation, pour le syndic sortant, de transmettre au syndic entrant une série d'informations sur les comptes de la copropriété – c'est l'objet des articles 5 bis et 9 bis . Enfin, nous avons renforcé le pouvoir des maires afin qu'ils puissent intervenir plus en amont en cas de dégradation du bâti. Outre l'article 3 bis, l'article 12 bis facilitera la prise d'arrêtés de mise en sécurité eu égard au risque incendie et l'article 8 bis permettra de rendre obligatoire la réalisation d'un diagnostic décennal de structure de l'immeuble pour les sites les plus à risque.
Je tiens à préciser que les dispositions introduites en commission émanaient de l'ensemble des groupes. Les débats s'y sont déroulés dans un esprit constructif : j'espère qu'il en ira de même en séance.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur plusieurs bancs du groupe Dem.
D'une importance capitale, la lutte contre l'habitat dégradé doit constituer la priorité de toute politique du logement responsable. Depuis le milieu des années 1990, la France fait face à une augmentation alarmante des situations d'urgence et des copropriétés fragiles, principalement concentrées dans nos centres-villes. Malgré cette réalité préoccupante, les gouvernements successifs n'ont pas réussi à relever le défi posé par la dégradation de l'habitat, créant ainsi un besoin urgent de mesures efficaces.
Si, dans sa rédaction actuelle, le projet de loi prévoit des mesures positives en faveur de la réhabilitation et de la simplification du financement des travaux, comme l'insaisissabilité des comptes bancaires des copropriétés en redressement, il reste indéniablement dévoyé par votre tendance à porter atteinte aux libertés publiques, en particulier au droit à la propriété, au nom de considérations qui n'ont rien à voir avec l'habitat indigne ou dégradé, ni de près ni de loin. J'en veux pour preuve les références insistantes à la rénovation énergétique : selon vous, il serait presque légitime d'exproprier un petit propriétaire ou de lui imposer des travaux au motif que le DPE de son logement n'est pas sanctionné de la bonne lettre – diagnostic dont le manque d'objectivité a d'ailleurs été épinglé le 10 janvier par le Conseil d'analyse économique (CAE).
Soyons clairs : quand nous dénonçons l'habitat indigne et dégradé, nous ne visons pas les logements classés E à l'issue du DPE, mais par exemple ceux avec une hauteur sous plafond de 1,80 mètre, qu'un décret publié cet été par le Gouvernement permet désormais de louer – les heureux propriétaires d'une cave vous en remercient, pas les locataires ! Nous visons ces bailleurs sociaux qui gèrent un parc de logements dévorés par les moisissures et qui les louent sans sourciller à des personnes n'ayant pas d'autre solution. Quand nous parlons d'habitat dégradé, nous pensons aussi à cet internat qui a dû être évacué parce que sa structure était branlante, ou à l'effondrement de deux immeubles à Lille, en plein centre-ville, qui a coûté la vie à un médecin.
En première ligne de la gestion de l'habitat dégradé, les élus locaux n'attendent pas des outils protéiformes, adoptés par le groupe présidentiel selon sa lubie du moment, et si complexes qu'ils en deviennent incompréhensibles et inutilisables, mais des dispositifs flexibles permettant de surmonter les lourdeurs normatives qui empêchent une intervention rapide. Malheureusement, ce texte ne va pas dans le sens de la simplification, de la clarification et de l'efficacité réclamées par les élus locaux. Bafouant les quelques suggestions faites par des associations de copropriétaires, il semble s'inscrire dans une vision politique qui réprouve la propriété immobilière. En privant les citoyens de la possibilité de construire un patrimoine immobilier, une telle approche risque de transformer la France en un pays de locataires mobiles.
Au nom d'une conception particulière de la modernité dont vous êtes les prédicateurs, les citoyens se verraient ainsi réduits à la qualité d'agents économiques gérés et déplacés à l'envi, selon la situation économique.
Le Gouvernement semble avoir délibérément négligé les représentants des copropriétaires, ce qui est également préoccupant. Les charges de copropriété ont augmenté significativement, de 50 % en dix ans. En exposant certains copropriétaires occupants au risque de surendettement, l'application aveugle de ce texte pourrait accroître la fragilité des copropriétés et amplifier les disparités socio-économiques.
Les dispositifs proposés négligent également la question de la protection, nécessaire, des bâtiments à intérêt historique ou architectural. En privilégiant des critères strictement économiques ou environnementaux, le projet de loi ne prend pas en compte les aspects culturels et patrimoniaux. La préservation de notre histoire et de notre identité n'est pourtant pas incompatible avec le fait de disposer d'un logement décent et intègre.
Nous considérons donc que ce texte, en l'état, manque d'ambition. S'agissant d'un sujet qui devrait être une des priorités de la politique du logement, les sorties de routes répétées sont inadmissibles. Aussi, nous appellerons à supprimer…
…tous les articles de loi attentant de manière disproportionnée, eu égard aux objectifs poursuivis, aux libertés que nous chérissons.
En espérant qu'en résulte une rédaction plus équilibrée, nous appelons à une réflexion approfondie et à l'adoption de mesures mieux calibrées pour remédier efficacement au problème de l'habitat dégradé. Il est de notre responsabilité collective, tout en relevant les défis que pose ce dernier, de mener une politique du logement équitable et respectueuse des droits fondamentaux des citoyens.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Le logement indigne est, pour le peuple, une grande cause de souffrance. Le vent, le froid et l'humidité qui s'infiltrent dans le foyer ; la moisissure qui noircit les murs ; les fissures qui lézardent le plafond ; l'escalier qui menace de s'effondrer ; les détritus qui s'accumulent et attirent les nuisibles ; la nuit passée dans l'angoisse d'un incendie qui pourrait vous emporter, vous et vos enfants : voilà ce que vivent des millions de femmes et d'hommes dans notre pays. Pour eux, le domicile, qui devrait être le lieu du repos, de la tranquillité et du réconfort, est source de malheur. Il use, épuise et abîme le corps autant que l'esprit. Je veux dire à ces familles que leur souffrance est une honte pour le pays tout entier.
La France est la septième puissance économique mondiale. Nous sommes le troisième pays au monde qui comporte le plus de millionnaires. L'année passée, les dividendes versés aux actionnaires des entreprises du CAC40 ont atteint le record historique de 97 milliards d'euros. Il est révoltant de constater que subsistent, à côté de cette indécente accumulation de richesses, des îlots de misère – des villages et des quartiers frappés par le logement indigne, où les marchands de sommeil font la loi.
La première faiblesse du texte que nous discutons aujourd'hui est de ne pas envisager la problématique du logement indigne dans sa globalité. Il se réduit à des mesures juridiques et techniques pour les copropriétés dégradées.
S'agissant du bilan du Gouvernement en la matière, il y a certes déjà beaucoup à dire, et à critiquer.
Ainsi, le plan Initiative copropriétés n'a consommé que 14 % de ses crédits en quatre ans, et les OIN visant les copropriétés les plus dégradées ne sont encore que des coquilles vides. J'ai pu le constater en me rendant à Marseille à l'invitation de mes collègues Insoumis Sébastien Delogu et Manuel Bompard. Le président Macron est venu en personne dans la cité phocéenne faire des annonces, mais les habitants des copropriétés que j'ai rencontrés à Félix-Pyat, Consolat ou dans la cité du Mail vivent encore dans des logements indignes.
À Marseille comme ailleurs, l'origine du problème est toujours la même : l'abandon de l'État.
Abandon des propriétaires occupants, seuls face à des coûts d'entretien qui explosent. Abandon des locataires, désemparés face à une situation qu'ils ne comprennent pas et qui leur échappe totalement. Abandon face aux agissements des marchands de sommeil qui refusent d'assumer leurs charges pour maximiser leurs profits, et qui prennent en otage l'ensemble des occupants.
Ne soyons pas naïfs : si ce système perdure, ce n'est pas seulement par manque de moyens ou en raison de la complexité de la loi – mais aussi parce que le logement indigne est un business. Les marchands de sommeil qui vivent de la misère sont bien souvent les notables de la ville.
Ils s'appuient sur leur réseau et leur connaissance de la loi pour mieux la contourner et manipuler des locataires vulnérables. Une seule question mérite d'être posée : combattrons-nous avec force ce système pour que les habitants retrouvent enfin leur dignité ? Ce n'est malheureusement pas cette loi, technique et dénuée de moyens budgétaires et humains, qui permettra de mener la bataille.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – M. Alain David applaudit également.
Pire, la politique du logement menée par la Macronie, en ce qu'elle propage la misère, apporte un soutien objectif aux marchands de sommeil et au développement de l'habitat indigne.
Baisser l'aide personnalisée au logement (APL), augmenter les loyers, couper dans le budget des bailleurs sociaux, et donc allonger la liste des demandeurs de logement social, permettre aux multipropriétaires d'expulser plus facilement leurs locataires : voilà des mesures qui paupérisent et affaiblissent les locataires, et qui les placent à la merci des marchands de sommeil.
Nous, les Insoumis, pensons qu'il est possible, non pas seulement, comme le disait Victor Hugo, de « diminuer, amoindrir, limiter, circonscrire » le logement indigne, mais de le faire disparaître. Pour peu que les gouvernants en aient la volonté, la France de 2024 a les moyens d'éradiquer ce fléau qui fait souffrir tant de nos concitoyens.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Pour cela, il faudrait un État fort, qui s'assure que le droit au logement l'emporte sur les privilèges des multipropriétaires et que les lois de l'humanité sont au-dessus de la loi de la jungle imposée par les marchands de sommeil.
Voilà pourquoi nous proposons, entre autres, de généraliser le permis de louer. Il s'agit de faire en sorte que l'État contrôle la décence du logement avant qu'il soit mis en location. Finies les larmes de crocodile des élus locaux et de la préfecture qui déplorent le cercle vicieux de la dégradation d'une copropriété ! Avec le permis de louer, le logement est contrôlé avant sa mise sur le marché : les droits des locataires seront respectés.
Nous proposons aussi de durcir les sanctions contre les marchands de sommeil – nous souhaitons non seulement faciliter leur expropriation mais aussi leur interdire de mettre en location de nouveaux biens. Être un marchand de sommeil, c'est faire commerce de la misère et s'enrichir du malheur. Cela ne relève donc pas du simple exercice de la propriété privée et l'État doit pouvoir prendre des mesures exceptionnelles en cas d'abus.
J'évoquerai une dernière proposition, à destination des propriétaires occupants modestes. Alors que leur logement est le fruit de leur travail, le cercle vicieux de l'insalubrité peut les amener à tout perdre. Nous proposons que l'État apporte un soutien massif aux travaux de rénovation énergétique, avec un objectif de reste à charge zéro pour les ménages modestes. Voilà une mesure qui débloquerait bien des situations.
L'éradication de l'habitat indigne est aussi possible que nécessaire, mais elle exige une volonté politique…
Mme la présidente coupe le micro de l'orateur, dont le temps de parole est écoulé
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – M. Stéphane Peu applaudit également.
Le Gouvernement a inscrit à l'ordre du jour ce projet de loi relatif à l'accélération et à la simplification de la rénovation de l'habitat dégradé et des grandes opérations d'aménagement. Ce titre était porteur de promesses, mais le Gouvernement ne compte même pas, à ce jour, de ministre chargé du logement.
L'exécutif ne semble pas avoir pris la mesure de la gravité de la crise que traverse le secteur, ni de l'urgence d'y remédier. Ce n'est pas très sérieux ; cela témoigne du peu de considération que l'exécutif accorde au sujet du logement, qui ne figure pas au rang des priorités nationales.
Le Gouvernement a raté l'occasion de résoudre la crise du logement lors de l'élaboration du budget pour 2024 : au lieu de prendre des mesures fortes, il a de nouveau raboté le prêt à taux zéro. Il a aussi imposé une évolution du dispositif MaPrimeRénov' qui fait craindre une nouvelle diminution du nombre des rénovations et la sortie en masse de logements du parc locatif, faute pour leur propriétaire de pouvoir passer le mur de l'interdiction de louer en cas de mauvais classement énergétique.
Plus de 100 000 copropriétés sont considérées comme fragiles ; de plus en plus de copropriétaires ne parviennent plus à payer les appels de fonds trimestriels, qui se transforment donc en impayés de charges. L'exigence de mener des travaux de rénovation, notamment énergétique, a aggravé la situation. Il faut donc définir un cadre plus strict en matière d'administration des copropriétés, tout en prévoyant des mesures plus protectrices à l'égard des copropriétaires.
Certains aspects techniques du texte vont dans le bon sens. Ainsi, l'article 1er prévoit d'élargir la définition des opérations de restauration immobilière. Mais l'ensemble est-il à la hauteur ? Malheureusement, en l'état, il n'est pas suffisant pour relever les défis que constituent les logements dégradés et pour atteindre les objectifs d'accélération de rénovation des copropriétés.
Certaines idées sont bonnes mais les mesures pourraient se révéler inopérantes ou presque. Ainsi, l'emprunt collectif, facilité par l'article 2, suscite des interrogations. Tous les copropriétaires seraient en effet tenus pendant plusieurs années de participer au remboursement de l'emprunt, même s'ils ne souhaitent pas en bénéficier. Quel sort réserveront les prêteurs et les organismes de caution aux copropriétaires inscrits au fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP) ? L'État apportera-t-il des garanties aux copropriétaires défaillants ? Quelles seront les conséquences sur le cautionnement solidaire servant de garantie au syndicat ? Quels organismes accepteront de cautionner ce risque avéré, et avec quel surcoût ? Plus généralement, comment l'État aidera-t-il les copropriétaires modestes à faire face aux investissements nécessaires pour assurer la transition énergétique ?
Excepté cette facilitation du prêt collectif, qu'il faudra rembourser, le projet de loi fait l'impasse sur les moyens nécessaires à la rénovation de l'habitat dégradé – c'est mon plus grand regret.
Le financement est un enjeu essentiel étant donné que les copropriétés doivent adopter des programmes pluriannuels de travaux. Ne faut-il pas leur laisser le choix entre le nouveau prêt collectif, à adhésion obligatoire, et le prêt collectif à adhésion individuelle, tel qu'il existe ?
Votre projet prévoit par ailleurs que les copropriétaires refusant le prêt devront verser au syndic l'intégralité de leur quote-part du coût des travaux de rénovation dans les six mois suivant la notification. Or, dans la pratique, les délais de mise à disposition des crédits collectifs, y compris les éco-PTZ, sont largement plus élevés – jusqu'à dix-huit mois. Il faudrait donc verser sa quote-part sur un compte dédié alors que le montant ne serait pas utilisé tout de suite. Le point de départ du délai ne devrait-il pas être revu pour plus de cohérence ? Je proposerai des amendements en ce sens.
Toutes ces questions m'incitent à penser que le projet de loi n'est, en l'état, pas abouti. En témoignent les dix-huit amendements déposés par le Gouvernement au dernier moment et sans concertation. C'est dommage, monsieur le ministre : nous sommes ouverts à la discussion et nous soutiendrons ce qui ira dans le bon sens.
Le texte contient certes des articles intéressants, notamment pour améliorer les procédures d'expropriation ou de préemption, lorsque c'est justifié. Toutefois, il faut envisager la suite : de quels moyens disposeront les collectivités ou leurs opérateurs pour rénover les logements dégradés dont ces outils leur donneront le contrôle ? Combien d'immeubles en ruines, acquis par les collectivités, sont difficilement rénovés, faute de moyens ? La situation sera plus compliquée encore si la collectivité devient propriétaire d'un logement dégradé appartenant à une copropriété.
Comment interagira-t-elle avec la copropriété ? Une fois le logement rénové, devra-t-elle le conserver ou le céder ? Pourra-t-elle le vendre au prix du marché, si celui-ci est inférieur au montant consenti pour réaliser les travaux nécessaires ?
L'article 13 soulève également des difficultés. Il tend à réformer la procédure de reconnaissance de l'état de carence, en établissant une présomption de graves difficultés financières ou de gestion lorsque les comptes ne sont pas transmis à l'expert nommé par un juge saisi à cet effet dans un délai de deux mois. La mesure ne semble pas opportune au regard des conséquences d'une telle présomption, à savoir l'expropriation de l'immeuble. À défaut de pouvoir justifier cette disposition, êtes-vous prêts à y renoncer ?
En l'état, le projet de loi est inabouti. Nous arrêterons notre position de vote en toute responsabilité, en fonction de la tenue de nos débats et des amendements qui seront adoptés. Mes chers collègues, il nous faut amender le texte pour nous donner les moyens de remédier au problème de l'habitat dégradé – cette ambition doit nous rassembler.
Tout d'abord, permettez-moi de remercier le Gouvernement d'avoir soumis ce texte au Parlement. Il prévoit des actions concrètes sur un sujet si important pour le bien-être et la dignité des Français : le logement. Partout dans le monde, le logement est au cœur des enjeux sanitaires et d'accès à l'emploi, du défi environnemental et des fractures tant territoriales que sociales. Thématique omniprésente dans l'esprit de nos concitoyens et condition de leur bien-être, il est trop souvent source d'inquiétude et de frustration, d'autant que le secteur traverse une crise grave. Les drames liés au logement ne sauraient être éludés et il nous appartient de les faire disparaître au plus vite. Des centaines de milliers de personnes ne peuvent se loger comme elles le souhaiteraient et vivent dans des conditions déplorables. Je suis satisfaite qu'avec ce texte, nous saisissions à bras-le-corps le problème de l'habitat dégradé ; je souhaite que nos débats permettent de l'enrichir de toutes les bonnes idées qui seront utiles à nos concitoyens.
Les jeunes sont frappés par ces difficultés. Ils ne comprennent pas pourquoi, malgré des formations qualifiantes et diplômantes de plus en plus poussées, ils ne parviennent pas à se loger aussi bien que leurs parents. Il est de notre devoir et de notre responsabilité de ne pas laisser s'ajouter à la conjoncture économique une confrontation générationnelle.
En France métropolitaine, on estime à 110 000 le nombre de copropriétés fragiles, soit 18 % du total. Le présent projet de loi entend permettre aux acteurs publics comme aux copropriétaires d'agir plus rapidement et plus efficacement pour prévenir la dégradation des immeubles et éviter de lourds travaux, voire leur démolition. Des leviers financiers et administratifs innovants permettront aux copropriétés de dépasser les blocages rencontrés pour engager des travaux d'envergure. Plus tôt ceux-ci seront entrepris pour rendre l'habitat décent et respectueux des normes les plus élémentaires, notamment en matière environnementale, moins le coût en sera élevé pour les propriétaires, les locataires ou les collectivités. Bref, tout le monde y gagnera.
Je tiens à saluer les mesures adoptées en commission, qui viennent renforcer l'arsenal juridique visant à lutter contre les marchands de sommeil et à faciliter l'hébergement des personnes délogées lors d'opérations de lutte contre l'habitat indigne. Nous ne pouvons pas laisser prospérer un commerce opportuniste qui repose sur le malheur des gens.
L'article 2 marque une avancée attendue, en ouvrant la possibilité pour toutes les copropriétés de souscrire un emprunt collectif pour le financement de travaux essentiels et de rénovation énergétique. Cette mesure importante s'ajoute à la subvention MaPrimeRénov' Copropriété pouvant être accordée aux propriétaires occupants ou bailleurs, ainsi qu'aux syndicats de copropriétaires. Ce dispositif a déjà été utilement renforcé et nous devons continuer d'œuvrer pour inciter nos concitoyens à effectuer des travaux de rénovation énergétique.
Le Gouvernement et le Parlement œuvrent ensemble, tant pour lutter contre la précarité énergétique, qui touche encore trop de nos concitoyens, que pour limiter les émissions de CO
Ce texte est un premier pas très attendu et nous devrons continuer à nous pencher sur la thématique du logement. Avec la remontée des taux d'intérêt et la déconnexion entre les revenus des ménages et le prix des logements, il faudra agir encore sur la fiscalité, particulièrement celle des classes moyennes. Des logements neufs seront nécessaires : ceux qui accompagnent l'organisation des Jeux olympiques, puis d'autres encore. Nous nous y attellerons aux côtés du Gouvernement ; nous nous apprêtons à effectuer ce pas supplémentaire.
Si je me montre relativement optimiste quant à l'issue du vote final, c'est parce que je me réjouis de la manière dont les débats ont évolué jusqu'ici. Permettez-moi de saluer mon collègue Mickaël Cosson, qui a porté la voix du groupe Démocrate en commission des affaires économiques, et de vous remercier, monsieur le ministre et messieurs les rapporteurs, pour ce texte adopté en commission à la quasi-unanimité, après des débats qui se sont bien déroulés. Des amendements, venus de la gauche et de la droite, ont permis une coconstruction qui n'est pas aussi rare que certains se plaisent à le dire, et qui pourrait nous inspirer pour la suite. Je formule le vœu que nous puissions continuer sur cette lancée ; vous l'aurez compris, le groupe Démocrate soutiendra ce texte.
Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur quelques bancs des groupes RE et HOR.
Comme mes collègues avant moi, je ne peux que regretter l'absence d'un ministre du logement de plein exercice, compte tenu de la crise que traverse ce secteur. Il est rare que des projets de loi, portant en particulier sur l'habitat et l'urbanisme, soient adoptés à l'unanimité en commission. En premier lieu, ce vote traduit un constat partagé avec tous les élus locaux confrontés à un parc important d'habitats dégradés, notamment en copropriété : le constat de procédures trop longues, trop complexes, ou encore trop tardives, et de conditions d'application parfois non objectivables et juridiquement insécurisantes. En second lieu, il traduit la qualité du travail effectué en commission. Je vous remercie, messieurs les rapporteurs, pour votre ouverture, votre esprit de coconstruction et la précision de vos argumentaires. J'espère que nous poursuivrons ainsi nos travaux dans l'hémicycle.
En commission, les députés du groupe Socialistes et apparentés ont fait adopter quatorze amendements et sous-amendements permettant de mieux préciser les dispositifs proposés et d'en assurer le caractère opérationnel. À cet égard, si nous avions soulevé la complexité de la première condition d'éligibilité prévue à l'article 3, nécessitant deux arrêtés, l'adoption de notre amendement remplaçant la nécessité de prouver une dégradation, à terme, « irrémédiable », de l'immeuble, par celle d'anticiper la « poursuite de la dégradation », est une avancée importante. Elle sécurise juridiquement la procédure et réduit le risque de contentieux. Dès lors, la conservation d'un premier critère restrictif se justifie et permet de conserver des garanties légales suffisantes. Nous n'y reviendrons donc pas en séance.
Nous souhaitons également poursuivre le renforcement du pouvoir donné au juge de scinder ou de dissoudre des associations syndicales libres (ASL) ou des associations foncières urbaines libres (Aful) lorsque celles-ci font véritablement obstacle à ces projets. Je crois savoir que nous pourrons progresser sur ce point crucial.
Nous proposons également de renforcer encore la lutte contre les marchands de sommeil en rendant automatique la confiscation de l'indemnité d'expropriation par le juge en cas de condamnation définitive de l'exproprié. En commission, notre collègue Stéphane Peu a énuméré des exemples choquants ; nous pouvons y mettre fin. Nous proposerons par ailleurs de mieux préciser les modalités de fixation de cette indemnisation, afin qu'elle ne soit pas décorrélée de la valeur réelle des biens, notamment en l'absence de références comparables.
Dans le même esprit, nous proposerons aussi de préciser les conditions d'évaluation financière tant de la démolition que de la remise aux normes. Cette dernière ne saurait se faire autrement qu'en respectant les dernières normes et non uniquement les normes de décence. À cet égard, si nous nous réjouissons du retour de la notion d'« habitabilité » à l'article 1er , il est essentiel d'aller plus loin et de viser l'amélioration des conditions d'habitabilité, notamment en intégrant le confort thermique en été comme en hiver. Parce que ces immeubles ne feront pas deux fois de suite l'objet de travaux aussi lourds, il faut en profiter pour aller le plus loin possible dans la réhabilitation.
En commission, nous avons salué le dispositif prévu à l'article 2, qui vise à favoriser la réalisation de travaux par les copropriétés à l'aide d'un emprunt collectif. Je nous mets cependant en garde contre le risque de voir des banques et des assureurs refuser d'aider celles des copropriétés qui en auraient le plus besoin, alors même qu'elles sont volontaires. L'article 40 de la Constitution ne nous permettant pas d'apporter cette garantie, pouvez-vous, monsieur le ministre, vous engager à ce que l'État apporte une garantie à ces prêts, à un niveau élevé, ou qu'il existe au minimum un prêteur et un assureur en dernier recours, à la CDC ou ailleurs ? Il nous faut garantir l'effectivité de l'accès à cet outil pour toutes les copropriétés.
Enfin, il nous paraît nécessaire de revenir sur l'amendement de M. Lionel Causse, qui a réduit les conditions de majorité pour le vote de travaux de rénovation énergétique. Si nous soutenons résolument la réalisation de tels travaux, nous craignons que le vote de travaux aussi lourds par une majorité inférieure au tiers des copropriétaires n'ait un impact contre-productif risquant d'engendrer des tensions, des impayés et un abandon en cours d'opération ; cela repousserait aux calendes grecques des travaux pourtant nécessaires. La sociologie des copropriétés démontre la nécessité d'un niveau minimal d'adhésion des copropriétaires pour assurer le succès de travaux lourds. À cet égard, l'article 25-1 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis apporte un équilibre satisfaisant.
Le groupe Socialistes et apparentés soutiendra à nouveau ce texte et tentera d'œuvrer avec vous à son amélioration. Nous réitérons le vœu de voir prochainement nommé un ministre du logement de plein exercice, à même de se saisir des enjeux qui concernent nos concitoyens.
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs des groupes LFI – NUPES, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Monsieur le ministre – entre autres – du logement, mes chers collègues, ce projet de loi concernant l'accélération et la simplification de la rénovation de l'habitat dégradé et les grandes opérations d'aménagement vise à nous fournir les outils nécessaires pour réduire les effets de la crise du logement que nous traversons.
Ces propositions tirent les leçons, à mi-parcours, du plan Initiative copropriétés. Lancé en 2018 et doté de près de 1 milliard d'euros, ce dispositif vise à accompagner la requalification de 88 000 logements situés dans des copropriétés en difficulté. Il a été déployé pour répondre aux problèmes rencontrés par de nombreuses copropriétés dont la mauvaise gestion engendre des dégradations qui peuvent être irréversibles et qui engagent la sécurité publique. Durant ces cinq années, les acteurs concernés ont relevé de nombreux dysfonctionnements dans l'application des procédures visant à redresser les copropriétés en difficulté. Il est donc nécessaire de prévoir de nouvelles mesures pour soutenir le plan Initiative copropriétés, afin de faciliter et d'accélérer la rénovation des habitats dégradés.
Le chapitre Ier du projet de loi prévoit des mesures qui permettront une intervention dans les copropriétés au plus tôt, avant que les dégradations soient définitives. L'article 2 prévoit ainsi la possibilité pour les syndicats de copropriété de contracter un prêt collectif pour financer les travaux essentiels et de rénovation énergétique. Cette mesure facilitera l'exécution des travaux, l'amélioration du cadre de vie et la réalisation de la transition écologique. Elle permettra également de réduire les délais de recherche de financement, qui peuvent parfois s'étendre sur une année, ce qui ralentit considérablement la rénovation des copropriétés.
Le chapitre II prévoit des mesures visant à accélérer les procédures de recyclage et de transformation des copropriétés, ainsi que les opérations stratégiques d'aménagement. Des dispositions permettront de sécuriser le cadre juridique des expropriations, qui sont nécessaires pour la sécurité de nos concitoyens et indispensables au recyclage des habitats urbains. L'examen du projet de loi en commission a conduit à l'adoption de plusieurs amendements visant à renforcer la portée du texte en ce qui concerne la modernisation du fonctionnement des copropriétés et l'amélioration de la circulation de l'information ; les dispositifs de lutte contre les marchands de sommeil, par l'instauration de sanctions pénales plus sévères ; le renforcement du pouvoir du maire pour assurer une meilleure application des mesures de démolition des constructions jugées irrégulières et présentant des risques pour la sécurité et la santé des résidents.
Nous avons tous conscience que le secteur du logement est en tension et que nous devons agir pour que nos concitoyens puissent se loger dans des habitats dignes et abordables. C'est pourquoi le Gouvernement et la majorité sont pleinement mobilisés, avec un ministre dont le portefeuille comprend le logement – je le répète, puisque cela ne semble pas acquis pour beaucoup d'entre vous
Sourires sur quelques bancs du groupe RE
– , pour simplifier les procédures judiciaires et administratives, afin de sécuriser les acteurs impliqués ; pour renforcer les outils d'accompagnement du plan Initiative copropriétés, afin d'assurer une intervention en amont et d'éviter ainsi les dégradations définitives ; pour soutenir la production de logements abordables avec l'investissement de 4,6 milliards dans le dispositif MaPrimeRénov'.
Pour toutes ces raisons, le groupe Horizons et apparentés votera pour le projet de loi. Je vous remercie, monsieur le ministre du logement.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
Comment faire des bébés lorsqu'on est privé de logement ? Comment faire des bébés lorsqu'on s'inquiète de ne pas pouvoir payer son loyer ? Comment faire des bébés quand on occupe un logement mal isolé ? Je pose ces questions car, dans ce qui tient lieu de discours de politique générale, le Président de la République a, la semaine dernière, parlé du « réarmement démographique » comme d'une priorité. Il n'a pas, ou à peine, évoqué le logement, alors que celui-ci constitue la première préoccupation des Français et que c'est à lui que le Gouvernement devrait donner la priorité absolue. Pourtant, comme plusieurs l'ont déjà observé, alors que nous sortons d'une vague de froid, le Gouvernement ne comprend pas de ministère dédié au logement.
Si Emmanuel Macron et son gouvernement ne sont pas les seuls responsables de la situation actuelle, n'oublions pas qu'ils sont aux responsabilités depuis 2017 – 2014 même, car Emmanuel Macron était alors ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique. Nous ne pouvons pas ignorer le constat unanime d'une crise conjoncturelle et structurelle du logement. C'est une bombe sociale dont le Gouvernement ne s'occupe pas, dont il ne prend pas la mesure, pire, qu'il aggrave. En attestent la suppression de la garantie universelle des loyers, le caractère facultatif de l'encadrement des loyers, la fragilisation du logement social ou encore la loi visant à protéger les logements contre l'occupation illicite, que nous devons entre autres à M. Kasbarian – un texte qui punit les impayés, pénalise les plus précaires et ouvre même la voie au retour de la prison pour dettes !
En atteste également l'encadrement insuffisant des meublés touristiques : quand nous, parlementaires, parvenons à la faveur d'une maladresse du Gouvernement à supprimer la niche fiscale Airbnb, le Gouvernement se veut rassurant et, reconnaissant son erreur, annonce qu'il n'appliquera pas la loi. J'avertis donc l'hypothétique futur ministre du logement : si vous n'appliquez pas la loi de finances qui prévoit de limiter l'avantage fiscal des propriétaires de meublés touristiques, vous devrez en répondre devant un tribunal administratif, mais également devant un tribunal pénal.
J'aimerais bien connaître son identité, mais je l'ignore encore !
Toujours est-il que le Gouvernement ne prend pas la mesure de la crise logement et qu'il l'aggrave. Le manque structurel et conjoncturel de places d'hébergement – si important que le Samu social ne répond plus et qu'à Paris, la préfecture nous informe que les femmes enceintes depuis moins de sept mois et les nourrissons âgés de plus de trois mois ne sont plus prioritaires – en est la preuve la plus manifeste.
Accepter et assumer que des gens dorment à la rue et qu'ils y meurent est un choix pleinement politique. L'abbé Pierre le rappelait à cette même tribune, à l'occasion d'une autre vague de froid, accusant le gouvernement de l'époque d'inaction et d'insensibilité. Les douleurs, les souffrances et la haine qui naissent des situations de mal-logement sont trop importantes, mais à quelques jours du soixantième anniversaire de l'appel du 1er février 1954, le logement catalyse toujours plus les inégalités en France.
L'abbé Pierre commençait ainsi son discours : « Mes amis, au secours… Une femme vient de mourir gelée, cette nuit à trois heures, sur le trottoir du boulevard Sébastopol, serrant sur elle le papier par lequel, avant-hier, on l'avait expulsée… » La semaine dernière, plusieurs personnes sont mortes de froid, mais le Gouvernement ne compte toujours pas de ministre du logement. L'absence de vision d'ensemble est manifeste, au moment où nous étudions le texte sur les copropriétés dégradées, inspiré d'un rapport remis par les maires Mathieu Hanotin et Michèle Lutz. Sans attendre l'examen de ce projet de loi, les mesures réglementaires préconisées par ce rapport auraient pu être prises par le ministre du logement, eût-il été déjà désigné.
Cela étant posé, il est fondamental de s'attaquer aux copropriétés dégradées. Aussi ce projet de loi est-il bienvenu pour prévenir et traiter l'habitat indigne. Ce texte technique comporte des mesures que le groupe Écologiste – NUPES soutiendra, comme le prêt pour travaux consenti aux syndicats de copropriétaires. Nous parviendrons peut-être à l'améliorer encore.
Notre groupe et d'autres ont signalé les effets pervers induits par la levée de l'obligation d'exécuter les mesures prescrites de rénovation en cas de vacance, cette dérogation pouvant inciter à laisser des logements vacants. Les travaux de la commission ont permis de traiter ce problème, et c'est heureux, mais j'espère avoir insisté suffisamment sur le fait que ce projet de loi ne s'inscrit malheureusement pas dans une politique cohérente d'amélioration du logement. Où est la réflexion sur la précarité énergétique dans les copropriétés dégradées ou sur les difficultés des ménages pauvres ? Où est le plan d'action permettant d'adapter les logements aux vagues de froid et aux canicules ? Le ministre – non pas du logement mais de la transition écologique et de la cohésion des territoires – a récemment évoqué une hausse de 4 degrés Celsius des températures en France, mais comment s'en satisfaire, sachant qu'Axa avertissait, voilà huit ans déjà, que sous une telle hypothèse de réchauffement, la France ne serait plus assurable ?
Nous attendons donc une vision de long terme, et si vous n'en disposez toujours pas, nous tenons la nôtre à votre disposition. Dans l'immédiat, des solutions existent et ne pas les appliquer signe un manque de courage politique et une indifférence à la situation.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOC.
Le présent projet de loi est technique et dense ; il vise, en modifiant plusieurs codes – le code pénal, le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, le code de la construction et de l'habitation ainsi que le code de l'urbanisme –, à accélérer et à simplifier la rénovation de l'habitat dégradé. Je vous avoue toutefois être très gênée de commencer l'examen de ce projet de loi alors qu'aucun ministre du logement de plein exercice n'a été nommé.
Depuis trente ans, de nombreuses lois ont été votées. Elles ont institué de nouveaux outils, parfois mal connus, dont le cumul rend l'utilisation de plus en plus complexe. Face à des charges d'investissement importantes, les délais de réhabilitation des immeubles se trouvent allongés, pour atteindre parfois quinze ou vingt ans. Les copropriétaires paupérisés se retrouvent alors dans l'impossibilité de payer leurs charges ou les travaux d'entretien, tandis que la valeur marchande des immeubles qui se dégradent ne cesse de baisser. Quant aux occupants, ils sont dans l'impossibilité financière de se loger ailleurs. Tous les ingrédients sont donc réunis pour créer de l'habitat indigne, qui touche aujourd'hui environ 1 million de personnes en France.
Ne nous leurrons pas : bien que les marchands de sommeil aient intérêt à la dégradation du bâti – c'est ainsi qu'ils peuvent loger les plus démunis dans des conditions intolérables –, la moitié des logements insalubres sont occupés par leurs propriétaires eux-mêmes. Souvent pauvres, fragiles et âgés, ils sont démunis devant la complexité des procédures et des travaux à entreprendre ; leur situation, aggravée par les nouvelles exigences de rénovation énergétique, se dégrade au point de devenir parfois irrattrapable.
Ce projet de loi doit permettre d'éviter d'atteindre de telles extrémités, en donnant aux collectivités les moyens d'agir avant la dégradation définitive d'un immeuble et en clarifiant les possibilités de recours à des opérations de restauration immobilière. Ces mesures de lutte contre l'habitat dégradé sont d'ailleurs attendues par les élus locaux.
Plusieurs mesures techniques de ce texte sont pertinentes. Tel est le cas de l'élargissement de la définition des ORI, prévu à l'article 1er , ou de la facilitation des emprunts collectifs, prévue à l'article 2, mais dont l'application aux copropriétaires les plus modestes doit encore être précisée. Tel est encore le cas de la procédure d'expropriation des immeubles ayant fait l'objet d'un arrêté de police, prévue à l'article 3, qui permettra, avant la dégradation irrémédiable du bâti, l'intervention précoce des pouvoirs publics.
Je ne peux malheureusement pas commenter toutes les dispositions de ce texte, mais l'une d'elles me semble particulièrement intéressante. L'article 8 bis prévoit en effet que « [l]e règlement du plan local d'urbanisme […] peut définir des secteurs dans lesquels est obligatoire pour tout immeuble bâti la réalisation, au moins une fois tous les dix ans, d'un diagnostic structurel incluant une description des désordres observés et évaluant les risques que ceux-ci présentent pour la sécurité des occupants et celle du voisinage ». Un tel dispositif sera évidemment contraignant pour les propriétaires, mais devrait offrir aux collectivités une meilleure connaissance de l'état structurel de certaines zones bâties dégradées et leur éviter d'intervenir à coups d'arrêtés de péril ponctuels. J'y vois évidemment un progrès. En revanche, je n'ai identifié aucune disposition relative à l'exploitation de ces diagnostics. Qu'en est-il des travaux à engager en fonction de leurs résultats et qui se chargera de leur contrôle ?
Je ne peux que saluer les dispositions de l'article 8 ter, qui prévoit que « [l]e fait de mettre à la disposition d'une personne, moyennant une contrepartie, un hébergement incompatible avec la dignité humaine est puni de sept ans d'emprisonnement et de 200 000 euros d'amende ». Il est en effet temps de sanctionner très clairement et fermement les marchands de sommeil.
En conclusion, je souhaite rappeler un principe essentiel, même s'il ne plaît pas forcément aux entreprises du bâtiment : nous devons accorder la même importance à la réhabilitation des logements anciens qu'à la production de logements neufs. Ce n'est pas le cas actuellement, mais étendre le prêt à taux zéro au financement des opérations de rénovation du bâti ancien, y compris dans les communes situées en zone tendue, pourrait contribuer à mieux faire respecter ce principe. Il est plus que temps !
J'appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles du projet de loi.
Nous sommes convaincus qu'ajouter des critères de salubrité ou d'intégrité du bâti à la définition de l'opération de restauration immobilière, comme le propose l'article, facilitera la création de contentieux par les marchands de sommeil. Inversement, le recours des collectivités à cet outil sera rendu plus difficile : il leur reviendra en effet de prouver que leur intervention est nécessaire au regard de l'un de ces deux critères, ce qui n'est pas toujours évident, compte tenu des moyens accordés aux experts et des conditions de leurs visites. Des représentants de plusieurs établissements et entreprises publics l'ont d'ailleurs souligné pendant leur audition.
La réintégration en commission du critère d'habitabilité, dont le paradoxe, celui d'être jugé trop flou et trop contraignant, semble avoir été levé, ne résout pas ce problème. En effet, il est plus que probable qu'en cas de contentieux, le critère d'habitabilité soit écarté au profit du critère de salubrité ou d'intégrité du bâti. De plus, l'ajout en commission des mentions expresses à la rénovation énergétique s'oppose à l'objectif de clarification du rôle des instruments d'urbanisme des communes visées par ce texte, puisque, de l'aveu même du Conseil d'analyse économique, l'évaluation de ces mentions ne repose pas sur des bases solides et que leur lien avec l'insalubrité ou l'intégrité du bâti est très faible.
Pour ces raisons, le groupe Rassemblement national est opposé à la rédaction actuelle de l'article.
M. Roger Chudeau applaudit.
Nous soutiendrons cet article, car les notions de sécurité des personnes, d'intégrité et de salubrité des immeubles y sont justement préférées à la notion d'habitabilité pour engager le lancement d'une opération immobilière. Selon nous, ses dispositions permettront d'éviter autant que possible le recours aux procédures de carence ou d'expropriation. Nous évoquons d'ailleurs très souvent les collectivités, mais la loi prévoit que de telles procédures puissent être engagées par les propriétaires.
Pour éviter les pires situations, il importe de modifier le dispositif actuel. En effet, certains immeubles, parfois de grande hauteur, construits dans les années 1960 ou 1970 – l'étude d'impact en fait mention – ne se trouvent pas encore dans une situation critique, mais s'ils ne font pas maintenant l'objet d'une intervention, des procédures de carence et d'expropriation devront inévitablement être engagées.
Du reste, notre inaction pourrait pénaliser les copropriétaires vertueux dès lors qu'il existe des copropriétaires indélicats.
Bien sûr !
Pour soutenir ces copropriétaires vertueux, nous devons anticiper le lancement des opérations de rénovation immobilière, surtout lorsque la dégradation de l'immeuble progresse. Or, sans même que l'habitabilité soit compromise, l'intégrité d'un bâtiment peut être menacée : par souci d'efficacité et dans l'intérêt des copropriétaires vertueux, nous devons faciliter ces opérations précoces. Nous éviterons ainsi les expropriations et favoriserons le maintien dans le logement, ce qui, dans un contexte de pénurie, ne manque pas d'intérêt. Nous soutiendrons donc l'adoption de cet article, tel qu'il a été rédigé.
M. Bazin vient de le souligner, l'article 1er permettra utilement d'élargir le champ des travaux pouvant faire l'objet d'une ORI. La loi étant actuellement trop floue, elle peut en effet donner lieu à des interprétations trop restrictives. Aussi est-il utile de remplacer le critère d'habitabilité par les critères de salubrité et d'intégrité d'un ou plusieurs immeubles, complétés par le critère de sécurité des personnes. Cela permettra d'intervenir plus rapidement et plus efficacement, mais également plus précocement dans le processus de dégradation d'un immeuble, c'est-à-dire avant qu'il ne soit trop tard, avant que les conditions d'habitabilité ne soient plus garanties. Nous voterons donc en faveur de cet article.
La parole est à Mme Christine Engrand, pour soutenir l'amendement n° 36 , tendant à supprimer l'article 1er .
Pour toutes les raisons évoquées précédemment, nous demandons la suppression de l'article 1er , afin de conserver la définition initiale de l'ORI, qui repose seulement sur la notion d'habitabilité. Nous l'avons dit en commission : rien ne vous oblige à chambouler ce cadre législatif, bien qu'il soit imparfait. Du reste, le texte laisse les principaux intéressés dubitatifs.
Je note une confusion et souhaite donc clarifier certains éléments. En commission, non seulement nous avons voté le dispositif proposé par le Gouvernement, qui vise à ajouter les notions de salubrité et de dégradation du bâti, mais nous l'avons complété en rétablissant la notion d'habitabilité.
L'article 1er vise à laisser les coudées franches pour définir un périmètre, afin d'aider les propriétaires et les personnes habitant dans des immeubles dégradés. J'en profite, madame Engrand, pour revenir sur votre intervention lors de la discussion générale. Il s'agit non pas de chasser les petits propriétaires et de les transformer en « locataires mobiles », mais précisément d'éviter qu'ils ne se retrouvent dans des situations où ils auraient irrémédiablement tout perdu.
Le dispositif vise à leur permettre de rester dans les lieux, de définir des périmètres d'action afin de mobiliser notamment les aides de l'Anah. Quant aux mauvais coucheurs, ils pourront être poursuivis afin que leurs victimes, de bonne foi, continuent à vivre dans un logement qui sera réhabilité, tout en étant accompagnées.
Avis défavorable.
Je fais pleinement miens les arguments développés par Mme Brulebois, M. Bazin et le rapporteur. Si nous voulons aider les propriétaires de bonne foi – qui se distinguent de ceux qui refuseraient d'engager des travaux –, afin qu'ils ne se retrouvent pas sans solutions, nous devons élargir le champ des travaux pouvant faire l'objet d'une ORI. C'est précisément ce que prévoit cet article. Sa suppression irait à l'encontre de son objet : éviter des blocages et des expropriations. Avis défavorable.
Mme Danielle Brulebois applaudit.
L'amendement n° 36 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Nathalie Da Conceicao Carvalho, pour soutenir l'amendement n° 108 .
L'amendement n° 108 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il vise à préciser la notion d'habitabilité. Ainsi, les travaux doivent « améliorer les conditions d'habitabilité » pour être qualifiés d'opération de restauration immobilière.
En commission, nous avions soutenu la réintroduction de cette notion dans la loi. En effet, bien qu'imparfaite, sa suppression pure et simple restreignait de manière excessive la portée du dispositif, qui ne s'appliquait qu'aux seuls travaux relatifs à la structure, à la salubrité ou à la sécurité incendie du bâtiment. Le cadre de vie, les prestations de l'immeuble, qui sont des conditions essentielles de l'habitabilité, ne doivent pas être écartés. C'est bien l'ensemble de ces travaux, menés conjointement à l'occasion d'opérations lourdes, comme celles en matière d'ORI, qui permettent la transformation durable du bâti et l'amélioration des conditions de vie des habitants.
Cependant, il ne s'agit pas de garantir seulement l'habitabilité de l'immeuble – notion qui ne s'applique pas à un logement inhabitable. Il s'agit de permettre la réalisation de travaux qui l'amélioreront, plutôt que de se contenter d'éviter que le logement soit un taudis, comme dans le cadre d'une opération de sauvetage du bâti.
Cette précision, qui ne fait pas obstacle à ce que d'autres types de travaux prévus par l'article dans sa nouvelle rédaction soient qualifiés d'ORI, vise à améliorer le bâtiment du point de vue qualitatif, au-delà du seul respect des normes minimales de sécurité, de salubrité et de décence.
Votre amendement est quasiment rédactionnel, même si l'argumentation est plus riche que le dispositif. C'est toute la magie de nos débats : la rédaction de l'amendement peut être sèche et sa défense pleine de verve.
Cette amélioration rédactionnelle ne clarifie pas le dispositif. Au contraire, en précisant que les travaux doivent « améliorer les conditions d'habitabilité », je crains qu'on ne fragilise les procédures prévues par l'article. Avis défavorable.
Nous comprenons parfaitement l'intention de l'auteur de l'amendement. Compte tenu de la richesse des débats qui se sont tenus en commission et de l'équilibre que vous avez atteint, notamment au regard du droit de propriété, nous préférons conserver la version du texte issue des travaux de la commission. En effet, l'ajout du mot « améliorer » pourrait porter atteinte à cet équilibre. Nous ne souhaitons pas élargir le champ des travaux pouvant faire l'objet d'une ORI car cela pourrait poser problème dans le cadre du contrôle constitutionnel et lors de l'application du dispositif.
C'est la raison pour laquelle j'émets un avis défavorable. Je prends le temps d'expliquer ma position car nous comprenons la motivation de l'auteur de l'amendement et de ceux qui l'ont déposé. Néanmoins, pour sécuriser les ORI, nous ne devons pas modifier l'article.
Si nous ne sommes pas favorables à cet amendement, ce n'est pas parce que nous ne souscrivons pas à l'objectif que cherche à atteindre notre collègue Inaki Echaniz. En effet, on ne peut que souhaiter l'amélioration des conditions d'habitabilité.
Cependant les opérations de restauration immobilière s'accompagnent de pouvoirs exorbitants de droit commun – la menace d'expropriation ; leur exercice doit donc répondre à une nécessité impérieuse, et ils doivent être proportionnés. L'ajout du mot « améliorer » porterait atteinte aux garanties encadrant le dispositif, à son équilibre même, et serait source de contentieux. Dès lors, cet outil ne serait plus efficace et ne résoudrait pas les problèmes, alors même que nous souhaitons agir plus tôt et plus efficacement. Sécurisons donc le dispositif au maximum. La rédaction actuelle, qui prévoit de « garantir la salubrité, l'intégrité ou l'habitabilité », est suffisante.
S'agissant du droit de propriété, dans d'autres domaines, notamment dans le cadre du contrôle technique des véhicules, la puissance publique se substitue au propriétaire et peut émettre une injonction de réparation sur un bien qui appartient à un propriétaire privé. Il n'y a donc pas de raison qu'on ne puisse instaurer un dispositif analogue.
Je rappelle qu'avec mon collègue Gabriel Amard, nous avons déposé une proposition de loi visant à financer 100 % des travaux permettant de diminuer la consommation d'énergie des bâtiments. Ces travaux seraient financés à 100 % par l'État, sans aucun reste à charge, l'équilibre budgétaire étant assuré par une inscription notariale au registre des hypothèques sur les biens bénéficiant de l'aide de l'État.
Il ne faut donc pas se crisper sur la question du droit de propriété. S'agissant des rénovations thermiques, on devrait pouvoir s'en affranchir afin de respecter la Charte de l'environnement qui exige l'implication de chaque citoyen en faveur de la préservation de l'environnement.
L'amendement n° 197 n'est pas adopté.
Sur l'article 1er , je suis saisie par les groupes Renaissance et Rassemblement national d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à Mme Emeline K/Bidi, pour soutenir l'amendement n° 59 .
Ces différentes notions sont difficiles à définir et certaines se recoupent. L'amendement vise à ajouter la notion de décence, bien connue des juges et présente dans la loi, qui se distingue de celle de salubrité du logement et a l'avantage d'être moins floue. Elle inclut plus clairement la notion d'habitabilité, répond à des critères prévus par la loi, fait écho à des notions juridiques bien connues et constitue une référence.
Je vous invite à retirer votre amendement ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable. Nous venons d'avoir le débat relatif à la ligne de crête, que nous avions déjà eu en commission.
Nous examinons des dispositifs qui déclenchent des aides, coordonnent l'action publique et permettent aux copropriétaires de sauvegarder leurs bâtiments avant toute dégradation irrémédiable. Ils touchent au droit constitutionnel de propriété et imposent des prescriptions. Nous devons donc avoir une position nette. Les notions d'habitabilité, de dégradation et d'insalubrité sont claires. Celle de décence s'applique aux logements qui seront mis en location, ce qui n'est pas le cas de tous les logements situés dans le périmètre des ORI. Les discussions que nous venons d'avoir sont éclairantes : cet ajout serait plutôt de nature à fragiliser le dispositif.
Le rapporteur l'a dit, je vais le dire avec mes mots. Dans le cadre d'une ORI, il existe tant des avantages substantiels – des aides – qu'une sanction potentielle – l'expropriation. Si nous allons trop loin, et si nous ajoutons le mot « décence » à la définition de l'ORI, nous pourrions potentiellement exproprier un propriétaire qui voudrait habiter son propre bien. Nous ne souhaitons pas aller jusque-là. C'est la raison pour laquelle nous souhaitons en rester à la notion de salubrité, pour éviter ce qui serait une forme de non-sens, à savoir l'expropriation d'un propriétaire qui voudrait lui-même habiter son bien.
Dans le cadre de l'ORI, nous devons faire preuve d'un raisonnement équilibré. J'émets donc un avis défavorable.
L'amendement n° 59 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Christine Engrand, pour soutenir l'amendement n° 274 .
Le vieillissement de la population et la question du handicap exigent une réflexion approfondie sur la manière dont nous abordons l'accessibilité des immeubles existants.
Actuellement, seuls les bâtiments soumis à des travaux dont le coût représente plus de 80 % de la valeur du bien sont tenus de garantir l'accessibilité de tous. Cependant cette condition drastique exclut de nombreuses mises aux normes nécessaires, laissant de côté de nombreux bâtiments qui pourraient être rendus accessibles. Selon le Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH), seuls 7 % des logements en France sont considérés comme totalement accessibles, ce qui souligne l'urgence d'agir et de repenser notre approche en matière d'accessibilité.
Il est toujours regrettable de constater que, face à l'absence de mesures adéquates, des personnes à mobilité réduite se résignent à vivre dans des bâtiments inadaptés, ce qui compromet la qualité de leur vie et leur intégration sociale. C'est dans ce contexte que s'inscrit l'amendement que nous présentons.
Il souligne la nécessité d'aménager des issues de secours accessibles aux personnes à mobilité réduite, renforçant ainsi la sécurité de ces dernières dans les bâtiments faisant l'objet d'une opération de restauration immobilière. Il propose également d'imposer la réalisation de travaux d'accessibilité lorsqu'une personne à mobilité réduite réside dans un tel bâtiment, même lorsque le coût des travaux est inférieur à 80 % de la valeur du bien. Il maintient toutefois les dérogations existantes afin de ne pas entraver la capacité des collectivités à réaliser des opérations de restauration immobilière lorsque les travaux d'accessibilité sont réellement impossibles.
Sur l'amendement n° 100 , je suis saisie par le groupe Rassemblement national d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Quel est l'avis de la commission ?
Ce projet de loi n'est pas le bon véhicule. Des textes ont été adoptés en matière d'accessibilité : la loi Elan instaure ainsi des quotas en matière de logements adaptés ; à l'époque, les débats avaient été très riches.
Aujourd'hui, nous examinons un dispositif qui vise à garantir la sécurité et la salubrité des biens. Votre amendement aurait pour effet de renchérir considérablement les travaux réalisés. Pour ces raisons, j'émets un avis défavorable.
L'amendement n° 274 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il vise à soumettre le bénéfice du dispositif de l'ORI à la réalisation préalable d'une étude sur l'opportunité et le coût d'une rénovation énergétique performante vers les classes A ou B, permettant d'atteindre au moins la classe D pour les immeubles de plus de quarante ans, lorsque sont envisagés des travaux autres que ceux de mise aux normes au regard du risque d'incendie, ou de démolition.
Si nous partageons les objectifs de simplification, de clarification et d'accélération que visent à atteindre ces dispositifs, l'enjeu de la rénovation énergétique et le mur d'investissement à réaliser sur le parc existant commandent de saisir toutes les occasions pour favoriser la réalisation de tels travaux, en particulier les travaux performants.
C'est dans les copropriétés les plus fragilisées que nous rencontrerons les plus grandes difficultés pour y parvenir, d'où l'importance de donner aux décideurs que sont les propriétaires et les collectivités locales toutes les informations permettant de juger de l'opportunité et de la faisabilité financière de tels travaux. Pour les immeubles anciens, il s'agira d'atteindre au moins la classe D.
Demande de retrait ou avis défavorable. Lisez bien l'article 1er tel qu'il est issu de la commission, cher collègue : « Après le mot amélioration, la fin de la première phrase du premier alinéa de l'article L. 313-4 du code de l'urbanisme est ainsi rédigée :, de rénovation, y compris énergétique lorsqu'elle conduit à une amélioration de la performance énergétique du logement […] ». Vous n'êtes pas étranger à cette évolution du texte, me semble-t-il. Le travail effectué en commission satisfait votre souhait alors que la rédaction que vous proposez à présent alourdirait considérablement le dispositif des ORI. Ce n'est vraiment pas l'objectif.
Je partage l'avis du rapporteur. Hormis l'étude préalable préconisée dans l'amendement, celui-ci est satisfait. Or prévoir la réalisation de telles études, au moment où nous disons l'urgence à agir, enverrait un mauvais signal, sans compter le temps potentiellement nécessaire pour les lancer, alors que l'ORI cherche à prévenir une dégradation définitive des logements. Vous avez obtenu l'essentiel : élargir le périmètre de l'ORI. Conditionner le dispositif à la réalisation d'une étude préalable nous ferait reculer. Avis défavorable.
Je retire l'amendement, bien qu'il permette de discuter du reste à charge et des objectifs de qualité à atteindre – ceux-ci devant faire l'objet d'engagements nécessaires.
L'amendement n° 198 est retiré.
L'amendement n° 110 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Michèle Martinez, pour soutenir l'amendement n° 100 .
La France a un riche patrimoine immobilier. J'en veux pour preuve les chiffres du ministère de la culture : plus de 46 000 immeubles étaient inscrits ou classés au titre des monuments historiques en 2022. Le but de l'amendement est de faire superviser par les spécialistes du patrimoine au sein des services de l'État les travaux de rénovation que doivent subir ces bâtiments en raison de leur dégradation, afin qu'aucune modification ne soit apportée à leurs caractéristiques remarquables.
Vifs applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.
Avis défavorable, ou demande de retrait, malgré le soutien que les députés du Rassemblement national expriment à leur collègue. Qu'est-ce qu'une ORI, en réalité ? Une opération au périmètre défini pour sauvegarder des bâtiments avant qu'il ne soit trop tard et faire en sorte que leurs habitants puissent continuer à y vivre. Je ne veux pas ouvrir un débat qui serait forcément trop long, mais solliciter l'avis des architectes des bâtiments de France (ABF) avant de commencer une ORI ne favorisera pas la souplesse. Nous voulons que la coordination de l'action publique se fasse vite et bien ; l'ajout que vous proposez nous ferait aller moins vite et moins bien.
Identique, car c'est superfétatoire : quel que soit l'état d'un bâtiment, dès lors qu'il est situé dans le périmètre d'un plan de sauvegarde, un ABF a pleine autorité et l'ORI n'enlève rien à son pouvoir. Ce dispositif complémentaire n'apporterait rien, sinon de la confusion, là où nous recherchons, au contraire, de la clarté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 61
Nombre de suffrages exprimés 58
Majorité absolue 30
Pour l'adoption 12
Contre 46
L'amendement n° 100 n'est pas adopté.
L'amendement n° 259 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 63
Nombre de suffrages exprimés 63
Majorité absolue 32
Pour l'adoption 51
Contre 12
L'article 1er est adopté.
Sur l'amendement n° 239 , je suis saisie par le groupe Rassemblement national d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Guillaume Vuilletet, rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 191 .
Il vise à élargir le champ d'intervention de l'association Foncière logement. Cette filiale du groupe Action logement, investie de missions d'intérêt général, chargée des programmes de mixité sociale et elle-même dotée d'une filiale d'intervention contre l'habitat indigne – Digneo – a alerté la commission sur les difficultés rencontrées durant ses opérations, du fait d'une définition légale trop étroite de son périmètre d'intervention. L'amendement propose d'y inclure les Opah, les ORI et les opérations de résorption de l'habitat insalubre (RHI) pour que Foncière logement puisse intervenir dans les secteurs caractérisés par une dégradation de l'habitat.
Favorable.
Je vous remercie, monsieur le rapporteur, car on a besoin de moyens, en plus des outils que vous imaginez. Le financement est le nerf de la guerre, et davantage encore en matière d'habitat dégradé, qui coûte encore plus cher puisqu'il nécessite des interventions plus complexes et plus techniques.
J'espère que la filiale d'Action logement pourra intervenir sur l'ensemble du territoire, monsieur le ministre, car l'habitat dégradé n'est pas propre aux zones tendues. Dans certaines communes rurales ou certains bourgs-centres, les parcs de logements en copropriété – destinés à ceux qui travaillaient dans les usines aux abords de sites industriels – ont vieilli. Grâce à sa filiale, Action logement pourrait être un opérateur utile pour pallier le manque de moyens des collectivités ou l'absence d'autres opérateurs disposant des équipes nécessaires pour mener à bien ce type d'investissements. Nous soutiendrons donc l'amendement.
L'amendement n° 191 est adopté.
La parole est à M. Frédéric Falcon, premier orateur inscrit sur l'article.
Nous estimons que l'article présente un véritable risque pour les propriétaires, en encourageant les copropriétés à s'endetter massivement pour réaliser des travaux de rénovation, d'amélioration ou d'isolation des immeubles. Si certains peinent à réaliser ces travaux, il faut bien comprendre que c'est dû à un manque de moyens, lesquels sont d'autant réduits que l'inflation a sérieusement fait croître les prix ces dernières années.
L'article ouvre la porte à un endettement collectif des copropriétaires sans appréciation de la solvabilité de chacun, et pose plusieurs questions. Quelles garanties les banques exigeront-elles, alors que ces travaux représentent parfois des sommes considérables, jusqu'à plusieurs fois la valeur vénale de l'immeuble concerné, comme c'est le cas dans le centre ancien de Narbonne, dans ma circonscription, ou dans certaines grandes métropoles où le coût des travaux peut dépasser le million d'euros ? Quelles seront les conséquences de cet endettement contraint pour des copropriétaires solvables, capables de régler leur part des travaux avec leurs fonds propres ? Pourquoi pousser les copropriétaires à s'endetter collectivement en les privant de la liberté de choisir le mode de financement le mieux adapté à leur situation individuelle ?
Les contraintes énergétiques, imposées selon un calendrier aussi court et aussi discutable, ne doivent pas précipiter des millions de Français à s'endetter massivement, alors que les sociétés labellisées RGE – reconnues garantes de l'environnement – sont de moins en moins nombreuses et incapables de répondre à une demande en constante augmentation. Pour toutes ces raisons, et pour empêcher les dérives auxquelles il conduirait, nous voterons contre l'article 2.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
L'article 2, en introduisant la possibilité, pour toutes les copropriétés, de souscrire un prêt collectif afin de financer des travaux essentiels – d'accessibilité aux personnes en situation de handicap ou à mobilité réduite et de rénovation énergétique – permettra certes, dans certaines situations, de débloquer des fonds pour effectuer des travaux nécessaires de réhabilitation, mais ne résoudra en rien les problèmes de solvabilité des plus précaires et pourrait même conduire à des impasses. Votre refus d'augmenter les salaires et de bloquer les prix des produits de première nécessité face à une inflation galopante aboutit à une paupérisation qui se généralise au profit de quelques puissants. Les copropriétaires n'échappent pas à cette tendance. La Cour des comptes le soulignait elle-même en 2022 : « La paupérisation des copropriétaires devra être mieux prise en compte afin d'éviter que le rôle de logement refuge des copropriétés pour les personnes n'ayant pu accéder au logement social ne vienne accroître encore le phénomène [des copropriétés dégradées]. »
Il est urgent de lutter contre l'explosion des inégalités, chers collègues, et pour la production de logements sociaux.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
L'article 2 a le mérite de s'atteler à une vraie question : celle du financement des travaux essentiels dans les copropriétés dégradées. Nous disposons d'outils, mais ils ne donnent pas satisfaction et nous devons chercher à les améliorer. L'emprunt collectif envisagé prévoit que tous les copropriétaires seront tenus de participer au remboursement durant plusieurs années, y compris ceux qui ne voudraient pas en profiter.
Mes questions sont nombreuses, monsieur le ministre – et je me réjouis que vous soyez là plutôt qu'à Bercy. Comment les prêteurs et les organismes de caution vont-ils considérer les copropriétaires inscrits au FICP ? L'État apportera-t-il des garanties – j'ai cru voir passer quelques amendements – aux copropriétaires défaillants ? Quelles seront les conséquences sur le cautionnement solidaire qui sert de garantie au syndicat de copropriété ? Quels organismes accepteront de cautionner un risque non plus potentiel mais avéré ? Avec quel surcoût ? Plus généralement, comment l'État accompagnera-t-il les copropriétaires modestes pour supporter le coût des investissements nécessaires à la transition énergétique ?
S'agissant du financement des copropriétés, ne faut-il pas maintenir le choix entre le nouveau prêt collectif à adhésion obligatoire et le prêt collectif existant à adhésion individuelle ? Selon moi, le nouveau prêt collectif ne devrait pas remettre en cause l'existence ni les modalités du prêt existant, auquel adhèrent les seuls copropriétaires qui souhaitent y participer, prêt agréé par le prêteur et l'organisme de caution, selon leurs propres critères. Il ne devrait pas non plus conduire à la disparition de l'éco-PTZ, que vous connaissez bien, monsieur le ministre, et qui est également soumis à une adhésion individuelle. Ces financements existants se développent un peu mais se développent tout de même, en maintenant un équilibre entre les parties prenantes.
Une autre question concerne le délai de paiement des copropriétaires refusant le prêt ; j'y reviendrai à l'occasion d'amendements.
L'enjeu de cet article est important, car nous savons qu'à l'intérieur d'une même copropriété, pour dire les choses le plus simplement possible, on trouve des gens très motivés et d'autres qui ne le sont pas ; tous n'ont pas la possibilité d'avancer les sommes et de tenir de surcroît des délais qui compliquent encore l'opération.
Je veux clarifier plusieurs choses, monsieur Bazin.
Premièrement, ce dispositif offre aux copropriétés une faculté nouvelle, mais ne devient en aucun cas le seul moyen de réaliser des travaux.
Deuxièmement, je confirme – nous y reviendrons – que des dispositifs de garantie pourraient participer au succès de l'opération.
Troisièmement, que se passe-t-il lorsque la situation patrimoniale ou financière des copropriétaires est différente, ce qui est systématiquement le cas ? Ce point ne relève pas de la loi ; il dépend de l'approche qu'ont les établissements bancaires de leur exposition au risque. En Belgique, par exemple, où ce type de prêts a cours, le dispositif fonctionne très bien sans les difficultés liées à l'examen des situations individuelles. La question doit faire l'objet, pendant la navette parlementaire, d'un dialogue avec la Banque de France et le milieu bancaire, en lien avec Bercy, pour nous permettre d'aboutir à une solution satisfaisante. Mais il faut, au préalable, que vous adoptiez le dispositif.
Nous en venons aux amendements à l'article 2.
La parole est à M. Frédéric Falcon, pour soutenir l'amendement de suppression n° 239.
Par cet amendement, nous souhaitons préserver les copropriétaires d'un risque d'endettement mal calibré, faute d'un contrôle préalable de leur capacité individuelle d'emprunt.
L'inflation n'épargne pas les charges de copropriété, qui explosent, notamment sous l'effet de la hausse des prix de l'énergie. Au reste, les défaillances ne cessent d'augmenter. En 2023, 130 000 copropriétés ont enregistré des niveaux d'impayés dépassant le seuil d'alerte. Selon l'Anah, ces copropriétés fragiles ont vu leur taux d'impayés bondir de 80 %. Le nombre de copropriétés affichant plus de 20 % d'impayés a été multiplié par six en cinq ans.
Nous craignons que l'endettement généralisé des copropriétés ne devienne finalement la seule issue de secours, la seule alternative proposée aux copropriétaires. Faut-il rappeler les enjeux financiers considérables que représentent ces travaux, dont le montant peut, dans les grandes métropoles, atteindre plusieurs millions d'euros selon la nature du bâti et son intérêt architectural, notamment si l'immeuble se situe dans un périmètre protégé ? Dans les marchés immobiliers les moins attractifs, le coût des travaux dépasse même souvent la valeur vénale de l'immeuble.
Face à toutes ces dérives possibles, l'emprunt global collectif ne nous satisfait pas. Nous refusons que l'ensemble des copropriétaires soient liés par une dette votée en assemblée générale ; nous préférons que chacun prenne les dispositions de son choix si des travaux d'amélioration doivent être votés.
Enfin, nous nous interrogeons sur l'accueil qui sera réservé par les banques à ce nouveau type de prêt. Quelles sûretés exigeront-elles ? Qu'en sera-t-il des garanties, de la caution, de l'hypothèque ?
Avis défavorable. Le fait est que nous devons trouver les voies et moyens adaptés pour aider les copropriétaires à financer des travaux importants de réhabilitation ou d'entretien du bâti, qu'ils concernent les parties communes ou privatives. Force est en effet de constater que les solutions bancaires proposées aux syndicats de copropriétaires ne sont pas adaptées, puisqu'elles sont très peu utilisées ; je pense, par exemple, aux prêts collectifs à adhésion individuelle.
L'article 2 a ainsi pour objet de créer un nouvel outil, lequel prendrait la forme d'un prêt contracté par le syndicat de copropriétaires, de manière que la solvabilité du seul syndicat soit analysée, et non celle de chaque copropriétaire.
Lorsque la copropriété compte très peu de lots, le banquier peut pratiquement s'assurer de la solvabilité de chaque copropriétaire, mais il est possible qu'au moins l'un d'entre eux soit insolvable. Lorsqu'elle compte plusieurs centaines, voire plusieurs milliers de lots – j'ai moi-même été président du conseil syndical d'une copropriété de 2 200 lots –, quel banquier s'assurera de la solvabilité de chacun des copropriétaires ? Aucun ! C'est ainsi que des travaux pourtant essentiels au maintien du bâti sont très difficiles à financer. Je ne comprends donc pas votre obstination à vous opposer à la création de cet outil complémentaire.
Défavorable.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 61
Nombre de suffrages exprimés 61
Majorité absolue 31
Pour l'adoption 12
Contre 49
L'amendement n° 239 n'est pas adopté.
Comme je l'ai indiqué dans la discussion générale, nous nous interrogeons sur la pertinence de l'article 9 ter, qui résulte de l'adoption par la commission d'un amendement de Lionel Causse et tend à appliquer aux travaux d'économie d'énergie ou de réduction des émissions de gaz à effet de serre les règles de majorité prévues à l'article 24 de la loi du 10 juillet 1965, tout en supprimant la référence à ces travaux à l'article 25 de la même loi.
Nous proposons de revenir sur ces nouvelles règles, soit en adoptant l'amendement n° 199 , soit lors de la discussion de l'article 9 ter .
Il s'agit de réserver la souscription du prêt collectif de financement des travaux à ceux d'entre eux qui portent sur la structure, l'habitabilité, la salubrité ou la sécurité de l'immeuble, en excluant les travaux dits de performance énergétique.
En effet, le régime du prêt collectif tel qu'il est prévu dans le texte revient pratiquement à forcer les copropriétaires récalcitrants à souscrire le prêt collectif. Une telle atteinte à la liberté contractuelle ne saurait se justifier que pour les rénovations réellement indispensables. Or les travaux prétendument de performance énergétique ne sont pas réellement nécessaires à la sauvegarde des immeubles ou de leurs occupants ; ils ne visent qu'à ajouter au bâti existant pour satisfaire une politique écologique déconnectée des réalités.
Enfin, je rappelle que la dernière loi de finances facilite déjà la souscription d'un éco-prêt à taux zéro pour la rénovation énergétique des copropriétés, en le soumettant à un vote à la majorité absolue des copropriétaires et non plus à l'unanimité.
Sur l'amendement n° 61 , je suis saisie par le groupe Rassemblement national d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Quel est l'avis de la commission ?
Sur l'amendement n° 61 , l'avis est défavorable, car la rénovation énergétique fait très clairement partie des travaux nécessaires et peut concourir à l'entretien des immeubles – il ne s'agit pas uniquement de l'entretien des parties communes. Il nous paraît donc important que ces travaux soient éligibles au prêt global collectif.
Quant à l'amendement n° 199 , il renvoie à la discussion de l'amendement n° 189 à l'article 9 ter . Il me paraît préférable de lier les deux débats. À ce stade, avis défavorable, donc.
S'agissant de l'amendement n° 199 , je demande un retrait : ne préemptons pas le débat sur les règles de majorité que nous aurons lors de la discussion de l'article 9 ter .
En ce qui concerne l'amendement n° 61 , affirmer, comme vous le faites, monsieur Falcon, que la rénovation énergétique des immeubles relève d'une politique écologique déconnectée est un abus d'éléments de langage.
À moins que vous ne considériez que le montant des factures énergétiques des personnes habitant des logements mal isolés est une question anecdotique, que la précarité énergétique n'existe pas et qu'aucun propriétaire occupant ne rencontre de difficultés dans ce domaine.
De quoi parlons-nous ? Lorsqu'une partie des mesures d'amélioration de la qualité énergétique de votre logement relève de décisions qui doivent être prises à l'échelle de la copropriété – isolation par l'extérieur ou changement de vecteur énergétique, par exemple –, vous pouvez vous retrouver dans une situation de blocage, pour de mauvaises raisons si elles sont liées à un emprunt, alors que ces travaux vous permettraient de diminuer vos charges.
Je ne comprends pas que vous vous opposiez à l'intégration des travaux de rénovation énergétique dans l'emprunt collectif, sachant, je le répète, que celui-ci n'est pas imposé, mais proposé comme une faculté aux copropriétaires. Laissez la possibilité à ceux qui le souhaitent d'utiliser cet outil supplémentaire : il ne leur retire rien et leur permettra de diminuer leurs charges !
Monsieur le ministre, la précarité énergétique, parlons-en ! C'est le Gouvernement qui en est responsable. Les factures d'électricité ont augmenté de 44 % en deux ans, et une nouvelle hausse de 9 % à 10 % est prévue le 1er février. Peut-être faut-il commencer par là, si l'on veut lutter contre ce phénomène.
Nous sommes évidemment favorables à la rénovation énergétique des logements, mais nous regrettons que toute votre politique soit fondée sur des diagnostics de performance énergétique très peu fiables. Ainsi, un rapport publié récemment explique que 70 % des notes des DPE ne sont pas fiables.
C'est faux !
…vis-à-vis de mesures qui représentent des milliards d'euros de dépenses. Il faut savoir raison garder.
« Bravo ! » sur les bancs du groupe RN.
Nous ne retirerons pas l'amendement n° 199 , sauf si les rapporteurs et le ministre prennent l'engagement de revenir sur l'article 9 ter, dont nous estimons qu'il ne correspond pas aux enjeux. Je souhaiterais donc qu'ils précisent leur position sur ce point.
Je réitère l'engagement que nous avons pris de manière, me semble-t-il, assez claire il y a un instant. Nous reparlerons de votre proposition de coordination des dispositifs lors de l'examen de l'article 9 ter et donc de l'amendement n° 189 .
Pas mieux : je m'engage également à ce que nous évoquions ce point lors de l'examen de l'amendement n° 189 .
Monsieur Falcon, je ne veux pas lancer un débat sur la politique énergétique – nous aurons l'occasion d'en discuter –, mais permettez-moi de revenir sur la lecture manifestement erronée que vous faites des conclusions du rapport du Conseil d'analyse économique sur la fiabilité du DPE.
Dans ce rapport, le CAE indique, non pas que le DPE n'est pas fiable, mais que le gain réel est moindre que le gain théorique ou espéré parce que les plus précaires se chauffent moins que la moyenne. Y lire la preuve que le DPE n'est pas fiable est non seulement insultant pour les personnes qui subissent cette précarité, mais inexact quant à l'efficacité de ces mesures, qui doivent être amplifiées.
L'amendement n° 199 est retiré.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 66
Nombre de suffrages exprimés 66
Majorité absolue 34
Pour l'adoption 11
Contre 55
L'amendement n° 61 n'est pas adopté.
L'objet de cet amendement est de faciliter la circulation des informations essentielles découlant d'une assemblée générale, lorsqu'un des copropriétaires est absent. En l'espèce, l'information est d'autant plus importante qu'il s'agit de la souscription d'un emprunt au nom du syndicat des copropriétaires afin de financer des travaux, ce qui peut évidemment entraîner des conséquences financières importantes.
Je sais bien que l'assemblée générale fait l'objet d'un procès-verbal envoyé par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, ou par voie électronique. Je propose, dans le cas d'une souscription d'emprunt au nom du syndicat des copropriétaires, l'envoi d'un courrier spécifique, afin d'être absolument certain que le copropriétaire absent ne manquera pas cette information majeure.
Ne pouvant sous-amender mon propre amendement, mais souhaitant le compléter, j'ai sous-amendé – par le sous-amendement n° 366 – l'amendement n° 79 qui suit, dont l'objet est similaire, déposé par M. Boucard. Ce sous-amendement propose l'ajout des mots « ou par voie électronique », afin d'instaurer une certaine souplesse dans la procédure, mais aussi d'assurer une information la plus complète possible aux copropriétaires, de telle sorte qu'ils ne soient pas pris au dépourvu, en particulier lorsqu'ils sont absents.
Je défends volontiers cet amendement de mon collègue Ian Boucard, qui reprend l'idée défendue par l'amendement n° 93 de Mme Ménard – avec lequel il est en discussion commune –, sans toutefois lui être identique : cet amendement propose un délai de notification d'un mois à compter de la date de l'assemblée générale, quand l'amendement de Mme Ménard prévoit quinze jours. Nous reprenons cependant l'idée, exposée par cette dernière, d'une notification spécifique ; j'ai hâte d'entendre le ministre à ce sujet.
Sourires.
Le sous-amendement n° 366 de Mme Emmanuelle Ménard est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Mon avis est défavorable sur les amendements n° 93 et 79 , ainsi que sur le sous-amendement n° 366 , car ils sont déjà satisfaits par l'article 42-1 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis. Il convient d'en rester à cette situation, qui offre déjà une certaine souplesse.
Défavorable, pour les mêmes raisons. Nous sommes hostiles à la réduction à quinze jours – que propose l'amendement n° 93 – du délai de notification ; le délai d'un mois nous paraît plus raisonnable, et ce dernier est déjà satisfait, comme l'a précisé le rapporteur.
La loi de 1965 prévoit effectivement la notification du compte rendu de l'assemblée générale. Et si l'assemblée générale a décidé de souscrire un emprunt, cette information sera présente dans ce compte rendu. Cependant, il me semble opportun de prévoir une notification spécifique. En effet, contrairement à la plupart des décisions prises par une assemblée générale, celle dont nous parlons comporte une incidence financière bien différente, y compris sur le plan temporel. Lorsque des augmentations de charges sont décidées, elles ont, certes, une incidence financière, mais leur effet sur le long terme n'est pas de même ampleur que celui d'un emprunt.
Il faut également signaler que lorsqu'un particulier souscrit un emprunt, des règles très précises de notification et de délai s'appliquent. Il serait intéressant d'appliquer les mêmes exigences aux situations, souvent précaires, d'habitat dégradé, qui concernent parfois des copropriétaires peu à l'aise avec le suivi administratif comme avec les conséquences financières d'une rénovation. La notification spécifique permettrait de les alerter et de mieux les préparer.
Il ne s'agit pas d'alourdir la procédure, mais d'éclairer et d'informer pleinement chaque copropriétaire, grâce à une notification spécifique signalant l'enjeu financier à assumer en conséquence de l'emprunt collectif.
Je ne peux que souscrire à ce que vient de dire le député Bazin. Comme je l'ai expliqué en défendant l'amendement n° 93 , je n'ignore pas que l'assemblée générale donne lieu à un procès-verbal ; cependant, vous le savez aussi bien que moi – d'autant que vous avez travaillé le sujet –, il est fréquent que des copropriétaires qui n'ont pu se rendre à l'assemblée générale ne consultent pas non plus le procès-verbal lorsqu'ils le reçoivent. Ils le mettent dans un coin, se disant qu'ils verront cela plus tard. Si bien qu'ils le lisent soit tardivement, soit pas du tout. Cela arrive tous les jours : la phobie administrative ne touche pas que les ministres !
Sourires.
C'est le sens de la notification spécifique, en cas de souscription d'un emprunt collectif, que je défends. Quant à son délai, je veux bien me ranger à celui d'un mois prévu par l'amendement n° 79 déposé par M. Boucard. L'important est l'ajout de cette notification spécifique à ce que prévoit déjà la loi de 1965 – l'envoi du procès-verbal de l'assemblée générale –, afin d'être certain que le copropriétaire absent ne manquera pas une information financière susceptible d'entraîner pour lui d'importantes répercussions.
Le dispositif du prêt collectif n'est pas exorbitant du droit commun. Il s'ajoute à d'autres dispositifs existants. Pourquoi voulez-vous créer une situation différente de ce que prévoit déjà la loi de 1965 ? Lorsque vous prévoyez des travaux importants et que la souscription d'un emprunt est envisagée, un travail préalable d'information est mené par le conseil syndical et le syndicat des copropriétaires, avant qu'un vote de l'assemblée générale acte la décision. Je comprends, madame Ménard et monsieur Bazin, votre volonté d'apporter toutes les garanties et informations possibles ; toutefois, votre quête du meilleur des mondes possibles vous conduit à proposer des mesures exorbitantes du droit commun, alors que le dispositif de prêt en discussion reste un mécanisme bancaire classique.
J'entends la sincérité absolue de Mme Ménard et de M. Bazin, mais je crois qu'ils font une confusion. Ce qui compte, ce n'est pas la modalité de financement des travaux, c'est leur montant. Vous souhaitez instaurer une information spécifique quant au recours à l'emprunt collectif. Or si une copropriété décide de travaux sans préciser la façon de les financer, cette information spécifique ne sera pas requise ! Et vous ne précisez pas quel doit être le montant de l'emprunt collectif donnant lieu à information.
Le droit existant prévoit qu'une décision d'un programme de travaux fait l'objet d'une notification classique. Vous affirmez que si ces travaux, quel que soit leur montant, sont financés par un emprunt, une mesure dérogatoire de notification est nécessaire. Intellectuellement, je ne peux pas vous donner raison, et je pense qu'en négligeant la question du montant des travaux pour vous concentrer sur la modalité de leur financement, vous vous trompez.
Ce qui compte, c'est le montant des travaux. Le droit existant prévoit déjà un dispositif de notification lorsqu'un programme de travaux est voté – en l'occurrence, l'envoi du procès-verbal de l'assemblée générale. Il n'y a pas lieu, si la modalité de financement des travaux est l'emprunt, de prévoir un système d'information différent de celui accompagnant un financement classique. Cela ne ferait qu'alourdir la procédure de l'emprunt collectif. Mon avis reste donc défavorable.
L'amendement n° 93 n'est pas adopté.
Le sous-amendement n° 366 n'est pas adopté.
L'amendement n° 79 n'est pas adopté.
Cet amendement déposé par mon collègue Hervé de Lépinau vise à allonger à trois mois, au lieu de deux, le délai accordé aux copropriétaires pour manifester leur refus de souscrire au prêt collectif. Il tend également à ce que le délai de six mois, accordé au copropriétaire ayant manifesté son refus pour payer intégralement sa quote-part de travaux, coure à compter de la notification qu'il fait de ce refus, et non à compter de la notification qui lui est faite du procès-verbal de l'assemblée générale.
Défavorable, conformément à la position de la commission des affaires économiques. L'objectif de l'article 2 est de gagner en rapidité. Or la série d'amendements qui s'ouvre tend à allonger les délais. En l'espèce, si l'amendement n° 87 était adopté, il pourrait s'écouler neuf mois entre la décision de l'assemblée générale et le règlement des sommes dues au titre du remboursement du prêt collectif. Un tel délai peut être source d'incertitudes et de difficultés quant à l'exécution du contrat de prêt.
L'amendement n° 87 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Sur l'amendement n° 159 , je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale, d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir les amendements n° 29 , 30 , 32 et 31 , qui peuvent faire l'objet d'une présentation groupée.
Monsieur le rapporteur, prenez garde à ne pas faire de réponse globale sur des amendements ne portant pas sur le même sujet. Vous décrivez les amendements en cours de discussion comme visant à allonger les délais de travaux. Or ce n'est pas du tout ce que je souhaite ; j'entends traiter le cas de ceux qui régleraient en cash.
L'article 2 permet aux copropriétaires ne souhaitant pas participer au prêt collectif de notifier au syndicat leur refus. Cependant, ils doivent, dans ce cas, verser au syndicat l'intégralité de leur quote-part du coût des travaux de rénovation, dans les six mois à compter de la notification. Or la pratique montre que les délais actuels de mise en place des crédits collectifs – y compris l'éco-prêt à taux zéro pour les copropriétés – sont largement supérieurs : ils peuvent atteindre jusqu'à dix-huit mois, comme je l'ai constaté en discutant avec ceux qui les mettent en œuvre. Ainsi, le copropriétaire qui ne participerait pas à l'emprunt aurait à verser sa quote-part sur un compte dédié, pour un crédit qui ne serait pas encore disponible.
À mon sens, pour que la mesure soit juste, le point de départ du délai de six mois devrait donc être revu, en cohérence avec la réalité de la mise en place du crédit. En conséquence, l'amendement n° 29 propose de porter ce délai à dix-huit mois – qui correspond au délai actuel constaté dans la mise en œuvre des crédits collectifs.
Si cette mise en œuvre s'avérait plus rapide, les amendements de repli n° 30, 32 et 31 proposent de porter ce délai à respectivement quinze, douze et neuf mois à compter de la notification de l'emprunt collectif.
Vous avez raison, monsieur le ministre, d'insister sur l'importance du montant des travaux. Il existait jusqu'à présent la possibilité d'un emprunt collectif facultatif. L'article 2 tend à le rendre obligatoire : on peut comprendre pourquoi eu égard à certains critères, mais vous avez vous-même reconnu, dans votre réponse aux orateurs de la discussion générale, que certains copropriétaires pourraient être confrontés à des difficultés. J'ai évoqué ceux qui sont inscrits au FICP. Comment les banques considéreront-elles leur cas ? Le fait que certains copropriétaires soient en situation délicate fait courir aux syndicats de copropriété un double risque : celui de ne pas obtenir de cautionnement et celui de renchérir les emprunts.
Vous avez cité la Belgique et vous nous avez demandé d'être confiants dans le fait que cette question serait traitée à la faveur de la navette. Nous souhaitons que les travaux soient réalisés grâce à une intervention située bien en amont, mais nous savons aussi que l'argent est le nerf de la guerre en matière de rénovation de l'habitat dégradé. Il ne faut pas se mentir : l'emprunt est susceptible de devenir un outil de financement inopérant, car si son coût est trop élevé ou s'il n'est pas cautionné, il ne sera pas utilisé. Entendons-nous bien : je ne dis pas qu'il n'est pas le bienvenu – je ne souhaite pas comme certains la suppression de l'article 2 –, mais j'estime que les mécanismes actuellement prévus ne sont pas suffisamment encadrés pour le rendre pleinement efficace.
Vous avez bien pris en compte les copropriétaires qui pourraient payer en cash mais il importe, je le répète, d'aligner le délai dont ils disposent pour verser leur quote-part sur le délai de mise en place des prêts collectifs. C'est une question de justice.
Vos amendements, monsieur Bazin, ne sont plus des amendements de repli, mais de repli de repli !
Aux termes de la rédaction actuelle de l'article 2, le copropriétaire dispose de deux mois pour notifier son choix au syndic de copropriété et de six mois pour verser la totalité de sa quote-part du prix des travaux, délai qui nous semble raisonnable.
Vous voulez allonger ce délai en le faisant partir du vote en assemblée générale, comme si c'était seulement à cette date que le copropriétaire découvrait l'existence de travaux. Si, d'un point de vue juridique, les travaux sont bel et bien votés par l'assemblée générale, vous savez bien que dans la vraie vie, ils sont discutés en amont dans le cadre du conseil syndical et même parfois plus en amont encore au sein des commissions de travaux dans les copropriétés qui en sont dotées. Les copropriétaires sont donc suffisamment informés pour choisir les modalités de financement des travaux.
Cela dit, vous ne semblez pas croire vraiment à la pertinence de vos propres amendements, puisque les délais que vous proposez vont de dix-huit mois à neuf mois, soit une division par deux. C'est un peu la loterie !
En toute sincérité, les délais proposés par le Gouvernement dans cet article 2 m'apparaissent raisonnables. Avis défavorable.
Le dispositif de prêt collectif que nous proposons ne donne pas lieu à un examen de la part des organismes bancaires de la solvabilité de chacun des copropriétaires. Son délai d'obtention est donc plus rapide que le dispositif actuel, qui repose sur la prise en compte de la somme des situations individuelles. Si nous avons fixé le délai de versement à six mois, avec les précisions qu'a données le rapporteur, c'est que nous considérons que la banque n'a à analyser qu'une seule situation, celle de la copropriété. C'est en prêtant attention avant tout au taux d'impayés qu'elle apprécie le risque et c'est en fonction de son niveau qu'elle déterminera si une caution privée est suffisante ou s'il faut recourir à des garanties supplémentaires. Cette approche unifiée raccourcit la durée d'examen de la demande de prêt et explique le choix que nous avons fait pour le délai. Il peut vous paraître court, mais il découle du nouveau dispositif que nous avons introduit.
Très concrètement, monsieur Bazin, votre dernier amendement, le n° 31, qui propose un délai de neuf mois, sera indirectement satisfait, compte tenu du temps qu'il faudra pour procéder au vote et obtenir le prêt. Le copropriétaire qui dispose déjà de l'argent nécessaire s'inscrira aisément dans ce calendrier pour les versements.
Monsieur le rapporteur, autant vous étiez très courtois en commission, autant vous apparaissez un peu méprisant en séance.
Si j'ai déposé de tels amendements, c'est que j'y crois, et le ton de mes interventions est plutôt celui du questionnement. En l'occurrence, à travers cette série, je m'interroge moins sur la solvabilité des copropriétaires que sur l'équité qu'il faut instaurer entre ceux qui ne veulent pas recourir au prêt et les autres. Il ne faudrait pas les conduire à immobiliser des sommes sur une période qui irait au-delà du raisonnable. Ce sont les auditions en commission des divers acteurs concernés qui m'ont alerté sur ce point.
Cela dit, monsieur le ministre, j'ai apprécié vos explications sur les raisons qui vous ont conduit à retenir un délai de six mois, un délai plus court que celui habituellement pratiqué grâce à une expertise bancaire menée plus rapidement. Comme j'ai envie de vous croire, je vais retirer tous mes amendements à l'exception de l'amendement n° 31 , qui propose un délai de neuf mois, susceptible selon vous d'être observé dans les faits.
L'amendement n° 31 n'est pas adopté.
Il a pour objectif de garantir que les fonds obtenus au moyen de l'emprunt collectif soient utilisés pour la réalisation de travaux. Cela suppose de préciser que le compte bancaire dédié prévu à l'article 2 doit être ouvert au nom du syndicat des copropriétaires. En outre, il convient d'ajouter qu'il ne peut faire l'objet ni d'une convention de fusion ni d'une compensation avec un autre compte et que les fonds versés ne sauraient être saisis par des créanciers.
Il reprend pour partie un amendement que nous avons déposé en commission, en précisant que le compte bancaire dédié ne peut faire l'objet ni d'une convention de fusion ni d'une compensation avec tout autre compte. Nous avons toutefois retiré la mention relative à l'impossibilité de saisir les fonds, en tenant compte des remarques formulées par les rapporteurs. Cela nous semble de nature à renforcer de manière équilibrée les garanties attachées à ce compte.
L'amendement n° 159 est satisfait par les modifications apportées en commission à l'alinéa 12, après avis favorable de mon collègue Guillaume Vuilletet. Je vous demanderai donc, monsieur Martinet, de bien vouloir le retirer.
Quant à l'amendement n° 200 , nous y sommes favorables. Préciser que le compte ne peut faire l'objet d'une fusion est pertinent.
J'aurai les mêmes avis que M. le rapporteur.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 66
Nombre de suffrages exprimés 66
Majorité absolue 34
Pour l'adoption 33
Contre 33
L'amendement n° 159 n'est pas adopté.
L'amendement n° 200 est adopté.
Les comptes bancaires dédiés sont appelés à recevoir des sommes importantes et certaines banques pourraient être tentées de se faire plaisir en prélevant des frais de tenue de compte et surtout des frais d'opérations excessifs. Afin de ne pas renchérir le coût de l'emprunt pour les copropriétaires, il importe de préciser que les frais bancaires doivent être strictement limités et en rapport avec les coûts réellement supportés par les établissements teneurs du compte.
Encore une fois, nous avons tenu compte des débats en commission et nous avons simplifié notre amendement en supprimant le renvoi de la fixation d'une nomenclature des tarifs et frais à un arrêté ministériel relevant du futur ministre du logement. Le juge pourra cependant toujours intervenir en cas de contestation.
Si je peux comprendre votre objectif, il n'en demeure pas moins que votre amendement comporte une légère erreur d'aiguillage : la détermination des principes relatifs à la facturation des frais bancaires relève, vous le savez, d'articles du code monétaire et financier et du code de la consommation et non pas de la loi de 1965. Avis défavorable.
Votre intention est louable, mais une telle disposition n'aurait pas de portée normative. J'ajoute que, compte tenu de l'ampleur du travail qu'il nous reste à accomplir, nous n'avons pas intérêt à introduire des mesures qui ne vaudraient pas pour les autres emprunts, car cela risquerait de fragiliser le dispositif nouveau que nous instituons. Je crois en ce domaine aux vertus de la concurrence.
L'amendement n° 201 n'est pas adopté.
Il vise à apporter des précisions techniques.
Monsieur le ministre, votre amendement est bienvenu, mais il comporte davantage que de simples précisions techniques. Ouvrir la possibilité pour les copropriétaires de faire leurs versements au syndicat des copropriétaires chaque trimestre et ajouter des frais de caution va dans le bon sens, car cela correspond aux réalités. Sans cette précision, la gestion des copropriétés aurait même été alourdie.
J'émettrai donc un avis favorable, sinon ce sera une demande de retrait.
Sourires.
Vous êtes trop modeste !
L'amendement n° 342 est adopté.
Dans la droite ligne des mesures relatives à l'éco-PTZ présentes dans la loi de finances pour 2024, le prêt dont nous débattons sera véritablement collectif, car il sera contracté par le syndicat de copropriétaires et remboursé par les charges afférentes aux différents lots. Ainsi, un copropriétaire qui vendrait son lot ne serait plus redevable de l'emprunt. C'est pourquoi il me semble inopportun de prévoir un remboursement lors de la cession ; une telle opération serait sans objet. De plus, elle risque de créer un doute quant au caractère collectif de l'emprunt et d'en compliquer la mise en œuvre en pratique. Je propose donc de supprimer cette possibilité.
Favorable.
L'amendement vise à supprimer une phrase introduite dans l'article 2 par la commission. Je comprends l'inquiétude qui le motive, mais je rappelle que les copropriétaires ne souhaitant pas participer à l'emprunt collectif pourront fournir un apport direct. Il paraît donc souhaitable de prévoir la possibilité d'un remboursement lors d'une cession. Cela facilitera d'ailleurs certains montages bancaires, puisqu'il faut tenir compte à la fois de l'emprunt individuel lié à l'acquisition du lot et de l'emprunt collectif.
Peut-être faudrait-il affiner ce dispositif pour qu'il ne soit pas perçu comme une soustraction à l'emprunt collectif, mais plutôt comme une manière alternative d'y contribuer quand le titulaire d'un lot change. Tel était l'esprit de l'amendement adopté par la commission.
Je rappelle que le marché de l'immobilier est grippé, que les acquisitions, y compris au sein d'une copropriété, sont très difficiles, au point de requérir parfois la signature d'un accord, et que les montages bancaires doivent inclure, outre la somme correspondant à l'acquisition du bien, les autres charges prévues.
L'amendement n° 256 est adopté.
Cet amendement de repli vise à supprimer les alinéas 22 et 23 de l'article 2 pour protéger les copropriétaires d'un risque de surendettement.
L'entrée définitive dans le patrimoine du syndicat des copropriétaires des versements consentis par les copropriétaires eux-mêmes et leur affectation au remboursement du prêt des autres copropriétaires, prévues dans l'alinéa 22, nous semblent déraisonnables. La mutualisation de la dette doit être mieux cadrée et l'irréversibilité du versement nous paraît disproportionnée.
Quant à l'alinéa 23, il prévoit l'absence d'obligation pour l'acquéreur de rembourser les fonds versés par le copropriétaire vendeur au syndicat des copropriétaires. En cas de mutation, notamment dans le cas d'une transaction, nous souhaitons que l'acquéreur ait l'obligation légale de régler au vendeur les fonds que celui-ci a versés pour le financement de travaux en cours d'achèvement ou programmés. Il nous paraît insatisfaisant de s'en remettre à la négociation entre vendeur et acquéreur.
L'amendement vise également à prévenir tout risque de contentieux.
Défavorable.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 73
Nombre de suffrages exprimés 72
Majorité absolue 37
Pour l'adoption 16
Contre 56
L'amendement n° 2 n'est pas adopté.
Sur l'article 2, je suis saisie par les groupes Renaissance et Rassemblement national d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à Mme Marina Ferrari, pour soutenir l'amendement n° 346 rectifié .
Il tend à n'appliquer l'interdiction de location des passoires thermiques qu'après l'achèvement des travaux collectifs. En effet, les bâtis situés, par exemple, en secteur patrimonial ou en zone de montagne, même s'ils ont subi des travaux engagés à titre individuel par le propriétaire, n'atteignent pas toujours un DPE suffisant. Dans le cas où la copropriété s'engage à réaliser des travaux et obtient un prêt collectif, nous souhaitons que l'interdiction de location des biens concernés ne s'applique qu'à l'issue de ces travaux, s'ils n'ont pas permis d'améliorer suffisamment le DPE.
Avis défavorable. Je comprends le message que vous voulez faire passer et le débat que vous souhaitez ouvrir – je laisserai au Gouvernement le soin de s'exprimer à ce sujet –, mais adopter l'amendement reviendrait à suspendre le calendrier de sortie des passoires énergétiques du marché de location, fixé par la loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi climat et résilience, au seul vote en assemblée générale d'une résolution qui, d'ailleurs, ne garantit en rien le respect des obligations fixées par le législateur en ce qui concerne la décence énergétique des logements.
De plus, la dérogation envisagée ne s'appliquerait qu'aux immeubles en copropriété, puisque le III introduit par ce projet de loi dans l'article 26-4 de la loi du 10 juillet 1965 ne vaut que pour cette catégorie d'immeubles. Dès lors, la mesure risquerait d'entraîner une inégalité devant la loi. Demande de retrait ou avis défavorable.
Je remercie Mme Ferrari d'avoir déposé cet amendement. Je ne suis pas surpris qu'elle saisisse l'occasion donnée par le texte de poser cette question.
J'émettrai trois remarques. Premièrement, j'aurai prochainement l'occasion d'ajuster quelque peu le dispositif du DPE, notamment en ce qui concerne les petites surfaces, qui présentent les effets de biais les plus importants. Ainsi, j'annoncerai dans les jours qui viennent des assouplissements concernant les surfaces de moins de 40 mètres carrés.
Deuxièmement, je ne peux être que défavorable à l'amendement, dans la mesure où il limiterait l'assouplissement du calendrier aux seuls travaux décidés par une copropriété souscrivant un emprunt collectif. En plus d'entraîner la difficulté soulignée par M. le rapporteur – un vote en assemblée générale ne garantit pas l'effectivité des travaux –, il ferait donc reposer le bénéfice d'une mesure d'assouplissement sur le seul véhicule de financement des travaux, en l'occurrence le prêt collectif.
Troisièmement, cette question mérite d'être traitée avec plus de précision. La navette parlementaire aura lieu ; vous le savez, je suis attaché à ce que le travail parlementaire y trouve sa complétude. L'examen du texte par les sénateurs permettra de faire encore progresser notre réflexion quant aux mesures restant à affiner pour conserver notre ambition écologique tout en servant les ambitions sociales et économiques dont nous parlions plus tôt. Je vous propose donc de retirer l'amendement.
J'ai pris note des observations de M. le rapporteur et de M. le ministre. L'objectif de l'amendement n'est pas d'assouplir le calendrier, mais de tenir compte de la longueur de certains travaux, en particulier en secteur patrimonial ou en montagne. Nous y reviendrons et y retravaillerons dans le cadre de la navette. L'amendement est retiré.
L'amendement n° 346 rectifié n'est pas adopté.
Je crains de réveiller l'inquiétude de M. Amiel, car cet amendement de M. Ian Boucard vise à compléter l'alinéa 29 en permettant aux copropriétaires de procéder à tout moment au remboursement anticipé de la totalité des quotes-parts restantes empruntées. Nous souhaitons ainsi laisser la liberté aux copropriétaires qui ont initialement accepté le prêt collectif de le rembourser de manière anticipée, s'ils en ont la possibilité par la suite. Cela peut correspondre à la logique individuelle de leur parcours, ou encore leur permettre de réaliser d'autres travaux à titre individuel.
Nous pensons que cette mesure irait dans le bon sens en donnant plus de liberté aux copropriétaires.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement n° 94 .
Comme l'a très bien expliqué M. Bazin, cet amendement vise à donner un peu de souplesse à la procédure. Dieu sait si les règles de copropriété sont complexes et strictes ; il paraît donc opportun de les assouplir sur ce point, en permettant aux copropriétaires qui le peuvent de procéder à tout moment au remboursement anticipé de la totalité des quotes-parts restantes empruntées. Ils pourront ainsi se dégager plus vite de l'emprunt. Il me semble qu'il s'agit d'une mesure de bon sens.
Je ne suis pas ennemi de la souplesse et je comprends la logique de vos arguments, mais la faculté d'un remboursement anticipé relève des modalités de l'emprunt définies contractuellement entre l'établissement prêteur et le syndicat de copropriétaires. Je précise, à titre de comparaison, que les dispositions de la loi du 10 juillet 1965 qui régissent le fonctionnement des emprunts collectifs à adhésion individuelle ne comportent aucune spécification de cette nature. Avis défavorable, au nom du parallélisme des formes.
Même avis. Si nous étions à l'assemblée générale d'un syndicat de copropriété, je défendrais le principe consistant à négocier la possibilité d'un tel remboursement anticipé, mais, m'exprimant à l'Assemblée nationale, je ne saurais laisser penser qu'il faut imposer par la loi l'obligation de proposer cette option dans le cadre de certains crédits. Cela ne relève pas de la loi, mais des règles applicables en matière de contrat de crédit, et il revient au syndicat de copropriétaires de négocier cette clause.
Avis défavorable. Je ne suis pas opposé à l'objectif que vous défendez, mais à la forme que prend votre proposition et au rôle que vous voulez ici faire jouer à la loi.
Il s'agit simplement de prévoir la possibilité de recourir à un remboursement anticipé, tout comme nous avons prévu la possibilité de recourir à un emprunt collectif. Nous ne cherchons pas à obliger qui que ce soit à pratiquer le remboursement anticipé, mais à inscrire cette possibilité dans la loi pour que le contrat liant le syndicat de copropriétaires à l'établissement bancaire puisse, si les signataires le souhaitent, inclure une telle clause. L'amendement vise à prévoir cette possibilité pour que les acteurs du prêt puissent, à leur tour, prévoir la possibilité d'y recourir.
Alors il est satisfait !
Cela ne me semble pas aberrant. Encore une fois, le bon sens exige d'introduire un peu de souplesse dans ces règles très contraignantes.
Il vise à interdire l'application d'indemnités de remboursement anticipé lorsque le syndicat des copropriétaires apure le solde de l'emprunt à la suite du versement de subventions publiques. Cette disposition complète les dispositions existantes du projet de loi qui prévoient des facilités en cas de remboursement anticipé. Toutefois, il s'agit d'être plus précis et de ne viser ici que le cas du paiement du solde de l'emprunt, et ce uniquement lorsqu'il fait suite au versement des différentes aides financières.
L'amendement n° 202 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Lors de la discussion générale, j'ai souligné le risque que les copropriétés volontaires, mais déjà en difficulté, peinent à accéder au prêt ou au cautionnement. J'ai demandé à M. le ministre de s'engager à prévoir des garanties, par exemple par l'intermédiaire de la Banque des territoires ou de la Banque postale, pour leur permettre l'accès à un emprunt et à une assurance. C'est le but de cet amendement d'appel.
Je vous demande de le retirer au profit de l'amendement n° 326 que je présenterai dans un instant et qui vise à instaurer un dispositif de garantie.
L'amendement n° 203 est retiré.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 78
Nombre de suffrages exprimés 62
Majorité absolue 32
Pour l'adoption 48
Contre 14
L'article 2, amendé, est adopté.
Au cours de la discussion générale, plusieurs d'entre vous ont appelé de leurs vœux un dispositif de garantie. Par l'amendement n° 326 , nous répondons à cette attente. Nous proposons d'utiliser le fonds de garantie de la rénovation énergétique et de supprimer dans son intitulé le dernier terme pour l'élargir à l'ensemble des travaux de rénovation des copropriétés en difficulté. Les copropriétés que les organismes de caution refuseraient de prendre en charge bénéficieraient de la garantie de l'État, pour que nous améliorions réellement l'état de ces copropriétés dégradées, conformément à l'objectif de ce projet de loi.
Si vous le souhaitez, je peux donner davantage de détails, cependant l'exposé sommaire est explicite.
Enfin, le fait de s'appuyer sur un dispositif existant en le modifiant permet d'aller plus vite.
Par cet amendement, nous allons dans le sens de l'amendement gouvernemental n° 326. Lors du débat en commission, nous avions bien posé les termes du problème : le prêt collectif avec un cautionnement privé est pertinent pour les copropriétés classiques qui présentent parfois quelques faiblesses de trésorerie ; en revanche, les copropriétés dégradées ou très dégradées auraient besoin d'un cautionnement public.
Nous avions donc évoqué la possibilité que le Gouvernement défende un amendement visant à créer un tel fonds de garantie. J'ai moi-même repris cette initiative avec l'amendement n° 271 .
Avec ces deux amendements, nous répondons aux inquiétudes que les uns et les autres ont exprimées quant à la pertinence du dispositif, en instaurant un dispositif complet, utile aussi bien pour les copropriétés en bonne santé que pour celles qui sont confrontées à la réhabilitation d'un bâti très dégradé et où certains copropriétaires sont défaillants.
Favorable.
L'amendement gouvernemental va dans le bon sens et répond à certaines de nos attentes. Vous permettrez donc au fonds de garantie de la rénovation d'intervenir. Il pouvait déjà se porter caution pour les copropriétés ; puis, dans le projet de loi de finances pour 2024, vous avez étendu l'éco-PTZ afin qu'il soit davantage utilisé.
Souvent, les montants nécessaires pour rénover un habitat dégradé sont très importants. Ce fonds de garantie doit donc être suffisamment approvisionné. Avez-vous mené une étude d'impact pour évaluer ce montant afin qu'il soit toujours alimenté à la hauteur des défis qui se présentent à nous ? En effet, étant donné que l'habitat dégradé concerne les personnes qui rencontrent le plus de difficultés, leur démarche ne sera pas toujours entièrement volontaire, tandis que l'éco-PTZ s'inscrivait dans une démarche dynamique et volontaire. S'est-on assuré que le fonds serait approvisionné à la hauteur des besoins ?
Effectivement, monsieur le ministre, ce fonds de garantie était attendu pour compléter le dispositif.
Toutefois, pour parler honnêtement, de manière générale, la conception de ce dispositif me paraît un peu naïve. Étant donné l'engagement du réseau bancaire pour octroyer des prêts à taux zéro, je doute que les banques s'engagent dans des prêts souscrits par des copropriétés où les risques sont avérés.
Vous proposez donc une garantie publique afin d'inciter les banques à prêter, mais à quel prix ? Disposez-vous d'une estimation du coût pour les finances publiques ? Nous souhaitons d'autant plus connaître ces coûts que cette garantie pourrait s'adresser à des copropriétaires indélicats, qui ne devraient pas pouvoir profiter de l'argent public.
J'avais présenté un amendement qui a été jugé irrecevable. Il me paraît dommage que, dans une situation dont il a été établi qu'elle présente un risque pour les copropriétaires, on ne puisse pas activer un autre dispositif, le prêt avance rénovation, qui a été instauré il y a quelque temps mais n'est pas encore sollicité autant qu'il devrait l'être. Il s'agit d'une avance individuelle qui serait remboursée à la mutation du bien, lors de la vente ou de la succession. Cela permettrait aux copropriétaires de sortir du prêt collectif et rendrait plus fréquent le recours au prêt avance rénovation. Il me paraît dommage que l'amendement que j'avais déposé n'ait pas même été examiné.
L'amendement n° 271 est retiré.
Je souhaite apporter des précisions à MM. Thibault Bazin et Jean-Louis Bricout, qui m'ont interrogé sur les moyens et le fonctionnement du fonds de garantie pour la rénovation.
Mesdames et messieurs les députés, si vous votez l'amendement n° 326 , nous donnerons à ce fonds de garantie la possibilité d'intervenir dans les cas prévus par le projet de loi, en particulier pour soutenir un prêt collectif.
Bien évidemment, il appartiendra à un texte financier de doter ce fonds de garantie.
Même si le fonds intervient très rapidement, il ne pourra être mis en œuvre qu'une fois que les premiers défauts de paiement se seront produits – nous pouvons nous accorder sur ce point. En effet, à la différence d'un dispositif de soutien ou de subvention qui constitue un amorçage budgétaire, ce fonds vise à contenir une sinistralité.
Nous débattrons donc de la hauteur de ce fonds de garantie et des institutions qui devront être autour de la table. Néanmoins, je voudrais d'abord présenter sa philosophie, qui n'a été que brièvement évoquée.
L'inaction, l'absence de travaux dans ces copropriétés a un coût humain, social, économique et elle est aussi coûteuse pour les finances publiques.
Par conséquent, rejeter un fonds de garantie qui permettrait de solvabiliser des copropriétés pour qu'elles accélèrent des travaux grâce auxquels des logements ne seront plus des habitats insalubres ou des passoires thermiques ne procède pas d'une bonne analyse.
En outre, le fondement du dispositif consiste à raisonner avec une copropriété qui est une personne morale unique et non une somme d'individualités. C'est le taux d'impayés qui permet l'appréciation du taux de sinistralité, mesure qui est effectuée en parallèle de l'élaboration de ce dispositif et qui sert de base à la discussion avec les banques.
Cependant, je le répète, il ne faut pas opposer les dispositifs visant à relancer la construction de logements neufs et ceux qui visent à soutenir la réhabilitation ; nous devons faire les deux.
En ce qui concerne la réhabilitation, notre marge d'action la plus importante réside dans les collectifs et, parmi eux, les copropriétés qui font face aux situations les plus complexes. En nous adressant à elles, notre action sera bonne pour l'économie, pour l'écologie et surtout pour les conditions de vie et le pouvoir d'achat de ceux qui habitent dans ces logements. Le fonds de garantie permettra cette action.
Vous serez à nouveau les juges de son détail dans le cadre d'un projet de loi de finances rectificative qui précisera le budget de ce fonds. Nous disposons de quelques mois pour affiner ensemble les dispositifs et les hypothèses de sinistralité.
L'amendement n° 326 est adopté.
L'amendement n° 232 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 2 bis est adopté.
L'accélération de la procédure d'expropriation nous pose un sérieux problème de proportionnalité. Elle constitue – il faut bien le dire – une nouvelle attaque du droit de propriété alors que ce projet de loi ouvre la voie à une non-indemnisation en cas de refus d'un relogement. La compensation est la grande faiblesse de ce projet de loi qui tend à exproprier à vil prix les petits propriétaires paupérisés résidant dans des immeubles qu'ils n'ont tout simplement pas les moyens d'entretenir.
D'ailleurs, ce projet de loi est assez flou quant aux capacités de relogement des municipalités concernées par ces projets de rénovation urbaine. Ces expropriations toucheront des publics âgés, protégés, parfois souffrant de handicaps, et se trouvant donc dans des situations que les services municipaux seront bien incapables de gérer.
Nous savons tous ici que le parc social est saturé, que les attributions de logements sociaux se réduisent comme peau de chagrin, notamment parce que la France d'Emmanuel Macron ne construit plus.
Je crois que vous avez eu tort de négliger le volet « compensation », car cela freinera à coup sûr le déploiement de ces projets de rénovation ou de requalification urbaine.
Comment peut-on refuser d'indemniser une personne expropriée qui refuse un logement trop éloigné de son environnement, du lieu de vie où elle cultive ses liens sociaux ? Refusera-t-on d'indemniser les personnes qui déclinent un relogement à l'autre bout d'un département, par exemple ?
Tout cela n'est pas sérieux. Cela relève selon nous d'une forme de spoliation. C'est aussi la porte ouverte à de nombreux contentieux.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Vous conservez la parole, monsieur Falcon, pour soutenir l'amendement de suppression n° 38.
Comme je viens de l'exposer, le principal écueil de ce projet de loi réside selon nous dans l'incapacité de l'État à apporter une compensation aux propriétaires expropriés et l'absence de garde-fous face à d'éventuelles dérives en matière d'expropriation.
Dans son application, ce projet de loi risque sérieusement de se heurter aux blocages des services municipaux et des administrations, qui seront dans l'incapacité de reloger en masse les propriétaires expropriés.
Le relogement des publics les plus fragilisés, comme les personnes en situation de handicap ou les personnes âgées – en effet, ce sont souvent des propriétaires âgés paupérisés qui n'ont pas les moyens d'entretenir leur logement –, pose de réelles difficultés.
Le point noir de cet article reste sans doute la non-indemnisation des propriétaires expropriés qui refusent un logement. Pour nous, c'est absolument inacceptable.
Sur l'amendement n° 38 , je suis saisie par le groupe Rassemblement national d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Quel est l'avis de la commission ?
L'exposé sommaire de l'amendement n° 38 affirme : « Les immeubles dégradés, qu'ils soient détenus en copropriété ou en monopropriété, sont la conséquence d'une paupérisation de leurs propriétaires. » Il y a là une ambiguïté, qui témoigne soit d'une méconnaissance, soit d'une envie de cacher la réalité. Bien sûr, il est vrai qu'il y a des propriétaires paupérisés et, dans une logique d'aller vers, nous allons les chercher pour leur apporter des aides, leur permettre de bénéficier de l'initiative gouvernementale, etc.
Mais tous les propriétaires ne sont pas dans cette situation. Il existe des propriétaires malhonnêtes – j'y reviendrai –, ceux qu'on appelle les marchands de sommeil, dont l'intérêt est que rien ne s'arrange dans leur copropriété car, dans leur logique, plus la copropriété et le bâti sont dégradés, plus les personnes susceptibles d'accepter ces logements sont des personnes fragiles. C'est là qu'on en arrive à une véritable traite d'êtres humains au travers de la location, et à ce qui s'apparente à un racket de ceux qui vivent dans ces locaux.
Il y a aussi des situations administratives très complexes, en particulier dans les cas d'indivisions successorales. Notre collègue Emeline K/Bidi, absente aujourd'hui, aurait pu nous parler de cette situation très courante en outre-mer – sous réserve d'inventaire, je pense que ce n'est pas différent dans l'Hexagone.
Le dispositif proposé vient en aide aux copropriétaires qui rencontrent ces difficultés. Croyez-vous vraiment qu'une mairie décidera par pur plaisir de se mettre dans une situation porteuse de contentieux et susceptible d'entraîner des obligations de relogement ?
C'est une chose de discuter du niveau d'indemnité après une expropriation, et c'en est une autre de traiter du problème du relogement. L'un et l'autre n'ont rien à voir. Croyez-vous que les mairies agissent de gaîté de cœur ? Non, elles exproprient parce que, si jamais les choses étaient laissées en l'état, la situation risquerait de se dégrader de manière irrémédiable ; encore une fois, les propriétaires ou copropriétaires auraient tout perdu. Avis défavorable.
Même avis.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 65
Nombre de suffrages exprimés 65
Majorité absolue 33
Pour l'adoption 13
Contre 52
L'amendement n° 38 n'est pas adopté.
Cet amendement rédactionnel vise à corriger des erreurs de terminologie en substituant aux mots « insalubres ou dangereux » le mot « indigne ».
L'amendement n° 328 est adopté.
Cet amendement de ma collègue Florence Goulet vise à exclure le terrain d'assiette du champ de l'expropriation d'un bien insalubre ou dégradé à titre remédiable. Puisque la loi du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, dite loi Alur, a introduit la distinction entre la propriété du foncier et celle du bâti, il convient de faire usage de cette même distinction dans le présent texte.
En effet, si le but est bien la rénovation des bâtiments et non l'accaparement des terres appartenant aux Français, il est logique que l'expropriation soit limitée aux bâtiments en question. Les éventuels problèmes d'accès aux bâtiments peuvent parfaitement être résolus par le droit commun, en particulier le droit des servitudes de passage.
Mon cher collègue, j'ai le sentiment que vous cherchez à complexifier le système pour le rendre inopérant. Je vous rappelle qu'on peut exproprier une partie seulement d'un immeuble ; dans ce cas, des copropriétaires expropriés conserveraient un morceau de la base foncière, mais pas le reste. Nous avons précisément voté le contraire en commission, donc avis défavorable.
L'amendement n° 63 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement, également dû à ma collègue Florence Goulet, tend à réserver à la puissance publique le bénéfice du droit d'expropriation d'un immeuble dégradé à titre remédiable. Il convient de s'assurer que le pouvoir d'expropriation ne constitue pas un moyen détourné pour un opérateur privé, fût-il détenu en partie par l'État, de réaliser des opérations de promotion immobilière à peu de frais.
Je reprends le même argument que tout à l'heure : vous voulez complexifier le système en empêchant la puissance publique d'utiliser les outils dont elle dispose pour mener des opérations qui sauvent le cadre de vie, le patrimoine et les intérêts des habitants. Avis défavorable.
L'amendement n° 62 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement n° 88 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Stéphane Lenormand, pour soutenir l'amendement n° 74 .
Il vise à encadrer la nouvelle procédure d'expropriation qui concerne les immeubles dégradés, mais dont l'état est remédiable. En effet, cette procédure ne pourra être déclenchée qu'à condition que les deux arrêtés de mise en sécurité ou de traitement de l'insalubrité n'aient pas donné lieu à des travaux. L'objet de ces deux arrêtés n'est pas précisé ; ils pourraient concerner deux logements distincts au sein d'un même immeuble. Dans ce cas, l'expropriation de l'ensemble du bâti en raison des méfaits des deux copropriétaires serait abusive.
Cet amendement propose donc que les doubles arrêtés de mise en sécurité ou de traitement de l'insalubrité ne donnent droit à la nouvelle procédure d'expropriation qu'à condition qu'ils concernent plusieurs lots de copropriété de l'immeuble, ou la majorité du bâti de l'immeuble.
Le texte précise bien qu'on peut exproprier une partie seulement de l'immeuble – nous aurons prochainement l'occasion de revenir sur le sujet. Je ne suis pas d'accord avec vos arguments et je pense qu'au contraire, l'ensemble de ces arrêtés doivent être pris en compte pour pouvoir justifier l'expropriation, dès lors que la double exigence d'avoir fait l'objet de deux arrêtés distincts et d'un rapport démontrant un risque de dégradation semble être un garde-fou suffisant pour éviter des expropriations abusives.
Nous faisons les efforts nécessaires pour rester sur cette ligne de crête qui nous permet de définir ce qui n'est pas excessif au regard du droit de propriété et ce qui est respectueux de l'intérêt général. Encore une fois, les dispositions existantes me paraissent suffisantes. Demande de retrait, sinon avis défavorable.
Même avis. Je demande maintenant une courte suspension afin de pouvoir passer un appel téléphonique urgent.
L'amendement n° 74 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à dix-neuf heures vingt-cinq, est reprise à dix-neuf heures trente.
La séance est reprise.
La parole est à M. Stéphane Peu, pour soutenir l'amendement n° 166 .
L'article 3 est important pour nous, car il devrait permettre une avancée notable pour les questions relatives à l'expropriation. Néanmoins, il nous semble présenter quelques faiblesses ou du moins des améliorations possibles, d'où les amendements que je vais défendre.
Le but est que l'expropriation permette d'agir en amont de difficultés plus graves – j'évoquais tout à l'heure des morts que j'ai connues dans mes fonctions précédentes. C'est la raison pour laquelle nous proposons de retenir, au lieu des deux arrêtés sur dix ans requis par l'article 3, une période de carence persistante des propriétaires d'au moins trois ans à compter de la notification d'un arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l'insalubrité. La non-exécution d'un arrêté pendant trois ans est un motif suffisant ; cela permettra d'être plus préventif que l'actuelle rédaction.
Le débat va être récurrent. Vous souhaitez, en amont des difficultés, pouvoir éventuellement procéder à des expropriations afin de bloquer le processus de dégradation. Mais le Conseil d'État nous a alertés : le droit de propriété est constitutionnellement garanti et il faut préserver l'équilibre.
C'est l'intérêt des deux arrêtés prévus par le texte. Nous en avons discuté en commission, et adopté un amendement du groupe Socialistes et apparentés visant à préciser que l'expert mandaté doit démontrer le risque de poursuite de la dégradation de l'immeuble du fait des désordres déjà constatés. Ne fragilisons pas l'article en adoptant votre amendement. Le risque est trop important que le Conseil constitutionnel ne le censure, ce qui anéantirait le dispositif. Demande de retrait. À défaut, avis défavorable.
Le mieux est parfois l'ennemi du bien. Je comprends évidemment l'intention de l'orateur, mais, d'une part, cela pourrait fragiliser juridiquement le dispositif – un seul arrêté est-il suffisant ? – et, d'autre part, en restreignant le délai, on prend le risque de limiter la portée du dispositif.
Le délai de dix ans est un plafond : les conditions peuvent parfaitement être réunies au bout de trois, quatre, cinq, six ou sept ans, mais nous avons tout intérêt à conserver la durée la plus longue pour que l'article englobe le plus de cas possible. Cette mesure est l'une des plus importantes du projet de loi, et elle mérite qu'on en reste à la rédaction de la commission.
M. le ministre et M. le rapporteur estiment qu'il est important d'être prudent et de conserver un équilibre, qu'il ne faut pas aller trop vite ni trop fort, qu'il ne faut pas que la puissance publique intervienne avec trop d'ambition, qu'il faut respecter la propriété privée et, argument ultime, que le Conseil constitutionnel pourrait nous censurer si nous allions trop loin !
C'est tout de même surprenant venant d'un gouvernement et d'une majorité qui, il y a quelques semaines, nous ont fait voter un projet de loi pour contrôler l'immigration et améliorer l'intégration dont les mesures sont discriminatoires, voire xénophobes et racistes !
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
Chers collègues, en l'espèce, la menace d'une décision du Conseil constitutionnel ne vous a pas empêchés d'appuyer sur le bouton « Pour » dans l'hémicycle ! Ayez un peu de courage pour autre chose que taper sur les étrangers – éradiquer le logement insalubre, par exemple !
Mêmes mouvements.
Le projet de loi pour contrôler l'immigration et améliorer l'intégration, quel beau texte !
Le projet de loi pour contrôler l'immigration et améliorer l'intégration, quel beau texte !
L'amendement n° 166 n'est pas adopté.
La parole est à M. Dominique Da Silva, pour soutenir l'amendement n° 194 .
Il vise le même objectif, mais sans diminuer le nombre d'arrêtés. Il s'agit ici de réduire de trois ans – donc de restreindre à sept ans – le délai au cours duquel l'immeuble a fait l'objet d'au moins deux arrêtés de mise en sécurité ou de traitement de l'insalubrité. Cela peut sembler futile, mais trois ans, c'est long, notamment quand il s'agit de sauver un immeuble dont l'état est remédiable. En effet, plus la procédure est longue, plus le risque que les dégradations deviennent irrémédiables est important. Il ne s'agit donc pas de gagner du temps pour gagner du temps, mais d'améliorer la portée dissuasive du dispositif pour les copropriétés.
Il semble qu'il y ait une incompréhension. Le texte dispose que deux arrêtés non exécutés sont nécessaires dans une période de dix ans pour que la procédure puisse être mise en œuvre et votre amendement risque donc d'être contre-productif, par exemple si un deuxième arrêté n'est pris qu'au bout de huit, neuf ou dix ans. Demande de retrait. À défaut, avis défavorable.
Puisque la préoccupation première de M. Da Silva me semble être la protection des occupants, je confirme qu'en l'état actuel de la rédaction, si deux arrêtés sont pris à huit ans d'intervalle, l'expropriation est possible. Avec un délai réduit à sept ans, la procédure ne pourrait plus être mise en œuvre. L'exposé des motifs de l'amendement de M. Da Silva plaide presque pour qu'il le retire !
L'amendement n° 194 est retiré.
Trois conditions cumulatives permettent l'expropriation, parmi lesquelles le fait que les mesures prescrites par les arrêtés n'ont pas été exécutées. Les rapporteurs ont auditionné de nombreux élus et opérateurs, et beaucoup expriment la même préoccupation : il faut que le dispositif soit plus précis.
C'est pourquoi nous proposons d'ajouter l'adverbe « intégralement », afin d'éviter d'éventuels contentieux en cas d'exécution partielle des mesures prescrites – un simple coup de peinture dans la cage d'escalier par exemple. Certains petits malins ne sont pas toujours animés des meilleures intentions. Je les ai vus à l'œuvre, ayant moi-même été élu local et opérateur, et c'est l'expérience qui parle !
Je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée, craignant que cette précision ne soit excessive. Je laisse le Gouvernement nous donner sa position, à laquelle nous nous rallierons.
Le Gouvernement émet un avis favorable à l'amendement de M. Peu – pour l'ensemble de son œuvre, s'il me permet l'expression, car il a déposé beaucoup d'amendements : c'est une forme de soutien.
En outre, cette précision améliore l'effectivité de l'article en évitant que, demain, des gens ne détournent les règles. Nous en convenons tous, c'est l'une des conditions de lutte effective contre l'habitat dégradé.
L'amendement n° 167 est adopté.
Cet amendement vise à préciser les effets de la publication des arrêtés de mise en sécurité ou de traitement de l'insalubrité au regard du droit d'expropriation. Le texte prévoit que deux arrêtés non exécutés sont nécessaires sur une période de dix ans pour que la procédure puisse être mise en œuvre, mais ne précise pas le temps nécessaire pour apprécier l'inexécution du second arrêté. Le présent amendement fixe cette durée à deux ans.
Votre imagination est débordante pour semer des embûches et rendre les dispositions inopérantes…
Évidemment, nous sommes défavorables, d'autant que les durées d'exécution des arrêtés sont généralement prévues par les arrêtés eux-mêmes.
L'amendement n° 90 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement tend à exclure l'exercice du droit d'expropriation lorsque les mesures de rénovation prescrites par l'arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l'insalubrité ont été exécutées d'office. Si le but de l'expropriation est bien la mise en sécurité du bâtiment, et non l'accaparement de bâtiments et de terrains, il n'y a aucune raison que le bâtiment, une fois sécurisé ou rénové, soit exproprié.
Votre proposition revient à inciter les copropriétaires à attendre les travaux d'office ! Ces travaux ne doivent pas entraver une démarche plus globale de sauvegarde des immeubles en cas de désordre remédiable. Il s'agit bien d'éviter que les copropriétaires subissent un désordre qui deviendrait irrémédiable. Arrêtez de semer des embûches !
L'amendement n° 89 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement de précision juridique vise à tenir compte de la réalité des arrêtés concernant ces immeubles. Il dispose que ces derniers peuvent concerner un lot privatif ou une partie commune de l'immeuble.
L'amendement n° 352 de M. Lionel Causse est défendu.
La parole est à M. Guillaume Vuilletet, rapporteur, pour donner l'avis de la commission sur les amendements identiques n° 347 et 352 et soutenir les sous-amendements n° 370 et 367 rectifié , qui peuvent faire l'objet d'une présentation groupée.
Les amendements apportent une précision utile dans la mesure où différentes parties de l'immeuble peuvent être concernées. Avis favorable, donc, sous réserve de l'adoption de mes sous-amendements qui précisent que, si un arrêté concerne des lots privatifs ou des parties communes, l'expropriation ne vise que les lots privatifs concernés par ledit arrêté. Les parties communes ne peuvent être concernées seules.
Les sous-amendements n° 370 et 367 rectifié , acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.
Il s'inscrit toujours dans le même objectif d'efficacité en matière d'expropriation. En l'état actuel de la rédaction du texte, le passage d'une dégradation remédiable à une dégradation irrémédiable doit être attesté par un rapport des services municipaux, intercommunaux ou de l'État. Le risque de contentieux est élevé – avec des procédures interminables, à l'inverse de l'objectif du texte – et cette deuxième condition ne nous semble donc pas souhaitable si l'on veut pouvoir agir en amont.
Avis défavorable. En commission, nous avons eu le même débat sur cette fameuse ligne de crête, et nous avons modifié la rédaction de l'alinéa afin de préciser le contenu du rapport – il doit démontrer la poursuite de la dégradation. Le dispositif nous semble donc opérationnel : ces rapports existent et ils sont rédigés par des experts connus, que les opérateurs peuvent trouver. Conservons l'équilibre juridique atteint.
Il ne s'agit pas seulement de logements détenus par des marchands de sommeil. Parfois, les opérateurs sont face à des personnes de bonne foi, dans une situation complexe, qui doivent être rassurées quant au respect de leurs droits. Demande de retrait. À défaut, avis défavorable.
L'amendement n° 168 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
S'agissant des expropriations, le problème majeur et éminemment humain est celui du relogement. Les propositions de relogement doivent s'adapter autant que faire se peut aux situations des personnes concernées. Cet amendement propose donc d'encadrer, davantage que ne le fait la législation actuelle, les conditions de relogement des occupants en cas d'expropriation.
Votre amendement vise à rappeler que le droit commun s'applique aux situations d'expropriation. Les articles L. 314-2 et suivants du code de l'urbanisme disposent qu'« il doit être pourvu au relogement provisoire des occupants dans un local compatible avec leurs besoins, leurs ressources et, le cas échéant, leur activité antérieure, et satisfaisant aux conditions de localisation prévues à l'article 13 bis de la loi n° 48-1360 du 1er septembre 1948, et que le relogement provisoire peut donner lieu à un bail à titre précaire pour la durée des travaux. » Il est parfois utile, comme je l'indiquais il y a un instant, de bien préciser les choses. C'est pourquoi l'avis de la commission est favorable.
L'amendement n° 169 et celui que nous allons examiner immédiatement après – l'amendement n° 204 – visent à préciser les obligations de relogement. Le Gouvernement va donner un avis favorable au premier, parce qu'il va donner un avis défavorable au second. En effet, nous avons le choix entre deux options. Soit nous consacrons le droit existant et nous expliquons que dans le cadre des copropriétés dégradées, on ne peut en aucun cas ne pas l'appliquer. Soit nous légiférons pour un cas spécifique, celui des seules copropriétés dégradées, selon une disposition dérogatoire du droit commun et assortie d'une rédaction spécifique. Dans une logique de clarté et de sécurité juridique, ne pas en appeler au droit existant risquerait de fragiliser les dispositions en vigueur et de déséquilibrer le droit des propriétaires et des occupants.
L'amendement n° 169 , en faisant référence aux articles L. 314-2 et suivants du code de l'urbanisme, et en précisant explicitement qu'ils s'appliquent à l'objet de l'article 3 du projet de loi, évite tout vide juridique et toute situation sans relogement. À l'inverse, si nous choisissons une rédaction différente, nous créons une nouvelle procédure qui demandera un suivi et une jurisprudence spécifiques. Cela pourrait affaiblir notre capacité à lutter contre les marchands de sommeil, puisque la nouvelle rédaction ne se serait pas encore trouvée confrontée à une application jurisprudentielle. Cette seconde option me semble donc moins protectrice que la première. J'émets donc un avis favorable à l'amendement n° 169 , en annonçant d'ores et déjà un avis défavorable à l'amendement n° 204 s'il était maintenu.
L'amendement n° 169 est adopté.
Si vous le permettez, monsieur Kasbarian, j'aimerais d'abord m'exprimer ! La question du relogement est essentielle. Lors du débat en commission, nos propositions ont été jugées excessives ou trop contraignantes par les rapporteurs, selon lesquels elles risquaient de freiner la mise en route de chantiers. Or nous connaissons tous des situations dans lesquelles des propositions de relogement ne font qu'accentuer les difficultés de personnes qui ont déjà un pied dans la précarité. Ces propositions sont parfois peu compatibles avec la composition familiale des ménages, notamment des familles nombreuses, dont les enfants ont besoin d'une chambre particulière pour étudier convenablement. Compte tenu de la volonté affichée de réarmement civique et d'investissement dans l'éducation nationale, il serait malheureux de ne pas permettre à ces enfants d'étudier dans de bonnes conditions.
En ce qui concerne la poursuite de l'activité professionnelle, comment justifier le relogement à l'autre bout du département d'un ménage qui n'a pas de véhicule ou n'a pas les moyens de payer les transports publics – je pense en particulier à l'Île-de-France, avec l'augmentation substantielle du prix du passe Navigo ? Ce ménage risque de ne plus pouvoir se rendre à son travail, donc de le perdre. Les allocataires du RSA, que votre réforme oblige désormais d'effectuer des heures d'accompagnement ou d'activité, ne pourront pas s'y rendre : il faudrait accompagner vos réformes d'un minimum de cohérence !
L'adoption de l'amendement n° 169 consacre l'application et le respect du droit commun, ce qui satisfait votre demande. Je vous invite à retirer cet amendement ; à défaut, avis défavorable.
Maintenant que l'amendement n° 169 a été adopté, la demande de M. Echaniz est satisfaite. Les garanties apportées par le droit commun s'appliquent dans le cas des expropriations. Retrait, sinon avis défavorable.
L'amendement n° 204 n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Louis Bricout, pour soutenir l'amendement n° 75 .
Cet amendement de bon sens vise à garantir que le relogement se fasse à proximité du lieu de vie des occupants ayant fait l'objet d'une expropriation, afin de garantir aux familles de ne pas perturber leurs habitudes de vie en matière de scolarité, de temps de trajet entre le domicile et le travail et de proximité des aidants familiaux.
L'amendement n° 75 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Louis Bricout, pour soutenir l'amendement n° 82 .
Cet amendement vise à encadrer les offres de relogement qui doivent tenir compte des critères suivants : une localisation à proximité du lieu originel d'habitation, de l'établissement scolaire et des réseaux de transport pour se rendre sur le lieu de travail ; une typologie adaptée à la composition du foyer, et le cas échéant aux personnes en situation de handicap ; une localisation à proximité des parents pour les enfants en garde alternée, sauf impossibilité avérée.
L'amendement n° 82 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement n° 298 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Mes chers collègues, il ne nous reste que treize amendements à l'article 3 à examiner. En nous dépêchant un peu, nous pourrions presque y parvenir avant vingt heures, ou au prix d'une très courte prolongation de la séance.
Sur les amendements n° 66 et 4 ainsi que sur l'article 3, je suis saisie par le groupe Rassemblement national de demandes de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
L'amendement n° 329 du Gouvernement est rédactionnel.
La parole est à M. Inaki Echaniz, pour soutenir le sous-amendement n° 355 à l'amendement n° 329 .
Je vais prendre un peu de temps, car il s'agit d'un sous-amendement important.
Désolé, nous ne nous contentons pas, comme vous, de ne proposer que des amendements de suppression ! Le présent sous-amendement vise à rectifier l'amendement du Gouvernement afin que sa rédaction corresponde à son objet. En effet, l'objectif de l'amendement n° 329 est de maintenir, par exception, la subrogation du bénéficiaire de la déclaration d'utilité publique (DUP) dans les droits du propriétaire pour la seule poursuite des baux locatifs en cours. Cette mesure permet d'assurer le transfert à ce bénéficiaire des obligations à l'égard du locataire, ce qui nous paraît nécessaire. Elle n'entend pas revenir sur la suppression de cette subrogation pour les autres droits, actée par notre amendement adopté en commission, qui réécrit l'alinéa 18. Cependant, la rédaction de l'amendement vient intégralement écraser cette mesure, ce qui n'est pas son objectif au vu de l'exposé sommaire du Gouvernement. Ainsi, la rectification proposée permet de rendre l'objet de l'amendement compatible avec sa rédaction.
Ma proposition de prolonger éventuellement la séance pour terminer l'examen des amendements à l'article 3 ne semblant pas faire consensus, je lèverai la séance à vingt heures.
Le sous-amendement n° 355 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
M. Inaki Echaniz s'adresse aux députés du groupe Rassemblement national, qui réagissent par des exclamations.
L'amendement n° 329 , sous-amendé, accepté par la commission, est adopté.
Je voudrais illustrer cet amendement par mon expérience d'ancien élu à Saint-Denis. Lors de l'incendie d'un immeuble, en 2012, trois personnes, dont deux enfants, avaient trouvé la mort. Le propriétaire, professeur d'économie à l'université Paris-Dauphine, avait acheté cet immeuble quelques années auparavant pour 700 euros le mètre carré. Après l'incendie, vu l'état d'insalubrité, auquel il n'avait jamais remédié, de l'immeuble qui était devenu une carcasse de cendres, il a été exproprié selon les règles en vigueur, au prix des domaines, à hauteur de 2 800 euros le mètre carré. L'incendie lui a donc permis de réaliser une plus-value de 500 000 euros sur la misère des gens, avec trois morts à la clé, et cet exemple n'est malheureusement pas unique. C'est pourquoi cet amendement vise à s'assurer que l'indemnité versée aux marchands de sommeil – ceux qui logent les personnes vulnérables en profitant d'elles – soit appréciée à la valeur du terrain nu.
Nous avons tous en tête ce genre de situations. Nous étions tous deux députés lors de l'adoption de la loi Elan et nous avions défendu ensemble un amendement, adopté, qui visait à la confiscation des propriétaires considérés comme des marchands de sommeil. Cela ne résout pas tout, car il est parfois difficile de déterminer qui est marchand de sommeil et qui ne l'est pas.
Ce débat nous renvoie à l'amendement n° 42 de M. Echaniz que nous examinerons tout à l'heure, qui vise à renforcer les précautions contre de telles situations.
Celui-ci me paraît donc satisfait par la mesure de confiscation déjà prévue – d'autant que cette disposition sera sécurisée par l'amendement de M. Echaniz, s'il est adopté. Je vous propose donc de retirer votre amendement.
Les motifs exposés par M. Peu ne peuvent que nous inciter à prévoir tous les garde-fous nécessaires. Le risque est toutefois qu'en corrigeant une situation exceptionnelle et insupportable, nous suscitions des effets de bord inopportuns. En effet, la valeur de l'immobilier n'a pas toujours quadruplé entre le moment de l'acquisition et celui de la revente, comme dans l'exemple cité par M. Peu, et retenir la valeur du terrain nu peut avoir des conséquences diverses, y compris pour des personnes de bonne foi. Votre intention de lutter contre les marchands de sommeil est louable : c'est précisément l'objectif du Gouvernement et de l'article 3. Cependant, la mesure que vous proposez est excessive ; ses effets iraient au-delà de ce que nous souhaitons les uns et les autres.
L'amendement n° 170 est retiré.
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite de la discussion du projet de loi relatif à l'accélération et à la simplification de la rénovation de l'habitat dégradé et des grandes opérations d'aménagement.
La séance est levée.
La séance est levée à vingt heures.
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra