Intervention de Anne Haller

Réunion du 16 novembre 2016 à 9h30
Commission des affaires économiques

Anne Haller, déléguée pour les filières viticoles et cidricoles à FranceAgriMer :

FranceAgriMer travaille à dégager, avec les professionnels de la filière viticole notamment, des stratégies de réponse et d'adaptation au changement climatique. Comme l'a indiqué M. Jean-Marc Touzard, les résultats de nos travaux de recherche sont en cours de présentation devant nos principaux interlocuteurs, en conseil spécialisé aujourd'hui, la semaine prochaine, au comité national de l'INAO.

Nous organiserons par ailleurs, au début du mois de janvier prochain, une rencontre avec les professionnels afin de les mobiliser, et nous créerons un groupe de travail mixte entre l'INAO et FranceAgriMer qui travaillera sur ces problématiques avec l'objectif de mettre en place un plan d'action concret dans le courant de l'année 2017. Dans la mesure du possible, ce plan s'articulera avec les autres grandes thématiques.

Le dépérissement du vignoble fait d'ores et déjà l'objet d'un plan de travail. La question de la garantie des récoltes par l'assurance en cas d'accident climatique entre, elle aussi, dans le champ de nos préoccupations. Nous réfléchissons par ailleurs aux dispositifs d'aides destinés à accompagner le changement et l'innovation, car, au-delà de l'adaptation des cahiers des charges, c'est toute une philosophie qu'il convient de faire évoluer. Faut-il recourir plus systématiquement à l'irrigation ? Faut-il changer les terroirs et les cépages ? Ces questions constituent autant de points importants de doctrine.

Les professionnels souhaitent s'approprier et prendre en charge ces thématiques, tant sur le plan national, pour lequel un groupe va être constitué, que sur le plan régional ; cela représente un travail considérable, dans lequel nous nous investissons dès à présent.

Les autorisations de plantation constitueront l'un des outils privilégiés de notre politique, utile à la régulation du potentiel ; à ce titre elles permettront de limiter ou d'accompagner les nécessaires évolutions du vignoble.

La négociation de la réforme de la politique agricole commune (PAC) de 2008 a conduit à la suppression du système de régulation, qui s'est éteint au cours des années 2013-2014. Au mois de décembre 2013, la nouvelle PAC a réintroduit ce système sous une forme différente, puisque désormais il est question d'autorisations de plantation et non plus de droits de plantation.

Les textes d'application du nouveau droit communautaire ont été publiés au mois d'avril 2015. Malgré cette publication tardive, l'administration de FranceAgriMer, l'INAO et les professionnels ont travaillé de concert au cours de l'année 2015 afin d'être prêts dès le 1er janvier 2016.

Notre choix a porté sur un outil unique et dématérialisé couvrant tous les segments : les AOC, les IGP et les vins sans indication géographique (VSIG). Tous les types d'autorisations sont par ailleurs concernés, qu'il s'agisse des plantations nouvelles accroissant le potentiel d'une exploitation ou des replantations car, aujourd'hui, un producteur qui arrache puis replante doit détenir une autorisation.

Notre outil a ainsi été centralisé et automatisé afin de rendre le meilleur service possible aux professionnels.

Les règles applicables aux plantations nouvelles constituent le sujet le plus politique, car c'est là que réside le potentiel de croissance. Les professionnels ont mis en place un dispositif de gouvernance fondé sur des instances nationales ; il a ainsi été décidé qu'au cours de la première année 1 % du potentiel existant serait mis à la disposition des intéressés ; ce qui représente 8 057 hectares d'autorisations de plantations nouvelles, si telle est la demande. C'était là le maximum qu'il était possible d'autoriser.

En outre, quatre-vingt-dix-huit limitations régionales ont été proposées. Il s'agit de zones dans lesquelles les professionnels, afin d'éviter les risques de détournement de notoriété de l'indication géographique ou de saturation du marché, ont souhaité limiter les surfaces concernées à dix, cinquante ou cent hectares. Un critère unique d'éligibilité a été retenu : tous les producteurs se sont engagés, à l'occasion de plantations nouvelles, à ne pas aboutir à un détournement de notoriété, c'est-à-dire à bien planter dans le segment autorisé. Ainsi, une nouvelle plantation de VSIG devra conserver ce statut jusqu'en 2030.

En application d'une règle communautaire, deux critères de priorité ont été retenus : les nouveaux entrants sont prioritaires, tandis que les producteurs ayant antérieurement pratiqué des plantations illégales ne le sont pas. Par ailleurs, à l'avenir, les producteurs n'ayant pas utilisé les autorisations qu'ils avaient obtenues ne seront pas non plus prioritaires.

Le bilan montre que 4 141 producteurs ont demandé des autorisations de plantations nouvelles représentant 7 768 hectares pour 7 506 demandes initiales. Toutes les attributions ont eu lieu le même jour, le 31 juillet 2016 ; 3 540 hectares ont été attribués pour 7 506 demandes. L'écart constaté entre les demandes initiales et les attributions résulte de la non-éligibilité d'une partie des surfaces : ainsi, de façon caricaturale, des gens situés en Bourgogne voulaient-ils faire du champagne. Des erreurs matérielles ont par ailleurs pu être commises, certaines demandes concernant des emplacements situés en dehors de l'aire d'autorisation. Enfin, quelque 1 000 hectares ont fait l'objet de tentatives de détournement. Il s'agit de producteurs ayant déposé des dossiers portant sur des surfaces importantes – car celles-ci ne sont pas plafonnées aujourd'hui – malgré la forte probabilité de se voir opposer un refus, dans le seul but d'empêcher d'autres viticulteurs d'accéder aux hectares concernés. Nous devons donc demeurer vigilants, car de telles situations sont susceptibles de se reproduire.

L'écart est aussi imputable à un plafonnement régional des demandes dans certaines zones. Dans celle de Cognac, le plafond était de 250 hectares pour plus de 2 000 hectares de demandes. Ce sont ainsi 1 800 hectares qui ont « disparu », en raison d'une différence importante entre ce qui a été demandé et ce qui a pu être attribué. Comme les producteurs savaient qu'il y avait une limitation régionale et que l'attribution se faisait au prorata de la demande initiale, beaucoup ont gonflé leur demande pour être sûrs d'obtenir ce qu'ils souhaitaient. Par exemple, si vous savez que l'on ne vous attribuera que 20 % de ce que vous avez demandé et que vous voulez dix hectares, vous êtes tenté d'en demander cinquante plutôt que dix. Dans les zones où il y a des limitations régionales, il y a donc eu un effet, que l'on n'a pas mesuré, de « sur-demande » de la part des producteurs pour avoir une attribution finale qui corresponde à leurs besoins. Aussi ne peut-on pas affirmer qu'il y a eu 7 768 hectares de demandes réelles de plantation ; c'est sans doute beaucoup moins.

Aujourd'hui, tout le monde se félicite, y compris les professionnels, que l'on ait réussi à attribuer correctement l'ensemble des autorisations pour 2016, ce qui n'était pas gagné d'avance. Nous avons pu mettre en place une gouvernance professionnelle forte qui implique à la fois le conseil spécialisé de FranceAgriMer, le comité national des AOC viticoles et le comité national des IGP viticoles de l'INAO. L'ouverture à la plantation pour les vins sans indication géographique (VSIG) a pu être mise en place sur l'ensemble du territoire, à l'exception de quelques endroits où les professionnels ont choisi de ne pas le faire. Dans le périmètre de certaines AOC, là où il y a des risques de détournement, ils ont en effet préféré limiter fortement la possibilité de faire des VSIG.

Des ajustements sont en cours de discussion. Il y a cependant un vrai problème avec le non-plafonnement des demandes ; aussi les professionnels demandent-ils que l'on fasse bouger cette ligne. La priorité donnée aux nouveaux entrants pose également problème car, dans certains endroits, ils ont été les seuls bénéficiaires des autorisations, ce qui est un peu gênant pour l'économie de la filière. Enfin, il est nécessaire d'adapter le critère de détournement de notoriété dans le sens d'une plus grande souplesse par rapport aux règles qui avaient été retenues l'année dernière.

Un certain nombre de demandes professionnelles sont en cours d'examen. Nous espérons qu'elles pourront aboutir à des arbitrages d'ici à la fin de l'année, de manière à pouvoir lancer la campagne 2017 de plantations nouvelles dans de bonnes conditions.

En plus des autorisations nouvelles, nous avons délivré aux professionnels un nombre important d'autorisations de conversion de droits ou de replantation. Actuellement, 75 % des autorisations sont délivrées de manière automatique. Comme le nouveau système réglementaire était assez contraignant, nous avons fait en sorte de limiter la charge administrative pour les professionnels grâce à un outil informatique simple : les professionnels font une demande, et ils reçoivent l'autorisation par retour de courriel – c'est la machine qui fait le calcul – ce qui leur évite d'avoir à attendre.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion