Intervention de Joël Giraud

Séance en hémicycle du 5 novembre 2014 à 21h30
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 - projet de loi de finances pour 2015 — Économie

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJoël Giraud :

Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des affaires économiques, monsieur le rapporteur spécial, madame la rapporteure pour avis, messieurs les rapporteurs pour avis, mes chers collègues, nous sommes réunis ce soir pour examiner en séance publique les crédits de la mission « Économie » de notre projet de loi de finances pour 2015.

Ils portent incontestablement sur des sujets majeurs, a fortiori dans la période de crise économique que nous traversons.

En effet, il est de notre responsabilité d’effectuer un effort budgétaire sans précédent alors même que nous sommes en période de stagnation de notre économie – ce qui est plutôt contre-intuitif – et, dans le même temps, nous devons rechercher les relais de croissance disponibles par le renforcement et le développement des entreprises afin de restaurer la compétitivité de notre économie.

La mission « Économie » a précisément pour objectif la mise en place d’un environnement propice à cette croissance « durable et équilibrée » et elle illustre particulièrement bien les choix stratégiques effectués par le Gouvernement pour le budget 2015.

L’évolution des crédits comme du nombre d’emplois de la mission traduit l’effort d’économies pour le redressement de nos finances publiques. Il est par ailleurs amplifié en ce qui concerne le nombre d’emplois, alors même qu’il était déjà considérable l’année dernière.

Comme l’indique le « bleu » budgétaire, ces économies, qui atteignent 120 millions d’euros sur l’ensemble du triennal 2015-2017, traduisent l’effort consenti en matière de réduction du fonctionnement courant et, surtout, de rationalisation des dispositifs d’interventions.

Le Gouvernement a donc choisi de marquer ses priorités avec des hausses ciblées – logement, emploi, sécurité, éducation nationale, culture –, et des économies de dépenses sur les autres postes, sur lesquels la rationalisation était plus accessible.

Ne nous le cachons pas : c’est bien une forme de modernisation à marche forcée que subissent ces administrations qui sont souvent contraintes de gagner en productivité pour maintenir la qualité du travail.

En dépit de ces exigences de responsabilité budgétaire, je voudrais saluer, au nom des députés du groupe RRDP, certaines mesures ambitieuses contenues dans cette mission, et en particulier le lancement du Plan « France Très Haut Débit », même si je ne vous cache pas mes doutes sur les délais annoncés de la couverture de la totalité du territoire en 2022, un objectif probablement un peu présomptueux, comme c’est l’usage.

Concernant l’architecture budgétaire de la mission, nous avons donc quatre programmes.

Le programme 134 « Développement des entreprises et du Tourisme » regroupe les instruments de soutien et de régulation des entreprises afin d’assurer une concurrence équitable.

Les grands régulateurs comme la CRE, l’ARCEP ou encore l’Autorité de la concurrence ont fait leur preuve. Nous constatons tous leur très haut niveau d’expertise et leur utilité économique et sociale.

Ils sont confrontés à des secteurs en fortes mutations – pour lesquelles ils doivent s’adapter –, en particulier dans le domaine des télécoms et du numérique.

Par exemple, pour l’ARCEP, c’est aux alentours de 25 ETP qui seront perdus en trois ans. La facture est un peu salée, à l’heure où nous lui imposons un accroissement de ses missions, avec l’augmentation du nombre d’acteurs à réguler, le lancement du Plan « France Très Haut Débit », ou encore l’attribution des licences 4G en outre-mer et l’attribution de la bande passante des 700 Mhz.

Précisément, monsieur le ministre, à périmètre financier constant, nous pouvons probablement trouver des pistes d’économies sans perdre en qualité de service : nous savons par exemple qu’il existe des « doublons » entre les activités de l’ARCEP et la Commission supérieure du service public des postes et des communications électroniques, la CSSPPCE. Nous avions posé la question en commission mais nous n’avons pas eu de réponse. Pouvez-vous nous dire, monsieur le ministre, si nous ne pouvons pas réfléchir à une mutualisation et à une rationalisation des moyens entre ces deux structures connexes ?

Ensuite vient l’activité de régulation et de protection des consommateurs exercée par la DGCCRF. Les députés du groupe RRDP l’ont réclamé à plusieurs reprises dans cet hémicycle : nous devons trouver des moyens supplémentaires pour cette direction, notamment pour son action déconcentrée. Dans certains départements ruraux, notamment touristiques, elle ne dispose que d’une poignée d’agents alors même que les missions sont nombreuses et complexes et qu’il existe une demande forte et croissante de la part de nos concitoyens pour lutter contre les fraudes qui se multiplient.

Monsieur le ministre, vous le savez mieux que nous, les effectifs de la DGCCRF ont connu des années sombres avec la RGPP.

Avec l’entrée en vigueur de la loi consommation, dite « loi Hamon », nous confions à ces services d’importantes missions nouvelles, auxquelles ils ne pourront faire face sans moyens supplémentaires. L’enjeu est bien de préparer la bonne mise en oeuvre de cette loi qui renforce les outils et les instruments juridiques de cette administration.

Ensuite, le programme 220 – peu touché, en vérité – est consacré aux crédits de l’INSEE. Nous connaissons tous l’importance et la qualité de cette institution que le monde nous envie et qui est d’autant plus utile en période de crise économique afin de mener des politiques économiques et sociales pertinentes.

Sur le programme 305, consacré essentiellement au fonctionnement de la direction générale du Trésor et de la direction de la législation fiscale, les réductions d’effectifs sont modérées.

Ce sont des directions remarquables dont l’expertise est indispensable.

Enfin, nous saluons le petit nouveau dans la mission, le programme 343, le Plan « France Très Haut Débit ». Tous les plans successifs de déploiement des télécoms ont affiché des objectifs ambitieux et peu réalistes, aussi bien en termes de délais que de généralisation à tous et à l’ensemble du territoire. Notre programme 343 promet le très haut débit pour tous en 2022, sur l’intégralité du territoire, avec un objectif intermédiaire à 50 % des foyers en 2017. La réussite de l’objectif intermédiaire n’est pas impossible, car les opérateurs privés équiperont les villes.

Nous saluons évidemment les 13 à 14 milliards d’euros d’investissements annoncés pour les réseaux d’initiative publique dans les dix ans à venir. Mais soyons réalistes et n’exigeons pas l’impossible, préférons ensemble le « dire vrai » au « parler beau » : le très haut débit ne sera pas déployé partout dans les Alpes, le Massif central, les Pyrénées et autres lieux reculés en 2022, si nous ne sommes pas en mesure de contraindre ou d’inciter les opérateurs à accélérer la couverture. Nous connaissons votre habileté, monsieur le ministre, et nous aimerions connaître vos propositions sur ce sujet.

Au moment des négociations du partenariat transatlantique, je vous ai dit mon inquiétude quant au mécanisme de règlement des différends entre les investisseurs et les États, parfois qualifié de « cheval de Troie » juridique. Il permettrait, au nom de la libre concurrence, à des exploitants américains de gaz de schiste ou de boeuf aux hormones, de traîner l’État français devant des juges non élus siégeant à huis clos.

Vous avez exprimé votre opposition en commission. Comment comptez-vous réellement l’exercer auprès de nos négociateurs, et comment comptez-vous tenir au courant la représentation nationale de votre vigilance et de l’évolution des négociations ?

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