Intervention de Marie-Claude Dupuis

Réunion du 18 décembre 2012 à 17h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Marie-Claude Dupuis, directrice générale de l'ANDRA :

Nous n'en sommes pas encore, je le répète, à la phase de décision. L'autorisation de création du stockage ne sera pas demandée avant la fin de 2018, après l'adoption de la future loi et une nouvelle évaluation par l'ASN, en attendant une mise en service prévue pour 2025. Les premières recherches ont commencé avant 1991. Il s'agit d'un processus long mais qui doit être poursuivi à un rythme suffisamment soutenu pour aboutir dans de bonnes conditions. Le prochain rendez-vous est, en 2013, le débat public sur le projet industriel de stockage : nous serons alors à même de fournir des éléments précis, sur le contrôle-commande, sur l'étendue des galeries et sur les effectifs nécessaires, par exemple. Nous aurons ensuite deux ans pour mettre au point notre dossier de demande d'autorisation, ce qui nous permettra d'intégrer les conclusions de ce débat public, particulièrement sur les questions de réversibilité ainsi que d'implantation et de transport. Ces dernières font l'objet d'un projet de schéma de territoire interdépartemental, piloté par le préfet de la Meuse pour le compte de l'État.

Le calendrier du débat public de 2013 sur le CIGÉO se télescope avec celui, fixé par la suite, du débat sur la transition énergétique. Il faut donc trouver la bonne articulation entre les deux. Les ONG demandent donc que l'on repousse le premier au deuxième semestre, quand le second sera achevé, cependant que les élus locaux, quant à eux, refusent que le débat sur l'enfouissement, qui les concerne évidemment de très près, soit organisé aussi près des prochaines élections municipales. Mais l'ANDRA n'est pas décideur en la matière. C'est à la CNDP qu'il reviendra de trouver la meilleure articulation. En tout état de cause, une bonne partie des déchets existe déjà et il faudra bien résoudre le problème qu'ils posent, quelle que soit la nouvelle politique de l'énergie. Mais nous savons aussi que l'ANDRA aura à contribuer au débat sur la transition énergétique, ne serait-ce qu'en indiquant les incidences qu'auront sur le stockage des déchets les différents scénarios examinés, selon la part qu'ils feront au nucléaire.

Nous avons ouvert aux ONG les instances et les comités de l'ANDRA, dans le cadre de l'inventaire national et de nos missions d'intérêt général. Nous les associons ainsi à nos décisions sur la réhabilitation des sites pollués « orphelins » et sur l'attribution des fonds publics. Nous les rencontrons régulièrement au sein d'instances nationales comme le Haut comité pour la transparence et l'information sur la sécurité nucléaire ou le groupe de travail sur le plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs. Nous sommes transparents. Chacun est le bienvenu dans nos installations. Toutes les ONG y sont venues, à un moment ou à un autre – Greenpeace a ainsi récemment visité notre laboratoire souterrain.

Au niveau international, la France se situe dans le peloton de tête pour le stockage géologique et, plus généralement, pour la gestion des déchets radioactifs. Elle est souvent citée en exemple par l'Agence internationale de l'énergie atomique et par la Commission européenne. De grands pays nous sollicitent, soit pour aider à mettre en place des centres de stockage de surface, soit pour préparer les futurs stockages profonds. Nous venons ainsi de signer un accord avec les États-Unis, qui revoient complètement leur politique de gestion des déchets radioactifs, ainsi qu'avec la Chine et avec la Russie. Nous coopérons également avec les pays les plus avancés sur le sujet, comme la Belgique, la Suisse et les pays scandinaves. D'une manière générale, la coopération internationale fonctionne bien car les nations ne se sont pas en concurrence dans ce domaine. La complexité de la matière conduit au contraire la communauté internationale à se montrer très soudée pour dégager les solutions de l'avenir.

Le projet de loi de finances pour 2013 vise à plafonner les emplois de l'ANDRA, ce qui risque de susciter des difficultés à partir de 2014. Nos effectifs seront insuffisants pour mener à bien le projet de grande ampleur dont on nous a chargés, et qui exigerait la participation d'environ 2 000 personnes. Ne nous manqueraient toutefois que quelques dizaines d'emplois.

La taxe additionnelle dite « de recherche » qui nous alimente, s'est élevée pendant trois ans jusqu'à atteindre 118 millions d'euros, mais la mesure vient maintenant à expiration, de sorte que la ressource allouée à notre fonds de recherche va redescendre à 96 millions à partir de 2014, ce qui ne sera pas suffisant. Nous discutons donc avec notre tutelle, consciente du problème, pour adapter le niveau de notre financement aux besoins.

Pour l'essentiel, nos missions se sont jusqu'ici cantonnées au stockage des déchets. Or l'ANDRA pourrait davantage intervenir en amont, notamment pour des travaux de recherche et développement (R&D) visant à réduire le volume des déchets à stocker. C'est d'ailleurs à cet effet que 75 millions d'euros de moyens financiers nous avaient été octroyés au titre des investissements d'avenir. Mais il ne s'agissait que d'un appoint conjoncturel et fortement contraint : les sommes correspondantes ne pouvaient être utilisées par l'ANDRA pour les actions qu'elle conduisait elle-même, qu'elle devait financer sur ses fonds propres, qui sont très modestes.

On a donné aux acteurs du nucléaire tous les moyens de travailler au stockage géologique des déchets, on a consacré d'importants budgets aux recherches sur les réacteurs du futur et sur le cycle du combustible, mais l'effort a été insuffisant en ce qui concerne la R&D portant sur la caractérisation, sur le conditionnement, sur le traitement et sur le recyclage des déchets radioactifs. Nous essayons certes de promouvoir quelques innovations en la matière mais il devrait être possible d'aller plus loin, moyennant quelques moyens supplémentaires. Il en va de même des stratégies de démantèlement. Nous nous rapprochons dans ce domaine d'EDF, d'Areva et du CEA afin, ici encore, de travailler plus en amont.

Je confirme que la loi interdisant le stockage de déchets venus de l'étranger est bien respectée. Certes, AREVA retraite des combustibles usés venant d'autres pays, mais c'est dans le cadre d'accords intergouvernementaux transparents.

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