Intervention de Jean-Laurent Bonnafé

Réunion du 30 janvier 2013 à 9h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Jean-Laurent Bonnafé, administrateur directeur général de BNP Paribas :

Pour prendre la direction des affaires fiscales au sein du groupe, nous avons recruté, comme cela se pratique souvent, un fiscaliste venu des services compétents du ministère des finances. Son dossier est passé devant une commission dite de déontologie. Si nous l'avons fait, c'est pour le bien de la maison : on ne recrute pas un fonctionnaire qualifié du ministère des finances de la République française pour lui demander de faire des farces et attrapes !

Il y a quelques années, on m'a fait vendre notre filiale à Panama, qui était alors sur une mauvaise liste et qui est repassé depuis sur la bonne. Et la banque canadienne qui l'a achetée a été, dès le lendemain, agréée spécialiste en valeurs du Trésor français ! Nous sommes dans un monde ouvert. La nouvelle loi est nécessaire ; un cadre européen eût été préférable, mais les discussions sont possibles malgré les divergences d'agenda, de sorte que l'on y viendra. En revanche, je demanderai que les établissements spécialistes en valeurs du Trésor français soient peu ou prou soumis aux mêmes contraintes que nous.

À propos de la holding, je vous livrerai mon témoignage d'opérationnel de la banque. Les banques sont des entreprises qui doivent être gérées par des banquiers. Je ne connais que deux exemples de banques qui soient devenues des holdings : Fortis et Citigroup. Dans une holding, au bout d'un moment, on n'entend plus le bruit du moteur : on ne sait plus si on conduit un 38 tonnes ou une mobylette. Mais un 38 tonnes lancé à toute vitesse dans un village fait des dégâts s'il ne reste pas sur la chaussée. Je vous recommande donc de ne jamais opter pour une holding. Pour la diriger, on commence par recruter un banquier, mais comme il ne peut cumuler ses fonctions dans les organes sociaux de la holding et dans ceux de la filiale, il faut une autre personne ; et on en arrive finalement à recruter un consultant, un avocat, qui n'a jamais étudié un dossier de crédit ni vu un risque de sa vie. Le pilotage de la holding n'est alors plus opérationnel : il se fonde sur des ratios, des agrégats, etc. La holding est donc à proscrire non pour des raisons philosophiques ou juridiques, mais pour des raisons pratiques. Nous dirigeons des entreprises complexes : cela suppose de savoir ce que c'est qu'un moteur et être capable de le démonter nous-mêmes si nécessaire. Il faut un banquier pour le faire, non un plombier, ni un chauffagiste, ni un avocat !

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